☼ Chapitre 23 : Tensions à l'horizon ☼
Point de vue de Neymar
Les semaines sont passées si vite ces derniers temps que je tombe des nues en voyant la date du jour apparaître sur mon portable.
Déjà le 14 février ! Je n'y crois pas ! Les nombreux entraînements que nous avons eus auraient dû me mettre la puce à l'oreille pourtant. Je n'ai pas pour habitude de l'admettre mais j'appréhende un peu le match de ce soir contre le Bayern de Munich. L'équipe nous a bien ridiculisés en début d'année lorsqu'ils sont venus jouer à domicile... Aujourd'hui, c'est à nous de prendre l'avion, de leur rendre une petite visite pour prendre notre revanche mais cela ne sera pas facile. Loin de là.
Bruna a insisté pour m'accompagner en ce jour si spécial.
Je ne suis pas dupe, elle veut attirer, comme d'habitude, l'attention sur elle pour étoffer encore sa communauté sur les réseaux. Son autre requête m'a en revanche surpris. Elle souhaite à tout prix être sur la pelouse aux côtés de ma meilleure amie, Ester, et de ma petite sœur lorsque le moment où nous devrons nous battre comme des lions sur le terrain viendra.
Après m'avoir menacé de révéler aux journalistes que je l'ai trompée, je n'ai pas eu d'autres choix et ai accepté qu'elle se joigne à notre fine équipe. Pourvu qu'elle ne fasse pas des siennes là-bas.
Je me sens si bête d'avoir été pris sur le fait... Maintenant, c'est une corde de plus à son arc pour me démolir et détruire tout ce que je suis parvenu à construire jusqu'ici...
Heureusement, dans mon malheur, Ester est au courant de la situation de A à Z maintenant. Elle ne m'a pas lâché comme je le craignais et se charge de me soutenir chaque jour. Ilona aussi. Bien qu'elle ait constamment des envies de meurtres lorsque Bruna pointe le bout de son nez, elle m'a promis de se retenir sauf si je lui demande le contraire.
Je suis content de pouvoir compter sur elles deux et sur les rares garçons mis dans la confidence.
De peur de louper le vol, je m'habille en vitesse et m'empêche de penser davantage. Je rassemble mes affaires dans mon sac de sport, le referme, mords dans une tartine de pain pleine de beurre et de confiture, essuie d'un revers de main le coulis de framboise qui a coulé sur mon menton et file à toute allure dans l'allée devant chez moi qui mène à une rue passante.
Comme convenu, Ester, Ilona et Sergio m'attendent dans la Mercedes de la Madrilène d'adoption et m'ouvrent même la portière arrière.
Pour ne pas nous faire perdre de précieuses minutes, je saute dans sa voiture et m'attache. Après s'être assurée que nous sommes au complet, Ester remonte ses lunettes de soleil sur son nez puis démarre sur les chapeaux de roue. L'aiguille sur son compteur indique qu'elle dépasse la vitesse autorisée mais j'ai confiance en ses talents de conductrice.
Je ne saurais l'expliquer mais elle est la seule à réussir à me faire oublier l'accident qui a failli me coûter la vie et celle de mes parents quand j'étais petit. Sergio, lui, s'agrippe à tout ce qu'il peut.
En plein dans un virage large, elle accélère encore, maintient sa trajectoire d'une main de maître. Elle aime jouer avec le feu mais uniquement quand elle sait qu'elle peut avoir le dernier mot. On ne la changera pas... L'aéroport approchant, elle finit par ralentir et stationne son véhicule sur le parking déjà bien rempli. Nous nous extirpons tous de son bolide, jetons un œil en direction des Italiens et Portugais qui arrivent à notre hauteur et rejoignons ensemble l'avion privé de l'équipe.
Tout sourire, je fais un check à tous mes équipiers, plaisante comme avant chaque décollage et le perds aussitôt quand j'aperçois Bruna qui m'a réservé une place à côté d'elle. La tête rentrée dans les épaules, la mine renfrognée, je me dirige vers elle exactement comme si j'allais à l'échafaud.
Toutes deux compatissantes, Ester et Ilona m'adressent un regard désolé puis s'installent sur des sièges libres deux rangées devant moi. Sergio et Kylian se sont mis côte à côte pour jouer durant le vol. Tout comme Marco et Messi ainsi que Gigio et Marqui.
Le moral dans les chaussettes et certainement blanc comme un linge, je me laisse tomber à mon tour près du hublot. Quelle poisse...
✶ ✶ ✶ ✶ ✶
Pour mon plus grand bonheur, l'avion vient d'entamer sa descente.
D'ici quelques minutes, je serai un homme libre. Je n'aurais jamais pensé avoir autant hâte de me dépenser sur la pelouse du stade de l'équipe allemande.
Loin. Si loin de Bruna et de mes problèmes.
