98) Un bon frère
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Cliver sa conscience, éteindre ses pensées, seulement agir.
Bruits de pas, sa silhouette fine et horipilante qui se détache de la pénombre, le grincement des barreaux qui s'ouvrent.
Flora tendit le bras vers le fidèle d'un geste autoritaire et décidé. Il eu un mouvement de recul : il était évident que sa Reine le terrifiait.
Flora n'arrivait pas à comprendre comment elle pouvait faire trembler un mage noir, loup garou de surcroît. Sa réputation était légèrement sur-cotée.
Les pulsations rapides de son cœur palpitaient contre ses tempes et résonnaient contre les os de sa mâchoire.
Il n'y avait plus qu'un bourdonnement strident qui fulminait dans son esprit éteint.
Par les gestes, Flora fit comprendre à l'homme qu'elle le suivrait volontairement. Ce dernier fit un pas hors de la cage, s'assurant que la prisonnière s'éxecute.
Ce fut son dernier acte avant de se retrouver au sol après un coup violent et surprenant à la tête. Comme Victor t'a montré, comme Victor t'a montré...
Tout d'une machine de guerre, plus rien d'un humain ; Flora répéta une première prise d'immobilisation et l'instant d'après, elle poignarda à plusieurs reprise le cou tendu du fidèle qui étouffa un cri. Du sang gicla des artères, recouvrant la physionomie de la jeune femme d'un liquide épais, gluant et chaud dont l'odeur la ramenait au pire moment de sa vie.
Ce fut elle qui hurla, incapable de retenir ce déferlement de rage et d'impuissance, aussi de désolation.
Son bras effectuait le mouvement de façon itérative. Elle n'arrivait plus à l'empêcher, comme si son bras n'était plus partie intégrante de son corps.
Flora reprit conscience alors que le sol était devenu rouge et que l'air empestait le fer.
Le silence fut.
Elle cessa d'hurler. Des larmes dévalaient ses joues. Elle hoqueta plusieurs fois, choquée du cadavre mutilé qui gisait sous ses yeux.
C'est moi. C'est moi qui ai fait ça. Je l'ai... tailladé en pièces.
Étourdie, Flora se releva difficilement sur ses deux jambes cotoneuses et vacillantes. Elle se tenait au mur pour ne pas s'effondrer, le regard rivé sur sa victime.
Même l'homme le plus impur et abjecte au monde ne méritait pas une fin aussi violente et horrible.
Son cou avait un aspect de viande hachée. Des bouts de chaire avaient explosées un peu partout, notamment sur ses chaussures et sa cape.
Le débris d'assiette qu'elle tenait encore entre les mains était rouge écarlate et lui donnait envie.
Les narines dilatées, le cœur en folie, un hurlement interne incessant, Flora enfonça la pointe sur son point vital à elle, tremblante de la tête aux pieds.
Un autre hurlement lui échappa et le courage l'abandonna : elle laissa retomber la porcelaine par terre quu s'exposa à son tour en d'autres petits bouts inexploitables.
Avec un rien, elle avait réussit à faire une arme blanche et tuer un homme.
Voler une vie.
Comme on avait volé la sienne.
Celle de son bien aimé père.
Celle de son précieux meilleur ami.
Ses genoux se dérobèrent et Flora n'eu même pas le réflexe ou l'intention de se rattraper. Elle s'éclata contre les dalles sanglantes, seulement apte à pleurer, pleurer, pleurer.
Un tourbillon avalait son cerveau. Son cœur brûlait douloureusement. Ses organes internes semblaient fondre et se dissoudre.
Les morts n'avaient rien à lui envier.
Rien.
La vie qu'elle menait depuis l'après guerre était insupportable.
Et elle n'avait même pas le courage d'y mettre un terme car, malgré le chaos qui la réagissait, une maigre lueur d'espoir brillait encore : la voix de Mattheo qui chuchotait à ses oreilles les louanges d'une autre vie.
Finalement, Flora vomit. Principalement de la bile car son estomac était vide et retourné.
Il fallait continuer. Sans savoir comment, ni par quelle force, ni par quel moyen, Flora s'était retrouvée dans l'antre de Greyback.
Son odeur nauséabonde empestait les tissus et le bois.
Par chance, la nuit était tombée et l'étage inférieur dans lequel évoluait Flora était plongé dans le noir. Au parfait hasard, elle tâtonnait à la recherche de sa baguette.
Elle butta contre un poids au sol et se rétama au sol, emportant dans sa chute une chaise. Le fracas du meuble secoua toute la taverne abandonnée et Flora retint son souffle, les larmes aux yeux.
