10 : if you ever need a helping hand
Théodore Jenkins
Je fonce, comme Jane me l'a conseillé. Je fonce et je sais que je vais le regretter. Je fonce...aussi vite que le bus me le permet et aujourdhui, il me paraît encore plus lent que d'habitude. Lorsqu'il me dépose enfin dans le centre-ville, je chasse les questions qui hantent mes pensées et je me concentre sur le positif. Pénélope est partie, j'étais anéanti ; Lucy est revenue, elle m'a reboosté comme dix boissons énergétiques. Alors je marche à vive allure, je slalome entre les passants pressés et les rares touristes pour finalement me retrouver planté devant le seul hôtel de Silver Bay. Je jette un dernier coup d'œil au bout de papier sur lequel j'ai recopié les indications de Jane. Deuxième étage, chambre 24. Je respire comme si je voulais aspirer tout l'air du monde, puis je franchis les portes automatiques du bâtiment. La moquette rend mes pas inaudibles mais la réceptionniste, toujours à l'affut d'un nouveau touriste, m'accueille avec un grand sourire professionnel. Elle a des cheveux noirs et un visage très pâle. Ses yeux soulignés d'un trait noir contrastent avec son uniforme bordeau.
- Bonjour, je peux vous aider ?
- Non, je rends simplement visite à quelqu'un.
- Oh.
Elle soupire sans faire l'effort d'être discrète et s'affale à nouveau sur sa chaise, déçue. Je ne m'excuse pas et cours presque dans le long couloir qui mène à l'ascenseur où j'ai vu Lucy disparaître, hier soir. Il prend son temps pour arriver et je bouscule presque un vacancier en m'engouffrant dans l'appareil. Il sort, offusqué, et moi j'appuie frénétiquement sur le rond avec un gros « 2 » rouge. Les quelques secondes qui me séparent du deuxième étage me paraissent interminables et quand je l'atteins enfin, mes doutes reviennent à la charge. Et si ça se passe mal ? Non, je ne dois pas penser à ça. J'avance dans les couloirs aux murs brun clair et gris souris et je fixe la porte portant l'inscription « 24 » pendant une minute avant de frapper. Lucy ouvre rapidement, et je remercie le ciel qu'elle soit restée à l'hôtel aujourd'hui. Elle sourit et fronce les sourcils en même temps. J'abandonne toute tentative d'explication, car je ne pourrais pas expliquer quoi que ce soit sans bégayer ou perdre mes moyens. À la place, je ne perds pas de temps et je pose mes mains sur ses joues. Je ne la laisse pas réagir (je ne voudrais pas qu'elle me repousse, pas maintenant) et je l'embrasse. Comme ça, au milieu du couloir. Elle reste immobile un instant, un trop long instant. Je m'attends à recevoir une gifle...elle passe ses bras autour de mon cou. Elle mêle son souffle au mien et une de ses mains vient mettre la pagaille dans mes cheveux.
- J'ai cru que j'avais complètement imaginé ce qui s'est passé hier soir, dit-elle timidement.
- Tu ne l'as pas imaginé et euh...ça non plus, du coup.
Et voilà, on y est, j'ai encore l'air ridiculement gêné. Heureusement, c'est une des choses qui ont fait que Lucy a craqué pour moi, la première fois. Elle me sourit et me propose d'entrer, si je veux passer un peu de temps en sa compagnie. Je lui dis que j'avais prévu autre chose, à la base, alors elle accepte de me suivre. Nous quittons l'hôtel main dans la main et nous marchons longtemps, jusqu'à arriver au lac de Silver Bay. Même si, après les examens de fin d'année, cet endroit de la ville est bondé, il est pratiquement désert le reste du temps. Je nous déniche le rocher le moins inconfortable et je l'invite à y prendre place, juste à côté de moi. Elle me rejoint, enthousiaste, et nous restons là, enlacés, pendant une durée indéfinie. Nous parlons de nos vies respectives et même si nous l'avons déjà fait, lors de son retour, nous en rediscutons.
- Il faut que je t'avoue quelque chose, lâche-t-elle tout à coup.
- Ah, oui ?
- Oui. Tu sais, ce nétait pas vraiment mon idée de revenir ici, à Silver Bay. Pour tout te dire, j'avais la ferme intention de ne jamais revenir.
