03 : Is this a kind of magic ?
Théodore Jenkins
Nos lèvres se séparent après d'interminables secondes. Elle pose son front contre le mien et garde les yeux fermés tandis que je prends le temps d'observer le moindre détail de son visage. Son nez droit, ses cils légèrement épaissis grâce à du mascara, ses longs cheveux bruns, ses fines et douces lèvres et enfin, ses épais sourcils qui font tout son charme. J'entremêle nos doigts et je l'entends soupirer. Elle se redresse et lorsqu'elle ouvre les yeux, je ne peux retenir un furtif mouvement de recul : le brun a cette fois totalement cédé sa place à un vert d'eau captivant. Seuls ont demeuré les filaments dorés.
- Pénélope, tes yeux...ils...ils sont verts.
Elle cligne plusieurs fois des yeux, lâche ma main et se détourne de moi. Elle se lève précipitamment et prend appui sur son bureau. Elle a la tête baissée et ses doigts sont crispés sur le bois ouvragé du meuble. Je la laisse reprendre ses esprits pour reprendre les miens, moi aussi. Je jette un il plus attentif à la chambre de Pénélope. Les murs sont gris ou blancs et une seule et unique photo de Pénélope et sa sur y est accrochée dans un joli cadre noir ; la fenêtre aux châssis gris est immense et laisse entrer de grands jets de lumière ; une porte entrouverte, devant moi, laisse deviner un dressing ; son lit à baldaquin est recouvert d'un drap blanc immaculé. La seule touche de couleur que je trouve est celle des rideaux : ils sont de la même couleur que des lilas. Je trouve cette décoration trop minimaliste pour une chambre d'adolescente. Pourquoi Pénélope n'a-t-elle pas de photos d'elle et ses amis, de sa famille, des posters... ?
- Il faut que tu partes, annonce-t-elle, interrompant ainsi mes interrogations.
- Non. Il faut que tu m'expliques pourquoi tes yeux changent de couleur, pourquoi j'ai rêvé de toi et pourquoi ce phénomène étrange se produit à chaque fois que je te touche.
Je sens que je perds doucement mon calme. J'ai beau adorer écrire des histoires mystérieuses, je hais les mystères de la vraie vie. Je veux des réponses, et je suis sûr que Pénélope les détient.
- Je ne peux pas, Théo !
- Tu ne peux pas ou tu ne veux pas ?
- Probablement les deux, alors maintenant, va-t'en.
- Il en est tout à fait hors de question.
Je quitte son lit pour me poster derrière elle et la prendre dans mes bras. Je me penche à son oreille.
- J'ai besoin de réponses, Pénélope. Je sais que tu en as. Je sais aussi que tu ne peux pas sortir de ma tête depuis que je rêve de toi, encore moins depuis que je t'ai aperçue, hier, dans mon bus.
Elle reste silencieuse et ses épaules se secouent. Elle pleure ? Et merde. Bon, vite, une solution. D'une main, je ramène sa chevelure d'un côté de son cou et j'embrasse tendrement l'autre. Je croise mes mains sur son ventre et je sens qu'elle les caresse lentement de ses fins doigts. L'étrange sensation m'envahit à nouveau et je ferme les yeux pour m'y abandonner complètement. Pénélope brise ce merveilleux moment en me poussant doucement et en m'attirant à sa suite sans lâcher ma main.
- Il est préférable de tout t'expliquer en compagnie de ma grande sur.
Je la suis dans les escaliers, puis dans le couloir qui mène à son salon où sa sur semble nous attendre. Elle lève ses beaux yeux bleus vers nous et nous sourit.
- Je me demandais quand vous viendriez me trouver, explique-t-elle. Tu es sûre de vouloir le lui avouer ? ajoute-t-elle, s'adressant sans doute à Pénélope.
- Oui. De toute manière, il se posera des questions.
- Je pense que c'est une sage décision. Asseyez-vous.
D'un geste vague de la main, elle nous montre le canapé en face du fauteuil dans lequel elle se tient. Je m'assieds donc sur le cuir blanc, sans savoir avec exactitude si je veux apprendre les réponses à mes questions.
- Donc, tu as déjà des questions sur ma sur. Qu'est-ce qui te trouble autant ?
- Ses yeux, je réponds, mal à l'aise. Ils changent de couleur. Ils deviennent verts, comme dans mes rêves. Pourquoi ?
