Tentation

"Hey.

C'est encore moi, Maëline. La dernière fois que je t'ai écris, c'était y'a plus d'un an. En juin 2020. Je t'ai écris "Obsession". Aujourd'hui je t'écris tentation.

Voilà plus d'un an que notre relation s'est terminée. Désormais, je suis quasiment persuadée que tu ne lis pas ceci. Mais au fond j'en sais rien, t'as plusieurs comptes secondaires. Bref. C'est pas grave. J'ai besoin de parler.

Plus d' un an est passé. De l'eau a coulé sous les ponts. La Terre n'a pas cessé de tourner, le Soleil persiste à briller. À l'échelle mondiale, rien n'a changé. Enfin si. La pandémie, tout ça. Mais j'ai pas envie de parler de ça. Et à mon échelle de moi, est-ce que les choses ont changées ? Oui. Non. Peut-être. Je sais pas. C'est trop bizarre.

Pendant plusieurs mois, après août, j'allais bien. Tu sais de quoi je parle, en août. Je pensais plus à toi. Enfin beaucoup moins. Tu m'obsédais plus. Je ne passais plus mes journées à me demander ce que tu faisais, je n'allais plus sur ton profil lire ce que tu écrivais, voir ce que tu postais. Je me faisais moins mal comme ça.

Mais évidemment, je ne t'ai jamais complètement oubliée. Il y a eu mon entrée au lycée, et j'ai pensé à toi. Il y a eu l'anniversaire de ta sœur, et j'ai pensé à toi. Il y a eu Noël, et j'ai pensé à toi, à la conversation que nous avions eu, ce 24 décembre 2019, parce qu'étrangement, je m'en souviens. Il y a eu le 25 décembre, les Air Force 1 que j'ai toujours, ma coque de téléphone, la patinoire. Je me souviens. Après y'a eu 2021. Tes 17 ans. Y'a eu La Corrida, Pink Floyd, Shallow et Goldman. Y'a eu les problèmes de maths, le 21 janvier, cette fille de ma classe, qui a ton prénom. Y'a eu WhatsApp, Wattpad. La première personne que j'ai bloquée, après toi. Y'a eu cette fille, qui te rappelait tellement à mes yeux. Elle te ressemblait putain. Jusqu'au physique, jusqu'à l'esprit, jusqu'au signe astrologique, jusqu'à ces manies. Seigneur. C'était incroyable et en même temps horrible. Y'a eu tout ça. Et cette pensée à chaque fois, que j'aimerai te raconter tous ces trucs. Mais impossible.

C'est devenu pire cette année. En 2021 je veux dire. Vers... Février ? Un truc comme ça. J'ai commencé à repenser à toi. À éprouver le manque de ta présence, de toi.

Une fois, tu m'as demandé si je te trouvais changée. Au début non. En août je me suis rendue compte que si. Alors je me suis raccrochée à ça. À me dire que tu n'étais plus comme avant, et que moi non plus. Ça ne m'empêche pas, ces derniers temps, de penser à toi.

Dans ma dernière lettre, je disais t'aimer, davantage qu'en amitié. Je te hais pour ça. Je suis perdue. Je ne sais pas comment exprimer ce que je ressens. Seigneur, tout ce que je peux dire c'est que je t' aime.

Je t'aime. C'est fort comme mot. D'habitude, je les emploie pour qualifier l'affection extrême que j'éprouve pour quelqu'un. Mais pour toi, c'est différent.

Tu as été mon premier amour. Mon premier coup de cœur. Le vrai, j'entend. Noah de la primaire, ça compte pas. Je veux dire... Bon sang, toi et moi, c'était comme une évidence. Mais je ne me suis rendue compte de l'étendue de mes sentiments que lorsqu'il était trop tard. Tu étais déjà en couple. Heureuse.

Et j'étais stupide. Stupide au point de me convaincre que c'était bien, stupide au point de vous supporter avec enthousiasme, toi et lui. Parce que comme notre relation, la vôtre aussi était une évidence.

Tu sais, encore maintenant, et comme mes expériences amoureuses sont bien plus que limitées, je suis incapable de définir comment se manifeste l'amour chez moi.

