Chapitre 2

Bill lui avait proposé de venir à cette soirée, pour le sortir un peu, comme le chien. Bill habitait toujours sa petite chaumière au bord de la mer, avec Fleur. Mais elle était retournée en France pendant quelques semaines pour voir ses parents. Il était resté en Angleterre et voulait en profiter pour passer du temps avec sa famille. Percy s'était senti touché qu'il veuille passer du temps avec lui. Il avait accepté d'aller à cette soirée, qui devait être tranquille, avec des anciens camarades de classe de Bill et quelques collègues dans un bar sur le Chemin de Traverse.

Percy ne savait pas comment s'habiller pour l'occasion, son frère lui avait dit de faire simple. Il avait juste mis une chemise pas trop froissée ni trop stricte et sa veste marron. Bill, en le voyant, fit une petite grimace et haussa les épaules.

« Détends-toi, Perce, ça va bien se passer. »

Bill avait une veste en cuir, son catogan qui énervait tant sa mère et ses cicatrices qu'il ne cachait pas. Il était beaucoup plus à l'aise que son petit frère, beaucoup plus carré aussi, plus beau. Percy se demanda un instant s'il ne ferait pas honte à son frère devant ses amis. Lui, il en avait très peu, quelques collègues lui étaient sympathiques mais il n'était jamais invité aux soirées qu'ils organisaient entre eux, ou refusait d'y participer si on lui proposait, disant qu'il avait trop de travail pour ça. Percy soupira.

Bill ouvrit la porte du bar et aperçut tout de suite sa vieille bande d'amis qui était dans un coin, déjà avec quelques bièraubeurres vides sur la table. Il poussa son frère en lui faisant un petit sourire confiant. 

« Bonsoir tout le monde ! Vous allez bien ? J'ai ramené le petit frère.

– Salut Percy, fit un grand garçon qui se faisait appeler Bobby. Tu veux boire quelque chose ?

– Non merci, rien pour l'instant. »

Percy s'assit à côté de Bill qui commandait deux bièraubeurres, il supposa qu'il y en avait aussi une pour lui. Bobby lui fit un sourire amical. Il avait été à Gryffondor dans la même année que Bill, ils s'étaient déjà croisés plusieurs fois. Il avait d'ailleurs eu l'occasion de voir la plupart des amis de Bill plusieurs fois. Mais il avait l'impression d'être trop différent d'eux pour s'intégrer vraiment au petit groupe. Bobby Parker était batteur dans le club de Flaquemare, il riait fort et tapait souvent du poing sur la table. À côté de Bill, il y avait une fille aux cheveux aussi noirs que son maquillage autour des yeux. Elle avait des bagues à chaque doigt et les faisait cliqueter contre son verre au rythme de la musique que diffusait le bar. C'était Vivian Raywood. Elle faisait déjà peur à Percy à Poudlard car elle le regardait toujours de travers et fumait dans les toilettes de Mimi. Elle dit :

« Alors, Balafré, comment va ton épouse ? Toujours sur le vieux continent ?

– Elle voulait passer un peu de temps avec sa famille. Je devrais la rejoindre quand mes vacances commenceront. En attendant, je profite un peu de ma tranquillité et de ma propre famille, dit-il en ébouriffant les cheveux de Percy qui ferma juste les yeux sans râler plus.

– D'ailleurs, vos parents vont bien ? »

Bobby avait l'air inquiet. Tout le monde savait que c'était dur et c'était dur pour beaucoup de familles. Bill exposa la situation brièvement et profita de l'arrivée des bièraubeurres pour changer de sujet. Il discuta un peu avec Vivian, puis avec le gars à côté d'elle dont le prénom ne revenait pas à Percy. Ce dernier soupira en commençant à siroter sa bièraubeurre qu'il n'avait pas demandée et que son frère lui offrait quand même.

Bobby tenta de lui parler un peu de son travail, de lui poser quelques questions mais il arrêta rapidement, sûrement un peu ennuyé par les réponses courtes du garçon à lunettes. Deux autres personnes les rejoignirent quelques minutes plus tard, dans de grands éclats de rire, contents de voir Bill qui ne sortait plus souvent depuis qu'il était marié. Un garçon blond pas très épais et un peu pâle tapa le dos de Bill et serra la main de Percy en lui souriant. C'était un dénommé Otto qui travaillait aussi au Ministère. Il était avec sa petite-amie, aussi pâle que lui mais avec quelques tâches de rousseur, qu'il ne connaissait pas. Elle demanda avec un fort accent Irlandais :

« Il manque encore du monde, non ?

