Partie 4 : REFLET
« Pleure,
Pleure, petite fille,
Personne ne viendra te chercher. »
6 janvier.
Tic, tac, tic, tac...
Perdu dans mes pensées, je me concentrais sur les bruits temporel de l'horloge. Le temps me semblait si... long.
- Il fait chaud aujourd'hui, n'est-ce pas ? dis-je à ma psychologue qui attendait que je parle depuis vingt minutes de silence.
- Oui, répondit-elle. C'est vrai qu'il fait particulièrement beau.
- Alors pourquoi je ressens cette sensation orageuse ? la questionnais-je.
Depuis que j'étais sortie de l'hôpital, madame Lang m'avait beaucoup apporté. Et elle continuait de le faire, surtout depuis l'incident d'il y a quelque jours.
- Quelle sensation ? me demanda-t-elle de sa voix douce qui me rassurait.
- La sensation de tourner dans une spirale de cauchemar.
- Es-tu allé voir ton père à l'hôpital ?
Mes mains arrêtent aussitôt de triturer la fermeture éclaire de ma veste.
Mon... père ?
- Je n'ai plus de père.
- Pourquoi dis-tu cela ?
- Parce qu'il y avait trop de sang ce soir-là. Papa avait mal à la tête et la douleur de Tae était effrayante à voir.
Je me surpris à sourire d'un air nostalgique.
- Quand on était petits, il me racontait que je pourrais toujours compter sur lui pour me protéger. Je ne pensais pas qu'il était sérieux à ce point-là...
- Un frère ne devrait pas protéger sa sœur ?
Madame Lang me regarda à travers ses lunettes en demi-lune.
- Est-ce que vous le jugez ? lui demandais-je.
- Je ne connais pas Taehyung, alors je ne peux pas le juger.
- Il a fait ça pour moi. Ça a toujours été pour moi !
Je serrais les poings, sentant la colère monter.
- Tu as traversé beaucoup d'étapes ces derniers mois, tu sais ? Tout d'abord la tristesse, puis le déni, le choc et maintenant tu entres en phase avec la colère.
- C'est tellement difficile, avouais-je les larmes aux yeux. Cette sensation de brûler de l'intérieur.
**
- Tout s'est bien passé ? me demanda Jackson quand il vint me chercher une heure plus tard.
- Ça va... j'aimerais aller voir Taehyung.
- On ne veut pas que tu ailles là-bas, me répéta le meilleur ami de Namjoon.
- Oui, mais moi c'est mon choix ! m'énervais-je en tapant ma main contre la vitre.
- Et c'est moi qui conduis cette voiture alors si je te dis que tu n'iras pas le voir en garde en vue, tu n'iras pas, ordonna-t-il d'un ton dur et sans appel.
- Pourquoi est-ce que je ne peux pas décider ?! Je suis assez grande ! insistais-je.
- La décision est prise, conclut-il la discussion sans même écouter ce que j'avais à dire.
Frustrée, j'appuyais ma tête contre la vitre et ne parla plus pendant tout le reste du voyage.
De retour à la maison, je monta en trombe les escaliers et claqua la porte de ma chambre.
- Soon ! me réprimanda Namjoon qui n'aimait pas ce genre de comportement.
Je l'ignorais royalement en dégageant mes cours qui se trouvait sur mon bureau pour placer ma tête entre mes bras.
Je me sentais tellement en colère.
- Quelque chose à nous dire peut-être ? dit une voix.
M'attendant à voir Namjoon, je fus étonnée en constatant qu'il s'agissait d'Hoseok.
- Salut... le revenant, répondis-je.
Apparemment, j'étais décidée à être désagréable.
- Okay... murmura Hoseok en se posant sur le bureau, les bras croisés. Toi, tu es en colère.
- Ouais, bien vu. Je suis en colère parce qu'on m'empêche de voir mon frère ! Mon frère qui a aussi besoin de moi !
- On essaie de te maintenir à l'écart de tout cela.
- Je n'en ai pas besoin ! hurlais-je presque en me levant subitement.
Hoseok, qui était adossé face à moi, se redressa. Il boitait légèrement à cause de son attelle à la cheville. La blessure qu'il s'était faite en me portant pour m'emmener à l'hôpital. Blessure qui ne faisait que me faire culpabiliser encore plus.
