Épilogue
– 6 ans plus tard – Londres –
– Hailee –
Voilà un an que je fais l'aller-retour une fois tous les deux mois entre Londres et New-York et je ne me fais toujours pas au décalage horaire.
Les bénéfices de la boutique ont explosé ces dernières années, si bien que nous avons pris la décision avec Shelly d'ouvrir une seconde boutique à New-York. Nous gérons cette nouvelle boutique, tandis que Marley gère celle de Londres. Shelly et moi l'aidons une semaine par mois chacun notre tour.
Nous avons pris la décision de l'ouvrir à New-York pour pouvoir être proches de nos parents et Teddy, parce que même si je ne pensais pas possible de les pardonner, j'ai fini par accepter une invitation, puis une autre et nos relations ont fini par s'améliorer, il y a encore du chemin, mais je n'ai pas pu renier ma famille.
Je suis arrivée hier soir, si bien que je suis déjà en train d'aider Marley à ouvrir la boutique pour cette nouvelle journée qui s'annonce pluvieuse, pour changer de Londres.
- Comment ça s'est passé depuis la dernière visite de Shelly ? J'interroge Marley.
- Vraiment bien, j'ai eu une demande d'une jeune femme pour un apprentissage.
- Tu lui as répondu quoi ?
- Qu'on n'en prenait pas. Elle me répond.
- Tu devrais la recontacter, je me doute que les semaines où tu es seule doivent être compliquées à gérer.
- Ça m'aiderait, effectivement. Merci beaucoup, je la recontacterai dans l'après-midi.
Je lui souris avant de filer dans l'arrière-boutique pour commencer la composition de bouquets. Marley me rejoint très vite et les premiers clients affluent.
***
Je sèche mes mains sur mon jeans tout en allant dans la boutique où un client vient d'arriver.
- Bonjour ! Dis-je en levant les yeux vers l'homme qui se tient près du comptoir.
Je manque de trébucher en le reconnaissant, cela fait cinq que nous ne nous sommes pas vus, pourtant, je reconnaîtrai Neal entre tous... Il a vieilli évidemment, tout comme moi. Mais il n'en est pas moins beau, je dirais qu'il est comme un bon vin, il vieillit bien.
- Salut. Répond-il en fuyant légèrement mon regard, comme s'il était nerveux.
Savait-il que j'étais là aujourd'hui où était-ce un hasard pur et dur ?
- Que puis-je faire pour... vous. L'interrogé-je, me brûlant la gorge avec ce vouvoiement.
Vouvoiement qui semble lui faire le même effet puisque ses yeux tombent brutalement dans les miens, laissant apparaître toute sa douleur. Je ne cille pas face à la transparence qu'il m'offre.
- Euhm... Oui, j'ai une commande au nom de Neal Evans. Il me répond après de longues secondes de silence.
J'acquiesce et retourne dans l'arrière-boutique où sont mis de côté les commandes, je cherchais un bouquet à son nom, mes yeux tombent sur un magnifique bouquet de roses rouges, simple, mais splendide. Je l'attrape et retourne auprès de lui.
Le revoir ne met pas aussi douloureux que ce à quoi je pensais, en fait, le voir là me rend en colère pour ce qu'il m'a fait, je croyais être en paix avec ça, mais il faut croire que je me trompais fortement...
J'attrape le carnet présent sur le comptoir pour vérifier si tout est bon puis je l'interroge comme s'il n'était qu'un simple client.
- Pas d'occasion spéciale ?
- En fait, si.
Je lève les yeux du carnet pour les poser sur lui, il n'y a rien de mentionné sur le papier, simple oubli de notre part ou de la sienne ?
- Je vous écoute. Dis-je en me déplaçant vers le présentoir.
- Tu ne le trouveras pas là.
Je dégluti, ignorant mon cœur qui bat soudainement plus vite en l'entendant s'adressant directement à moi, sans cacher qu'on se connaît contrairement à moi.
Je l'observe tandis qu'il sort une petite carte de son manteau, il la glisse jusqu'à moi sur le meuble en bois.
Malgré ma curiosité de le lire, j'ignore son écriture et glisse le carton entre deux roses.
Je lui annonce le prix, il paie et je glisse le bouquet pour qu'il soit devant lui. Il le regarde pendant de longues secondes avant de le faire glisser dans le sens inverse.
- Il est pour toi... Me dit-il avant de tourner les talons, sans prendre la peine de m'écouter lorsque je lui dis de le reprendre.
Je soupire, attrape le bouquet et le ramène dans l'arrière-boutique, je le pose brusquement sur la table dans un soupir, attirant l'attention de Marley.
- Il vient tous les jours depuis un mois, refaisant exactement la même commande pour le jour suivant. Annonce ma collègue après avoir reconnu le bouquet.
- Oh... Il est pour moi, c'est pour ça. Dis-je en grimaçant.
- C'était ton voisin sexy, si je me souviens bien.
- Ouais... Et ça, c'est plutôt mal fini. Dis-je sans pour autant rentrer dans les détails.
Je soupire une nouvelle fois puis pousse le bouquet, avec la ferme intention de le mettre à la poubelle sans prendre la peine de lire le carton.
***
Une petite clochette sonne au-dessus de ma tête, mon cœur bat violemment dans ma poitrine alors que j'entre dans le petit café tranquille... Mon regard s'accroche tout de suite à des iris bleus que je connais plus que bien, Neal se lève alors que j'approche de la table où il est installé.
Je suis faible... Il m'a été incapable de ne pas céder à la curiosité, je suis rentrée avec le bouquet, j'ai lu la petite carte écrite de sa main avec une écriture soignée.