Je tourne la tête vers Pénélope mais ses prunelles ont repris leur habituelle teinte mordorée. Séléna sourit à nouveau et hoche lentement la tête.
- C'est tout à fait normal, pour elle comme pour moi. C'est une des caractéristiques majeures de notre espèce.
- Votre...espèce ?
O.K. : je suis à nouveau en train de rêver. Je me pince discrètement la cuisse, mais je ne me réveille pas. Le salon de Pénélope s'étend toujours autour de moi.
- Nous ne sommes pas de simples Mortelles.
- Alors qu'êtes-vous ?
- Nous sommes des fées.
- Pardon ?
Je ris jaune, complètement perdu. Cette femme n'est absolument pas saine d'esprit.
- Tu m'as bien entendue, Théodore : Pénélope et moi sommes des fées.
- Vous êtes en train de me faire une blague, c'est ça ?
- Non, ce n'est pas une plaisanterie. Je pensais qu'un garçon comme toi, un garçon avec une telle imagination, serait plus ouvert.
- Une telle imagination ?
- Tu n'es pas écrivain ?
- Comment savez-vous que...
- Ma sur n'est pas qu'une simple fée, me coupe Pénélope. Elle a le dont de lire dans les pensées des gens.
Elle regarde ses genoux comme s'ils étaient les seuls points fixes de la pièce, visiblement aussi mal à l'aise que moi. J'essaie de me montrer digne d'un « garçon avec une telle imagination » et de garder l'esprit ouvert, même si tout ce qu'elles me racontent est tout à fait dénué de sens. Je pose mes coudes sur mes genoux et me frotte le visage. Mon regard passe de Pénélope à Séléna et je m'apprête à poser une question plutôt embarrassante.
- Admettons que tout ce que vous racontez soit vrai. J'ai une autre question.
- Nous t'écoutons, affirme la blonde.
- Lorsque Pénélope et moi nous... (L'intéressée me glisse un « discret » regard désapprobateur.) Lorsque je lui ai tenu la main, j'ai ressenti une sensation étrange, comme une...
- Décharge électrostatique.
Séléna n'a pas employé un ton interrogateur ; j'en déduis donc qu'elle en sait bien plus que ce que je pensais.
- Oui. C'est ça. Pourquoi ça me fait ça ?
- Lorsqu'une fée touche un Mortel, ce genre de réaction peut arriver.
- Ah bon ? (Je me tourne vers Pénélope.) Est-ce que Seth a eu droit à cette sensation, lui aussi ?
- Seth ? s'étonne sa sur. Qui est ce Seth ?
- C'est juste un garçon, Séléna, ne t'en fais pas.
- Un garçon qu'elle a embrassé hier matin, pour être exact.
Je ne sais même pas pourquoi je dis ça, et encore moins pourquoi je le dis sur ce ton dédaigneux, presque dégoûté. Je remarque que Séléna esquisse un sourire amusé qu'elle tente de dissimuler.
- Je doute qu'il l'ait ressentie, affirme-t-elle. Tous les Mortels ne ressentent pas ça au contact d'une fée. Comme je te l'ai dit, ça peut arriver.
Je hausse les sourcils, paumé. Alors là, elles m'ont définitivement semé. Pourquoi ressentirais-je cette drôle de décharge lorsque Pénélope me touche tandis que d'autres ne le ressentiraient pas ? Si c'était encore une caractéristique des fées, je ne vois pas pourquoi elle ne s'appliquerait que sur moi.
- Pardonnez-moi, mais j'ai vraiment du mal à croire ce que vous êtes en train de me raconter. Les fées, c'est comme les vampires, les loups-garous et les zombies : ça n'existe pas.
- Tu as raison pour les zombies, plaisante Pénélope. Mais les deux autres espèces que tu as citées existent bel et bien, en plus des sirènes et des elfes. Il y en a même plusieurs dans cette ville, si tu veux tout savoir.
J'écarquille les yeux. Des vampires ? Des loups-garous ? Ici, à Silver Bay ? C'était tout simplement impensable. Sérieusement : des créatures surnaturelles. Ce sera quoi, la prochaine blague ? Harry Potter est inspiré d'une histoire vraie ? Bon, je dois admettre que cette perspective ne me déplaît pas du tout. Imaginez un peu, faire ses études à Poudlard, aux côtés des charmantes Hermione Granger et Pansy Parkinson... Je m'égare, pardon.