- Soon. Nous ne sommes pas contre toi. Nous sommes ta famille et tu ne peux pas t'énerver de cette façon contre nous.
- Mais vous m'énervez ! C'est tellement injuste tout ce qui se passe en ce moment !
- Bien-sûr que c'est injuste...
- Et tu n'as rien fait pour que cela n'arrive pas ! l'accusais-je durement.
Il s'arrêta de parler, net.
- Alors c'est ça que tu me reproches ? C'est pour cela que tu es en colère depuis des jours ? Car je n'ai pas été là, selon toi ?
- Quand papa et maman sont revenus à la maison, tu t'es volatilisé. Tu as fait comme Yoongi, mais en pire ! le blâmais-je, le pointant du doigt. Je t'entendais à peine revenir le soir. Tout est parti en catastrophe, je me sens tellement en frustrée, si tu savais...
- Bien-sûr que je sais, murmura-t-il en s'approchant de moi.
Je repoussa le bras qu'il tendit vers moi.
- Tu ne sais rien du tout ! Ce n'est pas toi qui est placé provisoirement dans un centre de détention pour mineur.
- On sortira Tae de là, me promit-il.
- Tes promesses tu peux te les garder.
Dans le reflet de mon miroir accroché au mur, je vis la tristesse et la culpabilité marquer son visage. Mes mots lui faisaient mal et mes poings se serraient douloureusement.
Quand est-ce que cette situation allait cesser ?
Namjoon.
- Tu vois quelqu'un en ce moment ? me fit sursauter une voix.
Je lâchais mes clés sous le coup de la peur et me tapa la tête contre la poignet de la porte en tentant de me redresser.
- Putain... Jin ! chuchotais-je.
Mon grand frère me lançait un regard espiègle, ses lèvres pulpeuses affichant un sourire presque arrogant.
- Alors, j'ai raison. Comment elle s'appelle ?
Je feignis de regarder ailleurs mais les rougeurs sur mes joues me trahissaient.
- Eh bien... c'est... enfin, ce que je veux dire c'est que...
- Tu veux un verre d'eau ? me charria Jin.
- C'est la médecin que Soon avait à l'hôpital ! avouais-je.
J'avais crié cela sans me soucier de qui pouvait bien m'entendre.
- Waouh, dit simplement Jin. T'as frappé fort quand même.
- C'est pas ma faute ! tentais-je de me justifier. La première fois que je l'ai vu, je l'ai trouvé vraiment... magnifique ! Et on s'est recroisé il y a quelques jours. Elle avait fait tomber ses affaires par terre et je l'ai aidée...
- Quel homme, nargua Jin en éclatant de rire.
- Ce n'est pas drôle ! Et d'abord, c'est ma vie privée. Aucun de vous n'était censé le savoir !
Jin mima une fermeture éclaire sur sa bouche en plus d'une clé imaginaire qu'il me donna et que je jeta dehors après avoir ouvert la porte.
- Rien ne sortira de ma bouche, promis mon frère. Tant que vous vous protégez.
- J'ai passé l'âge de la discussion !
Donnez-moi une corde. Je devais être rouge comme une tomate à l'heure qu'il est.
- Je ne pensais pas qu'être amoureux te rendrait si timide.
Je détournais le regard. Il s'avança et posa sa main sur mon épaule.
- Tant qu'elle te rend heureux, c'est le principal. Tu as le droit de ressentir un peu de bonheur. C'est ce que je souhaite pour vous tous.
- Merci. Mais je ne me laisserai pas distraire. C'est la famille qui compte plus que tout.
- Ne t'inquiètes pas pour ce détail là : je gère.
Il m'ébouriffa les cheveux comme si j'étais encore un gamin. Je les voyais pourtant. Ses cernes. Son teint pâle. Ses regards inquiets qu'il nous lançait à tous. Jin était quelqu'un de calme, mais il pouvait ressentir du stress comme tout être humain.
- On se doit de protéger les petits pour l'instant, me dit-il. J'aurais un souvenir de leur adolescence...
Je ris, d'accord avec lui.
- Quand papa sera remis de tout ça, on l'obligera à partir. Tu as des nouvelles maman ?
- Non.
