22. Tricoter des liens
Dans mon enfance, ma maman tricotait pour arrondir les fins de mois. Elle tricotait pendant l'hiver, quand il n'y avait pas de travail dans les vignes ou au jardin. Les gens du village venaient à la maison passer commande pour eux-mêmes ou pour leur famille. Maman tricotait à la machine. Nous, les enfants, nous aidions à notre petite mesure : il fallait tendre les deux bras, maman plaçait l'écheveau de laine sur nos bras et enroulait les pelotes pour la machine. Ma grand-mère préférait le crochet au tricot et c'est elle qui m'a appris les bases du crochet. Aujourd'hui, je tricote et je crochète, en mêlant parfois tricot et crochet sur un même ouvrage.
Souvent je tricote quand je suis en route. Ce jour-là, j'étais dans le train. Un coup d'œil sur mes aiguilles, un coup d'œil sur le paysage. Une petite fille vient s'asseoir en face de moi. Sa maman s'installe à ma droite, son papa à sa gauche. La petite ne quitte pas des yeux mon tricot. Elle semble subjuguée, hypnotisée par mes aiguilles. J'entame la conversation, ce qui ne semble pas du goût de la maman, mais ça ne fait rien, je continue. « Tu devines ce que je fais ?» Un moment de réflexion, une hésitation... « Des chaussons... pour un chien ?» C'est moi qui reste bouche bée ! Je lui dis doucement : « Tu as raison, ce sont des chaussons. Mais ce n'est pas pour un chien, c'est pour un bébé. » Le train s'arrête et la maman entraîne la petite par la main. Dommage ! J'aurais bien aimé comprendre pourquoi la petite fille pensait à un chien. Peut-être avait-elle envie d'avoir un chien ?
Naïmé a 14 ans. Elle voudrait apprendre à tricoter. Sa maman ne sait pas tricoter. Elle lui dit : « Demande à Soeur Myriam. » Naïmé vient une fois par semaine. Je lui montre comment monter les mailles. Après la maille endroit vient la maille envers. Naïmé apprend vite. Tricoter une écharpe, c'est trop facile et ce n'est pas très intéressant. Naïmé rêve de tricoter des gants pour son papa, des gants noirs et élégants, des gants spéciaux, avec les doigts libres pour qu'il puisse jouer du violon. Naïmé est douée. Sa marraine lui offre un livre de tricot où sont expliqués des points difficiles et de jolis modèles. Naïmé cherche aussi des tutoriels sur internet. Maintenant, c'est moi qui pourrais prendre un cours avec Naïmé.
Christine tricote pour Kevin Germanier. C'est un créateur de mode, un styliste qui commence à être connu à Paris. Tout a commencé dans le réseau familial. Les femmes de la famille tricotaient pour lui, la grand-maman cousait, assemblait et s'occupait des finitions. Kevin Germanier utilise des matériaux recyclés et travaille de façon éco-responsable. Le succès est au rendez-vous. Le réseau s'est élargi. Christine participe à l'aventure.
Denise se bat avec un cancer. J'espère qu'elle va gagner. J'espère que la vie va gagner. Denise désire tricoter des chaussettes pour son fils. Avec l'aide d'un tutoriel trouvé sur internet, elle a commencé. Elle tricote avec amour. Je connais bien des hommes qui aiment porter des chaussettes en laine, tricotées par leur femme, leur mère ou leur grand-mère. Maille après maille, ce sont des chaussettes remplies d'amour, des chaussettes qui tiennent chaud aux pieds... et au cœur !
Des hommes qui tricotent ? Ça existe, mais il n'y en a pas beaucoup. J'ai rencontré un homme qui tricotait tous ses cadeaux de Noël... Et j'ai connu un petit garçon qui aurait bien aimé apprendre à tricoter. Tous ses petits copains se moquaient de lui. Laurent a tenu bon. Il a confectionné un petit chat au tricot. Quand les copains ont vu l'animal, les moqueries ont cessé : tous voulaient apprendre !
Tricoter crée des liens...
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