Deux.

Pour la première fois de sa vie, Eliel s'extasiait sur les vêtements pour bébé, il voyait son petit frère dans tout ce qui était mignon à ses yeux. Isys se moquait de lui, lui répétant sans cesse à quel point il était un grand frère gaga. Ce qu'il ne démentit pas, à vrai dire, il s'en fichait pas mal, il était juste le frangin le plus heureux de la planète à l'heure actuelle, même si la crainte persistait et le rongeait la nuit. Depuis combien de temps n'avait-il pas fait une nuit complète ? Son petit frère lui causait déjà du soucis, alors qu'il n'était même pas encore sorti du ventre de leur mère.

Il dépensa presque toute sa paye du mois dans des habits et des jouets pour bébé et revint chez lui les mains chargées. Sa mère lui offrit un grand sourire attendri quand il lui montra tout ce qu'il avait pris, elle ajouta même qu'elle n'avait rien à acheter, qu'il avait déjà pensé à tout.

— Sinon, il travaille bien mon fils en ce moment ? Une première année de master, ça n'est pas facile ! dit-elle à Isys, restée en retrait jusque là.

— Ne vous en faites pas, Eliel est toujours aussi bosseur, même avec son petit frère chéri en tête, sourit son amie.

La discussion se concentra donc sur les études et sa mère s'intéressa à ceux d'Isys, qui travaillait tout aussi bien que lui. Loan en revanche, n'était qu'en deuxième année, ayant redoublé deux fois durant son cursus. Quant à Hisae, il était en terminal et rejoindrait leur fac l'année prochaine si tout se passait bien, étant intéressé par des études similaires. Ils avaient cinq ans de différence entre eux, voilà pourquoi Eliel l'aidait souvent à faire ses devoirs.

Le soir, et comme son père travaillait de nuit, ils décidèrent de regarder un film ensemble, juste après qu'Isys soit partie. Sa mère voulait absolument regarder dirty dancing, à son plus grand dam, mais il accepta, c'était elle la femme enceinte. Pendant le film, il posa la main sur son ventre et souriait en sentant les petits coups que lui envoyaient son petit frère de temps en temps.

Deux semaines après, les tensions s'apaisèrent un peu, la grossesse de sa mère venait d'atteindre les huit mois, éloignant la crainte d'un bébé né prématurément. Les cauchemars d'Eliel diminuèrent et il arrivait à se concentrer plus en cours, même s'il n'était pas totalement serein. Mais voir ses parents respirer enfin le soulageait, ils semblaient mieux dans sa peau.

Le samedi qui arriva et sous la demande du père de Loan, Eliel partit dormir chez eux pour aider Hisae a révisé une leçon dont il avait du mal à apprendre. Ils ne s'étaient pas vus depuis deux semaines, Eliel s'étant concentré sur ses cours, tentant de rattraper tout ce qu'il avait perdu avec les problèmes de santé de sa mère. Ils avaient juste discutés par message, mais la plupart du temps, Hisae l'envoyait bouler.

Quand il entra chez son meilleur ami, sa mère vint à sa rencontre et lui retira sa capuche, elle lui demanda des nouvelles de sa génitrice et de son petit frère avant de le laisser monter à l'étage. Il alla d'abord saluer Loan dans sa chambre, qui était assis sur son lit en train de lire un bouquin.

— Tu regarderas l'historique de mon frère, lança son ami avec un sourire étrange.

Eliel fronça les sourcils, ne comprenant pas vraiment pourquoi il devrait faire ça.

— Pourquoi ?

— Tu verras, dit-il en replongeant son nez dans le livre.

Curieux, il se dirigea vers la chambre d'à côté et toqua avant d'entrer, apercevant Hisae allongé en étoile de mer sur le matelas, les yeux rivés au plafond, l'air pensif.

— T'as dix minutes de retard, trancha-t-il finalement en tournant son visage vers lui.

— T'étais si pressé de me voir pour réviser ? taquina le plus vieux en venant s'asseoir à ses côtés.

Il retira son gros blouson et sa veste en dessus avant de fondre sur le petit corps menu d'Hisae, l'enlaçant avec possessivité contre lui. Sa crevette tenta de le repousser pendant quelques secondes, puis décida de céder et se laissa faire, tel un poids mort. Le blond pencha sa tête sur le côté quand Eliel eut sa dose de câlin et se releva légèrement, lui offrant son cou pour ses baisers. Le brun ne se fit pas prier et embrassa sa peau chastement, en profitant pour respirer son odeur alléchante.

