Chapitre 11 : Soul Terra


TW : Il est mention de v*ol dans ce chapitre. Rien n'est détaillé mais je préfère prévenir.

Autre TW sur la cigarette, puisque j'en fais mention dans ce chapitre. Non fumeuse, mais entourée de fumeurs, n'oublions pas que c'est mauvais pour la santé...
Prenez soin de vous <3

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« Voici les blessés. »

Une vingtaine de personnes sont allongées devant moi, certaines sont plus gravement touchées que d'autres. Leurs blessures sont bandées, ayant reçu les premiers soins. Mais leurs gémissements étouffés témoignent de toute la souffrance qu'ils ressentent encore. Les villageois présents essaient tant bien que mal de soulager leur peine. Je sens Soul reculer, pris d'effroi.

« Pourquoi il y a des villageois ? souffle-t-il.

- Ici, c'est leur village, j'explique. Ce sont leurs terres, leurs maisons, leur vie. En général, les enfants sont évacués mais la plupart des adultes restent. »

Soul ne répond pas tandis que je m'avance au milieu des blessés. Une jeune fille à peine plus âgée que Soul essuie le front d'une femme âgée.

« Tous les blessés sont présents ? je lui demande doucement.

- Oh euh... Oui madame ! »

Ses yeux brillent d'admiration en voyant ma cape. Sûrement venait-elle de comprendre que les renforts sont arrivés. Je tends mes mains au ciel et lance mon sort magique.

« Magie régénératrice de glace : Flocons gelés apaisants."

Un dôme de lumière bleuté englobe tous les blessés avant que des flocons ne tombent, se déposant sur les blessés. Presque instantanément, les gémissements de douleur cessent. Contrairement à la dernière fois, je sens que mon sort fonctionne. C'est étrange comme sensation mais j'ai l'impression d'être connectée à chaque cellule composant leur corps. Petit à petit, elles se régénèrent.

« Magnifique... »

Je me tourne vers Soul qui n'a pas bougé depuis tout à l'heure.

« Soul, je l'appelle le tirant de sa rêverie. Je ne peux pas bouger d'ici tant que mon sort est actif. Je compte sur toi pour nous protéger. »

Ma remarque suffit à lui faire rappeler son rôle ici.

« Oui ! Magie de création de terre : Tour mère ! »

Une grande tour faite de terre l'élève dans les airs. Ainsi, il a une vue de l'ensemble du village. Satisfaite, je me concentre sur ma magie. C'est un peu un pari de m'avoir envoyé soigner des blessés sans connaître la véritable puissance de mon sort. Mais Nozel a gagné ce pari. Malgré le nombre de blessés, il ne me faut qu'une vingtaine de minutes pour tous les soigner. J'ai utilisé beaucoup de maana, mais je ne suis pas aussi épuisée que la dernière fois. Rassurée, je défais mon sort.

« Et voilà... »

Les anciens blessés commencent à se redresser doucement, et me remercient chaleureusement.

« Je n'ai fait que mon devoir. Restez encore ici, le Capitaine de l'Aigle d'Argent ne devrait pas tarder à mettre fin à la bataille. »

Mon annonce remplit tout le monde de joie. Des familles se prennent dans les bras en pleurant. Un sentiment de fierté s'empare de moi. Soul saute de sa tour pour me rejoindre.

« Je ne vois aucun mage, je pense que le capitaine les a tous maîtrisés.

- Continuons de monter la garde en l'attendant. »

Soul hoche la tête. La mission aurait pu s'arrêter là si je n'avais pas senti du maana nous foncer droit dessus. D'un même geste, Soul et moi nous nous retournons.

« Magie de création de glace : Bouclier gelé !

- Magie de création de terre : Mur de terre ! »

Notre défense combinée se fait frapper de plein fouet par un sort, provoquant la panique derrière nous. La puissance de frappe est si forte que nos murs volent en éclats. Heureusement, le sort ennemi est tout de même annihilé.

« Soul ! Protège les villageois !

