14) Joyeux Noël, Mattheo
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Noël n'avait jamais été vraiment magique au monde des sorciers. Dans l'immensité du manoir Malfoy, le silence régnait. Tout était si calme. Tout était à sa place. Pas le moindre désordre, pas la moindre poussière, pas le moindre signe de vie. À croire que des fantômes y habitaient.
Des bougies crépitaient. Mattheo regardait la flamme s'agiter pourtant, il n'y avait pas le moindre courant d'air. Ses mains étaient froides à ne plus sentir ses doigts. La neige avait recouvert le jardin, sa blancheur pure illuminait la pièce par les immenses baies vitrées.
Draco lui jeta un regard, un regard inquiet. La gorge sèche, il osait à peine bouger de sa chaise en bois noble. Tous les deux le savaient : quelque chose se préparait.
Enfin, du brouhaha se fit retentir. Des bruits de talons contre les dalles de carrelage en marbre, des brides de discussion et un parfum de cannelle boisé embauma la pièce.
Instinctivement, Mattheo se leva et ouvrit ses bras. Jamais il n'avait su ce qu'il ressentait envers sa propre mère. Fraîchement échappée d'Azkaban, elle avait l'air indomptable. Bellatrix accepta les bras tendus de son fils et plaqua ses deux mains gelées contre son visage.
« Que tu es beau ! Tu ressembles tellement à ton père ! »
Narcissa et Lucius firent à leur tour leur entrée dans le salon. Ils avaient l'air grave, voire inquiet. Draco eu du mal à respirer en regardant sa tante enfoncer ses mains crochues dans les joues de Mattheo.
« Mère.» salua Mattheo la voix tremblante.
Bellatrix balaya d'un geste de main les mondanités de Mattheo, n'appréciant pas non plus cette appellation.
Narcissa se précipita auprès de Mattheo pour le serrer sincèrement contre elle. Ce pauvre enfant lui faisait mal au cœur. Son neveu resserra ses bras autour des côtes de Narcissa, enfonçant son visage dans son long trench noir, comme un enfant. Elle sentait le coton et la lavande. En même temps, Lucius déposa sa main sur l'épaule de son fils, soutenant son regard.
Cette visite ne relevait pas de la simple courtoisie. L'heure était venue. Bellatrix se laissa tomber dans un immense fauteuil de cuir brut, croisa les jambes et balança la tête en arrière comme si elle était épuisée. Mattheo la regardait se mouvoir sur ce fauteuil, la boule au ventre.
Il ne savait rien de sa mère. Pourquoi semblait-elle si épuisée ? Que faisait-elle de ses journées, de ses nuits ? À quoi ressemblait sa vie, son passé ? Il n'en avait aucune idée. Pourtant, au fond de lui, il était abasourdi de regrets. Celui d'être incapable de l'aimer comme on aime une maman, d'avoir peur d'elle. Bella n'avait, en effet, rien d'une mère douce et réassurante, ni protectrice, ni sécurisante. Dans ses pires cauchemars, c'était elle qu'il se figurait en tête d'affiche.
« L'heure est venue, mes garçons. »
Sa voix stridente faisait l'effet d'ongles qui griffaient du verre. Draco se raidit, Mattheo lui jeta un regard affolé. Lucius resserra sa main autour de l'épaule de son fils qui tressaillit. Draco était préparé. Mattheo ne l'était pas.
« Vous allez enfin rencontrer notre Maître ! Chantonna Bellatrix. Pour la cérémonie des nouveaux Mangemorts ! Tu seras à l'honneur, Mattheo. »
Son sang se figea. Le bourdonnement explosa à nouveau dans son cerveau, poignardant ses tympans. La bouche sèche, Mattheo blêmit, les jambes flageolantes. Tous les regards étaient braqués sur lui. Encore. Une bête de foire.
Narcissa lui prit la main avec vivacité comme pour le secouer un coup. Le jeune homme semblait sous le choc.
« Et si... je refuse ? » Bafouilla Mattheo.
Le pâle visage de porcelaine de Narcissa se décomposa, Lucius détourna la tête d'un rictus désapprobateur alors que Bellatrix pouffa de rire, la main devant sa bouche recouverte d'un rouge écarlate.
« Penses-tu avoir le choix ? »
Son cœur battait si fort. Mattheo avait l'impression de vivre ses derniers instants. Sa génitrice s'était relevé de son assise, menaçante, le regard sombre et terrifiant.
La folie se lisait dans ses traits. Sans limites, elle était prête à tout pour Lui. Une violente nausée lui prit alors que Bellatrix se planta devant lui, baguette pointée vers ses points vitaux.