— En deux semaines, t'as même pas été foutu de te ramener ici, lança Hisae, brisant le silence qui s'était installé où seul le bruit de ses baisers raisonnaient.

— Je devais réviser pour rattraper mon retard sur les autres, avec le bébé et...

— Le bébé, bien sûr, le coupa-t-il.

Il le repoussa d'une main sur son torse et l'éloigna à bonne distance, devant l'air incompréhensible d'Eliel.

— J'ai dit un truc qui fallait pas ? demanda-t-il perdu.

— Non. On est là pour travailler non ? Sinon ça sert à rien que tu sois là.

Le grand brun hocha la tête, décida de ne pas creuser l'affaire, il savait qu'avec Hisae, c'était déjà peine perdue, il était bien trop têtu pour lui tirer les verres du nez. Ils se mirent donc au travail durant plusieurs heures, Eliel en profita pour lui apprendre des techniques de mémorisations et autres astuces pour lui faciliter son apprentissage. Quand Hisae se décida à prendre une douche, le brun lui vola son pc et consulta son historique, il y vit des sites qu'ils avaient récemment regardé, d'autres qui paraissaient normaux pour un adolescent de son âge. Il avait peur d'y découvrir des sites pour adultes, le petit blond était trop innocent pour regarder ce genre de choses !

Puis, il tomba sur ce que Loan voulait qu'il voit et un sourire se dessina sur ses lèvres. Il y avait nombres de notifications Facebook qui portaient son prénom, il avait passé au moins une bonne demie heure sur son profil. Il remonta un peu et y vit le prénom de ses amis proches de la fac, il décida de cliquer curieusement sur les liens et aperçue des photos de lui, avec ses amis. Toutes les photos le concernaient.

Alors comme ça, le petit blond le stalkait ? Cela l'amusa énormément.

— Qu'est-ce que tu fais sur mon pc ?

La voix d'Hisae le fit sursauter, il ne s'y attendait pas. Il avait été rapide ! Il ferma précipitamment la page de son historique et se tourna vers lui.

— Rien, je regardais juste un truc sur Facebook.

Il sembla le croire car il continua de frotter ses cheveux avec sa serviette et mâchouillant un truc dans sa bouche.

— Tu veux que je t'aide ? proposa Eliel en le fixant.

L'autre secoua la tête en s'asseyant sur son lit.

— Va dormir, il est tard, ordonna-t-il à son aîné.

— Je dors ici, s'imposa le plus vieux.

— Non, je veux pas de toi, tu dors avec Loan, c'est lui ton meilleur pote, répliqua-t-il en lâchant sa serviette et en se couchant sur le côté, dos à lui. Allez va-t'en, s'impatienta-t-il.

Eliel soupira. Il aura essayé. Il lui vola son coussin, sous les protestations de celui-ci et s'enfuit dans la chambre de Loan. Il tira le lit en dessous de son lit, installant le coussin dessus avant d'aller prendre sa douche. Son meilleur ami était parti à une soirée, donc il avait la chambre pour lui tout seul cette nuit. Cela voulait dire, pas de ronflements ! Il se dépêcha à se laver, il n'aimait pas s'éterniser chez les gens.

Cependant, quand il passa devant la porte d'Hisae, il entendit ses petits gémissements anormaux. Sans essayer de comprendre ce qu'il se passait, il se précipita à l'intérieur et son sang se glaça en le voyant se torse de douleur sous ses couvertures. Il ne prit pas la peine d'allumer la lumière et vint s'allonger à côté de lui. Dans ces moments là, il ne pouvait qu'attendre en le rassurant que sa crise d'angoisse allait bientôt partir. Son cœur se serra en sentant son corps brûlant contre le sien, il entoura ses bras autour de lui et le colla à son torse, plongeant son nez dans ses cheveux encore humides.

— Hisae calmes toi, je suis là, chuchota-t-il tout bas pour le rassurer.

Hisae se retourna dans ses bras et se colla davantage à lui, il sentait au travers de son haut à long manche qu'il suait beaucoup. Il embrassa son front mouillé et quand il passa un pouce sous ses yeux, il comprit que son visage était ravagé par les larmes, pourtant, ses pleurs étaient muets. Il continuait de remuer, des spasmes envahissant son corps. Il tentait de lui parler doucement à l'oreille pour le calmer, pour l'apaiser mais cela fonctionna qu'à moitié. Il se contenta alors de le serrer le plus fort possible contre lui jusqu'à ce que son corps s'immobilise enfin, après d'interminables minutes. Il avait si transpiré qu'il avait mouillé les draps et le t-shirt d'Eliel. Mais il s'en fichait, il était soulagé qu'il trouve enfin la porte de sortie. Il l'entendit renifler bruyamment, il lui déposa des baisers dans les cheveux et attendit qu'il se rendorme pour aller chercher un gant de toilette froid et de lui passer sur le visage. Il porta son corps profondément endormi pour aller le déposer dans son lit, dans la chambre de Loan pour qu'il soit au propre et qu'il n'attrape pas froid. Il s'allongea à ses côtés et remonta la couverture jusqu'à son cou, puis passa un bras et une jambe sur lui, posant son visage prêt du sien. Il s'endormit rapidement, son odeur se répondait agréablement tout autour de lui pour son plus grand plaisir.