- Donc, si je comprends bien, vous êtes en train de m'annoncer que la ville dans laquelle j'habite depuis ma naissance est remplie de créatures surnaturelles.
- Exactement. C'est difficile à avaler, j'en ai conscience, tente de me rassurer la plus âgée. Mais ne crains rien, nous sommes presque tous inoffensifs !
Je déglutis difficilement.
- Presque ?
- Et bien, certains vampires ont toujours un peu de mal à accepter les conditions du Grand Conseil, mais ils ne représentent pas une réelle menace.
- Le...Grand Conseil ?
- Chaque ville surnaturelle en a un ! m'explique Pénélope. C'est le cas de Silver Bay et d'autres petites villes mais aussi de San Francisco, de Dublin en Irlande et de Liège en Belgique. Il y en a partout à travers le monde.
- D'accord, mais à quoi sert-il ?
- Deux membres de chaque communauté y siègent et discutent de notre cohabitation. Il y a des tas de règles à respecter. Il y a les Premières Lois, celles auxquelles on ne touche jamais. Elles sont identiques partout à travers le monde. Et puis chaque ville a ajouté ses propres lois. Par exemple, à Melbourne, les créatures surnaturelles ne peuvent surtout pas fréquenter les Mortels. C'est passable de mort, là-bas.
- Et est-ce que les dirigeants de notre pays...ou du moins de notre ville sont au courant de votre existence ?
Étrangement, je me surprends à trouver leur monde très intéressant, bien que j'aie encore de nombreux doutes quant à la véracité de leurs propos. Mais bon, qui irait inventer une histoire pareille ?
- Seulement le maire de Silver Bay. Dès qu'un nouveau maire est élu, il est informé de notre existence par son prédécesseur, et ainsi de suite. C'est comme ça que ça fonctionne depuis que la ville a été fondée. D'ailleurs, Séléna est membre du Grand Conseil de Silver Bay.
- Ah oui ?
- Oui, intervient cette dernière. J'y siège avec notre frère, Hélios, mais il n'est pas là pour le moment.
Découvrir que Pénélope a un grand frère me stresse quelque peu, pour je-ne-sais quelle raison. Je décide d'ignorer cette angoisse infondée et je me passe à nouveau les mains sur le visage, comme si elles allaient m'aider à faire le tri dans mes pensées.
- Il n'empêche que vous n'avez pas tout à fait répondu à ma question et je me dois d'insister. Pourquoi est-ce que je ressens une infime décharge indolore lorsque Pénélope me touche ? Si ça arrive avec les fées, pourquoi ça n'est pas arrivé à Seth Nelly lorsqu'elle l'a embrassé ?
- En toute honnêteté, je l'ignore, m'annonce Séléna en secouant lentement la tête, entraînant ses cheveux blonds parfaitement coiffés dans son mouvement. Quand je t'ai dit que ça pouvait arriver, je voulais dire que j'ai déjà entendu parler de ce phénomène...mais je n'ai aucune explication. J'en suis navrée.
Je ferme les yeux une seconde. Je suis surpris que Séléna n'ait aucune explication à me donner là-dessus ; quelques instants plus tôt, elle semblait pourtant avoir réponse à tout. Je me lève : il est temps que je rejoigne Jane. Il faut absolument que je lui raconte tout ça, histoire de ne pas perdre l'esprit tout seul. Mais d'abord, je veux une preuve.
- Une dernière chose. Comme je fais pour être sûr que vous dites vrai et que vous ne me menez pas en bateau ?
Séléna se lève à son tour, gracieuse et aérienne, pour finalement se tenir bien droite devant la cheminée, l'élément le moins moderne de la maison. Elle ferme les yeux et lorsqu'elle les ouvre à nouveau, les filets d'or sont bien là, mais les pupilles bleues sont devenues oranges comme les flammes d'un immense brasier. Je recule instinctivement, butant au passage contre le canapé. Je ne suis pas au bout de mes surprises. Tandis que la magnifique blonde penche la tête en arrière, une paire d'ailes lui pousse dans le dos. Elles sont vertes comme des pommes mais elles n'en sont pas moins fines au point de parvenir à voir à travers elles. À l'instar de ses yeux, les ailes de Séléna sont irriguées de filets dorés qui les font briller de mille feux. Bouche bée, je ne peux plus m'empêcher de les regarder. La jeune femme les laisse retomber dans son dos : elles sont tellement longues qu'elles atteignent ses chevilles. Séléna me sourit tandis que le bleu reprend le dessus sur l'orange de ses prunelles.