Sages comme des images, nous descendons à la queue leu leu et marchons vers le bus décoré aux couleurs du PSG. Le trajet se déroule encore une fois sans encombres.
Motivés comme jamais, nous entonnons des chants pour nous porter bonheur. Christophe, notre coach, nous observe d'un air amusé.
Je le comprends, il souhaite aussi de tout son cœur que nous remportions ce match pour redorer notre blason. Notre sac sur le dos, nous passons les barrières métalliques érigées spécifiquement pour l'entrée des joueurs, prenons le virage qui mène aux vestiaires et allons nous changer tandis que la majorité des membres du staff débarque sur le terrain.
Pendant que nous enfilons notre attirail de guerre, Christophe nous explique l'échauffement que l'on va devoir mener tambour battant devant les supporters.
Si avec son programme, nous ne sommes pas évacués sur des brancards, nous aurons une chance du tonnerre !
✶ ✶ ✶ ✶ ✶
Finalement, j'ai peut-être été mauvaise langue. Grâce aux exercices qu'il nous a proposé, je suis en pleine forme pour affronter nos adversaires.
À ma grande surprise, le temps a défilé encore une fois à une vitesse monstre. Avant que je ne le réalise, nous voilà dans le tunnel.
Le torse bombé, la tête haute et le dos droit, nous remontons l'interminable ligne droite qui nous sépare de la pelouse. Tant mon excitation est à son comble, mon cœur bat à tout rompre. Munich nous voilà. En l'honneur du roi Pelé, mon idole, une minute de silence pour lui rendre hommage est décrétée.
La main sur le cœur, je lève ma tête vers le ciel, les lèvres tremblantes. Il y a quelques jours, notre légende brésilienne est décédée des suites d'un cancer. Mon empathie, mon côté sentimental me tordent et me nouent l'estomac, me serrent de leurs griffes acérées les entrailles. Je souffre.
Si je m'écoutais, j'éclaterais en sanglots comme tout le monde ici présent. Les supporters, le staff et les joueurs des deux équipes s'effondrent à leur manière. Leurs joues trempées, leur nez rougi, leurs yeux rouges font peine à voir. Des larmes aussi lourdes que des ballons de foot menacent de franchir la barrière de mes cils épais.
Secoués eux aussi, les arbitres donnent le coup d'envoi. Ce match va être dur. Dans tous les sens du terme... Nos adversaires sont aussi tendus que nous. Des gestes rageurs claquent l'air de leur fouet dévastateur. Des disputes violentes éclatent lors des pertes de balle. Des coups partent. Des paroles obscènes fusent. Et le pire survient.
D'un ton méprisant, suffisant, odieux, un défenseur m'attaque sur ma couleur de peau. Ses mots profondément choquants raisonnent en moi et me font l'effet d'un électrochoc.
Fou de rage, je me jette sur lui sans réfléchir. Ce connard n'avait pas le droit. Il aurait pu me dire un tas d'autres choses mais pas ça. Hors de moi, je le frappe à plusieurs reprises avant d'être levé de force par Sergio. Je me débats, hurle la haine que j'ai envers cet allemand. Malgré la difficulté, Sergio me maintient contre lui fermement et m'entraîne plus loin vers Ester et ma sœur. Aveuglé par la colère, je continue de bouger, tente de le mordre au bras pour retourner me battre.
— Ça suffit maintenant ! me gronde Ester. Tu vas te calmer et m'expliquer ce qui s'est passé.
Comme un enfant de trois ans, je m'assagis aussitôt. Sa grosse voix m'a impressionné. Elle ne se met pas souvent en rogne mais lorsqu'elle le fait, elle peut devenir terrifiante. Christophe attend aussi des explications ainsi qu'Ilona et l'aîné de ma meilleure amie.
— Il m'a dit que j'étais bien bronzé pour le mois de février et que j'avais toute ma place aux côtés de mes amis les singes. Il a continué en imitant leur bruit, déclaré-je la mâchoire serrée.
— Gros con, marmonne Ester d'un air mauvais. Il va voir de quel bois je me chauffe.
Prête à lui sortir ses quatre vérités en face, elle prend son élan et s'apprête à débarquer avant que je la retienne in extremis par la taille.
— N'envenime pas la situation, s'il te plaît. Je viens d'être expulsé, c'est bien assez.
— Il y aura toujours des idiots qui tenteront d'appuyer là où ça fait mal, soupire-t-elle. N'accorde pas d'importance à ses mots. À la cérémonie de remise des cerveaux, il devait être parti pisser.
Même si je suis encore choqué par cette attaque, je ne peux m'empêcher de rigoler. L'expression qu'elle emploie et la tête sérieuse qu'elle arbore ont le mérite de détendre l'atmosphère.
* La date du décès a changé. En réalité, il a rendu son dernier souffle le 29 décembre 2022.
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