Chapitre 35
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-̷̰͈͕̖̝̳̙̭̝͚̎̿è̸̙̇̆͂̈́̃͊̚̕_̴͚͇̿́̌̄̑̽̚͘͝͝"̷͙̕'̸̧̪͍̤̎͌̏?̵̠̥̫̪͛͑̌̚ͅà̸̜̦̜̖̣́̊͌̂̿̿̕
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Mes doigts valsent sur les touches noires et blanches et mon cerveau, lui, s'évade l'espace d'un instant vers un autre monde. Tout n'est qu'automatisme. Je ne suis plus vraiment là. Plus vraiment dans cette petite pièce. À croire qu'il n'y a pas ma sœur, à l'autre bout de la chambre, en train de faire ses devoirs sur le seul bureau qu'on a pu garder. L'autre était irrécupérable, complètement en miettes.
Moi et mon piano ne faisons qu'un être un peu complexe. Toutes ces touches sont si identiques, mais produisent chacune un son bien différent. Certaines se ressemblent, d'autres non. C'est un peu la surprise, quand on ne s'y connaît pas.
Je viens d'avoir seize ans, je connais bien mon instrument, mais la vie n'est qu'un mystère de sons que je suis incapable de deviner.
Mes mains se laissent porter par la musique qui réussit à calmer mon esprit. Plus question de nuages noirs qui viennent le brouiller à longueur de journée. Lorsque je suis sur cette petite chaise en bois, en face de mon piano, il n'y a qu'un ciel dégagé.
Cette chaleur, cette douceur, ces couleurs pétillantes qui me donnent envie de ne jamais m'arrêter de jouer tous ces morceaux.
Et puis, je finis par louper une note.
Tout redevient terne, bien trop gris. Et, lorsque j'enlève mon casque, le monde sourd dans lequel je dansais s'est effondré pour ne laisser place qu'à des cris stridents qui ne m'alarment même plus.
J'abandonne et sors de ma chambre, fermant la porte pour ne pas l'entendre râler.
Encore un nouveau septembre dans une nouvelle ville.
Il y a des cartons qui traînent un peu partout au quatre coins de l'appartement parisien de mes parents. Un nouveau départ, disaient-ils. La vaisselle prend la poussière dans ces boîtes entrouvertes, seul le strict minimum en est sorti. Parce que ranger quoi que ce serait un effort trop épuisant. Parce que personne n'a le courage de mettre la main à la pâte. Parce que tout nous rappelle notre ancienne vie. À croire que nous sommes déjà prêts à repartir à l'autre bout du monde. Et encore tout recommencer à zéro.
Les pieds nus sur le carrelage gelé, je me promène jusqu'à la cuisine où un vieil ami m'accueille de bonne humeur.
Ses ronronnements viennent couvrir les hurlements de mes parents. Il vient se frotter contre ma jambe, accrochant quelques-uns de ses poils noirs à mon pantalon de pyjama. Un petit miaulement, et mon cœur fond sur place. Je passe doucement ma main pleine de cloques sur son doux pelage.
— Salut, toi.
Sa gamelle est vide.
Je m'empresse de la remplir de croquettes, avant qu'il engloutisse tout en un éclair, sans prendre le temps de savourer chaque morceau.
Les cris, quant à eux, se dissipent enfin.
Peut-être que je devrais nous aider.
Je m'accroupie face à l'un des gros cartons entassés dans la cuisine pour fouiner dedans : seulement quelques assiettes parce que la majorité a été explosée sur nos anciens sols, ainsi que des couverts éparpillés à la va-vite – ce qui a déjà abîmé plusieurs coin de la vaisselle. J'utilise mes deux mains pour attraper le plus d'assiettes possibles que je pose contre le plan de travail. En zieutant les alentours, je finis par trouver le placard idéal idéal pour toutes les ranger. Ce sera déjà mieux que les exposer sur l'égouttoir en attendant leur prochaine utilisation.
Voilà qui est fait, c'est déjà un bon début.
J'attrape des dizaines de couteaux de toutes les couleurs, en plastique ou en argent, avec motifs ou ternes comme cet appartement. Tous accumulés au fur et à mesure des années. Ils pointent vers le ciel jusqu'à atterrir face à un tiroir vide.
— T'as vraiment mauvaise mine, Esther.