Si Greyback était présent, en ce moment même à l'étage, elle signait sa dernière heure.
Rien ne se passa.
Mais sous son corps étendu ventre contre terre, Flora sentait une drôle de texture. Quelque chose de rebondi, de puant, de gluant. Elle toucha du bout des doigts, incertaine.
Quelle était cette chose sur le sol, au beau milieu du passage ?
Incapable de discernement, de logique, de bon sens, pas après un assassinat aussi féroce, elle glissa sur la chose qui gisait et continuait la fouille.
Finalement, sa baguette se trouvait posée sur le comptoir. Il n'y avait rien d'autre que cela et un pichet de sang.
"Lumos."
Curieuse, Flora retourna au point de sa chute.
Des boyaux. Des morceaux de chaire. Une petite main d'enfant. Un estomac ouvert en deux et vidé.
C'était le corps mutilé d'un petit garçon irreconnaissable.
Son cœur ne battait plus, son souffle était coupé.
Un grognement retentit de l'étage, un bruit de griffe éffleurait le parquet.
Flora ravala honteusement son vomi et prit ses jambes à son coup, mettant de côté la discrétion. Un shot d'adrénaline lui fut envoyé par son cerveau. Elle ne comprenait pas son instinct de survie légendaire malgré son penchant pour la fin.
En défonçant la porte d'entrée, ses jambes courraient comme son bras avait poignardé : instinctivement, en dehors de toute maîtrise.
Flora allait si vite qu'elle en perdait haleine.
Au loin deux tâches volantes fonçaient vers elle. Sans ne rien y comprendre, Flora hurla à l'aide à l'attention de ses deux tâches, priant pour que ce ne soit pas des fidèles.
Plus ils se rapprochaient, plus ils en avaient l'air mais Flora continuait de hurler, de courir, d'agiter les bras.
Au fond d'elle, elle le savait.
Elle le savait car elle se jeta sur le balais de gauche et fut réceptionné par deux bras qui la rattrapèrent dans sa chute.
Elle s'était jeté contre Mattheo, qui avait sauté immédiatement de son balais, horrifié et rongé d'inquiétude.
L'état de la jeune femme était plus que préoccupant. Le regard que son cousin et lui s'échangèrent le signifiaient. Un regard chargé de terreur.
Flora explosa en sanglots contre le torse de Mattheo de la même façon que l'assiette et les artères du lycanthrope avaient explosés.
Il la tenait fermement contre lui, son uniforme se recouvrant de sang, de chaire, d'imondes fluides en tout genre.
En prenant le visage de Flora entre ses mains gantées, en plongeant son regard dans le sien, éteint et sénile, il comprit que cette épreuve avait été celle de trop.
Celle qui l'avait brisée pour de bon, sans retour possible. La séquelle irréversible.
Le sang séchait sur le visage de Flora, croûtant dans les creux de sa propre cicatrice.
Mattheo s'empêcha durement de fondre en larmes à son tour.
Il avait faillit.
Boulversé, il jeta un autre regard de détresse au garçon à côté de lui.
Draco aida Flora à se maintenir debout, et il l'assista pour qu'elle monte sur son balais.
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Cette soirée là fut la pire de toute l'aire de sa gouvernance.
Être roi demandait tellement de compétences : garder la tête froide, une neutralité à toute épreuve et une stratagème inébranlable.
Mattheo en était capable mais les cris et les sanglots de Flora, à l'étage, le rendait fou d'inquiétude.
Draco et lui avaient passé la soirée à faire des allers-retours entre le salon et la chambre conjugale.
Mattheo n'arrivait pas à se résigner au fait qu'il faille endormir Flora de force au risque qu'elle se blesse sérieusement. Sa crise d'explosion durait depuis des heures et rien ne semblait l'épuiser. Il avait envoyé Draco pour se faire.
Le roi des Ténèbres n'était pas capable de voir sa bien-aimée souffrir autant, surtout qu'il s'estimait responsable.
Pendant longtemps, Mattheo s'était trouvé des excuses : Tom, Bellatrix, même Appoline.
Ce soir-là, il se rendait à l'évidence : le seul fautif n'était que lui. Il était le cœur, la raison même de ces massacres. Son existence expliquait tout.
Cette réflexion, il se l'était déjà faite alors qu'il n'était qu'un gamin étudiant à Poudlard. Mattheo avait préféré garder Flora à distance, par tous les moyens, de l'ignorance au sort de l'Oubliette, pour que jamais une telle situation ne se produise.
Il ne s'était jamais imaginé en arriver là.
Au bord du gouffre.