Aïe.
- Revenir...ça aurait été bien trop difficile. Je savais que je devrais accepter de te voir avec quelqu'un dautre, car j'étais persuadée que te revoir me ferait replonger tête la première dans notre histoire. C'est Jane qui ma proposé de lui rendre visite. Et quand je l'ai revue, elle m'a expliqué l'état dans lequel tu étais.
Elle se redresse et me regarde attentivement, comme si elle essayait de lire en moi.
- Et donc, tu as eu pitié de moi, c'est ça ?
Lucy doit se rendre compte qu'elle ma vexé, car elle s'écarte un petit peu.
- Non, j'ai juste eu envie de te remonter le moral et...j'ai peur, Théo. Je ne veux pas m'emballer alors que je pars à la fin de l'été.
Je me lève et saute de notre perchoir. Dans quoi est-ce que je me suis fourré ?
- Ne sois pas fâché, s'il te plaît...
Sa voix est presque suppliante, comme si elle s'en voulait.
- Ce n'était pas censé se passer comme ça, je n'avais pas prévu ce que tu as éveillé -ou plutôt réveillé- en moi hier soir. Je...je pense qu'on devrait y aller doucement, tu comprends ? Je veux qu'on reste des amis, comme au bon vieux temps....
- Je comprends tout à fait. Tu m'as proposé de venir au cinéma avec toi, en sachant que c'est là que je t'ai embrassée pour la toute première fois. Mais à quoi tu t'attendais, Lucy ? Après tout ce qu'on a partagé, tu te doutais bien que j'allais forcément réagir comme ça, non ?
- Je me rappelle très bien t'avoir proposé une sortie entre amis, Théo !
- Et c'est pour ça que tu m'as laissé t'embrasser puis t'emmener ici ?
Je ne me rends compte que j'ai crié que quand Lucy recule instinctivement. Ses yeux sont grand ouverts et elle reste muette. Elle sait que j'ai raison, elle sait que c'est de sa faute si j'y ai cru.
- Théo, je suis désolée... Je ne savais pas quoi faire et...
- C'est bon, j'ai compris. On ferait mieux de rentrer.
Énervé, je marche en direction de la route pour regagner l'arrêt de bus. Là, Lucy se tient à côté de moi, interdite, sans piper mot. Elle reprend finalement sa route à pieds lorsque je remonte dans mon bus, en direction de ma seconde maison. Je la regarde encore à travers la vitre et elle me lance un regard triste. Elle n'a pas le droit d'être triste. Je sais que je suis probablement très égoïste en ce moment, mais je n'en n'ai rien à faire. Je descends du véhicule après avoir marmonné un « au revoir » à la conductrice, puis je me traîne jusque chez Jane.
Jane Noha
Genny est enfin revenue de sa colocation, alors nous avons décidé de profiter un maximum. Actuellement, je suis penchée au-dessus du gigantesque évier en pierre, sur ma terrasse. Genny ne porte qu'un simple short ainsi que son bikini, et elle pourrait être diablement sexy si elle n'était pas en train de se battre avec une serviette de bain pour éliminer la farine présente dans ses cheveux et sur sa peau. Je ne peux pas m'empêcher de rigoler en la voyant ainsi, même si je suis dans le même état qu'elle.
- Arrête de te foutre de moi, Jane ! C'est la dernière fois que je m'essaye à la cuisine !
- Désolée, mais tu es si belle avec tout ce blanc ! On dirait un bonhomme de neige !
- Tu veux continuer tes moqueries, hein ?
Elle moffre un sourire espiègle et je sais qu'elle prépare un mauvais coup. Elle se jette sur moi et m'emprisonne dans un câlin dégoulinant de tendresse et de farine.
- Tu vois, ça t'apprendra à te moquer de moi !
Elle me lâche avant de poser ses lèvres sur les miennes. Je souris tandis qu'elle s'éloigne à nouveau en direction de l'évier où elle a abandonné sa serviette. Je m'apprête à me débarrasser moi aussi de ma dose de farine lorsque Théodore débarque dans mon jardin.
- Je suis désolé de débarquer comme ça, mais je viens d'aller voir Lucy et ça ne s'est pas bien passé du tout alors je voulais te voir Jane et...pourquoi tu es pleine de farine ?