Dans mon sursaut, les couverts s'écrasent contre le carrelage.
Contre mes pieds nus.
— J'espère que tu ne sortiras pas avec un t-shirt aussi court pour aller à l'école demain.
Comme des milliers de petites aiguilles qui viennent se planter dans ma peau, je sautille sur place en espérant faire disparaître la douleur, sous les yeux de ma mère qui reste muette. Elle observe mon début de rangement chaotique, tente de dire quelque chose, mais préfère retourner dans sa chambre avec son peignoir et ses cheveux décoiffés.
Je ne parlerai pas de son œil au beurre noir.
En baissant les yeux, je réalise qu'un pot de peinture cramoisi est tombé sur mes pieds.
Je marche péniblement jusqu'à la salle de bain où je fouille chaque placard à la recherche d'un désinfectant encore plein et d'un pansement qui n'a pas eu le temps de moisir, mais rien. Et si quelque chose n'est pas jeté ici, c'est qu'il est dans un carton. C'est comme ça que je me retrouve accroupie contre le carrelage froid, tentant désespérément de trouver de quoi me soigner, malgré les picotements incessants qui veulent me faire tomber.
Il reste un fond de désinfectant et quelques pansements à l'effigie de Kermit, je m'empresse de les plaquer sur mes pieds et de partir récupérer des chaussettes.
Sur le chemin, je m'arrête devant le miroir bancal et poussiéreux du couloir. En m'observant, je réalise qu'elle a raison. Mon crop-top est trop court, mais c'était le seul qui me restait – à moins qu'une chemise qui gratte soit le parfait accessoire pour passer une bonne nuit. J'ai perdu toutes les couleurs que j'avais pu prendre pendant l'été. Mon visage ne laisse place qu'à mes cernes. Et mes cheveux châtains en pagaille donnent l'impression de ne pas avoir été touchés depuis que je les ai coupés au niveau de mes épaules.
Je passe doucement ma main dedans pour me heurter à des nœuds.
Et cette couleur terne, elle me ramène trop à la réalité accablante.
Je fonce dans ma chambre malgré les plaintes de Vanille qui m'explique qu'elle n'arrive pas à se concentrer lorsque je suis là. Éviter un stylo, éviter un livre, éviter le contenu d'un verre tombé l'autre jour : c'est le chemin périlleux jusqu'à mon armoire quasi vide. En jetant un rapide coup d'œil vers le bac à linge sale dans le coin de la pièce, je remarque qu'il déborde tellement de vêtements que ces derniers commencent à s'étaler sur le sol.
Je soupire.
Miraculeusement, je trouve des vêtements au fond du placard : une chemise et une jupe bleue à fleurs. D'abord réticente, c'est en les asseyant que je réalise que j'adore cette combinaison jamais tentée – certainement pour éviter les remarques cassantes sur mes jambes poilues à l'allure de galaxies.
— T'en penses quoi ? je demande à ma sœur.
Vanille ne réagit pas.
Tant pis.
Je prends mes dernières économies avant de dévaler les escaliers de l'immeuble pour me retrouver dans les rues lumineuses de Paris. Bruyantes, comme à la maison. Les voitures passent leur temps à klaxonner et il y a déjà des gens bourrés à dix-huit heures. Ça change de mon ancienne ville dans le Centre-Val de Loire où je pouvais parfois marcher quelques minutes avant de croiser quelqu'un.
Aujourd'hui, je me fonds dans la masse.
Assez pour observer tous ces gens solitaires dans ces rues bondées de monde en me demandant ce qu'il s'est passé pour qu'ils le soient. Pour la plupart, ce sont des courses de dernières minutes. D'autres doivent habiter seuls dans cette immense ville où j'ai du mal à me retrouver. Et puis, il y a les vagabonds à la recherche d'un moyen de tuer l'ennui ou, dans mon cas, d'assassiner la personne qu'ils étaient.
À quelques mètres de là se trouve un supermarché vers lequel je marche douloureusement. La porte s'ouvre pour laisser sortir un couple et leur enfant. Il doit avoir sept ou huit ans et une sucette à la main. Quant à moi, j'ai seize ans et les mains dans les poches de ma jupe. Je ne peux que les regarder en silence. Pas trop longtemps, avant d'entrer dans le magasin.
