10.


On passe les heures qui suivent affalés dans la pièce tapissée du sol au plafond de confortables coussins multicolores.

Je raconte à Victoire et son ami que nous sommes amnésiques, et je leur parle de nos numéros. Sans surprise, ils sont exactement dans le même cas. Leur numéros respectifs sont 1.2.a, et 3.1.a. Il faudra que je pense à étudier les similitudes et les différences de nos quatres numéros.

Victoire s'endort, et je suis tentée de l'imiter mais une insupportable bouille blonde apparaît dans mon champ de vision à l'instant même où j'allais m'endormir.

Merci Gabriel.

-Allez, pousse toi et laisse moi une place.

Je hausse les sourcils en regardant tous les coussins libres à côté de moi.

-T'as pas les yeux en face des trous ? Y'a de la place partout.

Je jette un coup d'œil à Marius qui est toujours affalé dos à moi. Quel dynamisme.

-Si, mais les coussins ont l'air plus confortables ici.

Quel chieur. Je ne bougerais pas pour un gamin pareil.

Il s'aperçoit à ma mine renfrognée que je n'ai aucune intention de bouger pour lui. Alors que je crois avoir gagné, et que je repense avec une satisfaction non dissimulée à ma sieste méritée, l'être machiavélique qui se tient en face de moi plisse les yeux et je vois apparaître aux commissures de ses lèvres un sourire diabolique.

Ça ne sent pas bon pour moi. Vraiment pas bon. La pensée qu'il peut me virer de force ne me traverse même pas l'esprit. Grave erreur. Règle numéro un : ne jamais sous-estimer son adversaire.

-Comme tu veux. Je t'aurais laissé le choix !

Sur ces mots, Gabriel m'empoigne comme si je ne pesais pas plus lourd qu'une brindille et me jette un mètre plus loin sans aucune délicatesse.

Il est musclé le bougre !

J'atterris juste à côté de Marius qui me glisse un regard indifférent. Ma décision est prise. Je vais devoir tuer le charmant Gabriel. Désolée Vic ! Ce mec n'aime pas vivre, je ne vois pas d'autres hypothèses.


J'hésite à me jeter sur lui sans autres forme de procès, mais je me rappelle qu'il est bien plus fort. La vengence est un plat qui se mange froid, n'est-ce pas ? Bon, alors il me faut un plan.

Je me retourne vers Gabriel, la mine sombre.

Il s'est allongé les bras sous la tête et a fermé les yeux avec un sourire satisfait.

Au diable le plan ! Je vais le tuer sur-le-champ. J'opte pour la technique de l'angelot fourbe. Vous allez comprendre.

Je m'approche de lui, un sourire aux lèvres.

-Bon allez t'as gagné. Je peux pas me battre.

Marius se retourne vers moi et me jette un regard qui en dit long. Merde. Le crapaud m'a cramée. Comment a t-il fait ? Il n'a même pas vu la scène !

Gabriel lui n'y vois que du feu. Tant mieux, vil renard, profite de ton répit; il sera de courte durée.

Je me rapproche encore un peu du blond, avant de me jeter sur lui. Il pousse un cri faussement terrorisé. Bon, apparement je n'ai trompé personne. Tant pis ! Je me laisserai pas avoir cette fois. J'enjambe son futur cadavre, choppe ses avants bras, et commence à le faire rouler vers un autre coin de la pièce.

Il rit. Je n'ai aucune crédibilité. 

Victoire vient de se réveiller, et observe la scène d'un oeil amusé. Marius quant à lui ne parvient qu'à nous montrer son agacement. Étonnant.

Gabriel se dégage facilement et je perds aussitôt ma mine sombre, pour lui faire un sourire éclatant. Je suis folle mais pas à ce point : il est bien plus fort que moi.

 - On est quittes ?

Je lui tend la main en acquiesçant, toujours munie de mon faux sourire.

Je lui presse la main comme une orange. Il se fend la poire en me regardant.   A ce qu'on se marre !

Je m'allonge, cette fois-ci pour de bon, et le blondinet vient me rejoindre. Je ne dis rien, lui non plus. C'est bien comme ça aussi, le silence. Ça fait du bien. Surtout après s'être fait traînée comme un sac patate.

Victoire s'est rendormie. Une vraie marmotte ! L'ado survitaminé à côté de moi brise le silence au bout de quelques minutes.

-J'ai faim.

-Moi aussi.

-On va voir la cuisine ?

-Ouais.

Je traîne ma carcasse accompagnée de Gabriel jusqu'à la cuisine. On traverse le Furtifo, qui nous mène cette fois-ci directement aux matelas.

Une fois au coin cuisine, on commence à fouiller tout les placards comme si on n'avait rien mangé depuis des jours. De vraies bêtes, je vous dis.

