Chapitre 16 : Des surnoms et des chansons
Qui était le putain de connard qui avait décidé qu'il fallait réaliser un dossier complexe qui prenait tout le temps et l'énergie d'un étudiant pour valider son semestre ? C'était la question que Nicholas se posait en boucle depuis maintenant plusieurs semaines. Au début, il était énervé, désormais, c'était bien plus de la résignation. Il avait essayé de repousser l'échéance au dernier moment mais devant la montagne de travail demandé, il s'était dit qu'il fallait qu'il s'y prenne tout de même un peu en avance et non pas au dernier instant comme il l'avait toujours fait.
D'autant plus que le nombre de recherches à effectuer était absolument phénoménal et Wolfwood était actuellement à la bibliothèque en train de se ronger les ongles de dépit. Il avait plusieurs livres ouverts étalés devant lui. Il ne les lisait certes pas tous en même temps mais il aurait aimé pouvoir le faire, ne serait-ce que pour avancer plus vite. Et lorsqu'il essayait d'échapper à sa charge de travail et qu'il levait les yeux pour regarder les autres étudiants, il se trouvait désespéré de les voir tous si concentrés, bachotant comme s'il n'y avait pas de lendemain, comme si c'était tellement facile pour eux tous.
Nicholas voulait s'arracher les cheveux. D'autant plus qu'il voyait, à quelques tables de là, l'inquisitrice qui semblait accomplir son devoir comme si c'était une sortie bucolique en forêt et qu'elle aimait réellement ça. La fusillant du regard, il replongea son nez dans son livre lorsqu'elle leva les yeux vers lui, ayant senti un regard sur elle. Nicholas marmonnait des choses incompréhensibles dans sa barbe, maudissant le monde entier et faisant fuir les quelques courageux non loin de lui sur la même table.
Et c'était bien parce qu'il avait fait fuir tout le monde en paraissant aussi cinglé que l'abruti qui venait de débarquer pouvait s'installer à côté de lui. Entendant une chaise racler le sol, il leva les yeux, se retrouvant face à face avec Legato Bluesummers, lui faisant tirer la grimace. Et face à cette grimace, l'autre lui jeta son cahier à la tête. La seule chose qui les empêchèrent de partir au quart de tour et de se jeter le mobilier en travers de la tête fut les très nombreux regards des autres occupants de la bibliothèque qui leur signifièrent qu'ils n'avaient pas intérêt à faire le moindre bruit.
Et malheureusement pour l'homme en noir, le lutin bleu avait soudainement envie d'engager la conversation. Bon, sur leur devoir. Mais c'était justement parce qu'il voulait échanger sur leur devoir que Nicholas avait encore plus envie de lui enfoncer sa tête dans la table. Pourquoi ce connard était-il venu vers lui ? Ah oui, parce qu'aucun d'eux ne s'entendait avec le reste de leur classe et qu'ils se retrouvaient -de fait- toujours ensemble. C'était d'ailleurs à cause de lui qu'il avait fini par rencontrer Knives qui lui avait proposé son super plan. S'arrêtant quelques instants, il se mit à réfléchir. Parce qu'il était un asocial, il s'était retrouvé avec Legato.
Et parce que Legato était beaucoup trop fier de son petit ami (et de sa petite amie mais elle, elle était supportable) qu'il avait été présenté à Knives. Et que de fil en aiguille, il avait fini par emménager avec Vash. Levant alors son regard vers Legato, il le regardait maintenant comme si son camarade de classe était le messie qui lui avait apporté dans sa vie tout ce qu'il désirait. Legato grimaça à son tour au regard bienheureux, se demandant ce qui pouvait traverser l'esprit de ce débile de Wolfwood.
Continuant leur devoir dans l'accablement, Nicholas fut soudainement sorti de sa concentration, déjà assez faible, par la sonnerie de son téléphone. Téléphone qu'il avait oublié de mettre en silencieux. Se faisant fusiller du regard par l'entièreté de la bibliothèque, il allait couper le téléphone. Mais lorsqu'il vit qui l'appelait, il sortit en trombe, manquant de renverser sa chaise. Également heureux d'avoir enfin une distraction.