Juste le temps d'avoir ce petit pincement au cœur.
Juste le temps d'être jalouse.
Sous la lumière jaune du petit supermarché, j'avance en boitant légèrement. Ça ne change rien au fait que mes pieds me hurlent à chaque instant de faire une pause. Mes Dr. Martens basses me brûlent le talon, histoire d'améliorer la situation.
Je fredonne une musique de French 79.
Assez bas pour que personne ne se retourne sur mon passage, pour que je ne sois qu'une simple passagère en ce début de soirée.
Me voilà au rayon que je veux.
Devant moi se présentent des quantités et des quantités de couleurs, mais il n'y en a qu'une qui m'intéresse aujourd'hui. D'une main, je prends la décoloration, et de l'autre la coloration rose, avant de passer à la caisse d'un vendeur mâchant son chewing-gum à rythme régulier.
— Ça fera 16 euros.
Je lui donne un billet froissé et des petites pièces, il les prend et me souhaite une bonne soirée. Moi, j'espère juste en passer une meilleure qu'hier.
Dans la salle de bain, j'applique méticuleusement les mixtures sur chacune de mes mèches, avec de la musique qui hurle dans mes écouteurs et la porte fermée à clé. L'attente est si longue entre chaque passage, si bien que je commence le rangement de cette pièce où les rouleaux de papiers toilette s'entassent à côté de la poubelle pleine, où les produits pour le visage vides sont exposés en trophée et où il y a tant de calcaire sur les gels douches et les tubes de dentifrices qu'il est impossible d'en lire les instructions.
Je sors de la salle de bain sans me reconnaître.
Les cheveux roses, une jupe à fleurs et une chemise blanche.
C'est elle, la Esther que je veux voir tous les jours.
Pas celle qui erre dans sa chambre sans se souvenir de ce qu'elle est en train de faire. Pas celle qui a une galaxie entière sur les jambes et du mascara coulant sous ses yeux. Pas celle qui reste dans le même pyjama à longueur de journée sans avoir le courage de le mettre à laver. Pas celle qui ne sait que se déchirer les tympans pour changer, l'espace d'un instant, de monde.
C'est la première fois depuis un moment que j'ai un si grand sourire aux lèvres.
La jupe dans le vent.
Et les cheveux virevoltants.
Peut-être que, finalement, c'est bien un nouveau départ.
— C'est quoi cette couleur ?
Assise au bout de la table de ce tribunal journalier, les petits pois dans mon assiette ont peine à être engloutis par un ventre en pleine turbulence. Les rires de ma sœur viennent ajouter à ce plat des aiguilles tranchantes et le regard de mes parents le saupoudre de dédain. Mes yeux n'arrivent qu'à observer cet étrange mélange, se retenant de le pimenter avec des larmes.
— Esther, tu veux que tout le monde te remarque au lycée ?
Je ne réponds pas.
— C'est ce que tu veux, hein ? insiste mon père en donnant un coup de poing dans la table.
Mes pieds se crispent.
— Honnêtement, tu ressembles à une gouine là, ajoute ma mère en me dévisageant.
Endurer en silence.
Et ça va passer.
෴
J'ai joué du piano durant toute l'année scolaire.
Ces derniers mois, j'ai rencontré des gens qui me faisaient sourire, d'autres qui me faisaient pleurer. J'ai appris à me sentir seule dans une foule remplie de connaissances. Je me suis vue passer de seize à dix-sept ans, comme de la première à la terminale. J'ai senti cette boule au ventre devenir de plus en plus oppressante chaque jour, ainsi que ces frissons de plus en plus nombreux à chaque fois que je montais les escaliers de l'immeuble. J'ai appris à reconnaître les types de cris et à éviter que des drames ne se produisent. J'ai vu Grib doubler de taille, mais diminuer de poids. J'ai vu mes cheveux récupérer leur couleur nauséabonde pour redevenir roses dès que je le souhaitais, accompagnés d'un lot de remarques inclus dans le paquet. J'ai vu ceux de Vanille devenir platines sans qu'on ne lui dise jamais rien.
Et je me suis vue tout quitter du jour au lendemain un beau matin de fin septembre.
La raison n'a jamais été abordée, mais c'est sûrement un nouvel emploi mieux payé que mon père a décroché. Le fait est que nous sommes partis en un clin d'œil. C'est à peine si j'ai eu le temps de dire au revoir à tous mes nouveaux amis.
