☼ Chapitre 2 : Surprise surprise ! ☼

Point de vue d'Ilona 

Plus rien ne trône dans l'entrée. Ester a récupéré ses affaires comme convenu. Je suis si contente qu'elle soit près de moi maintenant. Son connard de patron ne pourra plus la briser.

Elle me manque déjà ! Son rire communicatif aussi. Même si elle s'efforce de ne pas le montrer, je vois bien que ce qu'elle a vécu l'a changée. Ses yeux ont perdu de leur malice et de leur joie de vivre, son visage s'est aminci, ses joues se sont légèrement creusées. Elle doit avoir terriblement souffert...

Je suis là pour la défendre désormais. Son frère aussi. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il peut-être impressionnant lorsqu'il s'y met. Elle ne sera plus jamais seule.

Pour ne pas prendre de retard dans notre programme, je fonce me préparer dans la salle de bain. J'enfile un chemisier kaki fluide que je rentre dans une jupe noire en similicuir.

Je relève ensuite mes cheveux en une queue de cheval haute, applique du mascara sur mes cils et un trait de crayon sur le dessus de ma paupière puis termine mon look en recouvrant mes lèvres d'une teinte rouge foncé.

Ester ne le sait pas encore mais nous avons prévu un dîner dans son restaurant préféré et une soirée en boîte à l'occasion de son arrivée. J'ai hâte d'avoir sa réaction en direct tout à l'heure.

Bien que j'aie une confiance aveugle en lui, je croise les doigts pour que mon frère n'ait pas vendu la mèche. Je sais à quel point Ester peut être persuasive quand elle veut. Si elle n'avait pas été en communication, je l'aurais très bien vue dans la police à mener des enquêtes, à tirer les vers du nez des coupables présumés et à mettre des criminels derrière les barreaux.

Finalement, j'ai été plus rapide que prévu. Je reviens sur mes pas et retourne dans le salon. Pour passer le temps, je m'installe devant une série dont je ne me lasse pas : Vampire Diaries. Je sirote un verre de grenadine en regardant le récapitulatif du dernier épisode. Mes pieds reposent sur la table basse en verre que je me suis payée grâce à mon premier salaire.

Me rappelant à la réalité, mon téléphone vibre une demi-heure plus tard. Presnel m'informe que Ney est sur la route avec ma meilleure amie et qu'ils ne devraient plus tarder. Vite, je prends mes clés, mon sac à main et mon perfecto en jean.

Je verrouille la porte de mon appartement et sprinte jusqu'à ma voiture. Exceptionnellement, je laisse à peine chauffer le moteur. Je démarre en trombe et m'insère dans la circulation dense. Les minutes défilent, j'ai l'impression de me trouver dans une course contre la montre.

La chance me sourit cependant. Une place se libère juste devant l'établissement et me permet de me garer. Je ne me repose pas sur mes lauriers et bondis hors de mon véhicule. Je rejoins les gars à l'intérieur, essoufflée. Je me demande comment mon aîné a réussi à tenir sa langue et à ne pas éveiller la curiosité d'Ester. Je suis sûre qu'elle ne se doute de rien. Il est vraiment trop fort.

— Alors, Ilona ? Tu t'es endormie ou quoi ? me taquine Kylian.

— Eh ! Ne te moque pas ! J'étais juste sur Netflix ! me justifié-je, en lui donnant une tape amicale sur l'épaule.

— Trop pas crédible, rigole-t-il.

Je n'ai pas le loisir de répliquer. Mon frère et Ester franchissent les portes du restaurant. C'était moins une. Un peu plus et j'arrivais après eux !

— Surprise ! crions-nous en chœur.

Le choc est tel qu'elle fait un bon en arrière, butte contre le torse de mon aîné qui la rattrape in extremis et porte une main tremblante à son cœur. De toute évidence, elle ne s'y attendait pas !

— Bienvenue à Paris, sœurette !

Ses yeux s'embuent sous le coup de l'émotion. Ses doigts s'agrippent à sa robe à motifs floraux. Elle ne sait pas comment réagir, oscille entre la joie, la tristesse et la colère.

Son visage fin se crispe, ses pommettes hautes se colorent.

Nous attendons tous un signe de sa part qui ne vient pas. Elle est comme paralysée face à nous. Je m'approche d'elle et la serre contre moi.

— Tu vas bien ? m'enquiers-je, inquiète.

— Oui, oui, me répond-elle un peu sonnée. Je ne pensais pas que vous organiseriez quelque chose. Surtout pour moi. Je ne mérite pas tout ça.

