8. Date limite de péremption
Stéphane était sorti de la vie de Gaëtane. Ce n'était pas cependant la fin de son apparition. Il voulait encore exister pour elle (et elle pour lui). Continuer à se voir, car ils ne se haïssaient pas. Comment auraient-ils pu (se demandait-il, sans même imaginer que ses agissements, puis son départ après lui avoir octroyé un retour finalement passager, avaient laissé un goût amer dans la bouche de Gaëtane) ?
Il avait pris un appart, il avait partagé le matériel commun de loisirs, et emporté ce qu'il avait apporté au pot commun plusieurs années auparavant : une paire de draps, un couteau, son ordinateur, son skateboard et sa cafetière.
Quand on commence une histoire d'amour, on n'imagine jamais sa date limite de péremption. On croit que le couple est éternel, que contrairement à tous les éléments sur notre terre, il ne s'érodera pas avec le temps. Non seulement cette date n'est pas indiquée, mais on ne sait pas non plus ce qu'on risque à la dépasser : simple fadeur, urticaire, aigreurs d'estomacs, maladie grave, dégénérescence ? Et que risque-t-on à la respecter ?
Solitude ou plénitude ?
Solitude de ces repas où la fourchette fait écho au couteau. Plénitude de ces moments rien qu'à soi, sans les bruits parasites de la TV, du téléphone ou de la belle-mère. Solitude de ces ballades où le moindre événement ne peut plus être sujet d'une conversation. Plénitude du temps enfin trouvé pour faire les albums photos. Solitude des tergiversations en boucle dans la tête. Plénitude des soirées entre copines. Solitude du problème de connexion internet à régler seule. Plénitude des promenades nocturnes en bord de mer. Solitude des vieilles photos toujours pas classées. Plénitude du bruit de la TV.
Pourquoi n'apprend-on pas à rompre ?
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