Tout ce que j'en sais, c'est que j'étais prête à tout pour toi. À mentir, à m'oublier, à supporter tout ce que tu voudrais me faire subir. Ce que je sais, c'est que je pouvais te parler, du matin au soir et du soir au matin, toujours avec cette impression que ce n'est pas assez. Ce que je sais, c'est que je sens les larmes monter quand je songe que je ne parviens plus à me souvenir de ta voix.

Comme j'ai été bête de vouloir t'oublier.

J'y suis parvenue. Un temps. Sans douleur, sans souffrance. Et c'est revenu. Comme une tempête, un ouragan dévastateur qui fait se fracasser mon cœur, produisant des milliers d'échos d'un orage qui écrase mon âme.

Je t'aime. Je t'aime putain. J'aime les souvenirs que j'ai de nos discussions, de ton visage, de tes écrits, de nos souvenirs. Je chéris tout ça.  Aujourd'hui.

Maintenant que déchirées sont les lettres, effacées les photos, brisés les espoirs de te revoir. Je chéris ce que j'ai perdu, ce que j'ai jeté, ce que j'ai risqué, les pieds sur une corde raide et les yeux bandés.

Voilà une métaphore parfaite de notre relation. Chacune sur une falaise, séparées par un gouffre immense qui vient se jeter dans des eaux tourmentées. Tant que le soleil brille, il est aisé de se parler. Et on a bravé les obstacles pour y arriver. Les forêts, les tempêtes, les rivières. On a tout traversé. Ne restait que ce gouffre, cette corde raide.

Et puis il y a eu l'orage. La corde allait rompre, je me suis lancée dessus, Doucement, précautionneusement. Les yeux bandés par l'illusion d'y arriver. Je l'ai fais parce que toi tu avais le vertige. Et le vent me balançait, et la pluie tombait drue sous les éclats de colère du ciel qui voulait nous séparer. À ce moment là, on ne criait plus assez fort. Mais j'y arrivais pas. Et j'ai préféré sauter dans l'eau, parce qu'au moins là, je peux me déplacer aisément.

Mais maintenant que l'orage est passé, et malgré toute ma volonté, je ne peux plus regagner le sommet. Tu as été au bord du vide, un temps. Je te voyais, boucles brunes éventées, sourire et fossettes qui m'ont maintes fois fais chavirer. Je ne te vois plus maintenant. Parce que tu t'es éloignée du vide, parce que j'ai décidé de laisser le courant m'emporter.

Tu me manque. Terriblement. D'une douleur sourde et inégalée, qui appuie sur le cœur et bloque la trachée. Je me demande si tu pense toujours à moi. Suis-je censée l'espérer ? Probablement pas. Cela dit, je n'y peux rien. Et si, par une amère vengeance tu aimes te conforter, sache que mon cœur, mon âme et mon esprit, se sont condamnés pour toujours à souffrir de ces vieilles amours. 

Je ne sais plus qu'espérer tu sais. J'hésite. Revenir sur la terre ferme, retrouver les vestiges de ce que j'y ai laissé, ou me cogner la tête sur le premier rocher qui passe, et laisser mon corps se noyer. 

C'est violent hein ? Ouais. Violent comme ce que j'éprouve, violent comme le poison qu'on a distillé dans le cœur l'une de l'autre, violent comme les battements dératés de mon cœur, lorsque mon esprit esquisse la courbe de tes traits.

J'ai un million de choses à dire, pourtant si peu à écrire. J'ai envie de pleurer ce soir. Pas uniquement à cause de toi, tu sais. Mais quand même. J'ai mal. La douleur s'apaisera-t-elle un jour ? Peut-être avec les rires et les sourires, parfois sincères, souvent mensongers, qu'ils me donnent chaque jour. La douleur s'effacer peut-être. Sûrement pas la nostalgie. Encore moins l'amour.

Je t'ai aimée. Je t'aime toujours. Et je crois qu'en fait, je t'aimerai, jusqu'à m'être réellement noyée.

Enfin, je dois te laisser. J'ai une autre lettre à écrire. Qui sera aussi libératrice, je l'espère."

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