— Au contraire, toi, plus que personne d'autre, mérite d'être la vedette.

Après quelques instants, elle met fin à notre étreinte et prend la parole d'une voix mélodieuse.

— Merci à tous pour cette délicate attention qui me fait très plaisir. Je suis heureuse d'être avec vous ce soir pour clôturer cette première journée en France. Je ne pouvais pas rêver mieux.

L'assemblée l'écoute. On pourrait entendre une mouche voler. Les joueurs semblent touchés par ses mots. C'est vrai qu'Ester a ce don de rassembler des personnes à travers un simple discours. Chaque phrase peut faire vibrer et résonner des cordes en nous. Alors qu'elle est acclamée par un tonnerre d'applaudissements, je me penche vers elle discrètement et chuchote dans son oreille qu'elle peut venir s'installer. Conciliante, elle me suit et remercie un à un chaque sportif qu'elle croise sur son chemin. Renato, Nuno, Marco, Gianluigi, Marqui, Messi, Kylian, Hugo, Presnel et son frère ont formé une haie d'honneur.

Tout sourire, elle prend place en bout de table. Je m'installe à sa droite alors que Sergio s'assoit à sa gauche. Sans vouloir me lancer de fleurs, la voilà bien entourée. Radieuse, elle jette un œil à la carte.

— Ne me dis pas que tu ne la connais pas par cœur, pouffé-je. Tu viens toujours ici quand tu es de passage.

— C'est pour la prononciation, je ne retiens jamais comment on le dit, admet-elle, penaude.

— C'est vrai que ce n'est pas évident, ajoute Marquinhos sur le ton de la confidence. Même après des années de pratique, j'ai encore du mal avec certains mots.

Notre serveur attitré interrompt notre conversation, calepin en main. Prêt à noter ce que nous allons commander, son stylo survole de quelques millimètres le papier nu.

Tour à tour, nous prenons la parole et l'informons de nos choix respectifs. Quand vient le tour d'Ester et malgré toute sa bonne volonté, elle butte sur certaines syllabes et doit se reprendre à plusieurs reprises, rouge cramoisie. Elle frôle la syncope. Je la connais. Alors que je m'apprête à intervenir, Gianluigi vient à la rescousse contre toute attente et me devance. Reconnaissante, ma meilleure amie échange un regard avec lui et lui fait part de sa gratitude du bout des lèvres.

Satisfait, le serveur tourne les talons et part transmettre en cuisine les différents plats.

✶ ✶ ✶ ✶ ✶

Le repas terminé dans une ambiance festive, nous nous levons tous et nous partageons les frais. Ester est la seule à ne pas débourser un sou. Elle nous remercie de l'avoir invitée, nous emboîte le pas à l'extérieur et regarde l'heure sur son portable. D'ici peu, minuit sonnera. Nous prenons alors le chemin de la seule discothèque réputée du coin. Pour que nous ne soyons pas embêtés, les garçons ont réservé un espace rien que pour nous à l'étage.

Bras dessus, bras dessous avec Kylian, nous passons par la porte de derrière. Nous montons les marches quatre à quatre et sprintons jusqu'au bar, imités par le reste de notre bande d'amis. En pleine discussion avec Marco, Ester est l'exception qui confirme la règle. Ils gravissent l'escalier à leur rythme et atteignent le comptoir sans se presser.

De notre côté, nous attendons avec impatience que le barmaid prépare nos boissons. L'occasion étant spéciale, nous sommes partis exceptionnellement sur un verre de cava*. Petit à petit, il les dépose sur le revêtement en résine pour que nous nous servions.

Nos flûtes en main, nous trinquons à l'arrivée de la cadette de Sergio.

Sa bonne humeur est si communicative que nous formons un cercle et nous mettons à danser, heureux d'être réunis ce soir. L'alcool aidant, nous nous déhanchons et profitons de ce moment comme si c'était le dernier. Je suis tellement ravie d'avoir fait leur rencontre, d'avoir la chance de les côtoyer en tant que kiné du club. Ils ont une grande place dans mon cœur et dans ma vie. Ils font partie de mon cercle rapproché. Je ne les échangerai pour rien au monde.


*cava : équivalent du champagne. Il s'agit d'un vin mousseux et sec de Catalogne qui est élaboré à partir de différentes variétés de raisins : le macabeo, le parrellada et le xarello. Symbole de finesse et de délicatesse, le cava est la boisson consommée en Espagne pour toutes sortes de célébrations ou des fêtes importantes, comme en France. 

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