« Nicholas : Putain tu tombes bien balai-brosse, j'en ai vraiment marre de ce dossier à la con. Je vais buter mes profs et l'ensemble de l'administration de la fac si ça continue.
Vash : ...
Nicholas : Balai-brosse ? Chaperon rouge, ça va ?
Vash : ... *respiration troublée*
Nicholas : Eh, Vash, qu'est-ce qui se passe ?
Vash : Nick ... *souffle saccadé* Nick le dangereux ...
Nicholas : *pâlit* T'as à la maison ? Bouge pas, j'arrive. »
Raccrochant alors violemment au nez de Vash, il se précipita dans la bibliothèque, se fichant cette fois-ci du bruit qu'il pouvait causer. Il attrapa son sac, l'ouvrant en grand au bord de la table et jeta toutes ses affaires qui trainaient sur la table, sous le regard stupéfié de Legato qui se demandait pourquoi ce revirement. Certaines personnes firent remarquer à Nicholas qu'il faisait trop de bruit mais la seule façon qu'il eut de leur répondre en sortant fut un magnifique doigt d'honneur qui offusqua un bon nombre de personnes.
Nicholas avait l'impression qu'il n'avait jamais couru aussi de sa vie. Il aurait très bien pu battre le record du monde sur cette distance (quelle était-elle même ?) qu'il n'en serait pas étonné. Même le soir de l'escapade sur le toit, ils n'avaient pas couru aussi vite. Un point de côté fit rapidement son apparition, faisant grimacer Nicholas. Mais il ne s'arrêta pas. Il continua de courir comme sa vie en dépendait, parce qu'il en avait l'impression. Parce que Vash n'était pas bien et qu'il avait besoin de lui.
Il faillit se prendre la vitre en verre de la porte de son immeuble. Il prit les marches deux par deux, ses cuisses le brûlant sous l'intensité supplémentaire de l'effort. Il avait l'impression qu'il n'avait jamais ouvert sa porte d'entrée aussi vite de sa vie. Et c'était le cas. Il faillit se ramasser en entrant, trébuchant sur son propre paillasson. Il ne prit même pas la peine de se déchausser, préférant partir à la recherche de son colocataire partout dans leur appartement.
Il le retrouva finalement dans sa chambre, dans son lit, enroulé dans une couverture et appuyé contre la tête de lit. Les genoux remontés contre sa poitrine, il avait la tête cachée dans son bras, ne la relevant même pas alors qu'il entendait les pas affolés de Nicholas le cherchant dans toute la maison. Et alors que Wolfwood se rapprochait de lui tout doucement comme il aurait pu le faire pour un animal blessé, Vash releva finalement sa tête pour croiser son regard avec celui de Nicholas. Son visage était strié de larmes. Vash avait l'impression qu'il avait tellement pleuré qu'il n'y avait plus aucune once d'eau dans son corps.
Nicholas se débarrassa finalement de ses chaussures, grimpant en douceur sur le lit, s'approchant à pas de loup de l'autre. Il s'installa alors à côté de Vash, ne faisant aucun geste brusque qui pourrait éloigner le blond de lui. Il s'assit juste à côté. Anxieux, il ne savait pas quoi faire de ses mains ni ce qu'il devait dire. Par habitude, il sortit son paquet de cigarette et s'en grilla une. Au premier abord, il ne semblait pas forcément blessé, enfin, physiquement. Si cela avait été le cas, il aurait retrouvé l'autre dans la salle de bain. Mais il était assis sur son lit, comme un enfant qui cherche du réconfort dans un cadre familier et sûr.
Nicholas ne savait toujours pas quoi faire, il ne savait même pas s'il pouvait se permettre de le toucher, alors il ne tenta pas de passer son bras autour de ses épaules. Mais ce fut Vash qui interrompit son flot de pensées en se balançant contre Nicholas, se reposant tout contre lui. Ce fut le signal pour Nicholas de finalement passer ses bras autour de lui, le rapprochant et le berçant contre lui. Vash ne disait toujours rien, la seule chose qu'il fit fut de pointer au loin son téléphone qu'il avait balancé en travers de la pièce. Mais aucun des deux ne voulait se lever pour aller le chercher. Ce fut Kuroneko-sama qui mit fin au dilemme en le prenant dans sa gueule et en l'apportant à ses maitres.