- Convaincu ?
Toujours aussi chamboulé, je hoche la tête et bafouille un « au revoir » aux deux surs. Je m'empresse de sortir de cette maison et de revenir sur mes pas. Heureusement, Silver Bay est une petite ville où l'on ne se perd pas facilement. Dans le cas contraire, j'aurais été bien incapable de retrouver la rue de chez Granfiot. Une fois devant la brasserie, je téléphone à Jane, bien décidé à tout lui raconter. Elle décroche après cinq sonneries, ce qui est plutôt inhabituel pour elle qui est toujours scotchée à son téléphone même si elle est occupée.
- Allô ?
- Jane ?
- Non, c'est Genny ! Attends, je te la passe immédiatement.
Tiens, elle est toujours avec elle ? Je suppose qu'elles ont décidé de passer une journée entre filles accros aux jeux vidéo. J'entends Genny crier après Jane avant qu'elle ne recommence à me parler.
- Elle sera là dans deux petites secondes : elle vient de sortir de sa douche.
Une douche ? À cette heure-ci ? Le bruit étouffé m'indique que le téléphone de Jane revient dans les mains de sa propriétaire.
- Théodore ? Je ne m'attendais pas à ce que tu m'appelles si tôt !
Je trouve sa voix vraiment bizarre. Qu'est-ce qu'elle a, aujourd'hui ?
- J'ai cru comprendre... Tout va bien ?
- Évidemment ! Pourquoi ?
- Je trouve ta voix très bizarre.
- Oh, tu racontes n'importe quoi. Enfin, bref, pourquoi appelles-tu, frangin ?
- J'ai besoin que tu viennes me chercher devant chez Granfiot : j'ai une chose folle à te raconter. Tu vas avoir du mal à y croire, je reviens de chez Pénélope à l'instant et-
- Oui, oui, très bien, j'arrive dans dix minutes.
Et elle me raccroche au nez. Je n'ai plus aucun doute à présent : quelque chose cloche chez ma meilleure amie.
Jane Noha
Je me dépêche de m'habiller, songeuse. Il va falloir que je prépare un mensonge digne de ce nom. Je déteste mentir à Théo, vraiment, mais en attendant, je n'ai pas le choix. Genny est toujours assise sur mon lit, ses doux yeux bleus posés sur moi et mon agitation. Elle aussi semble songeuse, ça se voit.
- À quoi tu penses ? Tu as l'air d'être sur la Lune.
- Seulement à ce que l'on vient de faire. Tu vas en parler à Théodore ?
Elle rigole légèrement devant mes joues qui rougissent alors que j'enfile mon débardeur. Elle se remet sur ses deux pieds et dépose un léger baiser sur ma joue.
- Je...je ne sais pas encore. Et puis, avec ce que tu viens de m'avouer je...j'ignore si c'est correct de lui en parler. Je comprendrais que tu veuilles garder ça secret.
- J'aimerais bien, mais je ne te demanderai pas de mentir à ton meilleur ami pour moi, Jane, retiens-le bien.
Je lui souris et timidement, je la prends dans mes bras. Elle me rend mon étreinte et j'embrasse sa joue. J'écarte alors quelques mèches de ses cheveux roux pour accéder à son oreille.
- Merci, je lui chuchote.
- Merci pour quoi donc ?
- Merci d'être comme ça. C'est rare les gens qui comprennent si bien comment on fonctionne, Théo et moi.
Elle m'offre son plus beau sourire et se met sur la pointe des pieds pour combattre nos dix centimètres de différence et m'embrasser aussi tendrement que si elle cueillait une fleur. Je lui caresse la joue puis je m'éloigne.
- Fais comme chez toi, je reviens dans vingt minutes avec Théo.
- Compte sur moi !
Aussitôt dit, je la vois reprendre sa place sur mon lit et s'emparer de la manette de ma PlayStation. Je rigole doucement en la regardant faire puis je sors démarrer ma voiture. J'arrive vite devant un Théodore au visage pensif, très pensif. Je m'arrête devant lui et je klaxonne pour le sortir de ses pensées visiblement profondes.
- Hey le balafré, ton chauffeur est là !
Il sursaute à cause du coup de klaxon et s'installe à côté de moi. Il embrasse ma joue comme à chaque fois et me tape l'épaule. Seulement, il retrousse son nez. Et merde.
