– 6 jours plus tard – Londres –

– Hailee –

Je pensais jusqu'ici que le pire réveil qui m'était donné d'avoir, était celui après un tel cauchemar qu'il m'en donnait des crises d'angoisse par la suite...

Mais aujourd'hui, je peux dire sans l'ombre d'un doute que ce fut le pire réveil de ma vie.

Me voilà à trois heures du matin dans ma salle de bain à m'habiller comme un robot en me convainquant que cet appel n'a pas eu lieu.

Que cet appel qui m'a réveillé n'était pas là pour m'annoncer que ma sœur était sur une table d'opération depuis maintenant une heure et que sa vie était en jeu.

Elle pouvait mourir d'un moment à l'autre.

Mon corps se mit à trembler à cette simple pensée.

J'accélère tous mes mouvements, relève mes cheveux dans un chignon désorganisé.

Sentant le carrelage de la salle de bain froid sous mes pieds, je me rappelle que je n'ai pas de chaussettes alors je fonce dans ma chambre, prend la première paire de chaussettes que je trouve et les enfile sans faire attention à leurs couleurs différentes.

Il fallait que je réveille Eden, mais je ne voulais pas l'emmener à l'hôpital...

-Mon ange...Dis-je en le secouant doucement pour le tirer de son sommeil.

Il se tourna vers moi dans un grognement plaintif.

- Il faut que tu t'habilles.

Il se lève et m'écoute sans discuter, pensant sûrement qu'il était l'heure d'aller à l'école.

Je vais dans le salon et fais-les cent pas en attendant que mon fils soit prêt.

- Il fait encore nuit. Dit Eden en entrant dans le salon seulement éclairé par la faible lumière d'une lampe.

- J'ai une urgence avec tata Shelly, je dois aller la voir.

Le visage d'Eden passe de la fatigue à une sorte d'inquiétude d'enfant.

- Je te dépose chez Harriet.

Je sais que je ne peux pas appeler Piper au beau milieu de la nuit et je n'aime pas particulièrement réveiller Harriet, mais je n'ai pas le choix.

Elle comprendra.

J'enfile mes chaussures alors qu'Eden enfile les siennes.

Manteau sur le dos, je sors de chez moi avec Eden dans les bras.

Je toque une première fois à la porte face à la mienne, mais aucune réponse.

Je toque deux fois de plus, mais toujours rien.

Merde.

Merde.

Merde.

- Neal est peut-être réveillé lui ? Propose Eden innocemment.

Je n'avais pas pensé à cette possibilité.

Devant la porte de mon voisin, je lève le poing pour frapper, mais avant qu'il n'entre en contact avec le bois, j'hésite.

D'accord, Neal m'a expliqué le pourquoi du comment.

D'accord, il m'a dit à plusieurs reprises qu'il ne nous ferait jamais de mal.

Mais...

Il n'y a pas de mais qui vaille Hailee. Me dis-je.

Ma sœur est entre la vie et la mort et j'hésite à être présente pour elle à cause de ce que j'ai vécu il y a huit ans.

Huit ans.

Huit ans.

Huit ans.

- Je peux venir sinon ? Dit Eden alors qu'il ne sait même pas où je vais aller.

- Non. Dis-je.

Je refuse qu'Eden passe sa nuit dans un couloir qui sent... l'hôpital.

Je refuse qu'il ne vienne à moins que je sois sûr que Shelly s'en sortira parce que je refuse qu'il voit sa mère s'effondrer en larmes.

Je toque en effaçant cette image.

J'attends un peu avant de toquer une fois de plus bien plus fort cette fois.

S'il te plaît.

S'il te plaît.

S'il te plaît.

- Oui ? Dit une voix encore endormie lorsque la porte s'ouvre.

Neal me dévisage d'abord, mais sa surprise s'efface pour laisser place à l'inquiétude.

- Shelly... elle a eu un accident et... Eden... je ne veux pas que, enfin...balbutie-je sans réussir à former une phrase claire. Harriet ne répond pas. Je finis dans un soupiré.

Alors que Neal essaie de remettre en ordre ce que je dis, Eden me semble de plus en plus lourd alors je le pose au sol.

- Tu pourrais... ?Je demande en montrant mon fils du menton.

Il comprend ce que je lui demande.

- Bien sûr, fonce voir ta sœur. Je vais prendre soin de lui. Me répond Neal.

- Merci... Je t'appelle demain pour... J'abandonne ma phrase avec un signe de main, mais il comprend quand même.

Je le remercie une fois de plus et lui donne Eden avant d'opérer un demi-tour.

Je sens une main m'attraper le poignet pour me stopper. Je regarde par-dessus mon épaule pour savoir ce que Neal me veut.

- Tu peux conduire dans cet état ? Il demande.

- C'est bon, t'inquiète. Dis-je en me dégageant le poignet.

Il me demande du regard si je suis bien sur alors je lui offre un sourire qui se veut rassurant.

