11) L'Armée de Dumbledore
Tandis que la nuit tombait, emportant dans sa chute le peu de rayon de soleil restant, Mattheo s'éclipsait hors de son lit grinçant. Il retenait son souffle, inquiet de réveiller ses camardes. Blaise ronflait tellement fort qu'il aurait pu hurler, personne ne l'aurait entendu. Cette pensée lui arracha un petit rire. Il décampa rapidement, enfilant le premier pull qu'il trouva sur le sol.
Alors que ses pieds claquaient contre les dalles en pierres qui constituaient l'escalier, il sentit une présence derrière lui, quelqu'un le suivre à la trace.
« Tu vas où, mec ? »
La voix rauque et endormie de Théodore Nott le fit sursauter. Prit en flagrant délit, Mattheo se retourna en grimaçant. Il fit défiler toutes les solutions : mentir, courir, dire la vérité. Le regard inquiet de son ami le résigna :
« Soit tu me suis et tu gardes le silence à jamais, soit tu retournes te coucher et tu gardes le silence à jamais. »
Le visage de Theo se décomposa d'incompréhension. Le Serpentard finit par hausser les épaules. A vrai dire, il était inquiet pour Mattheo. Il s'était imaginé qu'il allait rejoindre Vous Savez Qui en plein milieu de la nuit.
« Je viens, avait-il chuchoté, je vais chercher une veste. »
Dans la pénombre de la salle commune, Mattheo attendait Théodore qu'il entendait déjà dévaler les escaliers. Pour la discrétion, on repassera... Les deux amis quittèrent la pièce en silence, laissant pour seul bruit derrière eux la porte qui claquait.
« On va où ? Demanda Theo à voix basse.
- Je sais pas trop. C'est Potter. »
Theo accéléra le pas, regrettant tout d'un coup sa décision de suivre son ami. Mattheo lui fit signe de faire moins de bruit. C'est alors qu'apparu Flora, seule, inhabituellement vêtue de noir, les cheveux lâchés, l'air un peu fatigué. Elle sourit aux garçons qui marchaient vers elle, s'agrippa au bras de Mattheo et le trio trottina jusqu'au point de rendez-vous établit par Harry.
Ce soir-là, Théodore avait choisit son camp. Ceux qui se lèvent la nuit pour se défendre, la résistance. Évidemment, il allait garder le silence. Il ne tenait pas se faire punir par ses parents ou subir les sévices de Dolorès. Comme les autres, cette femme le terrifiait. Il adorait cette expérience. Finalement, ne pas suivre les règles, c'était génial !
Beaucoup de visages familiers étaient présents. Tout d'abord la fratrie des Weasley, Granger, Chang, Longdubas, Lovegood, et tant d'autres. Dans un premier temps, Harry leur apprit le sort de désarmement qu'il jugeait essentiel, question de vie ou de mort.
« Mais non, vise ma baguette, Mattheo ! S'essouffla Flora en esquivant le sort de justesse. Pas mes pieds ! »
Mattheo grogna. Il avait loupé tellement de cours les années précédentes qu'il ne se sentait qu'à peine sorcier. Fâché contre lui même, il recommença et cette fois, la baguette en crins de licorne de la Poufsouffle s'envola dans les airs. Elle hurla de joie, soulagée, avant de se jeter contre lui.
« Bien joué, Mattheo ! »
Un sourire de satisfaction s'étendît sur ses lèvres.
« Je suis fière de toi. »
Sa remarque fit brûler le cœur de Mattheo d'une agréable douceur et d'une abominable tendresse. Il planta ses pupilles noire dans les siennes et une pluie d'étoiles filantes passa. Theo se racla la gorge :
« Vous écoutez, oui ? »
Flora pouffa avant de se redresser et de tendre à nouveau l'oreille sur les instructions de Potter.
« Pour vous protéger des détraqueurs, j'ai besoin que vous fermiez tous les yeux. Pensez au bonheur de votre vie, à votre entourage, à votre famille, à vos amis... au plus beau jour de votre existence. Votre plus beau souvenir. Vous la sentez, cette énergie qui se propage dans tout votre être ? Guidez la pour en faire un bouclier. Pour vous protéger des forces obscures. »
Harry passait de personnes en personnes, lunettes sur le bout du nez, les sourcils froncés. Tout le monde était bien concentré. Baguette tendue.
« La formule est la suivante : Expecto Patronum.
- Littéralement j'attend une protection, susurra Flora les yeux clos.
- Tout à fait. Maintenant, à vous ! »
Théodore repensa à la naissance de sa petite sœur. L'émotion d'apprendre la nouvelle, la joie d'enfin la serrer dans ses bras, contre son cœur. Il récita la formule, émue d'avoir tout de suite pensé à elle. Un majestueux dauphin, aussi rapide qu'intrépide, explosa d'une lumière aveuglante et tout le monde siffla d'admiration.
« Ils sont tellement jolis ! S'exclama Cho tandis que d'autres élèves faisaient apparaître leur Patronus.
- Ils ne sont pas là pour faire jolis, ils sont là pour te protéger. »
Flora expira un grand coup. Elle détendit ses épaules, ses muscles, prenant un bon appui sur ses deux pieds. Les yeux clos, elle se coupa des autres. Impossible de ne choisir qu'un souvenir, qu'une personne.