Vash le déverrouilla facilement et en farfouillant dedans, atterrit dans ses discussions sur ses réseaux sociaux et passa finalement l'appareil à Nicholas, un peu perplexe. Et alors qu'il essaya de comprendre à quoi il avait affaire, il se trouva face à une discussion tout ce qu'il pouvait y avoir d'ordinaire. Quelqu'un au hasard avait voulu entamer une discussion avec Vash sur les réseaux sociaux pour pouvoir l'approcher et se sentir plus près de lui. Des tas de gens le faisaient et ils rigolaient régulièrement tous les deux aux messages d'approche les plus farfelus que l'ingénieur pouvait recevoir.
Mais cette fois-ci, ce n'était pas farfelu. Non, c'était sérieux. Sérieux comme un collecteur d'impôts. Sérieux comme un enterrement. Sérieux comme une sœur disparu depuis trop longtemps et qui repointe le bout de son nez comme si de rien n'était.
« Attends quoi ?!?! C'est ta frangine qui vient de débouler là ?!?! Mais quoi ?! »
Vash hocha lentement la tête. Il avait reçu un nouveau message au milieu de l'après-midi, pendant que Nicholas était parti à la bibliothèque pour son devoir à la con. Enthousiaste comme toujours de parler avec quelqu'un, il s'était étonné puis alarmé devant son téléphone. La personne qui venait de le contacter lui disait qu'elle était sa sœur. Le confirmant avec des informations qu'elle aurait pu être la seule à connaitre. Tesla faisait devant lui son retour. Il ne savait pas quoi faire, il était perdu. Comment devait-il réagir ? Sa respiration se faisait de plus en plus irrégulière et alors que la conversation continuait, Vash se dirigea d'un pas tremblant vers son lit, cherchant un peu de réconfort entre ses couvertures. Ses yeux se brouillaient de larmes, il ne voyait pas très bien où il allait.
Et se recroquevillant sur lui-même, il fit la seule chose qu'il savait qu'il devait faire. Il appela Nicholas, sachant que même s'il ne saurait pas quoi faire, il saurait le réconforter et être là pour lui comme il l'avait dit. Après cet appel, il avait fini par jeter son téléphone contre le mur sans savoir quel sentiment exactement l'habitait, heureusement qu'il avait une bonne coque. Et le voilà maintenant entre les bras sûrs de Nicholas.
« Nicholas : Eh ben, elle se gêne pas, celle-là. Elle vous jette comme des chaussettes il y a des années et la voilà maintenant qui revient la fleur au fusil.
Vash : ... Nico ... Je sais pas quoi faire ...
Nicholas : Putain, je sais que je vais parler comme ton frangin et Dieu m'en bénisse mais est-ce que c'est une bonne idée de lui parler ? Elle veut même que vous vous revoyez.
Vash : Elle est venue vers moi justement parce qu'elle sait que Knives ne voudra jamais la revoir. Et ... dans ses messages, j'ai l'impression qu'elle veut vraiment qu'on se voit pour parler.
Nicholas : Alors pourquoi t'es dans cet état ? T'as l'air dévasté.
Vash : ... C'est ma sœur ... C'est Tesla. Et je veux comprendre pourquoi elle est partie sans même un regard pour Knives et moi à l'époque. Je veux l'aimer, je veux la considérer comme ma famille parce qu'elle est censée en faire partie. Mais ça me fait mal, j'ai l'impression qu'on a jamais compté pour elle alors que je me suis toujours inquiété pour elle, me demandant où elle était, avec qui, si elle allait bien. Et j'ai l'impression qu'elle revient uniquement quand ça va mieux pour elle et qu'il n'y a que ses sentiments à elle qui comptent.