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Ses lèvres tremblantes trahissaient la neutralité de son faciès.
Draco se jurait, en voyant Flora agrippée aux rideaux, hurlante et pleurant, encore recouverte de sang et de chaire, qu'il protégerait Astoria au prix de sa vie.
Que jamais sa femme ne toucherait le fond comme Flora était en train de le faire.
Avec pitié, Draco s'approcha à pas feutrés vers son ancienne camarade d'école, pliant les genoux pour se mettre à la bonne hauteur.
"Flora ?"
Le visage ruisselant, elle se retourna, les yeux bouffis, le blanc de ses orbites injectés de sang.
Draco lui montra la boîte de médicaments. Pas besoin de potions concoctées maison, cette fois-ci.
"Tu devrais en prendre un... ou deux. Ça te calmera."
Elle renifla bruyamment en rassemblant ses genoux contre sa poitrine, les cheveux en bataille.
"Non merci."
Adossée au mur du manoir, haletante, son cerveau lui imposait les images détaillées du fidèle charcuté et de l'enfant depecé. Son envie de hurler lui reprit. Tout son corps et toute son âme souffrait le martyr. Elle n'avait plus la force d'enjamber les cadavres dont elle avait otté la vie.
Flora posa son regard sur Malfoy.
"Mattheo est fâché ?
- Non, non, pas du tout."
Elle s'imaginait qu'avoir tué un fidèle allait lui causer de gros ennuis.
"Il voudrait vraiment que tu prennes ça, insista Draco en glissant les pilules dans les mains, ça ira mieux demain.
- Ça ira mieux demain ?"
Elle était confuse, perdue, pétrifiée. Son air fragile, juvénile et brisé prenait le dessus sur tout le reste. Flora joncha sérieusement les deux pilules qui roulaient dans sa paume. La fatigue la terrassait mais trouver le sommeil après de telles épreuves lui semblait impossible.
"Oui, ça ira mieux, murmura Draco qui n'y croyait pas sincèrement. Mattheo voulait vraiment que tu les prenne."
Ce fut l'argument qui la poussa à avaler les deux d'un coup. Flora déglutit péniblement.
Un silence s'installa pendant lequel la jeune femme ferma les yeux, sa tête trop lourde reposant contre le mur. Elle savourait presque ce moment de calme.
Draco la regardait miséricordieusement. Il se rendait compte qu'il devait à son faux-frère les excuses les plus plates d'avoir contribuer à faire de sa vie un enfer.
Draco n'avait pas toujours été le plus tendre des frères. Sa jalousie l'avait rongée jusqu'à l'os. Il avait envié Mattheo, son statut, son rôle, son nom sans se rendre compte de ce que cela impliquait réellement. Son quotidien était un calvaire. Flora et lui ne vivaient pas : ils survivaient. Et la survie n'avait rien d'enviable.
Par dessus ce silence lourd de bruit, la voix de Flora se remit à trembler lorsqu'elle chuchota :
"Jure-le moi que tu ne le trahiras pas."
Draco en resta muet, la bouche asséchée et entre-ouverte.
Ses paupières s'entre-ouvrirent pour dévoiler ses ambres humides. Elle lui tendit la main.
"Jure-le moi.
- Flora, tu devrais aller te coucher.
- Un serment inviolable et je vais me coucher."
La porte s'ouvrit, faisant sursauter la jeune femme. La tête de Mattheo apparue dans l'entre-baillement de la porte puis il osa enfin pénétrer sa propre chambre.
Sans trop savoir pourquoi, cette gueule d'ange fit pleurer à nouveau Flora.
"Tout va bien ? Tu devrais te coucher, Flora."
L'interessée opina en essuyant ses larmes silencieuses d'un revers de manche.
"C'est ce que je lui suggérais, informa Draco en se relevant. Elle a prit les médicaments."
Mattheo tendit la main à Flora qui s'en saisit pour se relever. Elle titubait, encore éprouvée.
"Je ne veux pas rester seule."
Le brun retirait déjà sa cape pour se faufiler sous les draps avec elle, déterminé à l'apaiser quoi qu'il en coûte.
Mattheo se souvenait très bien de ce qu'il avait apprit durant le procès : Flora avait voulu en finir. La douleur qui térassait son merveilleux visage lui tordait l'estomac d'appréhension. Il avait peur ; peur que les médicaments ne la soulagent pas, peur que son amour soit insuffisant contre le gouffre de sa souffrance.
"On doit... parler de beaucoup de choses, tenta Draco sur la réserve.
- Parlez ici, je m'en moque."
Le successeur se surprit à rougir en s'imaginant dans ce lit.