Un son strident le réveilla et il pesta contre la personne qui osait le tirer de son sommeil à cette heure, il était prêt à jurer que c'était Loan pour lui demander de venir le rechercher. Il regarda l'heure, qui indiquait quatre heures du matin. Il bougonnait en décrochant, sans même prendre le temps de regarder le destinataire.

— Quoi ?! dit-il agressivement.

Il sentit le petit blond remuer à ses côtés, voilà, il l'avait réveillé !

Il entendit soudainement un sanglot à l'autre bout du fils, ce qui ramena sa conscience en un seul coup, il se redressa, la peur au ventre.

— Pa... Papa ? demanda-t-il.

— E...Eliel... Ton petit... Ton petit frère il est... tenta-t-il de parler, mais ses pleurs le coupaient.

Eliel fut prit de panique et se releva rapidement, il alluma la lumière et chercha son jean du regard, le téléphone toujours collé à son oreille. Il pouvait presque entendre son cœur battre à tout rompre. Il avait l'impression qu'il allait tomber dans les pommes.

— Papa qu'est-ce qu'il y a ? Le bébé, il va bien ? demanda-t-il la gorge serrée.

Il n'aperçut même pas Hisae qui s'était réveillé et qui le regardait avec inquiétude. Il prit son jean et l'enfila rapidement, maintenant, il restait plus qu'à trouver ses clés de voiture !

Si son père lui apprenait que... Que son petit frère allait mal, il serait capable d'en mourir.

— Ton petit frère... Il... Il est là, continua-t-il.

Eliel se figea. Il ne comprenait pas... Comment ça il était là ? Cela ne faisait que huit mois de grossesse ! Il ne devait arriver que dans un mois ! Bon sang, est-ce qu'il allait bien ? Il sentit les larmes menacer de couler.

— Est-ce que... Est-ce qu'il va bien ? demanda Eliel d'une toute petite voix complètement terrifiée.

— Oui ! renifla son père. Oui, il est déjà en train de téter le sein ! rit-il nerveusement, ou alors, joyeusement ?

La pression retomba d'un coup et Eliel se laissa retomber au sol, ses fesses claquant contre le sol et ses jambes tremblotantes. Sa tête se posa sur ses genoux.

— Il va bien ? T'es sûr ? Et maman, elle va bien ?

— Oui tout les deux ! Il est tout petit et il pèse seulement deux kilos six cent, tu te rends compte ! Viens nous voir, il n'attend que toi, ajouta son père en riant doucement.

Il put à présent discerner le bonheur évident dans sa voix, mais avec la peur qu'il venait de lui faire, il ne sut se contrôler, il lui lança un rapide « à toute de suite » avant de raccrocher et s'écrouler, pleurant pour évacuer sa peur mais aussi de soulagement. Son petit frère était enfin là ! Il était vivant, il était réel, il allait grandir, il allait vivre ! C'est seulement à ce moment qu'il réalisa parfaitement qu'il allait être grand frère d'un petit bout de chou. Il n'était plus seul, il allait avoir un frère à s'occuper, à protéger, à aimer de tout son cœur.

Ses pensées affluèrent à une vitesse folle et il finit par rire nerveusement. Il releva la tête en sentant des mains chaudes se poser sur ses genoux et fut attendri par la mine inquiète et à moitié endormie d'Hisae, il écarta les jambes et le ramena contre lui, l'enlaçant pour la deuxième fois de la soirée.

— Est-ce que ça va ?

— Mon petit frère est là, il est né aujourd'hui.

Hisae s'écarta un peu de lui, l'air choqué. Mais devant le sourire d'Eliel, il comprit que tout c'était bien passé et sourit à son tour, collant leur front ensemble. Ils se sourirent mutuellement, tout les deux ayant l'expression heureuse sur le visage.

Finalement, le plus petit tira le plus grand à se relever.

— Allez viens on va aller le voir ! s'exclama-t-il enthousiaste. 

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