Nicholas : Elle revient peut-être justement parce qu'elle va mieux. Peut-être qu'avant, on sait pas pourquoi, elle allait pas bien. Et que maintenant qu'elle s'est reconstruite, elle peut enfin venir vers vous et vous parler de ce qu'il s'est passé à l'époque.
Vash : Je veux la voir. Je veux lui parler. Mais d'un autre côté, ma fierté me dit de ne pas me laisser avoir une nouvelle fois. Qu'elle va juste repartir comme elle l'a déjà fait.
Nicholas : Le problème, c'est que tu peux pas le savoir à l'avance, ça.
Vash : JE SAIS ! *se blottit plus près, se cache dans le torse de Nico* Mais je veux être sûr qu'elle ne repartira pas après être allé lui parler, comment est-ce que je peux être sûr de sa réponse ? Si ça se trouve, elle me dira seulement ce que je veux entendre et repartira immédiatement derrière. Au final, je ne la connais pas, c'est quasiment une étrangère, je ne sais pas comment elle peut réagir.
Nicholas : C'est la merde, hein ?
Vash : *pouffe de rire* Ça tu l'as dit.
Nicholas : T'as la trouille de la situation ?
Vash : ... Je sais pas, je pense.
Nicholas : ... Alors, ce qui va suivre va te paraitre chelou mais je te jure que ça a un intérêt.
Vash : Peu importe ce que tu dis, je t'écouterais toujours.
Nicholas : Je connais une chanson. Au final, je pense que là, t'es dans cette situation. Tu sais comment elle s'appelle ?
Vash : Non ?
Nicholas : « La frousse ».
Vash : *attend la suite*
Nicholas : Cette chanson, elle s'appelle « La frousse » et elle explique que peu importe ce qui se passera, on aura toujours la trouille de quelque chose. Peu importe ce qui se passera dans nos vies, on aura beau avancer et se construire pour être meilleur, il y aura toujours quelque chose qui nous fera peur. Mais c'est pas ça qui va nous empêcher de vivre. Justement parce qu'on aura toujours, toute notre vie la frousse de quelque chose, on va pas s'empêcher de vivre ce qu'on veut vivre et on va passer au-dessus de tout ça, et intégrer nos peurs à nos vies, en comprenant que ça fait tout aussi partie de la vie que les autres éléments qui la compose.
Vash : Elle a l'air bien.
Nicholas : Elle est de Louise Attaque. »
Nicholas trifouilla alors dans la poche de son pantalon, sortant son propre téléphone et cherchant à l'intérieur. Il mit alors la musique, la faisant écouter à Vash. Et pour bien rentrer dans la petite tête de génie du blond, il la lui remit plusieurs fois, comme une litanie, faisant rire ledit blond qui s'apaisa alors peu à peu dans les bras du théologue. Et à la mélodie de la musique et au rythme entrainant et rassurant des paroles, épuisés et vidés de leur énergie par la lourdeur de la discussion. Ils finirent tous les deux par s'endormir dans les bras l'un de l'autre, leurs membres entremêlés, leurs battements de cœurs à l'unisson.
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Seizième chapitre !
Vous avez devant vous l'arrivée de Nick le dangereux qui vole au secours de son bien-aimé dès qu'il est appelé à la rescousse.
Certains devaient s'en douter mais si j'ai fait en sorte que Vash parle à Wolfwood de Tesla, c'est pas pour rien. Alors maintenant, un peu de teasing, on aura son apparition, ne vous inquiétez pas mesdames-messieurs. Vous aurez également les raisons du pourquoi du comment elle est partie en laissant Knives et Vash.
Est-ce que cette chanson ne correspond pas parfaitement à la situation de Vash ? Si, putain et ça me fait une raison de plus de l'aimer. Je suis une grande fan de Louise Attaque et plus globalement de Gaëtan Roussel et dans une fic où je dissémine des petites chansons suivants les chapitres, je me devais d'inclure du Louise Attaque. Et La frousse était parfaite pour la situation.
Sinon, en espérant que vous avez aimé ^^
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