« Le Seigneur se fera un plaisir de parfaire ton éducation, vaux rien ! S'énerva Bellatrix en tapant du pied. Oh ! Non ! Je m'en chargerai. Il t'aurait déjà abattu, à ma place. »
Mattheo se tourna vers Narcissa, le regard suppliant. Il ne voulait pas être des leurs.
« Regarde moi ! »
Bellatrix avait hurlé en lui assénant une baffe monumentale qui raisonna dans tout le manoir. Draco sursauta, les lèvres tremblantes.
« Je suis ta mère ! C'est moi que tu dois regarder. »
Douloureusement, Mattheo obéit. Narcissa se permit d'attraper sa sœur par l'épaule pour l'éloigner du pauvre garçon. Bellatrix retrouva son calme en croisant le regard soutenant et plus apaisé de sa soeur.
« Je vais m'occuper de toi, mon garçon.
- Je refuse, cracha Mattheo.
- Penses-tu... »
Elle allait perdre le contrôle cette fois encore. De manière sénile, Bellatrix s'agita dans toute la pièce, pestant dans sa barbe. Ses cernes s'étaient subitement creusées. Le sang dans ses veines semblait être fait de feu tant elle se sentait bouillir. Mattheo était tétanisé.
« Je me calme, je me calme, répétait-elle en boucle.
- Ce n'est qu'un enfant, argumenta Narcissa.
- JE SAIS, hurla Bellatrix en se retournant vers sa sœur. Un enfant mal élevé, mal poli, sans aucunes valeurs ! C'est de ta faute, Cece ! Tu l'as trop couvé, c'est devenu un sale gosse ! »
S'était trop pour lui. Mattheo sentait également ce feu dans ses veines, cette folie lui creuser le visage et prendre possession de lui.
Impulsivement, il se leva et attrapa sa propre mère par les épaules, voulant l'immobiliser. Il planta son regard aussi froid que ténébreux dans les deux identiques reflets de Bellatrix. Satisfaite de cette rage, de cette haine qui suintait de chacun de ses pores, un immense sourire se placarda sur son visage. Les narines dilatées, Mattheo trancha :
« Je. Refuse.
- Alors Il te tuera ! S'esclaffa Bellatrix. Quel gâchis ! Regarde-moi ça, ton potentiel ! »
Comme plus tôt, elle caressa le visage de son digne fils. Ses émotions négatives le contrôlaient. Fait de haine, de peur, de rage, il était parfait parmi ce chaos.
Le regard de l'instable sorcière s'adoucît, elle voyait enfin en son fils la part de son héritage. Sa filie furieuse, bestiale et pulsionnelle. Bellatrix glissa sa main dans celle de Mattheo qui eu un frisson de répulsion.
« Viens avec moi, mon fils, je vais m'occuper de ton éducation. Un enfant qui n'est pas sage est un enfant qui doit être puni ! N'est-ce pas, ma soeur ? »
Narcissa, la main sur son propre cœur qui battait trop vite, ne savait que faire pour protéger Mattheo. Elle avait fait tout son possible toute sa vie. Le regard abattu de Mattheo lui fit l'effet d'un coup de poignard dans le cœur. Sa sœur était bien moins cruelle avec Draco qu'avec Mattheo. Il fallait dire qu'un restait plus à sa place que l'autre. Elle regardait sa sœur tirer de force sa progéniture hors de son manoir ne sachant pas quel sort elle réservait à Mattheo. Narcissa courra derrière eux.
« Bella ! Bella ! »
L'intéressée se retourna, ses ongles enfoncés dans la chaire de Mattheo, l'obligeant à la suivre.
« Oui je vais te le ramener, brailla la brune, ne sois pas si Sainte. »
D'un coup de baguette, Mattheo et Bellatrix avaient disparus de l'allée sombre et glissante du manoir.
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Cette soirée avait un goût amer. Un goût différent. Il manquait autour de cette table une personne finalement plutôt importante. Le feu de la cheminée crépitait dans le silence du manoir. Les épines du haut sapin tombaient de leurs branches. Narcissa avait quand même mit une assiette de plus, au cas où. Draco ne mangeait pas, l'air préoccupé, il écrasait des pommes de terres dans son assiette.