"Chère Hailee,
M'accorderais-tu une entrevue ? Si tu te sens prête à discuter, retrouve-moi au Marta's coffee à dix-neuf heures, ce soir.
Neal."
Évidemment, mon premier réflexe a été de jeter la carte en me disant que je n'irai pas, de toute façon, lorsque j'ai lu le papier, il était déjà dix-neuf heures...
Les minutes sont passées et je ne pouvais pas tenir en place, alors j'ai fini par attraper mes clés, je me suis dit qu'il ne serait peut-être plus là, et dans ce cas, il ne tenait pas tant que ça à m'écouter. Ou au contraire, il serait encore là...
Il est donc encore là, il attend que je m'assoie pour se rasseoir à son tour, il semble nerveux de se retrouver face à moi, rares sont les fois où je ne l'ai pas vu sûr de lui.
- Bonsoir. Finit-il par briser le silence.
- Bonsoir. Je lui réponds, je l'admets, assez sèchement.
- Tu... Tu veux boire quelque chose, peut-être ? Il m'interroge, sans faire une quelconque remarque sur mon retard de presque une heure.
Je hoche négativement la tête, m'attendant à ce que notre discussion ne dure pas assez longtemps pour prendre quelque chose à boire.
- Comment va Eden ? M'interroge Neal en croisant ses mains devant lui, sur la table.
Je me rends compte que mes lèvres s'étirent naturellement en un sourire à la mention de mon fils, je me mords alors la lèvre inférieure, refusant d'offrir un sourire à celui qui m'a fait tant de mal.
- Il déteste New-York et préfère la pluie de Londres... Mais il le vit mieux depuis qu'il s'est fait des amis, il a fêté ses quatorze ans avec eux le mois dernier. Expliqué-je.
Je m'arrête là, parce que je sais que je pourrais parler d'Eden pendant encore des heures, et ça serait trop simple pour Neal qui sourit déjà bien trop à mon goût.
- Et toi ? Tu aimes New-York ? Il m'interroge en inclinant légèrement la tête sur le côté.
- Oui, même si je préfère aussi Londres. Mais Shelly préfère New-York, Harriet préfère Londres, d'ailleurs, tu lui parles toujours à Harriet ? Non sûrement pas, tu devais être heureux de partir sans lui donner de nouvelles, puisque ça la faisait souffrir et tu aimes ça, faire souffrir les femmes.
Voilà, je n'ai pas pu discuter avec lui plus de dix minutes sans aborder le sujet, je ne suis définitivement pas prête pour ça, même six ans plus tard, je l'ai encore en travers de la gorge, mais il m'a brisé le cœur qui était pourtant dans un état déjà bien pathétique.
- Hailee... J'ai fait des erreurs, mon comportement n'avait rien de sain et je le sais maintenant. Ça n'a pas été facile, mais je me suis fait aider et aujourd'hui, je ne ferai plus jamais de mal à quiconque.
Je soupire en fermant les yeux, si je suis venue ici, ce n'est pas pour lui reprocher tout ce qu'il m'a fait, il est au courant et je suppose que s'il voulait me voir aujourd'hui, six ans plus tard, c'est parce qu'il a travaillé sur lui-même pour ce qu'il a fait.
- Désolée. Je m'excuse alors, en ouvrant les yeux.
Il reste silencieux quelques secondes, pris au dépourvu par mes excuses.
- Non, ne sois pas désolée. Je mérite cette colère que tu as contre moi et je me suis préparé à ça. Me répond-t-il finalement. Je vois régulièrement Harriet et je lui donne des nouvelles le plus possible. Ajoute-il en réponse à ce que j'ai dit un peu plus tôt.
- Oh... Harriet ne m'a pas dit que vous vous voyez. Dis-je, légèrement troublée.
- Vous ne devez pas beaucoup parler de moi, je suppose.
- C'est vrai.
Peu à peu, je me sens moins en colère contre lui et je sais que ce soir, c'est la dernière fois que nous nous parlons et nous le faisons pour tourner la page.
- Hailee, je suis sincèrement désolé pour ce que je t'ai fait. Je tiens vraiment à ce que tu saches que je t'aimais...
- Mais tu as joué. Le coupé-je tristement, le forçant à mettre les mots sur ce qu'il a fait.
- J'ai joué. Répète-t-il en acquiesçant. Au début, mais ça a changé, j'ai commencé à t'aimer d'une force qui me faisait peur et je m'en veux tellement parce que je nous ai arraché la chance d'être heureux ensemble.
- Il aurait peut-être fallu qu'on se rencontre à un autre moment, mais le mal est fait, Neal.
- Je sais... Murmure-t-il tristement. Tu es heureuse ?
J'accroche mon regard au sien, je ne me retiens plus de sourire et je lui réponds tout en acquiesçant :
- Oui. Et toi, tu es heureux ?
- J'y travaille.
Il y a un moment de flottement dans l'air, nous savons tous les deux que nous en avons fini, que notre histoire est du passé et que nous ne ferons pas partir du futur de l'autre, mais ça ne nous fait pas mal parce que nous sommes en paix avec ça, il est temps pour nous d'aller de l'avant, de refaire nos vies et de la vivre.
- Hailee, je t'aimerai toujours. Je veux que tu le saches.
- Et une part de mon cœur sera toujours à toi. Je lui réponds avant de me lever.
Il est sûr que certaines personnes se rencontrent au mauvais moment, mais il y a une raison pour cela... j'ai été le déclic de Neal pour qu'il se soigne et même s'il m'a fait mal, il m'a aussi appris à faire de nouveau confiance aux hommes.
Nous nous sourions une dernière fois avant que je ne quitte le café, le cœur libre comme l'air, la pluie s'abat sur moi, mais il semblerait que seul le ciel pleure notre ultime séparation.
Fin.
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