- Magie de création de terre : Forteresse de mère nature ! »

Cette fois-ci, c'est moi qui suis impressionnée par l'immense forteresse qui se ferme sur les anciens blessés et villageois, les protégeant de toute attaque extérieure. Soul n'est pas un noble pour rien. Doté d'une grande réserve de maana, il possède également de puissants sortilèges.

La femme qui nous a attaqués se dévoile. Elle est un peu blessée et semble désorientée.

« C'est étrange, commence-t-elle. Rien ne s'est passé comme prévu... Si ce satané noble n'était pas intervenu, on aurait pu contrôler une partie de cette région... Ah ? »

Son regard passe de moi à Soul, avant de sourire sadiquement.

« Je voulais détruire le village pour me venger... Mais vous êtes les compagnons de ce noble non ? Vous avez la même cape ridicule... Quelle sera sa réaction en vous voyant vidés de votre sang ? »

Pris de peur par ses menaces, je vois Soul reculer du coin de l'œil.

« Soul ! Ne recule pas. On va la vaincre ensemble, compris ?

- Je... Heu oui, tu as raison ! »

La femme lance la même attaque que toute à l'heure. Il s'agit d'une sorte de lance faite de poussière, si j'ai bien entendu l'intitulé de son sort.

« Magie de création de terre : Entrave du serpent !"

La magie de Soul prend la forme d'un serpent qui s'enroule rapidement autour de la lance qui se brise sous l'impact du serpent.

« Magie de création de glace : Lance gelé ! »

Je saisis la lance qui sort de mon grimoire, et fonce sur notre ennemie. Déstabilisée par mon attaque frontale, elle n'évite que tardivement mon offensive. Touchée au bras, il commence à geler sous les cris de la femme. Je pensais que la stupeur l'empêcherait d'agir, mais au contraire, elle relance un sort.

« Magie de poussières : mitrailleuse ! »

Par réflexe, je fais apparaître un mur de glace. Seulement, elle a une puissance d'attaque suffisante pour le briser. Je suis touchée au niveau de la hanche, me forçant à poser un genou à terre sous la douleur. Mais pendant son attaque, elle n'a plus fait attention à Soul. Son serpent s'est suffisamment approché de la femme et s'entoure autour d'elle, l'étouffant.

« Magie entravante de glace : Emprise gelée ! »

Comprimée par le serpent, et gelée avec son grimoire, elle ne peut plus riposter. Nous avons gagné.

« Bien joué Soul ! je m'écris.

- On a réussi... souffle-t-il, soulagé.

- Qu'est-ce qui s'est passé ici ? »

On se tourne, interpellés par la voix dure de notre Capitaine. Il avance vers nous, l'air grave. Pour quelqu'un qui revient du front, il n'a même pas une égratignure.

« Rien, nous avons accompli notre mission, comme vous nous l'aviez demandé. Guérir et protéger les blessés. »

Son regard se pose sur la femme prise par notre magie. Nozel semble contrarié.

« Je ne pensais pas que l'un des leurs avait réussi à m'échapper. Bon travail. »

Il n'en fallut pas plus pour faire planer Soul. Il annule sa forteresse et les habitants viennent à notre rencontre. Lorsque Nozel annonce la défaite de l'ennemi, ils crient tous de joie.

« Tu es blessée, constate Nozel à mon égard. »

Je regarde ma blessure. Il est vrai que je saigne, mais ce n'est pas profond. Je soulève un peu mon haut et lance mon sortilège de soin, sous les yeux de Nozel.

« Je ne pensais pas que mon sort était aussi efficace, je lance. Je suis contente. »

Nozel regarde ma blessure se refermer rapidement avant de poser un regard vers le camp des blessés. Tout le monde est debout, en excellente santé. Un bref instant, je le sens perturbé sans que je n'en sache la raison.

