Un matin j'était encore humaine. Le lendemain j'étais un être immortel.

L'éternité m'appartenait, j'avais acquis la richesse, la crainte du peuple et l'abondance de sang.

Mais je n'avais pas anticipé ma chute. Je n'avais pas retenue la seule leçon que m'a apprise mon humanité perdue: la mort guette tout être.

Même l'immortelle que j'étais devenue ne pouvais y échapper.

Comme chaque nuit, je descendait dans mon royaume. Les fenêtres et les portes étaient closes. L'humanité tentait de me résister, pauvre d'eux ils n'avaient pas la moindre idée de leur impuissance.

Je choisis à l'odeur la maison de ma prochaine victime. Je me delectait d'avance du goût du précieux liquide entre mes avides lèvres.

Dans le reflet d'une fenêtre j'inspectait l'image que je renvoyais. Mes longs cheveux blancs étaient soigneusement peignés, mon visage pâle comme la lune transmettait terreur à ceux qui le voyaient et mes yeux améthystes renvoyaient ma terrible faim. Enfin, je baissais ce même regard sur ma tunique bleu sombre qui a été brodé dans de riches tissus.

Satisfaite de mon image, j'ouvris avec fracas la porte de la demeure. J'entrais et mon regard se porta immédiatement sur un berceau ou un bébé dormait paisiblement. La créature ne devait pas avoir un jour car son sang avait une succulente odeur. Les pauvres parents encore ensommeillé ne purent que me regarder cueillir le fruit de leur amour. Je leur offrit mon plus beau sourire et m'éclipsais dans mon château.

L'enfant ne bronchait pas, il dormait paisiblement. Je m'installa dans mon fauteuil en cuir rouge et mordit dans mon repas. Le marmot se mit à hurler tandis que j'aspirais sa vie avec lenteur et ultime délectation.

Ce que je n'avais pas prévue, c'est que les parents de l'enfant avait prévu mon arrivé et la capture de leur enfant. Ils avaient engagé un chasseur de vampire. Dans mon royaume ils n'y en avaient aucun (j'y veillais avec attention). Celui-ci venait du pays voisin, le couple lui avait donné toutes ses économies pour protéger leur enfant.

Le chasseur, intelligent, avait fait  garder leur enfant dans son pays. Et c'est une copie ensorcelé par un puissant sorcier que je dégustai.

Je ne me rendis compte de la supercherie lorsque le sang afflua dans mon gosier en manque. Furieuse, je brisais la table d'un coup de poing. Seulement, mon malheur ne s'arrêtais pas là. Le chasseur c'était introduit dans ma demeure. 

Fulminant de rage, je voyais tout en rouge. Mes iris améthyste devinrent rubis. J'accourus dans la cour de ma demeure et je pus voir l'être qui m'avait berné.

Mon cœur mort ressuscita à sa vue. C'était un jeune humain, d'une beauté simple mais qui suffit à me conquérir. Il m'attendait nonchalamment appuyer contre un mur, sa mains sur son fourreau. Je me doutais que cette mise en scène lui servait à camoufler son angoisse.

"_ Avez-vous bien manger ? Quémanda mon ennemi."

Comme réponse je lui montrais mes dents. Il s'avança près de moi et je pus voir dans ses iris chocolat sa ferme détermination a m'exterminer. 

"_ J'ai été engagé pour vous détruire. Votre règne s'achève ici et maintenant !" 

L'homme avait sortit son épée de son fourreau. L'arme luisait a la lumière de la lune et je pus admirer mes yeux rubis dans leur reflet. Mes iris renvoyaient détermination mais aussi doute. Doute ? Pourquoi soudainement le doute m'envahissait-il ? Etais-ce à cause des orbites chocolat de mon ennemi ? 

Ma raison se ralluma soudain, je me mis en position défensive et le fusilla du regard. Personne ne m'avais jamais battu et surtout pas un simple humain. Je m'élançais donc sur lui rapidement mais celui-ci se déplaça a la dernière seconde ce qui me fit attérir dans un mur. Surprise, je n'eut pas le temps de voir qu'il m'empoignait par le col. Je riposta en lui lançant mon pied dans ses bijoux de famille. Déstabilisé il vacilla puis tomba a genoux. 

Je voyais déjà ma victoire: je buvais son sang en riant de ma mésaventure passé. Dans mes pensées, je ne le vis pas arriver par derrière. Il me poussa sans ménagement contre le mur de la cour. Je me retournais en une fraction de seconde pour le voir enfoncer son arme dans mon coeur. 

L'éternité s'envolait déjà, j'acceptais mon destin. Ce qui est ironique, c'est que c'est au moment de ma mort que les souvenirs de mon humanité resurgissaient. 

Je me souviens de tout, de ma naissance a ma terrible transformation. Je m'appelais Isidore Insley, mes parents m'avaient aimé de tout leur amour et j'avais jadis un fiancé. Je vivais dans un petit village de province. La vie était douce et paisible. Mon amant me berçait d'amour et nous rêvions ensemble de nos enfants futur. C'est le jour de notre mariage que tout  s'effondra.

Un vampire des contrées sombre s'aventura dans notre beau village. Nuit après nuit il assassinait les villageois. Le sang inondait nos rues mais avec mon fiancé nous n'en n'avions cure. Nous avions décidé que le monstre n'interfèrerait pas avec notre noce prochaine. Ainsi, un beau matin d'été nous nous dîmes oui. Insouciant du danger , nous faisions la fête sous la nuit noire.

Le vampire nous trouva sans aucun mal. Il attrapa ma mère qu'il dévora devant mes yeux. Mon mari me prit la main et nous courûmes dans les champs dans l'espoir d'en réchapper vivant. Malheureusement le monstre nous suivit. Il m'arracha mon mari et se tourna vers moi le visage couvert du sang des êtres que j'aimais. Je me mis a genoux devant lui et acceptais mon destin. Il rit d'un rire gras et me mordis. Je crus mourrir, j'aurais préféré mourir... Hélas il m'avait changé en monstre.

Je sortis de mes souvenirs pour regarder l'homme qui me poignardait. Le chasseur, étrangement ne me regardait pas avec pitié mais plutôt avec bienveillance. Son regard chaleureux me réconfortait. Grâce â lui ma mort avait l'air plus douce et plus libératrice. Je concentrais le peu d'énergie qui me restait a tendre ma main et a toucher délicatement la joue du jeune homme.

Une larme roula sur ma joue a l'idée du nombre d'humains que j'avais tuée. J'étais un terrible monstre qui méritait l'enfer. 

La vie me quitta soudain. La liberté vint me prendre en son sein et je pus étonnamment rejoindre ma famille et mon aimée.