Chapitre 8 : Les ailes coupées
En repartant chez lui, Nicholas se tourna et se retourna dans sa tête, en boucle, les paroles de la femme blonde. Que ressentait-il vraiment pour Vash ? Que voulait-il ressentir pour lui ? Les yeux baissés sur le trottoir et se prenant la tête dans les mains, il ne regarda pas où il allait. C'est donc tout naturellement qu'il se prit le premier poteau qui se trouvait sur sa route, la stoppant net. Wolfwood avait l'habitude de marcher assez vite et n'avait donc pas ralenti, n'ayant pas vu le poteau et se l'était pris à pleine vitesse, de plein fouet.
S'accroupissant par terre, le nez presque en sang, quelques personnes s'approchèrent de lui pour s'enquérir de son état et lui donner un mouchoir afin d'éponger son nez qui coulait désormais de sang. Grommelant maintenant, il se remit néanmoins en marche, regardant droit devant lui cette fois-ci. Il finit par arriver chez lui sans autre incident du genre, ayant esquivé de plusieurs mètres tous les poteaux qui se trouvaient sur sa route. Le mouchoir enroulé dans sa narine, il essaya de pousser la porte, sachant que son colocataire serait là.
A sa grande surprise, la porte devant lui était fermée à clé. C'était toujours lui qui fermait la porte, Vash n'ayant pas le réflexe de le faire. Et il était certain que l'ingénieur était à l'intérieur, il lui avait envoyé un petit message lorsqu'il était encore en cours, le distrayant légèrement de l'autre abruti. Vash ne fermait pas la porte. Qu'est-ce qu'il se passait ? Allait-il bien ? L'inquiétude prit place dans tout son être, faisant trembler sa main alors qu'il tentait d'insérer les clés dans la serrure.
Rentrant prudemment et fermant également le verrou derrière lui, Nicholas entra à pas de loup. Il posa ses chaussures, comme ils en avaient tous les deux l'habitude en entrant, les posant à côté de celles de Vash. Il était donc bien à la maison. Doucement, Nicholas essaya de l'appeler par son nom, ne voulant pas trop élever la voix. Il était peut-être en train de dormir. Mais non, même s'il tapait sa meilleur sieste, Vash ne fermait quand même jamais, il était honnêtement la proie favorite des cambrioleurs. Aucune voix ne lui parvint mais un bruit retentit quelque part au fond du couloir. La salle de bain ?
Attrapant le rouleau à pâtisserie qui trainait sur le comptoir à côté de l'évier, il ne savait pas à quoi s'attendre. Alors valait-il sans doute être plus prudent, peu importe ce qu'il se passait. Il avançait vers la salle de bain, pas vraiment certain de ce qu'il allait trouver mais surtout de comment réagir. Pourquoi Vash ne lui répondait-il pas ? Arrivé à la porte de la salle de bain, il souffla et l'ouvrit d'un grand coup sec, brandissant son arme de fortune. Mais peu importe ce qu'il avait bien pu imaginer, ce n'était certainement pas tout ce qu'il aurait pu imaginer.
Vash, au sol, se tenant maladroitement à la baignoire de la main droite, sa prothèse de bras gauche n'étant nulle part dans le champ de vision direct de Nicholas. Les larmes coulaient sans discontinuer de ses grands yeux bleus écarquillés, ses lunettes ayant elles aussi disparues. Il était torse nu, un pot de pommade non loin de ses jambes. C'était la première fois que Nicholas voyait Vash torse nu et il faillit en perdre de main son rouleau. Bien sûr, il avait entendu quelques histoires de loin de Knives. Bien sûr, il savait, comme à peu près tout le monde que Vash n'avait plus de bras de gauche et possédait une prothèse. Bien sûr, il savait que ce type cachait beaucoup de choses et n'en parlait jamais.