*****

Après la bataille, nous nous sommes alliés avec les Chevaliers-Mages du Lion Flamboyant pour aider à la reconstruction du village. Ma magie n'est pas vraiment adaptée pour cela, mais j'aide les habitants à se réinstaller. Ils ont d'ailleurs décidé de cuisiner un bon repas en guise de remerciements. Face à l'engouement du village, Nozel a fini par accepter de passer la nuit ici. Honnêtement, je ne pensais pas qu'il serait resté.

La soirée s'est donc passée dans la bonne humeur et la joie de la paix retrouvée. Soul s'est mêlé aux danses traditionnelles du village ce qui m'a fait beaucoup rire. Il est très maladroit dans ses gestes mais fait preuve d'une volonté de fer pour réussir les pas de danse. De temps en temps, je danse avec lui. Cette petite fête me rappelle beaucoup celles de mon village et je suis emplie de nostalgie.

C'est sûrement ce sentiment qui m'empêche désormais de dormir. Le village nous a prêté plusieurs maisons pour passer la nuit. Nozel, Soul et moi logeons dans la même maisonnette. Soul et moi dormons dans la même chambre, laissant le luxe à notre Capitaine d'avoir sa propre pièce.

Mais voilà, mon esprit refuse de se laisser aller aux bras de Morphée. Trop de questions et de pensées tournent en boucle dans mon esprit. Et c'est ainsi que je me retrouve à lisière de la forêt, assise contre un arbre, en train de fumer. Le ciel est dégagé, m'offrant une légère luminosité lunaire qui est très agréable. Le bruit des animaux nocturne parvient jusqu'à mes oreilles. Ces sons sont si apaisants pour moi... Je n'ai qu'à fermer les yeux pour avoir l'impression d'être de retour dans mon village.

Tout le monde me manque. Avec un pincement au coeur, j'imagine ma mère travailler seule dans les champs. Je m'en voulais beaucoup de l'avoir abandonné. Je lui avais écrit une lettre suite à mon entrée dans une compagnie. Elle m'avait répondu, me disant qu'elle était contente pour moi. Mais depuis, je n'avais plus de nouvelles. Je savais qu'elle n'était pas d'accord avec mon choix mais de mon côté, j'en avais vraiment besoin.

Mon frère n'aurait pas dû mourir. Je n'aurais pas dû subir les violences que j'ai vécues. On était censé être un Royaume en paix et pourtant... Je ne pouvais m'empêcher de me demander combien de villages subissaient ce genre de sévices. J'aimerais que toutes les compagnies, sans exception, se rendent véritablement compte de la chose. C'est ce que je souhaite vraiment...

Pourtant, je suis bien consciente qu'éradiquer le problème à sa source serait tout aussi efficace. Mais l'idée de me battre contre une armée me terrifiait. Je ne me sentais pas assez forte pour ça... Je me sentais un peu lâche à vrai dire. Tellement de sentiment et d'émotions rentraient en contradiction que c'en venait à me fatiguer.

Que pouvais-je faire à mon échelle ? Je ne suis qu'une recrue qui avait mis à dos son Capitaine. Ça partait si mal...

Je replie mes genoux, déprimée en tirant une nouvelle fois sur ma cigarette.

Je suis perdue.

« Que fais-tu là ? »

J'ai un sursaut en tournant la tête vers le propriétaire de cette voix si dure et glaciale. Mon regard croise celui de Nozel, les bras croisés sur son torse. C'est la première fois que je le vois sans la cape de la Compagnie. Il n'est vêtu que de son pantalon habituel ainsi que d'un haut à manche longue, blanc, serré près du corps. Et bien malgré moi, je ne peux que constater sa musculature fine sous son vêtement. En remontant les yeux vers son visage, je vois qu'il n'a pas sa tresse. Ses cheveux, en batailles, tombent sur ses épaules dans de magnifiques lueurs bleutées causés par les lueurs de la lune.

Je crois que c'est la première fois que je trouve un homme séduisant. Et j'aurais aimé que ce ne soit pas mon Capitaine...

« Rien... Je n'arrive pas à dormir. »

Il jette un oeil sur ma cigarette, visiblement dégoûté par ce minuscule objet.