"Je vais me... me... me débarbouiller."
Purifier aurait été le terme le plus exact.
De retour dans la chambre, Mattheo occupait déjà son côté du lit, à l'affût du retour de Flora, n'écoutant qu'à peine son cousin qui s'était seulement permis de s'assoir au bord du lit.
Elle plongea dans le lit, reposant sa tête contre le torse de Mattheo dont les doigts jouaient déjà avec ses cheveux. Flora s'éfforçait de fermer les yeux, de ressentir le moindre effet des somnifères, de se recharger du contact de Mattheo contre elle.
Qualifié de danger public, Mattheo était son paradis, sa personne ressource. Son ange.
Un sourire imperceptible se dessina sur ses lèvres rêches. Elle ressera son étrinte.
"Je suis désolée."
La conversation avec Draco se cessa immédiatement, Mattheo baissa la tête vers la femme allongée tout contre lui.
"De quoi es-tu désolée ?
- D'hurler depuis des heures.
- C'est terminé, sussura Mattheo, c'est terminé ma princesse.
- Je t'ai fait peur.
- Oui, avoua t-il le visage assombrit, c'est moi qui suit désolé.
- Je t'aime, Mattheo."
Gêné, Draco regardait ses pieds battants, le bout du nez rougit. Un rire vrombrit dans la poitrine de Mattheo.
"Je t'aime aussi, Flora."
Il avait eu la décence d'épargner son cousin et de lui souffler contre l'oreille, comme un cadeau ou du réconfort.
Ainsi, Flora referma les yeux, défoncée par les médicaments, enivrée de l'amour qu'elle recevait. Ces trois petits mots et cet immense sentiment avaient beaucoup de pouvoir.
De là, la conversation purement politique reprit. Les deux cousins parlaient en même temps, réfléchissaient à voix haute. C'est Flora qui trancha, à moitié endormie contre son amoureux :
"Il ne faut pas tuer Greyback. Nous avons besoin de son armée pour le jour où nous attaquerons Greengrass. Sans lui, on part avec un atout en moins."
Un sourire se figea sur les lèvres de Mattheo.
"La reine a tranché.
- Demain, Malfoy, nous élaborerons une stratégie pour Daphnée.
- D'accord, acquiesça l'interessé.
- Tu devrais te reposer demain.
- Finissons-en au plus vite."
Elle ne leur raconta pas sa mésaventure, l'assiette, le meurtre, sa découverte lugubre. Il était préférable que personne n'en sache jamais rien.
Les remords de Flora étaient immenses. Elle jugeait son acte de répugnant même si nécessaire et désirait qu'aucun d'eux ne la voit comme une tueuse.
Finalement, Flora trouva les bras de Morphée en ceux de Mattheo et son cœur s'apaisa. Elle sentait encore le bout de tranchant qu'elle avait appuyée fort contre sa trachée. Les doigts de Mattheo carressaient ses cheveux et ce simple geste la faisait aller mieux.
"Tu avais raison, je l'ai détruite, souffla Mattheo dont les yeux étaient rivés sur Flora endormie.
- Je me suis trompé."
Étonné, le garçon allité leva la tête vers l'autre.
"Tu l'as sauvé. C'est ça qui la préserve."
Draco désignait le lit, l'étrinte, les médicaments. Cette attention particulière, cette douceur et tendresse qui n'avaient pas toujours été de mise. Mattheo avait apprit à l'être, avec le temps. Pour Flora.
"Je suis désolé, Mattheo."
Le poids sur le cœur de Draco se fit plus lourd malgré ces paroles sensées être libératrice. Ses prunelles se gorgèrent d'eau, un nœud nouait ses tripes entre elles. Il frotta son visage et ses yeux pour ne pas céder à l'envie de pleurer. La nuit était déjà bien entamée et lorsque la fatigue venait, les émotions ne se cachaient plus.
Mattheo se raidit de surprise, ses doigts se stoppèrent dans les cheveux mi-blond mi-chatain de Flora -le naturel reprenait le dessus aux racines. Perturbé, il fut incapable de formuler une réponse et resta pendu aux fines lèvres de son cousin.
"De ne pas avoir été un vrai frère, quelqu'un sur qui tu pouvais compter. Je suis un véritable connard."
L'ambivalence, la pendule qui oscille entre le bon et le mauvais. Draco lui avait mené la vie impossible mais il avait aussi été cet enfant qui l'aidait à rentrer à la maison quand son propre père avait mit Mattheo à la porte avec une gamelle d'eau, l'insultant de chien.
Mais ils n'étaient pas vraiment frères, après tout.
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