***

- Bonsoir. Dis-je en arrivant à l'accueil de l'hôpital.

- Bonsoir, vous êtes ? Me demande la femme face à moi en levant son nez de son ordinateur.

- Je suis la sœur de Shelly Gray. Dis-je.

- Elle est encore en salle d'opération, je vous prie d'aller dans la salle d'attente, un médecin viendra vous informer de l'état de votre sœur. Explique la femme. Je vous conseille d'appeler la famille proche. Elle ajoute avec un petit sourire.

J'acquiesce et marmonne, un « merci ».

Je m'installe sur une des chaises dans la grande pièce qui sert de salle d'attente.

À cette heure-ci il n'y a pas grand monde.

Pour éviter de me poser un million de questions sur le pourquoi du comment cela a pu arriver, je fais ce que m'a conseillé de faire la femme de l'accueil.

Je commence par mon père, sachant que c'est lui qui va sûrement répondre le plus vite en voyant mon nom d'afficher.

Il doit être vingt-deux heures trente à New York... Tout le monde devrait répondre.

Je fais défiler mes contacts jusqu'à tomber sur le nom de mon père.

J'inspire et expire pour prendre du courage et appelle.

La sonnerie sonne quelques fois avant que la voix dure de mon père ne se fasse entendre.

- Allo ? Il demande.

- Salut... Je lui réponds d'une voix non assurée.

- Il y a un problème Hailee ?Demande froidement, mon père.

Je prends le soin de choisir mes mots avant de finalement abandonner toute délicatesse et de déclarer :

- Shelly est à l'hôpital, elle a eu un accident.

- ...

- On ne m'a pas donné plus de détails à part que son état était critique. J'ajoute face à son silence.

- Ta mère et moi prenons les premiers billets d'avion que nous trouvons pour Londres. Dit mon père avant de raccrocher.

Je soupire et retiens un sanglot.

J'ai encore Teddy à prévenir et l'envie est loin d'être présente...

Je fais de nouveau défiler mes contacts et j'appelle sans réfléchir.

Plus vite j'irai, plus vite, ça sera fait.

- Quoi ? Demande Teddy lorsqu'elle décroche enfin.

Surprise qu'elle ait répondu aussi vite, je suis prise de court.

- Oh Hailee. Reprend Teddy, visiblement saoulée.

- Shelly a eu un accident.

- Elle va bien ? Demande Teddy changeant radicalement de comportement.

- On ne m'a pas donné plus de détails à part que son état était critique. Dis-je répétant les mêmes mots employés pour mon père.

- Ok.

Teddy raccroche sans rien dire de plus, je suppose qu'elle n'arrivera en même temps que nos parents demain...

***

Une heure que je suis dans cette putain de salle d'attente sans aucune nouvelle de ma sœur.

N'en pouvant plus, je me lève et vais à l'accueil.

-Excusez-moi, je n'ai eu aucune nouvelle de ma sœur. Dis-je à la femme.

- C'est étrange. Elle me répond.Je vais voir ça, toutes nos excuses.

- Merci. Je souffle en retournant m'asseoir plus loin.

Nous devons être une dizaine dans la salle, je suis ravie d'avoir décidé de ne pas prendre Eden avec moi, l'ambiance put l'inquiétude et la mort...

Un médecin entre dans la pièce avec une tête fatiguée et qui n'annonce pas de bonnes nouvelles, je croise les doigts pour qu'il ne prononce pas mon nom.

- Madame Lee ? Il demande.

Une femme d'une quarantaine d'années se lève brusquement et se dirige vers le médecin.

- Comment va mon fils ? Elle demande la voix tremblante.

Le médecin l'invite à se mettre à l'écart et à s'asseoir.

Nous ne pouvons plus entendre ce qu'ils se disent, mais la mère fond en larmes...Son fils est sûrement mort...

Je détourne les yeux de cette vision horrible et essaie de ne pas paniquer.

Un nouveau médecin entre, une femme d'environ mon âge, elle semble fatiguée, elle aussi, mais différemment de son collègue.

- Madame Gray ? Elle demande.

C'est à mon tour de me lever brusquement.

- Ma sœur va s'en sortir ? Je lui demande.

- Je suis le docteur Berry et je m'occupe de votre sœur depuis son arrivée, elle est toujours au bloc, mais ses chances de s'en sortir sont bien plus élevées qu'à son arrivée. Dit la femme avec un sourire rassurant.

Un poids énorme s'enlève de mes épaules.

Elle est en bonne voie.

Elle est en bonne voie.

Elle est en bonne voie.

- Encore combien de temps doit-elle encore être opérée ? Je demande.

- Je ne serais vous dire, mais reposez-vous, elle ne sortira pas dans l'heure. Dit-elle en posant sa main sur mon épaule.

J'acquiesce et l'écoute, la femme quitte la pièce en me promettant de revenir pour m'informer de l'évolution de l'opération.

À suivre...