Nicholas soupira et se dirigea vers lui, laissant la porte de la salle de bain ouverte, pour leur laisser un peu plus d'espace. Il agrippa Vash et le souleva légèrement par les aisselles comme s'il n'était qu'un enfant pour le repositionner contre la baignoire et qu'il ne s'appuie plus dessus d'un bras tremblant. Il se posa ensuite à côté de lui et sortit une cigarette, toujours sans rien dire, le rouleau à pâtisserie désormais sur ses genoux. Aucun d'eux ne disait quoi que ce soit. Vash essayait d'arrêter les larmes qui coulaient de ses yeux mais Nicholas leva sa main et attrapa celle du blond.
« Si t'as besoin de pleurer, fais-le. T'arrêtes pas pour moi. »
Reposant doucement sa main à côté de lui, Vash n'essaya plus de restreindre ses larmes, les sanglots redoublant désormais. Nicholas releva un peu plus sa main, afin de la passer au-dessus des épaules de Vash. Posant finalement sa main sur l'épaule du blondinet après s'être demandé un moment s'il devait le faire ou pas, il l'agrippa aussi doucement qu'il le put et l'inclina. L'incitant délicatement à se pencher, la tête de Vash finit par atterrir sur l'épaule du noiraud, sans que celui-ci n'enlève sa main de l'épaule de l'autre.
Pendant un long moment, ils continuèrent de ne rien dire. Wolfwood tirait sur sa clope, se fichant un peu de répandre de la cendre sur son pantalon comme ça avait pu l'énerver plus tôt. Au bout d'un moment, les larmes se tarirent d'elles-mêmes, coupant le seul bruit qui existait dans la pièce.
« Vash : Ça fait mal. Des fois, ça fait trop mal pour le supporter.
Nicholas : T'as des douleurs fantômes ou un truc du genre ?
Vash : Oui. C'est mon membre fantôme. Je sens comme s'il était encore là. Et je sens la douleur de le perdre encore.
Nicholas : Et la pommade ?
Vash : Pour le reste de mes cicatrices. Certaines sont suffisamment anciennes pour que je ne m'en occupe plus mais il y en a d'autres qui me font encore mal. J'ai l'impression qu'elles vont se rouvrir. La pommade aide à apaiser. Mais aujourd'hui, la douleur était trop forte, j'ai rien réussi à faire.
Nicholas : Et la porte ?
Vash : Je ne veux pas que quiconque me voie comme ça. Je ne veux pas.
Nicholas : T'as pas appelé Meryl ou Milly pour t'aider à appliquer la pommade ?
Vash : *se recroqueville* Non. Je ne veux pas qu'elles me voient comme ça. Pas elles.
Nicholas : C'est pourtant les personnes à qui tu peux montrer le plus. Elles ne se moqueront jamais.
Vash : Je le sais ! *agrippe sa tête avec sa main* Je le sais mais je ne veux quand même pas. Je tiens trop à elles. Je ne veux pas qu'elles soient dégoûtées par ... par ça *désigne son torse de sa main*
Nicholas : Elles ne le seront pas. Je vous connais pas depuis longtemps mais j'ai rapidement appris qu'elles ne seront jamais dégoûtées par toi peu importe ce que tu en penses.
Vash : *s'effondre contre lui, ne se retient plus* ... oui ...
Nicholas : Si tu ne veux pas que ce soit elles, tu veux que je m'en occupe ?
Vash : Je ne veux pas t'imposer ça.
Nicholas : Tu me l'imposes pas, je veux le faire pour toi. Tu es mal, je veux t'aider, c'est tout, rien de plus simple.
Vash : ... alors oui ... tu peux t'en occuper ... s'il te plait ?
Nicholas : Évidemment. »
Se lâchant alors pour se laisser l'espace de procéder, ils se tinrent face à face. Nicholas attrapa lentement la pommade, laissant à Vash le temps de suffisamment intégrer tous les mouvements qu'il faisait. Vash leva alors sa seule main, la posant doucement sur les lèvres de Nicholas et lui retira ce qui lui restait de cigarette entre ses lèvres entrouvertes. Il la jeta dans la poubelle derrière lui, lui souriant maladroitement, lui disant que c'était mauvais pour la santé. D'un sourire en coin amusé, Nicholas prit une noisette de pommade sur ses doigts et interrogea de la main pour savoir par où il devait commencer. Vash lui indiqua et le froid habituel de la pommade entra en contraste avec sa peau normalement chaude.