- Tu as mis du parfum ?
Il faut savoir que je ne mets absolument jamais de parfum. Du déodorant le matin et après un cours de sport, oui. Mais du parfum : jamais. Donc, l'odeur qu'il a sentie ne peut venir que d'une seule personne, et elle joue à la console, dans ma chambre, en ce moment-même. Vite, Jane. Trouve quelque chose.
- J'ai passé la journée avec Genny. C'est fou ce que le parfum de cette fille sent fort, hein ?
J'accompagne ma remarque d'un petit rire forcé. Il fait semblant de rien, mais je sais qu'il n'en a pas fini avec moi. Il garde ses questions pour plus tard, c'est tout.
- Alors, de quoi voulais-tu me parler ?
- Pénélope m'a emmené chez elle. J'étais assis en terrasse, chez Granfiot, et j'écrivais un poème quand elle a débarqué. Elle m'a dit qu'elle avait entendu une chanson et qu'elle avait suivi l'air jusqu'à moi. Les paroles de cette « chanson » étaient les vers de mon poème, Jane.
- Ah. Tu es sûr qu'elle n'a pas lu par-dessus ton épaule ?
- Elle était en face de moi. Quoi qu'il en soit, je suis allé chez elle. En passant, sa maison est superbe. Enfin bref, c'est pas la question. J'ai rencontré sa sur, Séléna. J'ai cru qu'elle était complètement tapée, au début. Et puis...
Je sens mon meilleur ami hésiter.
- Et puis... ?
- J'ai accompagné Pénélope dans sa chambre et...je l'ai embrassée. Ou plutôt c'est elle qui m'a embrassé.
- Félicitations, frangin ! Tu as enfin trouvé quelqu'un !
J'éclate de rire mais comme je vois qu'il ne me suit pas, je lève les yeux au ciel.
- Ce que tu peux être grognon, quand tu t'y mets ! Ensuite, il s'est passé quoi ?
- Cette sensation étrange est revenue. Elle ne supportait pas les questions à propos de ça, de ses yeux...alors elle m'a emmené près de sa sur, qui m'a tout expliqué.
J'attends la suite, mais Théodore regarde la route avec appréhension.
- Et ?
- Tu vas me prendre pour un fou, ou pour un idiot, ou encore pour un naïf.
- Fais-moi confiance, je ne te prendrai pas pour un fou.
Effectivement, après ce que m'a annoncé Genny tout à l'heure...je serais mal placée pour l'accuser de délirer.
- C'est une fée. Je sais, c'est-
Il coupe sa phrase car je donne un coup de frein un peu trop brutal, ce qui provoque également la colère du vieil automobiliste derrière moi. Heureusement, il ne roulait pas vite et il a eu plus de peur que de mal. Je redémarre comme si de rien n'était, mais Théo me regarde bizarrement.
- Je savais que tu ne me croirais pas. Et je comprends, j'ai eu du mal aussi...
- Je te crois.
- Tu me crois ?
- Oui, je te crois.
Si je n'étais pas en train de conduire, je le prendrais en photo sur le champ. Sa bouche ouverte, ses yeux écarquillés...c'est tellement hilarant que je ne peux m'empêcher de rire à nouveau. Devant mes gloussements incontrôlables, Théodore referme la bouche et essaie de ramasser sa crédibilité à la petite cuillère. J'essuie les larmes qui perlent au coin mes yeux tout en riant.
- Je suis désolée, mec, mais ta tête...
- Oui, j'avais compris, c'est bon. Pourquoi as-tu été si facile à convaincre ?
- Tu comprendras en arrivant à la maison.
Sceptique, il reporte son regard sur la route et se mort la lèvre d'envie de me demander quelque chose.
- Bon, je vois bien que quelque chose d'autre te préoccupe. Dis-moi tout.
- Le parfum, le fait que ce n'est pas toi qui ait décroché au téléphone...tu me caches quelque chose ?
- Noooon, je ne vois pas de quoi tu parles !
Mon sourire espiègle me trahit et il sourit.
- Nan, je rêve. Genny ?
- Yep.
- Félicitations, surette ! J'aurais dû m'en douter dès la seconde où j'ai appris qu'elle aimait l'univers des jeux vidéo autant que toi.
- Tu te rends compte ? On rencontre chacun quelqu'un et on conclut en moins de vingt-quatre heures... C'est beau, tout ça, dit-elle en rigolant une fois de plus.