« Et pour remédier à ça, tu fumes.

- Je n'ai pas envie de me battre avec vous ce soir, soupirai-je. Faire comprendre à un non-fumeur que parfois, la cigarette permet juste de nous calmer, c'est peine perdue. »

Il ne répond pas, se contentant de détourner le regard. Il semble vouloir partir, mais cette fois-ci, c'est moi qui le retiens.

« Pourquoi ne m'avez-vous pas encore viré ?

- Devrais-je le faire ? »

Je fronce les sourcils avant de me relever. Ses yeux rencontrent de nouveau les miens, sans qu'il ne les détourne comme il avait semblé vouloir le faire ces derniers jours.

« Je ne sais pas, à vous de me le dire. Je ne fais pas partie de la noblesse, et vous semblez me prendre pour une traîtresse...

- J'ai changé d'avis. »

Mon regard se fait plus insistant. Étrangement, je sens qu'il est enclin à me parler. Serait-ce causé par l'heure tardive de la nuit ?

« Pourquoi ? je reprends. Que pensez-vous de moi désormais ? »

Il semble réfléchir un moment, me détaillant à son tour du regard. Un instant, je me sens un peu gênée. Je ne suis pas plus habillée que lui à vrai dire. Je n'ai une chemise de nuit blanche que m'a prêtée une villageoise.

« Je ne sais pas. Tu es l'une des rares personnes que je n'arrive pas à déchiffrer. À comprendre.

- Ah oui ? Pas étonnant, j'ai déjà du mal à me comprendre moi-même. »

Surpris par ma réponse, c'est à son tour de froncer les sourcils. D'humeur légèrement joueuse, je commence à me rapprocher de lui.

« Erin était... une enfant difficile, commençai-je. Insolente, orgueilleuse, prête à faire mille et une bêtise pour qu'on la remarque... Tout ça à cause de sa magie de glace. Quelle utilité pour un village ? Tout le monde utilise sa magie pour cultiver les champs et faire prospérer le village. À part faire crever les bêtes et les cultures, sa magie ne sert à rien. Ah si, elle servait à conserver les aliments. Mais ça ne suffisait pas. Elle en voulait plus. »

Je ne me rends pas vraiment compte de ce que je dis, le besoin de parler se fait de plus en plus fort. Je ne suis plus qu'à quelques centimètres de Nozel, mais je continue à m'approcher.

« Et puis... Le village a été attaqué. L'insolente Erin a vu comment les mages faisaient pour tuer des simples paysans. De peur de mourir, elle n'a rien fait. Elle n'a même pas essayé de protester lorsque les hommes sont venus pour profiter d'elle. Rien du tout. »

Je pose ma main sur le torse de Nozel, et commence à jouer délicatement avec le doux tissu.

« À chaque seconde, elle a souhaité que les Chevaliers-Mages la sauvent. Chaque seconde, elle a prié que vous veniez les libérer. Chaque seconde, elle pensait à vous. Et pourtant, ce n'est que lorsque son frère a décidé que c'en était trop, qu'il a donné sa vie pour les protéger, qu'elle s'est réveillée. C'est elle qui a sauvé son village, avec la magie qu'elle détestait tant. Miracle ! Désormais, le village l'acclamait. Elle avait atteint son but. Elle était puissante, et les gens la regardaient enfin. »

Nozel ne dit rien, plongé dans un silence alors que je le sens se crisper sous mes doigts.

« Et pourtant... Elle ressent tellement de colère et de honte en elle. Étrange, n'est-ce pas ? Erin s'est perdue ce jour-là. »

Je relève enfin la tête, rencontrant le regard indéchiffrable de Nozel.

« Je ne sais plus qui je suis. Maintenant, dites-moi, mon Capitaine. En sachant tout cela, si je souhaite, si je prie, si je pense à vous... Viendrez-vous me sauver cette fois-ci ? »

Je ne comprends pas moi-même pourquoi je dis une telle chose. Mais c'est sur ces paroles que je rentre dormir, laissant Nozel à ses pensées.

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