- Wow, du calme, le balafré. Respire calmement et assieds-toi là.
Théodore s'assied sur une des chaises et Genny part nous chercher un pichet de limonade fraîche (ça, elle sait en faire).
- Vas-y, explique-moi.
- Je suis allé à son hôtel et je l'ai embrassée, puis j'ai voulu l'emmener au lac. Et là, là...elle m'a dit qu'elle ne voulait pas recommencer, en gros. Elle ne pense pas que ce soit une bonne idée.
Je vois bien qu'il essaie de se maîtriser, mais je le connais : les propos de Lucy lui ont vraiment fait mal. Il avait justement besoin de se changer les idées, d'oublier Pénélope, et voilà que Lucy lui fait un sale coup... D'accord, ce n'est peut-être vraiment pas une bonne idée, mais elle aurait pu mettre les choses au clair dès le début. En plus, elle aussi connaît très bien Théo, et elle sait qu'il a tendance à très vite s'emballer.
- Ce n'est rien, Théo, des filles, il y en a plein d'autres...
- D'abord Lucy, puis Pénélope, puis encore Lucy... Les deux seules filles à avoir jamais réellement compté m'ont toutes les deux abandonné. J'en ai marre...
J'adore Théo, mais par moment, il peut être vraiment « fleur bleue ».
- Tu vas vite passer à autre chose, ne t'inquiète pas. En plus, Genny et moi sommes là pour te soutenir, d'accord ? Et puis il y a Helen aussi, tu peux passer un peu de temps avec elle...
- Oui, tu as peut-être raison. Je suis désolée, j'ai l'impression de monopoliser ton attention avec mes problèmes stupides. Raconte-moi comme ça se passe avec Genny, justement.
- Oh, tout roule. Elle est vraiment géniale. Et ne crois pas que tu m'embêtes, enfin ! Te voir débarquer ici à l'improviste est une des choses que j'aime le plus dans ma vie.
- Tu sais que t'es extraordinaire, comme fille ?
- Je sais !
Il éclate de rire et, fière de moi, je le prends dans mes bras. Il me serre fort contre lui et je sais que ça le soulage un peu. Je lui propose de rester avec moi : on va se faire une soirée films, comme au bon vieux temps.
- Retour vers le futur, ça te tente ?
- Hm, ça dépend...lequel des trois ? me demande-t-il.
- Mais voyons, les trois !
- Nickel ! Je vais chercher les couvertures !
Je souris devant son enthousiasme. Ma prescription : deux jours complets avec moi, c'est-à-dire sa meilleure amie, et il sera complètement guéri ! Du moins, je l'espère...aaah, Théodore, ce que tu m'en fais voir, toi ! Genny revient avec la limonade et m'interroge du regard. Elle me dit qu'elle peut repartir quelques jours, pour que je puisse passer du temps avec Théo, mais je saisis doucement ses poignets et l'attire contre moi.
- Il en est hors de question : maintenant que t'es là, je te garde pour moi.
Elle éclate d'un merveilleux rire enfantin et je ne peux que me joindre à elle. Je l'entraîne à l'intérieur sans lâcher sa main et nous préparons ensemble le salon. Nous repoussons le canapé et je m'occupe de le déplier pour que nous puissions nous y allonger tous les trois. Théodore redescend rapidement avec les boîtes de DVD et des couvertures. Il a déjà enfilé son pyjama qui traîne toujours dans mon armoire, et il nous sourit comme un gosse.
- Alors les filles, prêtes pour Marty McFly ?
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Hellooooo! Vous allez bien?
Je suis vraiment, vraiment désolée d'avoir mis autant de temps à publier ce chapitre... Comme je vous l'explique dans la partie où j'ai posté le trailer, je pense écrire des chapitres plus courts. Je croule sous le travail, je passe tout mon temps libre dans mes cours et je n'ai plus beaucoup de temps pour écrire, même le week-end. Ajoutez-ça à ma fatigue, et vous comprendrez mieux...
Donc, voici enfin le chapitre 10, avec toutes mes excuses. J'espère qu'il vous plaît! N'hésitez pas à voter et à me dire ce que vous en pensez dans les commentaires!
La bise!
Cxlxnx13
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