- Il faut aussi veiller à la guérison d'Hoseok et je m'inquiète pour Yoongi. Il boit trop ces derniers temps...
- Je m'en occupe.
- Jin, l'interrompis-je sérieusement. On s'en occupe.
- C'est surtout Soon qui m'effraie.
- Ça passera, assurais-je sans en être moi-même persuadé. C'est l'adolescence.
Soon.
Respire, respire...
Non. Tu vas mourir. Tu vas mourir là, seule. Seule sans personne.
Ma tête appuyée contre le sol froid de ma chambre, je serrais les poings en proie à une crise de panique. Cela faisait bien longtemps qu'elle ne m'avait pas rendu visite. Cela faisait si mal. Les poumons qui s'oppressaient, le cœur qui perçait petit à petit un chemin vers l'extérieur. Je ne pouvais plus respirer.
- Putain...! paniquais-je.
Et si je mourrais ? Je ne voulais pas que mes frères me retrouvent comme ça, misérablement affalée par terre.
Bon Dieu, que je haïssais ce misérable cerveau qui se pensait sans cesse en danger. Tout commençais à tourner autour de moi et ma nausée se faisait de plus en plus présente. Je ne pouvais pas. Je ne pouvais plus tenir. Je n'arrivais pas à en supporter plus. Mes phalanges s'écrasèrent contre le mur de ma chambre. La douleur qui traversa ma main me fit pousser un gémissement de douleur.
- Putain... marmonnais-je en la dépliant lentement.
Mes jointures s'étaient teintes de violet et de bleu. Mais cela ne suffisait pas à faire disparaître cette angoisse d'un avenir affreux pour moi et mes frères. Mon autre main s'abattit sur ce même mur, brisant un peu plus mes os à chaque nouveau coup. J'avais si mal, et j'étais si désolée.
- Pardon... pardon...! m'excusais-je inlassablement.
Je pensais à Yeonjun qui m'avait demandé de ne pas me faire de mal.
- Arrête, Soon ! me coupa Hoseok en me tirant en arrière.
Je le repoussais brutalement en me tourna vers lui, croisant son regard où se mélangeait culpabilité, peine et pitié.
- NE ME REGARDE PAS COMME ÇA ! hurlais-je.
Je voulais repousser son regard, prétendre qu'il n'existait pas. Prétendre que tout ce qui arrivait n'était pas ma faute, de notre faute à tous. Peut-être aurions pu nous soutenir un peu plus ? Peut-être aurais-je pu être à leur écoute ? Aurais-je dû partir avec ma mère ? Si dès le départ, j'avais dit tout ce qu'il n'allait pas dans ma tête, mes pensées noires et mon harcèlement, je n'aurais jamais fini à l'hôpital et papa et maman ne serait jamais revenu. Sans moi rien de tout cela ne serait arrivé !
- Dis-moi ce que tu as sur le cœur ! me supplia mon grand frère en tentant de s'approcher.
Sa voix tremblait tellement qu'il avait l'air d'être sur le point de pleurer. Il se paralysa en me voyant reculer. Qu'est-ce que j'avais mal. Si seulement j'avais pu leur dire ce qui n'allait pas. Shang ne m'harcelait plus, alors pourquoi ne pouvais-je pas supporter mon reflet dans le miroir. Pourquoi ne parvenais-je pas à m'aimer ?
- Je me déteste tellement, si tu savais... fut tout ce que je parvins à dire.
Le sentiment immense de la culpabilité pesait en moi tous les jours. Étais-je égoïste au point de penser que tout ce qui arrivait de mal était la conséquence de mes actes ?
Taehyung aurait-il pu apprendre à contrôler ses émotions ?
Jimin aurait-il pu s'aimer ?
Jungkook aurait-il pu être plus courageux ?
Hoseok aurait-il pu être plus présent ?
Yoongi aurait-il dû nous protéger comme il l'avait tant de fois promis ?
Namjoon aurait-il pu supporter Jin ?
Jin aurait-il pu en faire plus ?
Et moi, aurais-je dû cesser de mentir ?
Qui était réellement responsable de ce désastre ?
- Je... j'ignore pourquoi, bégaya Hoseok qui n'osait plus m'approcher. Mais rien n'est ta faute.