Une bonne semaine était passée depuis que Mattheo avait disparu dans la pénombre avec Bellatrix. Draco s'inquiétait. Était-il encore en vie ? Personne n'en savait rien. Sa propre mère n'avait pas réussit avoir de nouvelles. Le manoir était tellement silencieux sans lui. Il n'avait personne avec qui se chamailler à la moindre occasion mais surtout, personne avec qui partager ses journées. Mattheo lui manquait. Il avait peur. Peur qu'on lui annonce une mauvaise nouvelle. Mattheo était tellement têtu et borné qu'il se ferait tuer en moins de deux entre les mains de Voldemort. Le tout sans une once de pitié.
Alors qu'il émiettait du bout de sa fourchette le poulet froid dans son assiette de porcelaine, le claquement de la porte d'entrée et des pas lourds firent lever la tête des Malfoy. Entre espoir et angoisse, Draco retint son souffle.
Mattheo boitait en traversant l'immensité du manoir, haletant, crasseux. Un filet de sang sec avait coulé le long de sa bouche, de ses tempes et de ses narines. Une épaisse balafre tranchait son visage en deux, un bout de sa lèvre inférieure était en chaire. Il avait des hématomes en bas du visage, littéralement partout sur son corps. Sa mâchoire semblait déboîtée. Son pantalon en lambeaux dévoilait ses genoux recouvert de sang encore frais. Il s'arrêta à quelques pas de la tablée de Noël, à bout de forces.
« Je ne savais pas où aller... »
Narcissa se précipita sur son neveu, Draco bondit sur ses deux jambes. Mattheo flanchait sévèrement puis s'effondra dans les bras de Narcissa -plus une mère qu'une tante à ses yeux. Des larmes de souffrance et d'épuisement dévalèrent alors ses joues. Il eu un haut-le-cœur.
« Tu es à la maison, lui susurra Narcissa, tout va bien. Mon dieu, que t'ont-ils fait ? »
Draco s'agenouilla vers son cousin-frère-ennemi le regard brillant de peine. Il s'en était toujours douté que Mattheo refuserait sa destinée. Le fait qu'il ne soit pas encore mort relevait du miracle.
« Je t'en prie, souffla Narcissa en essayant de le maintenir éveillé, ne leur tient plus jamais tête. Fais ce qu'ils te disent.
- Oui, s'étouffa Mattheo.
- Je sais que c'est dur, mais vous n'avez pas le choix. »
Draco déglutit. Il était loin d'être aussi téméraire et courageux que Mattheo. Si un ordre lui était donné, il s'exécuterait, question de vie ou de mort. Les blessures de Mattheo lui retournaient l'estomac.
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Dans son lit à baldaquins, Mattheo tremblait sous sa couette. Il fixait le vide, son cerveau tournait à blanc. Il ne pensait qu'aux déchirantes douleurs qui le lançaient de la tête aux pieds. S'il pouvait, il pleurerait encore. Il avait échoué. Il s'éloignait considérablement de la personne qu'il aurait aimé être.
« Comment tu vas ? »
Draco pénétra dans la pièce sur la pointe des pieds, incertain. Mattheo ne releva pas la tête, surtout parce qu'il n'en avait pas la force. Intimidé, Draco se rapprocha du lit.
« Tu l'as rencontré ?
- Tu penses que c'est Bella qui m'a fait ça ? Répondit-il d'une voix faible. Non, c'est Lui. »
Ses lèvres tremblèrent. Il était encore plus horrible et terrifiant que dans son imagination. Savoir que cet être là lui avait donné la vie lui donnait envie de s'ôter la sienne. Après un instant de silence, Mattheo lâcha :
« On est foutus. »
Draco tressaillit.
« Ma mère et ton père vont essayer de chopper Potter au département des mystères. Ils ont voulu que je parle, j'ai rien dis.
- Et Flora..?
- Elle est je ne sais où, avec je ne sais quels animaux, son grand- père et aucun contact avec le reste du monde. »
Quelle drôle de personnage, pensa Malfoy, aussi loufoque qu'on le raconte.
« Qu'est-ce que tu vas faire ? L'interrogea le blond.
- Survivre. »
Draco se racla la gorge en sortant une enveloppe de sa poche qu'il remit au garçon blessé.
« On a reçu ça pour toi. »
Lorsqu'il quitta la chambre, Mattheo roula de l'autre côté du matelas et ouvrit la lettre. Il reconnaissait déjà cette écriture délicatement italique.
« Mattheo,
Je te souhaite un merveilleux Noël, tout aussi merveilleux que toi. Je pense beaucoup à toi. Tu me manques. J'aurai pleins de choses à te raconter à la rentrée, prépare tes pauvres oreilles ! J'aurai tellement aimé que tu sois avec moi.
Je t'embrasse,
Ta Flora »
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