Parfois, lorsque je suis seule, je me demande si eux aussi pensent à moi.
Notre petite famille a eu de la chance, un couple de fleuristes d'une ville appelée Tarrières louait un appartement en haut du leur et nous a gentiment fait un prix. C'est grâce à cet argent économisé qu'on a pu louer un camion de déménagement si grand que j'aurais aimé jouer à cache-cache à l'intérieur, sauf que Vanille jouait à sa 3DS et que mes parents ne prêtaient pas attention à moi.
Leur boutique de fleurs, au rez-de-chaussée de l'immeuble, est si chaleureuse, remplie de plantes et de bonheur, que j'aurais nettement préféré habiter là-bas. Au lieu de ça, j'enchaîne avec ma sœur les aller-retours entre le deuxième étage et le camion pour déposer des cartons à droite à gauche, en cette matinée ensoleillée de début octobre, tandis que mes parents discutent paisiblement. Jusqu'à ce que mon souffle ne suive plus le rythme.
Je m'arrête.
Une boîte à souvenirs dans les mains, j'observe les signatures qui sont dessus.
Elles datent toutes d'avant mon premier déménagement.
Durant ce moment de répit, je remarque que le quartier est si calme. Je tombe seulement nez-à-nez avec des rires d'enfants, des bribes de discussions et le bourdonnement de quelques voitures qui passent. C'est rare, je m'entends respirer. C'est rare, je n'entends pas mes parents.
Comme dans une bulle apaisante.
Debout à côté du camion, j'observe les alentours pour m'imprégner de cette nouvelle vie. Je vois des dames âgées marcher doucement en se tenant le bras, sûrement en train de discuter des derniers potins que cette ville va bientôt me partager. Je vois des personnes promener leur chien avec le sourire. Je vois des gens faire leur jogging et d'autres courir pour leur train.
Je m'attarde sur deux personnes devant le portail d'une petite maison face à la mienne.
Une fille à la peau mâte qui a un chignon parfaitement bien fait et un pantalon à motifs de nuages. Un garçon aux cheveux brillants roux et aux lunettes carrées, qui est habillé tout en noir. Ils ont l'air de bien s'amuser, avec leurs rires et leurs bouches qui n'arrêtent pas de débiter des mots inaudibles.
Moi, je suis silencieuse.
Je suis simplement la fille à l'autre bout de la rue.
Et j'espère qu'un jour, je serai celle du bon côté.
— Esther, viens m'aider ! crie Vanille.
Je disparais pour me retrouver à l'intérieur de notre nouvelle maison. J'enjambe les cartons pour ramener les nôtres dans notre chambre, tout en scrutant l'appartement qui est aujourd'hui mille fois plus propre que le précédent, mais toujours aussi terne de vie. Notre pièce à nous, à Vanille et moi, est bien plus grande que celle de Paris, ce qui me permet d'y exposer ma bibliothèque aux milliards de bouquins, au lieu de tout laisser moisir dans un coin de la pièce.
Pour repartir sur de bonnes bases, je me mets de suite à monter le meuble en métal avec mon tournevis. Puis, je commence à vider mes cartons et à remplir ces étagères.
Dans l'une des boîtes, je trouve des centaines de photos en parfait état.
Celle de l'époque où mes cheveux étaient châtains et ceux de Vanille bruns. Celle de mon premier déménagement où mes amis avaient signé mes cartons, en espérant tout de même me revoir un jour. Celle du collège où je m'amusais avec mon appareil photo, avant que ma mère ne le détruise en mille morceaux dans un excès de colère.
En les accrochant une à une sur mon mur, je prends un coup de vieux. Je n'ai rien de la personne pétillante sur ces photos. Ma vie aujourd'hui n'est pas aussi bonne que je l'imaginais lorsque j'étais plus jeune.
Les larmes fusent sur mes joues.
Vanille me déteste. Je ne suis plus aussi proche d'elle, comme si un barrage s'était construit entre nous au fil des années.
Mes amis, eux, ne doivent même plus penser à moi.
Et ma vie sera toujours comme ça, tout changer dès qu'une meilleure opportunité s'offre à nous. Tout laisser derrière moi pour une "meilleure vie".