Ses paroles réconfortantes et son regard désemparé rebondirent sur moi, ne m'atteignant pas. Il n'était pas responsable de ma douleur et de ce que je pensais de moi-même, il ne pouvait rien y faire. Personne ne pouvait rien faire. Ma colère était si forte qu'elle cachait tout un puit de tristesse.
- Écoute-moi ! cria Hoseok, désespéré.
J'ouvris grand les yeux, surprise qu'il adopte un ton pareil avec moi.
- Je t'aime, Soon. Tu es ma petite sœur et ça ne changera jamais. Mais je ne peux pas supporter de te voir comme ça.
Heureusement que les autres n'étaient pas là. Namjoon avait encore un repas avec Jackson, Jin réglait tout ce qu'il y avait à régler avec l'avocat de la famille, Yoongi était dehors je-ne-sais-où et Jimin à une soirée, sûrement pour se changer les idées sans penser à son jumeau. Car Tae était toujours...
- Mais qu'est-ce qui vous prend ? nous interrompit une voix.
Nos têtes se tournèrent vers Jungkook. Il regardait la scène éberlué. Constatant rapidement mon état, il s'approcha de moi à la vitesse de la lumière sans un regard pour son frère, et me prit dans ses bras. Son contact m'apaisa et fit redescendre les battements de mon cœur petit à petit. L'air redevenait respirable et mes mains s'agrippèrent à son tee-shirt comme à une bouée de sauvetage. Ce qu'il était.
- Ça va aller maintenant, chuchota-t-il. Je vais prendre soin de toi et je vais arrêter de me cacher dans ma chambre.
Du coin de l'œil, je vis Hoseok reculer doucement et partir sans un regard en arrière.
- Pardon... répétais-je.
- Arrête, me dit-il en posant une main sur ma joue. J'aimerais que tu prennes une grande inspiration et que tu ailles dormir. Je sens que tu en as besoin.
Il avait raison : j'étais exténuée.
Depuis quand lui et moi ne nous étions plus parler ainsi ?
Jungkook.
- Heureusement que tu es arrivé, me confia Hoseok en arborant un sourire factice.
- Tu te forces encore à sourire, lui fis-je remarquer, les bras croisés.
Affalé sur le canapé du salon, j'essayais d'empêcher mes pensées de tourner en rond.
- C'est vrai... Mais j'imagine que c'est dans ma nature, répondit-il presque amèrement.
Je lâchais un soupir, fatigué. La culpabilité que ressentais Soon était aussi en moi. La culpabilité de n'avoir absolument rien fait. Je regrettais tellement de m'être renfermé sur moi-même à chaque dispute qui éclatait, de ne pas avoir pu soutenir le regard de mon père. De ne pas avoir été là pour ma sœur. La personne qui me comprenait le plus sur cette terre.
J'étais allé voir Tae aujourd'hui. À part les quelques blessures qui ornait son visage, il m'avait lancé son habituel sourire carré, comme si je n'avais pas à m'inquiéter. Que tout rentrerait dans l'ordre. Je n'y croyais pas vraiment mais je tiendrais au moins parole.
« - Protège-la, d'accord ? m'avait-il dit. Je la connais, elle se mettra tout sur le dos.
- J'ai pas été assez là, putain... m'étais-je blâmé.
- Aucun de nous, en réalité.
- Je n'aurais jamais pu t'imaginer un jour dans cet endroit, avais-je avoué les larmes dévalant mes joues.
- Souris p'tit frère, et la vie te sourira.
J'avais relevé la tête, retourné par ses paroles trop optimiste dans le contexte actuel. Il s'avança légèrement et plaça sa main contre la vitre qui nous séparait.
- Alors promet-moi d'être aussi courageux que tu le pourras et de la protéger. De la protéger d'elle-même.
- Tu as ma parole ! avais-je dit en posant à mon tour ma main contre la glace, aussi près que je le pouvais de la sienne. »
**
Soon.
Les reflets sont une drôle représentations de nous-même. Il nous montre comment le monde nous voit, mais nous restons incapable de garder cette vision intacte. Elle est mensongère, hideuse, manipulatrice.
- C'est toi, Kim Soon ? me demanda ce drôle de garçon.
Notre esprit et notre vision de nous-même nous empêche toujours de nous aimer, de trouver cette place trop étroite dans ce monde égoïste. Comme réservé à la dernière minute.
