Mon fils

"Maman regarde !" me dit-il joyeux après avoir fait un simple dessin au stylo à bille sur une feuille. Comme chaque mère normale, je réponds par un : "c'est magnifique mon chéri". Alors que je ne l'ai même pas regardé. Et comme beaucoup de mères, bien sûr, je ne le pense pas. Mon fils dessine plutôt bien pour son âge. Je n'ai pas dit je trouve ses dessins laids, ils sont bien réussis pour un enfant de quatre ans, mais il me font peur... Des dessins sans couleur la plupart du temps, au stylo sur une feuille blanche. On a des feuilles de couleur pourtant ! Il ne dessine rien de vraiment violent, pourtant. Pour vous donner un exemple, je peux m'approcher de lui pour regarder le dessin qu'il vient de faire. C'est un bonhomme, un bonhomme simple, bâton, qui court, et en face de lui se trouve un ravin... Et ça le fait rire. Je m'inquiète pour lui, pour son avenir, s'il est déjà comme ça à son âge, qu'est-ce que ce sera plus tard ? Vous me direz peut-être : "Et son père, il en pense quoi ?" Sauf que son père, je ne sais même pas qui c'est. Et lui ne doit même pas être au courant qu'il a un fils. Cet enfant est le fruit d'un amour d'une nuit bien alcoolisée.

Je ne sais pas par quoi continuer, cela m'embête un peu de finir par cette note. Mais ne trouvant rien d'autre, je referme mon journal intime avec une clé. Bien que ce cadenas en plastique ne soit à mon avis pas très efficace, il me rassure. De toute façon je cache ce livre qui retrace ma vie presque entière dans un endroit que personne ne peut trouver : Entre la housse de matelas et le drap housse. Personne ne fait la lessive à part moi ici. J'habite seule avec mon fils dans un appartement. Mon frère vient nous rendre visite de temps en temps. Bon, il faut que je dorme, il est déjà vingt-trois heures, C'est les vacances mais s'occuper d'un enfant est une activité à plein temps.

Le lendemain, comme prévu, mon frère est venu nous voir. J'aime beaucoup mon frère. Il a su garder quelque chose que j'ai rapidement perdu : son âme d'enfant. Il a joué au parc avec mon fils presque toute l'après midi. Nous avons mangé tous ensembles comme une vraie famille. Mon fils l'aime bien aussi. Mais après le repas, il me lança dans une discussion, assez inhabituelle venant de lui.

"-Ecoute Carine, commença-t-il, j'ai lu ton journal et je crois que tu te fais un peu trop de souci à propos de ton fils.

-Comment ça ? Je suis une mère c'est normal que je m'inquiète pour lui non ?

-Oui, certes, c'est bien. Mais ses dessins ne sont pas si ignobles que ça. Je crois que tu es parano à ce sujet. C'est un petit garçon, à cet âge les hormones ne sont pas bien présentes mais ont des conséquences sur le corps quand même, à son âge, moi, j'étais bien pire que ça.

-Ben voyons, tu vas me dire comment est-ce qu'il faut que j'élève mon fils alors que tu ne sais pas garder une copine plus de deux semaines ? Attends... tu as lu mon journal !?

-Cela fait presque quatre ans que je le lis ton journal. Presque depuis que tu as eu cet enfant. Je me suis souvent fait du souci pour toi, les psychologues disaient que tu pouvais avoir des crises.

-C'était il y a vingt-cinq ans ! Et ne touche plus à mon journal sans ma permission ! C'est clair ?

-Tu vois, tu t'énerves.

-Peut-être que si tu m'avais demandé de te donner un compte rendu de ma vie de mère au lieu de lire mon journal intime, je ne serais pas énervée à l'heure qu'il est ! Tu te prends pour qui ?

-Pour quelqu'un qui veut veiller sur toi !

-Te voir une fois par semaine me suffisait amplement ! Et puis tu sais quoi ? La semaine prochaine, ne reviens pas !

-Très, bien j'espère que d'ici deux semaines tu iras mieux..."

Et il s'en alla. Je m'étais retenue de lui dire la tristement célèbre phrase que mon frère a dû entendre plus d'une fois dans sa vie : "Et ne reviens jamais !" Sans lui, je ne sais pas si je tiendrai, ici.

Le lendemain, mon fils a fait un autre dessin. Je jette un œil dessus : deux bonhommes bâtons autour d'une table, la scène a l'air animée, violente et animée.

"-Qu'est-ce que c'est ? lui demandai-je.

-C'est toi et tonton hier soir, c'est bien fait, hein ?"

Sa réponse me sidéra, et si le contenu de ses dessins étaient de ma faute ? Mon frère à toujours eu raison au fond... Je ne suis pas une personne capable de prendre soins de quelqu'un, lui oui. Même s'il ne s'y prend pas de la meilleure manière qui soit...

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