- Si on veut être exact, je l'ai embrassée plus de vingt-quatre heures après l'avoir rencontrée.
- Arrête de jouer sur les mots, emmerdeur.
- Tes désirs sont des ordres.
Nous arrivons enfin devant chez moi et je gare la voiture dans mon garage, bien à l'ombre. L'absence de mes parents ne me réjouit pas vraiment puisque mon père va atrocement me manquer, mais la possibilité de mettre ma voiture à l'ombre rend leur départ moins désagréable. Nous montons dans ma chambre et nous y trouvons une Genny intensément concentrée sur sa partie de Lara Croft. Le jeu a déjà plusieurs années, mais les images m'impressionnent toujours autant. Que ce soient les cheveux de Lara qui se soulèvent au gré du vent, les dégâts causés par ses combats sur ses vêtements ou encore l'eau qui coule dans les ruisseaux, tout est superbe. Je l'observe se concentrer et bander l'arc de Lara pour éliminer un des guerriers de la mystérieuse île sur laquelle elle est coincée. La flèche part et termine sa course dans la gorge de l'homme qui tombe comme une mouche. Personne n'a rien remarqué : Genny est décidément une bête à ce jeu-là. Lorsqu'il s'éclaircit la gorge, Théo m'arrache à la contemplation de l'écran et Genny à son jeu. Elle le met en pause et vient saluer Théodore.
- Salut, Théo ! Comment tu vas ?
- Bien. Et toi ?
- Plutôt bien. Qu'est-ce qui t'amène ?
- Je devais parler à Jane de...quelque chose.
Bon, et bien, je crois que c'est le moment.
- Genny ?
- Oui ?
- Théo m'a parlé...de fées.
La jolie rousse regarde mon meilleur ami, étonnée.
- Comment es-tu au courant pour les fées ?
- Comment es-tu au courant pour les fées ? rétorque-t-il.
- Je...peu importe. Dis-moi ce que tu sais.
Théodore me lance un regard interrogateur et d'un hochement de tête, je l'encourage à parler de ce qu'il vient de vivre à Genny. Après lui avoir résumé les évènements, Théo repose sa question : il voulait vraiment savoir pourquoi Genny connaissait la face cachée de Silver Bay.
- Je suis moi-même une créature surnaturelle, Théodore.
Mon ami s'affale sur mon lit, complètement exténué. S'il savait ce à quoi ce lit avait servi plus tôt dans la journée... Genny pense comme moi, car elle rougit et détourne le regard : c'est adorable.
- Genny est une sirène, Théo, c'est pour ça que je t'ai cru si facilement.
- Une sirène ? Avec les écailles et tout le tralala ?
- C'est exact.
- Mais, comment ça se fait que tu es ici, avec nous ? Tu ne devrais pas barboter dans l'océan ?
Genny rigole doucement (Ciel, ce rire...) et secoue la tête.
- Je suis ce qu'on appelle une Amphibie. Je peux vivre à la fois sous l'eau et sur Terre.
- Et comment tu as fait pour convaincre Jane ? Quand je lui ai parlé de Pénélope pour la première fois, elle m'a presque pris pour un fou...
C'est vrai : j'étais sceptique au début, mais bon...
- N'oublie pas que j'ai une immense piscine dans mon jardin, mon pote.
Il soupire, certainement épuisé par tant de révélations. Moi-même, je n'en reviens pas. C'est un peu comme si je vivais dans un jeu vidéo, à présent...sauf que ce n'est pas un jeu. Non, c'est la vraie vie, et nous sommes entourés de créatures magnifiques dont nous ne soupçonnions même pas l'existence quelques heures plus tôt.
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Heyyy! Vous allez bien? Je suis vraiment désolée... Je devais poster ce chapitre vendredi, mais je suis partie en Allemagne et j'ai complètement oublié, surtout que mon téléphone est fatigué, le pauvre. Je ne peux plus ouvrir Wattpad, donc me revoilà sur pc... Enfin bref!
Dites-moi ce que vous avez pensé de ce chapitre dans les commentaires, et n'oubliez pas de trouver la chanson! Ce chapitre est dédié à @nothingsronwithme! De nouveau, je vous conseille vivement sa Fremione!
Laissez un petit vote, ça prend une seconde et ça fait plaisir!
Kissouilles
-Cxlxnx13 ***
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