Le premier visage qui lui apparu fut celui de Newt, son grand père, alors qu'il l'emmenait en excursion sur une île abandonnée. Toute la journée, ils s'étaient occupés des espèces magiques de cet île ensoleillée. Elle se voyait encore l'imiter tandis qu'il se tordait de rire. Puis, sans grande surprise, ce fut Mattheo. A leur onze ans, sur le balais, quand ils faisaient les casse-coups, qu'ils n'avaient peur de rien, que l'insouciance brillaient dans leurs yeux. Puis ce fut la première fois que leurs lèvres se dévorèrent après cette calamiteuse soirée.
« Un chat ! » S'exclama Hermione.
Flora explosa de rire en ouvrant les yeux. Salem ! Son patronus était identique à son chat ! Elle tendit les mains pour l'attraper alors que la bestiole de magie virevolterait dans les airs. Mattheo la regardait, d'un air triste et désolé. Il n'arrivait pas à lui rendre le moindre sourire, à faire le moindre rictus. Le Salem de magie et de lumière se mit à poursuivre la petite loutre tranquille et paisible de Hermione.
« Harry, je ne pense pas être une cible pour les détraqueurs. »
Harry s'approcha de lui, il comprenait ce que Mattheo sous-entendait. D'un regard de pitié, Potter posa sa main sur l'épaule du serpent.
« Je n'ai aucun beaux souvenirs, souffla Mattheo, je ne peux pas faire ce sort et ils ne peuvent pas se nourrir de moi. »
Toutes les têtes tournèrent vers lui. Oh non, pas encore ces visages de pitié, ces regards braqués sur lui. Mattheo se ferma immédiatement, la mâchoire serrée, les lèvres pincées, une posture nonchalante. Flora lui jeta un regard qui lui retourna l'estomac. Même elle n'avait pas réussit à le rendre heureux à ce point. La gorge de la Poufsouffle s'assécha tout à coup, lorsqu'elle comprit qu'elle ne suffirait jamais. Des larmes de déception lui montèrent aux yeux, elle détourna le regard pour fixer ses bottines abîmées.
« Continuez, ordonna Harry. Viens. »
Riddle et lui se mirent à l'écart du groupe. Harry comprenait, lui aussi avait peu de bons souvenirs.
« Ne cherche pas un moment en particulier, souligna le Gryffindor, ferme les yeux. Ok, bien. Pense plutôt à un sentiment de bien-être, de bonheur, un moment où tu défais tout ce poids sur tes épaules, où il s'envole. Un moment où tu as existé, pour de vrai. »
Potter avait loupé sa vocation de thérapeute, pensa Mattheo alors que son cœur se desserrait petit à petit. Habituellement, lorsqu'il fermait les yeux, il voyait sa mère, son père, leurs visages angoissants et la représentation inconsciente mais horrible qu'il avait d'eux. Il souffla franchement pour vider tout ce poids a l'intérieur de lui.
« Tu es tout ce que j'ai », se souvenait-il lui avoir dit. Cette phrase raisonnait dans son esprit alors qu'il sentait ses mains parcourir son corps, son souffle dans son cou, ses lèvres sur les siennes. Son odeur de fleur et d'été lui enivrait les narines et d'un coup, il ne voyait plus que son regard mielleux, gourmand, sucré.
Ses lèvres tremblèrent. En effet, c'était la meilleure sensation au monde. Il osait à peine s'autoriser à y penser, Mattheo avait peur. Terriblement peur. Cette peur se dissipait parfois, quand elle dormait contre lui. Comme cette nuit-là, dans la salle commune.
Une puissante émotion secouait son cœur. Comme son ami plus tôt, il était ému. Les larmes montaient jusqu'a ses yeux, il se débattait pour ne pas qu'elles coulent. Un feu lui calcinait la poitrine, son estomac se retournait dans tous les sens. Il luttait si fort.
« Tu te bat contre la mauvaise émotion, lui intima Harry, laisse-toi aller. »
Oui mais c'est trop intense, aurait-il voulu lui répondre. Le noeud dans son œsophage lui laissait à peine assez de salive pour parler.
Pour elle, pour eux, il se devait de savoir comment se défendre de la magie noire. Mattheo sentait son cerveau se retourner, ses membres s'engourdirent et il s'écria quand le moment fut propice :
« Expecto Patronum ! »
Le regard dur, sérieux, concentré, il admira avec appréhension cet éclat de lumière qu'il avait réussit à produire. Tellement plus compliqué que la magie noire...
« Un Sombral ? Grinça Mattheo en regardant la bête se dresser sur ses pattes arrière et déployer ses ailes de dragon.
- Tu as l'air déçu, souligna Potter qui souriait à pleine dents.
- Oui.
- C'est en lien avec l'image que tu as de toi. Ton Patronus peut changer. »
Mattheo regarda le Sombral galoper dans la pièce avant de disparaître dans un amas de poussière. Lié à la mort, porteur de malchance.
Sans vraiment savoir pourquoi, le Serpentard en avait déjà vu dans la forêt interdite. Certainement parce qu'il avait été mit au monde pour être tué avant que le Seigneur des ténèbres comprenne que ce n'était pas le bon enfant. Mattheo comme le Sombral respiraient la mort et la malchance.
« Bienvenue à l'armée de Dumbledore. » fit Harry d'un ton très solennel.
Le Gryffindor lui tendit un parchemin. Les prénoms des participants y étaient inscrits à l'encre noire. Mattheo écrivit son prénom et son nom sous celui de Flora Scamander et de Théodore Nott. Harry commençait à lui faire confiance et même à croire en lui.
« Bienvenue dans la résistance, enfant du diable », pensa Mattheo.
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