Meilleure vie, meilleure vie, moi j'en déchire les photos avec hargne. Sous les larmes et les reniflements, mes souvenirs s'éparpillent devant moi. Détruits, encore par moi. C'est lorsque je me rends compte de mon erreur que j'essaye de les scotcher avec les mains tremblantes, avant de les réinstaller sur le mur comme si de rien n'était. Pourtant, on voit encore qu'elles ont été torturées. Et elles ne redeviendront jamais comme avant.
෴
J'ai continué à jouer du piano pendant les prochains jours, parce que les cris continuaient.
— Tu m'écoutes quand je te parle ?
Mon père vient de retirer violemment mon casque de mes oreilles. Alors que j'étais assise sur ma petite chaise en bois, il me tire le bras en le serrant si fortement que je m'emporte avec lui jusqu'à la cuisine. Je n'entends pas ce qu'il se passe. Je n'entends pas les hurlements visibles sur les lèvres de mes parents. Ni lorsqu'il me donne des coups dans les bras pour me faire réagir, ni lorsqu'il me fait tomber au sol sans le moindre regret. Je reste sur place, à attendre que le temps passe et que les hématomes se forment sur ma peau rosée.
Fredonnant une mélodie dans ma tête.
Interdiction de piano ce soir, alors que c'est mon seul remède.
Alors, j'attends que je n'existe plus à leurs yeux pour dévaler les escaliers et me retrouver dans la rue déjà sombre, uniquement éclairée par des lampadaires. Mon cerveau bouillonne d'informations et mes pieds accélèrent sans relâche, si bien que j'en viens à avoir si chaud que je pourrais m'écrouler. Pourtant, je ne m'arrête pas. Sous la pluie forte, je marche, encore et encore, sans me retourner une seule fois, sans profiter du paysage qui s'offre à moi.
Mes cheveux sont trempés et dégoulinent le long de mon corps. Mon visage, lui, n'est plus qu'un mélange de gouttes et de larmes indissociables.
Je ne sais pas quelle heure il est.
Je n'ai pas pris mon téléphone.
Tout ce que je sais, c'est qu'il faut que je me repose, ou mes jambes pleines de galaxies ne tiendront pas le coup.
Lorsque j'aperçois un bus, je pique un sprint, malgré la douleur qui imprègne mon corps en porcelaine. Tout ça pour le louper une fois arrivée au niveau de l'arrêt de bus. Je soupire. Et j'ai beau chercher les prochains horaires, il n'y a rien d'indiqué. Aucune information. Alors, résignée, je m'installe sur le banc en bois de l'abribus, avec la jupe et les cheveux trempés, pour attendre le prochain qui arrivera dans je-ne-sais-combien de temps.
Je remarque qu'une autre fille attend le bus.
Elle a l'air d'avoir mon âge.
Peut-être qu'elle connaîtra les horaires, elle.
C'est alors que je prends mon courage à deux mains pour me lever et entamer la discussion. Finalement, nous rentrons ensemble sous un parapluie transparent. Il faut dire que le destin est parfois surprenant.
Je viens d'avoir dix-sept ans, je connais bien mon instrument, mais la vie n'est qu'un mystère de sons que je me tue à deviner.
Peut-être que je devrais suivre cette piste. Je lui écris mon numéro de téléphone sur le sac en carton qui transportait les sushis qu'on a engloutis, avant qu'elle ne parte avec un sourire aux lèvres. Quant à moi, allongée dans mon lit peu confortable autour de photos recollées, je tiens fermement mon oreiller entre mes bras. Un sourire sur mon visage. Un sincère qui n'était pas apparu depuis bien longtemps.
C'est ce soir-là que j'ai rencontré Théa, et je ne me suis jamais sentie aussi vivante.
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𝘕𝘋𝘈
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❝ Merci d'avoir lu ce trente-cinquième chapitre, j'espère qu'il vous a plu !
Que pensez-vous de ce chapitre ?
Que pensez-vous du point de vue d'Esther ?
Que pensez-vous de la famille d'Esther ?
Que pensez-vous de son passé ?
Quelle est votre citation préférée ? Et quel est votre moment préféré ?
Pour savoir quand le prochain chapitre sortira, suivez-moi sur Instagram ! (@orautri). ❞
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