Il l'enduisait calmement, ne sachant pas trop quoi dire ou faire d'autre. Mais le silence commençait à peser sur l'homme en noir et les questions tournaient en boucle dans sa tête sans qu'il n'ose les poser. Mais, bien trop curieux, autant que Vash, il finit tout de même par décider de les lui poser.
« Nicholas : ... Je sais que c'est super indiscret mais –
Vash : Tu veux savoir comment je me suis fait tout ça, hein ?
Nicholas : Ouais. Ça te dérange ?
Vash : Si c'est toi, ça va. La brûlure que tu vois là *indique son épaule droite* c'est une poutre en feu qui m'est tombée dessus quand j'essayais d'aider des gens à sortir d'un bâtiment en feu dans lequel on s'est tous retrouvés piégés.
Nicholas : Comment tu t'es retrouvé dans un bâtiment en feu ?!
Vash : *hausse les épaules* A vrai dire, c'était la cantine de mon lycée. Il y a eu un court-circuit avec les branchements des réfrigérateurs et ça s'est enflammé.
Nicholas : Dans le genre pas de bol.
Vash : Tout ce que tu vois là est dû à la malchance. En primaire, les autres enfants avaient l'habitude de m'appeler « l'attrape-malheur » et me martyrisaient. Mais Knives arrivait toujours pour leur en coller une. C'est de là que vient sa réputation de bagarreur et ses instincts surprotecteurs envers moi. Mais bon, se faire cogner la gueule n'a fait que pousser d'avantage les autres à m'insulter dans mon dos.
Nicholas : C'est des connards. Oublie-les.
Vash : *rigole légèrement* Ce ne sont pas des connards. Ce n'était que des enfants effrayés par quelque chose qu'ils ne comprenaient pas.
Nicholas : *hausse un sourcil* Tu sais que t'es le droit de les insulter si tu le veux, c'est carrément ton droit. Et puis, même maintenant, est-ce que tu comprends tout ... ça ?
Vash : Non. On a eu beau faire toutes les analyses du monde en grandissant, il semblerait que je suis juste effectivement un attrape-malheur.
Nicholas : *lui donne un petit coup de poing sur la tête* Arrête de dire des conneries aussi énormes que toi.
Vash : *sourit finement* Si Nicholas Dangereux Wolfwood me le demande, alors je le ferais. »
Alors que monsieur le dangereux continuait d'appliquer la pommade, Vash continuait quant à lui de lui expliquer d'où provenaient ses différentes blessures. Que ce soit des accidents de voiture, des objets qui tombaient des balcons en-dessous desquels il passait, divers accidents à l'école. En grandissant, Vash avait quasiment tout connu et connaissait d'ailleurs le service pédiatrie de l'hôpital par cœur. Il était donc par ailleurs devenu le chouchou des médecins par son air adorable et innocent.
Lorsque Rem les avait recueilli tous les deux, Knives et lui, elle avait souscrit une assurance à Vash à laquelle ils recouraient beaucoup plus souvent qu'ils ne le devraient en temps normal. Rem était également une médiatrice pour les deux enfants. Autant qu'elle rassurait Vash en lui disant que rien n'était de sa faute et qu'il ne devait pas culpabiliser, elle empêchait Knives de se battre avec tous ceux qui insultaient son jumeau adoré. Ils rigolèrent tous les deux placidement à l'image d'un Knives enfant qui tente de se foutre sur la gueule avec la moindre personne qu'il rencontrait et essayait de regarder son frère de travers.