– Oui, répondit Bill en fronçant les sourcils. Je crois que Laurel et Audrey ont dit qu'ils passeraient.

– C'est vrai ? Ça fait longtemps qu'on n'a pas vu Laurel, s'exclama Bobby. Vous savez si son frère va mieux ? »

Mais personne n'avait l'air de savoir. Percy ne se sentait pas très à l'aise. Bill lui souriait de temps en temps, en essayant autant que possible de lui tendre des perches pour qu'il participe aux conversations mais il ne voulait pas tellement faire d'efforts. Il hésitait même à sortir le livre qu'il avait glissé dans sa poche mais il savait que ça déclencherait de nouveaux rires puissants de Bobby et un regard sombre de Vivian.

« Tiens, voilà Audrey ! »

Otto fit un grand signe pour indiquer leur position. Percy tourna la tête pour la chercher du regard. Il n'avait aucune idée de qui était cette Audrey. Il découvrit un visage familier et un sourire toujours aussi éclatant. Elle avait mis une jupe noire, un petit haut gris et une veste en cuir rouge. Elle avait détaché ses cheveux qui lui tombaient en cascade sur les épaules. Elle le vit et ne s'arrêta pas de sourire. Percy eut l'impression que sa bièraubeurre s'agitait dans son estomac. Il n'avait jamais pensé qu'elle pouvait connaître Bill, pourtant, elle lui fit la bise en blaguant sur ses cicatrices et fit le tour de la table pour aller serrer dans ses bras la copine d'Otto. Elle ne s'approcha pas de Percy mais s'installa en face de lui et le regardait en souriant de temps en temps. Percy n'osa plus lever les yeux de son verre. Que faisait la libraire en face de lui dans ce bar sombre avec tous les amis de Bill ? Il sentait que ses joues étaient marquées par la gêne. Il fit semblant d'avoir chaud pour donner une autre explication à ses rougeurs.

« Alors, Audrey, quelles sont les nouvelles ? demanda Bobby.

– Eh bien, mon grand-oncle se fait de plus en plus vieux alors je vais de plus en plus souvent l'aider, ça me fait une petite rentrée d'argent et ça m'occupe bien. »

Elle adressa un sourire complice à Percy qui ne le remarqua pas parce qu'il était soudainement occupé à étudier de près les petits défauts de la table. Bobby hocha la tête et Vivian se demanda comment Audrey faisait pour passer son temps dans un cagibi poussiéreux avec un vieux. Audrey haussa les épaules et défendit sa petite librairie en riant. Ce n'était pas si poussiéreux que ça et elle avait toujours beaucoup aimé les livres. Et le vieux, comme disait Vivian, était la seule famille qui lui restait alors elle n'avait pas l'intention de le laisser seul. Percy releva un peu la tête, il croisa son regard et fit mine de regarder le poster derrière elle. Elle sourit encore plus largement.

Quand tout le monde commença à se lever pour partir, Percy se sentit à nouveau bête parce que Bill paya pour lui et qu'il ne voulait pas donner l'impression d'être radin ou sans le sou. Mais Bill insistait, il resta quelques instants discuter avec le barman pendant que le reste de la petite troupe se disait au revoir sur le trottoir. Percy avait les poings dans les poches de sa veste et saluait Bobby, toujours un peu embarrassé. Il entendit derrière lui un petit toussotement et se retourna, étonné et toujours un peu rouge mais la lumière des lampadaires empêcherait peut-être que ça ne se voit de trop.

« Alors, Monsieur Weasley, dit-elle avec un sourire qui lui faisait plisser les yeux. Avez-vous lu le roman de Verda Mourowky ? »

Percy, un peu gêné, passa la main dans la poche intérieure de sa veste et en sortit le livre en question. Il esquissa un petit sourire.

« Je suis en train de le lire, répondit-il avec une petite voix. Je l'aurais sans doute fini demain.