- Et tu es ?
Un reflet. Tout n'est que reflet.
- Le grand frère de Yeonjun. Soobin, enchantée, me dit-il en s'inclinant légèrement.
On ne se connaîtra jamais complètement. Autant qu'on ne mesure pas l'ampleur des secrets des autres. Est-ce la préservation d'un jardin secret ? Ou bien une boîte où l'on y enfermerait les pires cachoteries ?
- C'est bien la première fois que je te rencontre, lui dis-je en m'inclinant à mon tour.
- Oui... rit-il comme mal à l'aise. Yeonjun ne parle pas beaucoup de moi.
- Tu es venu le chercher ? demandais-je.
Yeonjun n'était pas venu en classe aujourd'hui. J'avais essayé de l'appeler mais il n'avait jamais répondu. Je commençais à me demander s'il n'avait pas lui aussi des problèmes dans sa vie qu'il ne me partageait pas.
- Il n'est pas venu, c'est ça ? devina le jeune homme en voyant l'expression sur mon visage.
- Euh... non ?
Yeonjun le prendrait-il mal si je caftais auprès de son grand frère ?
- Je vois... soupira-t-il. Merci encore. Ravi d'avoir fait ta connaissance, Kim Soon.
Je fronçais les sourcils en le regardant partir. Il ne semblait pas étonné d'apprendre que son petit frère avait impunément séché une journée entière de cours.
- Nous n'avons pas les mêmes grands frères, râlais-je en n'osant même pas imaginer la réaction des miens si je manquais ne serait-ce qu'un cours.
Yeonjun.
- Tu n'as jamais été la ! Alors ne me fait pas de leçons de morales ! criais-je à l'intention de Soobin.
- J'essaie de te protéger, Yeonjun ! hurla-t-il à son tour.
Il était si tard. Trop tard pour un énième désaccord.
- Me protéger ?! La seule personne de qui je devrais être protégé, c'est de toi !
Un silence pesant s'installa à la suite de mes paroles.
- De moi ? répéta-t-il ahurie. Je ne suis pas le meilleur frère, Yeonjun, je te l'accorde. Mais que tu le veuilles ou non, j'ai toujours rattrapé tes conneries. Je t'ai empêché de te foutre dans des emmerdes pas possible, je me suis fourré dans des affaires pour qu'on ait de quoi manger, j'ai fais en sorte que les mauvaises personnes ne s'en prennent jamais à toi !
Je le regardais, les larmes aux yeux.
- Je sais que je ne suis pas un modèle. Et sincèrement ? Ne deviens jamais comme moi. Ma vie a mal commencé et elle ne se terminera sûrement pas bien. Mais au moins, je ne t'ai jamais lâché et je ne le ferais jamais. C'est une putain de promesse ! Alors que ça te plaise ou non, tu peux me croire, je ne te laisserais pas foutre ton avenir en l'air. Tu m'as bien compris ?
Je n'osais pas lui répondre. A le regarder dans cet appart' miteux dans lequel nous habitions.
Je t'aime, grand frère. Mais il m'arrive trop de fois d'en venir à te détester.
- Est-ce que tu m'as compris ? réitéra-t-il, à bout de nerf.
Mes lèvres restaient fermées et mon regard bloqué sur lui.
- Putain, Yeonjun ! jura-t-il, perdant patience.
Il me prit par les épaules pour me plaquer contre le mur. Est-ce que j'étais encore sous l'effet de la drogue ?
- C'est compris, murmurais-je.
Il avait autorisé la cigarette. Riait légèrement quand je revenais un peu bourré de soirée. Ne disait rien quand je ramenais des mauvaises notes, bien que je voyais ses regards réprobateurs, comme s'il m'incitait à m'assurer un avenir plus glorieux que le sien. Se mettait doucement en colère quand je me barrais sans prévenir. Mais les joints c'était...
- Interdit ! dit-il en me les prenant. Si je te revois avec ça ou si tu es encore sous l'effet de cette merde...
- Tu feras quoi ? irais-je amèrement. Tu as déjà oublié ?
Quel imbécile j'étais. A le provoquer, lui, qui finalement m'avait donné tout ce qu'il n'avait jamais pu avoir. Qui, du haut de sa vingtaine, avait fait ce qu'il avait pu, malgré toutes les rechutes.