Aucun d'eux n'avaient abordé le sujet du bras gauche, qui intriguait pourtant tant Nicholas. Mais il savait que Vash s'était déjà énormément livré sur toutes les cicatrices qu'il portait et il ne voulait pas en rajouter. Perdre un membre est une épreuve terrible et c'était sans doute déjà trop pour aujourd'hui. Il ne voulait pas pousser le bouchon trop loin et épuiser mentalement Vash plus qu'il ne l'était déjà. Ce serait donc pour une prochaine fois.
« Nicholas : ... Tu sais ... Si t'as encore besoin de moi, je suis là, hein. Tu peux te reposer sur moi. Je suis pas le plus grand spécialiste de discours réconfortant du monde mais je ferais ce que je peux. Je peux t'aider quand t'as trop mal. Je peux juste rester à côté de toi si tu veux quelqu'un.
Vash : Merci Nicholas. Ça signifie tellement ce que tu proposes, plus que tu ne peux te l'imaginer.
Nicholas : Si tu le dis, alors je te crois. D'ailleurs, on devrait convenir d'un code que les autres ne reconnaitront pas et qui voudra me dire que t'as besoin d'aide. Un truc passe-partout qui peut être dit en toute circonstance.
Vash : Comme un surnom ?
Nicholas : Ouais, un surnom, ça passe. Les gens vont croire que tu ne fais que m'appeler mais moi, je saurais ce qu'il se passe. T'auras pas besoin de t'expliquer. Dis juste mon surnom.
Vash : Dans ce cas, il faut trouver un truc spécial.
Nicholas : Si tu veux faire spécial, libre à toi mais ne va pas chercher trop loin ou trop perché comme les gosses à l'orphelinat avec le mien. Qui a littéralement fini sur mes papiers officiels mais bon.
Vash : *se redresse soudainement* C'est ça ! Je sais ce que sera notre code, ton nouveau surnom. *sourit plus largement* Nick le dangereux ! Tu seras Nick le dangereux.
Nicholas : *écarquilles les yeux, surpris* Nick ... le ... dangereux ? Ça fait pas un trop bizarre ?
Vash : Non, c'est bon. C'est suffisamment étrange pour que je ne t'appelle jamais comme ça sauf dans certaines circonstances et suffisamment moi pour que les gens ne soient pas étonnés.
Nicholas : *soupire* Eh ben aller. Rouler machine, c'est voté et adopté pour « Nick le dangereux ».
Vash : *explose de rire* Alors, peu importe la situation, tu as dit. Si ça ne va pas, si j'ai besoin de toi, j'en appellerais à mon super-héros avec son super nom de code, Nick le dangereux. »
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Huitième chapitre !
L'angst a commencé de s'installer. Vous avez un Vash pas en très grand forme à cause de ses nombreuses cicatrices et qui a du mal à se laisser aller aux bons soins des autres. Le titre est bien évidemment en référence au fait que Vash a canoniquement des ailes et je voulais que son mal-être se ressente là-dedans, alors je dois dire que j'aime beaucoup ce titre.
Ne vous inquiétez pas, je n'ai pas installé ce chapitre juste pour la décoration, il y aura plus d'angst par la suite pour les amateurs. J'espère que je n'ai pas fait trop léger pour qu'on ressente bien ce que ressent Vash mais j'espère aussi que ce n'est pas trop. Je n'ai pas mis de TW en début de chapitre pour ceux qui auraient du mal avec ces thèmes.
Sachez que le surnom est sorti de nul part mais c'est pas grave, je l'aime beaucoup et je trouve qu'il correspond bien à Nick.
(Petit aparté qui n'a rien à voir, aparté sécurité routière : faites attention sur la route, par pitié. J'ai fait un accident ce matin qui étais totalement de ma faute car je roulais trop vite et en tournant, avec la route mouillée, j'ai embouti une voiture garée. Je m'en sors avec des égratignures et mon frère est aussi entier, les seuls dégâts sont matériels mais bon, les airbags se sont quand même déclenchés. Alors si vous avez le permis, ne jouez pas les imprudents en vous disant comme moi que ça va passer parce que des fois ça passe pas. Faites tous attention à vous, surtout au volant).
Sinon, en espérant que vous avez aimé ^^
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