– A demain alors. »

Elle le détailla du regard. Percy regarda autour de lui, personne ne semblait s'en préoccuper, de lui et de son livre. Audrey attendit que Bill revienne pour lui dire bonne nuit et elle s'en alla dans la ruelle qui menait à sa petite librairie. Bill passa un bras autour des épaules de son frère, salua tout le monde et marcha avec lui pour le raccompagner. Il n'avait pas dû voir que Percy se retenait de sourire pendant tout le trajet. Il lui dit :

« Bon, ce n'était pas si terrible que ça ! N'hésite pas à venir quand tu veux, Perce, on va sûrement faire quelque chose la semaine prochaine avant mon départ pour la France. Ça me fait plaisir de faire des choses avec mon petit frère. »

Il lui faisait sûrement pitié. Percy hocha la tête avec un sourire toujours un peu retenu. Bill transplana dans l'entrée de son appartement, pour retourner chez lui. Percy ouvrit la porte de sa petite habitation pas très glorieuse. Il enleva rapidement sa veste et passa le reste de la soirée à lire. Elle lui avait dit « à demain », il voyait encore son sourire et sa petite mèche de cheveux en travers de son front qui se soulevait doucement avec le vent. Il souriait bêtement en tournant les pages de son livre.

Le lendemain, il se pointa à la librairie en sortant du boulot. Il avait mis ce qu'il estimait être sa plus belle chemise, un peu sans faire exprès, et il s'était peigné. Ses collègues l'avaient remarqué alors à midi, il s'était décoiffé pour se donner un air plus naturel. Il avait gardé contre son cœur, dans sa veste, le dernier Verda Mourowsky. Il l'aperçut de loin, elle était dans les marches du petit escalier, à lire un vieux livre. Il n'y avait personne d'autre dans la librairie. Pas d'étudiant en vue, même pas de grand-oncle fatigué. Elle leva la tête de son livre et lui adressa un sourire en le reconnaissant.

« Bonjour, Monsieur Weasley, dit-elle de sa voix joyeuse.

– J'ai fini le Verda Mourowsky, annonça-t-il après une grande inspiration.

– Vous avez aimé, je suppose. »

Elle se leva en reposant son livre sur le comptoir. Percy avait du mal à détacher ses yeux de son sourire, lui-même souriait un peu. Il trouvait que son nom dit avec sa belle voix sonnait bien. Il hocha la tête en touchant du bout du doigt le livre dans sa poche pour se donner quelque chose à quoi se raccrocher.

« Je ne savais pas que tu ... Vous étiez une amie de Bill. »

Elle sourit à son hésitation. Elle le vouvoyait sans problème mais il avait du mal à faire de même. Il aurait bien aimé qu'elle le tutoie comme elle tutoyait l'étudiant. Elle haussa les épaules, faisant rebondir ses cheveux bruns. Mais elle ne répondit rien de plus. Elle l'observait simplement, comme elle l'avait fait une bonne partie de la soirée la veille. Percy chercha quelque chose à dire, à faire, n'importe quoi pour l'empêcher de fixer une seconde de plus ses lèvres souriantes. Il tourna la tête vers le rayon le plus proche et s'y réfugia. Elle resta accoudée au comptoir, à le regarder se balader maladroitement entre les quelques étagères. Il trouva enfin un angle d'où elle ne pouvait pas le voir et y resta un instant en respirant profondément. Il prit un livre un peu au hasard dans le rayon et réapparut pour le poser sur le comptoir.

« Vous l'avez déjà lu, celui-là, fit remarquer Audrey en se retenant de rire.

– C'est pour offrir, marmonna Percy.

– C'est quatre mornilles. »

Il posa les quelques pièces argentées sur le bois du comptoir. Il ne savait pas si elle avait remarqué que sa main tremblait légèrement. Il attrapa le livre et s'enfuit de la boutique. Il eut envie de jeter le livre dans le caniveau, ou de s'assommer avec. Merlin, il avait tout fait rater. Elle se moquait définitivement de lui. C'était insupportable. Il rentra chez lui en traînant des pieds. Mais sur le chemin, la pensée qu'elle ait retenu tous ses achats et qu'elle puisse dire quel livre il avait lu ou non le fit sourire doucement. Elle était donc attentive à ses faits et gestes. Il ferma les yeux en refermant la porte derrière lui. Seul dans son petit appartement, il se jeta sur son lit et vit son sourire briller dans le noir de ses paupières. Il ne voyait plus que cela et ça le ravissait.



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