7. CARNET DE GAËTANE -17 octobre 2020
Aujourd'hui, j'ai rendez-vous avec mon destin.
Mais je ne veux pas me confronter à moi. Même si tous me l'ont dit, qu'il fallait que je profite de ces instants de solitude pour apprendre à me connaître. Il n'y a rien à faire, je ne veux pas être seule. Je refuse même l'idée ! Je suis de ceux qui vivent en tribu. Je veux être entourée. Tout le temps.
Et plus que tout, je le veux, lui.
Pourtant, il est parti ce matin.
Après un très joli moment où il s'est affalé à côté de moi dans ce que j'appelle maintenant le pouf-à-dépression. Ma main dans la sienne. Et pour une fois, c'est lui qui avait pris ma main.
Mais il fallait qu'il la lâche. Il l'avait programmé il y a un mois (peut-être plus?) : il avait rendez-vous lui aussi avec son destin. Ou plutôt avec son amour, avec le coup de foudre qu'il veut vivre, peut-être le premier de sa vie : Carine. Celle qui colore ses jours depuis plusieurs mois.
Que suis-je face à ça ? Je ne suis que chagrin, passé et routine. Elle, elle est promesse, surprise et découverte. Et le cœur qui bat. Et la bite qui s'excite.
Même si je le sais, et même s'il le sait aussi que c'est provisoire, que ça ne va pas durer, parce qu'ils n'ont rien en commun. Parce qu'un couple, c'est plus que des hormones qui s'attirent, c'est plus qu'un coup de foudre. Un couple, et l'alchimie qui fait que ça dure, c'est un savant mélange d'amour, de complicité, de valeurs communes, de projets partagés et de capacité à affronter la routine et les problèmes.
Mais je sais aussi qu'il ne peut pas lutter. Que l'attirance est trop forte. Des souris finissent bien zigouillées dans un piège pour la promesse d'un bout de gruyère.
Je repense à la soirée d'hier en roulant sous la pluie vers le marché : notre kilomètre de natation quotidien dans l'eau gelée, un ti'punch sur les rochers pour aider les rayons du soleil à nous réchauffer et une soirée crêpe, la dernière de notre vie, à nous remémorer des tonnes d'anecdotes. A mettre à l'honneur ce NOUS qui se consume, comme se vide la bouteille de cidre. Avec mes pleurs et mes peurs au milieu. Et puis cette nuit encore dans ses bras, jusqu'à ce départ, lui avec les larmes aux yeux. Pourquoi l'amour doit-il être exclusif ? Pourquoi doit-il à tout prix partir ?
Une notification de SMS vient me sortir de ma rêverie. Je regarde machinalement, commence à lire. Mes yeux s'embuent. Je pose le téléphone et file jusqu'au terre-plein avant le port : il faut un bel endroit pour lire ça. Je me gare face à la mer, les gros rochers gris en premier plan, l'eau claire, la pointe verte droit devant, avec ses rochers rouges, et la montagne parfaite qui ferme le golfe à ma droite. Le soleil est revenu. Je prends une grande inspiration et ouvre le SMS.
Merci
Merci pour tes sourires
Merci pour ces souvenirs
Merci de m'avoir accompagné autour du monde
Merci pour toutes ces sorties kite et d'escalade
Merci pour ton courage
Merci pour ta loyauté
Merci pour ta fidélité
Merci pour ta franchise
Merci pour ton optimisme et ta débrouillardise
Merci de m'avoir supporté
Merci pour ces centaines de films partagés
Merci pour ces 15 années de bonheur à tes côtés
Merci d'essayer de me comprendre
Merci de ne pas retenir ces derniers mois
Merci de ne pas changer. Reste la même c'est ce qui te rend belle
Merci de continuer à t'indigner et à te révolter
Merci à tout jamais
Je ne pourrai t'oublier
Tu resteras pour toujours mon premier amour
MERCI d'être toi
Après la pluie vient le beau temps...
Je fonds en larme devant la photo de la crique où nous avons pris l'apéro hier soir. Comment vais-je arriver à vivre et non survivre ? Comment apprivoiser la solitude ? Comment me motiver pour bouger ? Comment colorer ma vie ? Comment la rendre magnifique ? Comment réaliser mes rêves ? Comment rebondir sans trop sombrer ? Comment me sortir de cette torpeur, de ce chagrin, de ce manque d'air et d'énergie ? Comment transformer cette douleur en une opportunité ? Comment faire revenir le beau temps après la pluie ?
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