- Toutes les fois où t'es revenus la tête à l'envers ! Je te portais jusqu'à ton lit. T'étais pire qu'une épave...
Je n'eus pas le temps de finir ma phrase, qu'il m'envoya une gifle, méritée je l'admets, en pleine face.
Je me tus instantanément. Soobin n'avait jamais levé la main sur moi. C'était... la première fois. Quand je levais mon regard choqué vers lui, je pus apercevoir toute sa culpabilité.
- Yeonjun... dit-il tout bas.
Il s'approcha de moi mais je me protégeais de mes bras. J'entendais ses battements de cœur frénétiques. Ou bien était-ce les miens ? Peu importe... Il me lança un dernier coup d'œil et s'en alla en claquant la porte. Nous venions de dépasser une limite que nous n'avions jamais franchis.
- Il s'est passé quelque chose de grave ? me demanda Soon, une bonne heure plus tard.
- Qu'est-ce qui te fait penser ça ?
- Qu'est-ce que tu fous dans ma chambre à minuit alors ?
Ma jambe tressautait et un milliard de pensées surgissaient dans ma tête à chaque seconde. J'avais envie de faire n'importe quoi. De faire taire ma raison, mes responsabilités. Tout ce qui faisait que je me sentais lourd chaque jour, mes cicatrices me brûlant comme si je m'étais encore mutilé la veille.
Soon sembla ressentir cette haine bouillir en moi. Elle s'agenouilla et posa sa main sur la mienne.
- On se casse ? proposa-t-elle.
Se barrer ? Oui. Très loin d'ici.
Nous sommes ici là et maintenant. Mais en réalité, nous souhaitons fuir. Nous sommes ensemble et nous rions de nos malheurs, espérant un avenir meilleur. Car ce que nous vivons est éphémère.
- Qu'est-ce que tu fous ? irais-je en la voyant escalader un portail.
Je n'ai aucune certitude concernant le futur, mais nous n'oublierons jamais tout ce que nous avons vécu et partagé. Ces souvenirs d'une jeunesse rude et chamboulée, incomprise. Je ressentais ce désir de voler en te voyant, appelant la liberté.
- Ce n'est qu'une vieille décharge, dit-elle. Je sens que tu as besoin de te défouler.
On se comprenait et on se soutenait. Nous tentions de vivre. Vivre pleinement avec nous-mêmes et montrer combien nous haïssions ce monde.
- Je les déteste tous, murmura Soon.
La seconde d'après, elle écrasa le pied de biche contre la vitre d'une voiture déjà en mauvais état.
Quel sentiment de jouissance. Car rien que le temps d'un instant, nous emmerdions ce monde ensemble et nous courrions loin de tout cela, brisant tout sur notre passage. C'est insolent, idiot, mais nous refaisons le monde. Si ce n'est pas maintenant, alors quand ? Je veux des souvenirs à nous emporter contre tout, contre les adultes qui maudissent notre génération. C'est la plus belle des indignation. À vouloir hurler et crier, nous perdre dans cette colère immature et incomprise. La plus dramatique des escapade.
- J'ai le droit de perdre le contrôle, me dis-je à moi-même en refusant un appel de Soobin et en entendant les sirènes de police au loin.
Dans cette immense ville qu'était Séoul. Tout brûler, tout casser, tout insulter, tout vivre... Pour une fois, sentir que nous avions le droit d'être révoltés. Et une fois le contrôle abandonné, comprendre que nous avions peut-être eu tort. Mais en rire. Et encore en rire. Et continuer à parler de tout ce qui n'allait pas. À rêver.
—-
Je poste enfin un nouveau chapitre après six mois de silence ! Encore désolé, il y a eu quelques changements dans ma vie récemment. Je vais poster plus régulièrement en tentant d'adopter un certain rythme.
Sinon, j'espère que ce chapitre vous aura plus.
Dites-moi ce que vous pensez de la réaction de Soon vis-à-vis d'Hoseok. Sa colère est-elle légitime selon vous ?
Quoi dire de Soobin et Yeonjun ? Les relations fraternelles sont toujours compliqué dans cette histoire...
Sur ce, passez de bonnes fêtes. 🎄
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