C'est dommage
Combien de fois ai-je entendu cette phrase ?
C'est dommage, il n'était pas comme ça avant.
Avant quoi ?
Avant moi ?
Avant elle ?
Il était gentil et patient.
Il était attentionné.
Il était...
Moi je n'ai connu que la colère.
Les crises de rage qui font peur.
L'attention et l'affection, je les ai avant chaque départ.
« Pourquoi tu me fais autant de bisous ? »
« Pour tous ceux que je n'ai pas durant l'année. »
C'est ce que j'ai dit.
« Parce que tu n'es pas là tous les jours. »
C'est ce qu'il a compris.
« Parce que tu ne m'as pas montré que tu m'aimes depuis que je ne suis plus une enfant. »
C'est ce que je pensais.
Pourquoi tu n'acceptes pas que je te montre que tu es mon monde ?
Pourquoi tu ne me montres pas que je fais partie du tien ?
Le nombre de marque d'affection se mesure en nombre d'avion que tu prends à l'année.
Tu me manques papa.
Pas parce que je ne te vois pas mais parce que tu es loin même assis côte à côte.
Loin de moi.
C'est dommage, tu n'as connu que le monstre, la bête qu'il ne faut pas énerver.
Un pas de travers et c'est la colère qui fait peur, les mots qui font mal, les coups qui pleuvent.
De nouveaux souvenirs à ranger dans le tiroir des horreurs.
Ce tiroir sans clef dans un coin qui s'ouvre quand je m'y attends le moins.
C'est dommage, tu n'as pas eu de chance.
C'est dommage, elle n'était pas comme ça avant.
Avant quoi ?
Avant moi ?
Avant lui ?
Avant la bouteille ?
Elle était intelligente et extraordinaire.
Elle était gentille.
Elle était...
Moi je n'ai connu que la déchéance.
Les bouteilles vides cachées.
Les crises épileptiques.
Les mensonges.
Les hôpitaux et les centres d'addiction.
Entrecoupés d'espoir sous forme de glace et de balades en forêt. Sous forme de fauteuils en forme de main. Sous forme d'histoires de montagnes aux milles couleurs, la nuit, dans la maison d'une autre.
Et puis de nouveau, des bouteilles. Un centre.
Des mois d'absence.
Et puis les mensonges.
Des cigarettes en cachette.
Des médicaments interdits.
Un regard effrayé qui me regardait sans me reconnaître.
Un refus de ma part, des années sans la voir.
Un bowling mal à l'aise.
Trois ans.
Une vie meilleure pour moi.
Et puis un coup de téléphone en octobre avec des crises de larmes.
« Tu veux savoir ce que tu as fait de mal ? Tout.
Si tu m'aimes vraiment, laisse moi tranquille. »
Le silence.
Et puis de nouveau, un hôpital en février.
Mais plus dans la zone d'addiction.
Plus jamais.
Pour la première fois, tu étais dans les soins palliatifs.
Et puis, un corps méconnaissable, une vision d'horreur sur le lit d'hôpital.
Un nouveau souvenir pour le tiroir sans clef.
Et puis un cadavre.
Un semblant de paix pendant quelques jours.
Des funérailles.
Des pleurs.
C'est dommage.
De nouveau, encore et toujours.
C'est dommage.
Ma malédiction.
Elle était bien avant.
C'est dommage, tu n'as connu que la mère détruite.
Celle que tu ne peux pas sortir complètement de ta vie parce qu'elle revient toujours.
Mais aussi celle qui te détruit petit à petit avec elle si tu restes.
C'est dommage tu n'as pas eu de chance.
C'est dommage, tout le monde a pu les connaître joyeux, avant.
Mais toi, tu es arrivée trop tard.
C'est dommage tu n'as connu que la tristesse et la colère.
C'est dommage, tu n'as pas de chance.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top