-Mais...y a rien ! Qui qu'ils soient, ils ont pas intérêt à nous donner leur nourriture prémâchée !

Gabriel est énervé. Moi aussi.

Il reste un placard. Pas besoin de l'ouvrir : il est en verre. Rien. Du tout. Je m'apprête à tourner les talons, lorqu'un point rouge effleure ma rétine. Cete fois-ci, j'ouvre le placard, et aperçois une caméra. Elle est à peine discernable.

Enfait, je suis sûre que je l'aurais manquée si un point rouge ne m'avait pas aveuglé. Je sors de mes gonds. C'est trop ! Je commence à gueuler directement sur la caméra, en espérant que quiconque m'entende.

-Eh oh ! Les militaires, les fous, je ne sais pas qui vous êtes, mais vous commencez sérieusement à me taper sur le système ! On sait pas où on est, ni pourquoi, et on a faim ! Je veux pas de votre pseudo nourriture qui doit sortir du cul de votre putain de chien de garde ! On veut de la vraie bouffe ! ON EST PAS DES ROBOTS, MERDE !

Victoire et les deux gars me jettent des regards interloqués, les yeux ronds comme des soucoupes. Et merde, j'ai parlé à un fond de placard. Super. Maintenant, tout le monde me croit folle. Manquait plus que ça.

Victoire s'approche du placard, et lui jette un coup d'oeil méfiant.

-Gab ! J'en avais oublié une apparement. Fais chier, jure t-elle.

C'est mon tour de la croire complètement frappée. De quoi parle t-elle ?

Marius enchaîne.

-Combien y en a t-il ? Que vous avez trouvés ?

Mais de quoi parlent-ils bon sang !

Gabriel me montre la caméra du doigt et tout s'éclaire dans ma tête.

-4 par pièces.

Les caméras.

-8 caméras pour surveiller 4 personnes dans deux pièces ? Ils ne lésinent pas sur les moyens ici.

Je sourit et m'asseoit sur le plan de travail translucide.

-On doit être vraiment dangereux alors !

Gab' étire un sourire carnassier, sous l'oeil perplexe de Victoire et Marius.

-C'est trop cool ! Mais maintenant je meurs de faim.

J'adore ce mec, c'est officiel. Ça doit être quelque chose comme mon double masculin, mon jumeau maléfique. Mais oui ! C'est mon jumeau maléfique.

Un cri d'estomac affamé me tire de mes rêveries, et tous nos regards se tournent vers Marius.

Il rougit. Oh, Monsieur est gêné. J'en profite.

-Ben alors...

-Mademoiselle a faim ? Ricane Gabriel.

Je le fusille du regard, mais mon visage traduit mon amusement. Personne d'autre que moi ne peut se foutre de la gueule de Marius, mais Gabriel est tellement drôle !

Je ricane avec le blond.

Marius se retourne vers Victoire, agacé.

 - Bon, ça te dit qu'on cherche nous-même ? C'est pas que j'ai pas confiance en Blondie et son acolyte qui parle aux placrads, mais j'ai vraiment faim !

Gabriel et moi continuons de ricaner. Je jette un dernier regard à la caméra, et m'apprête à tourner les talons pour de bon, lorque le cercle d'acier projette une lumière bleue.

Qu'est-ce que c'est ? Demande Victoire.

Un hologramme.

Je ne sais pas lequel des deux garçons à répondu, trop occupée à fixer la silhouette de femme qui commence à se distinguer.

La silhouette est à taille humaine. Je tourne autour, médusée. Je m'apprête à essayer de passer mon bras à travers pour voir ce que ça fait, lorsque l'hologramme ouvre les yeux, et commence à parler d'une voix aigüe.

  -Je m'appelle Cassandre Aristée. Mais pour vous ce sera Mademoiselle. Je serai votre interlocutrice directe avec Monsieur. Ne m'interrompez pas jeune homme, ou vous n'en saurez pas plus. Ce qui risquerai de... nuire quelque peu à votre santé mentale comme physique, achève t-elle Gabriel, avec un grand sourire. Durant votre séjour ici, vous allez devoir affronter une série d'épreuves, qui visent à déterminer le plus méritant d'entre vous. Lui seul pourra sortir de nos locaux. Les autres verront leur séjour... prolongé. Je me permets de vous rappeler que vous êtes tous des criminels vivant aux bans de la société et mis à la disposition de Monsieur par le Serveur, afin de faire avancer la science. Donc pas d'exigences de princesse. Des questions ? Non je plaisante, je ne répondrai pas, conclut-elle froidement.

L'hologramme disparaît dans un bruit silencieux, nous laissant seuls avec nos questions.




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