Chapitre 14 : Une maison si mal rangée
Vash ne voulait pas sortir de son lit. Le froid l'avait définitivement attaqué. Son manteau n'était pas suffisamment chaud. Non, ce n'était que des mensonges. Son manteau était volumineux, il pouvait le protéger lors d'une tempête de neige. Il ne faisait que se trouver des excuses, il ne voulait juste pas sortir. Heureusement pour lui, il n'avait pas cours avant le début de l'après-midi. Il pouvait se permettre de paresser sans but. Bien qu'il sache parfaitement que paresser sans but reviendrait inlassablement à se triturer l'esprit. Et il était trop fatigué pour ça.
Cela faisait plusieurs nuits qu'il enchainait les insomnies. Il avait l'habitude, depuis le temps, de mal dormir ou simplement très peu. Il trouvait toujours des occupations la nuit. Mais ces derniers temps, il voulait simplement dormir, il voulait juste tomber de sommeil et ne surtout pas rêver. Il n'irait pas jusqu'à dire qu'il ne voulait plus se réveiller. Il voulait simplement du repos. Était-ce trop demander ?
Nicholas était parti depuis longtemps, il n'y avait plus aucun bruit de vie humaine dans cet appartement. Kuroneko-sama était venu, au milieu de la nuit, se blottir contre lui. Vash l'avait accepté et avait commencé à le caresser, ne serait-ce que pour occuper sa main. Il enviait ce petit chat qui arrivait à s'endormir n'importe où, n'importe quand, n'importe comment. Soupirant et enfouissant son visage plus profondément dans l'oreiller, il rapprocha une nouvelle fois la boule de poils de son torse nu.
A vrai dire, il ne savait même pas s'il voulait même assister à l'un des cours de Luida, pour dire. Il adorait plus que tout la femme mais ce n'était pas elle qu'il voulait, ce n'était pas avec elle qu'il voulait passer du temps, blotti dans ses bras. Non, ce qu'il voulait, c'était Rem. Sa mère avait toujours eu les meilleurs conseils et faisait les meilleurs câlins. Il voulait se blottir tout contre elle sur leur vieux canapé qu'ils n'avaient jamais voulu changer, trop confortable. Il voulait sentir ses mains caresser ses cheveux et démêler ses nœuds. Cela faisait-il trop longtemps qu'il n'avait pas vu sa mère ? Knives ne semblait pas ressentir cette absence pourtant. Mais après tout, Knives n'était pas aussi sentimental que lui.
La lumière filtrait à travers ses volets par petits points, éclairant à peine son visage et son corps. Heureusement pour ses yeux qu'il pouvait reposer un instant. Malgré ses insomnies qui lui tapaient sur le système et la santé mentale, il ne pouvait pas nier que la nuit lui faisait du bien, rien pour poser ses bouts de verre. Parce que dans la liste infinie de problèmes que Vash avait, il avait en plus fallu qu'il soit sensible à la lumière. Il pouvait voir sans, ce n'était pas le problème. Heureusement pour lui, il a une vue parfaite et pouvait lire des panneaux à 70 mètres de distance.
Mais la lumière, la luminosité était toujours trop forte. Ses yeux se fatiguaient vite, des tâches apparaissaient devant ses yeux, un mal de tête pointait le bout de son nez, il ne pouvait plus se concentrer correctement. C'était pour ça que ses lunettes ne le quittaient jamais. Le filtre orangé des bouts de verre diminuait la luminosité et la rendait plus agréable à ses yeux, il n'avait plus à les fermer à moitié pour ne pas se retrouver plus tard avec un mal de crâne carabiné. Il ne les oubliait jamais, elles étaient une partie de lui, tout autant que son manteau ou sa boucle d'oreille gauche.
Et la seule fois où il avait eu le malheur de les oublier. La seule fois où il se préparait à passer l'une des pires journées qui soit. Cette seule fois, il vit dans son champ de vision apparaître une main volumineuse -pour laquelle Vash n'avait certainement jamais imaginé qu'elle tiendrait sa taille dans un câlin paresseux au saut du lit- lui tendre sa propre paire de lunettes, grande et teintée de noir, comme les vitres d'une voiture présidentielle. Sans dire un mot, Nicholas lui avait tendu sa paire, les lui installant même sur le nez, très mal et les faisant tomber jusqu'à ce que le bord du nez de Vash les rattrape pour les réinstaller.
Tournant la tête pour regarde sa paire qui trônait fièrement sur la table de chevet. Les lunettes de Nicholas avaient été agréables. Elles lui couvraient tout le visage. Il aimerait bien avoir les mêmes. Ou les avait-il juste aimé parce que c'était les siennes et qu'il les lui avait prêté pour qu'il ne se brûle pas les yeux. Criant sans bruit dans son oreiller, il sentait son visage rougir. Ses sentiments étaient toujours autant confus. Il voulait l'avis de Rem.
Se relevant soudainement, Vash prit la décision instantanée d'aller rendre visite à sa mère ce week-end ci. Il devait lui parler, il savait que tout s'arrangerait s'il lui parlait. Ça avait toujours fonctionné comme ça. Le soir même, il fit part de sa décision à Nicholas. Il ne savait pas ce qu'il pensait, mais visiblement, il devait avoir l'air en mauvais état pour qu'il ne lui demande rien du tout. Bien que Nicholas ne lui ait jamais rien demandé. Et c'était l'une des choses qu'il adorait chez lui. Il ne le forçait jamais à parler, il le laissait toujours faire le premier pas.
Heureusement pour Vash, le jour de sa décision était un jeudi et il n'eut qu'à attendre un jour de plus pour sauter dans un train et enfin rentrer chez lui. En général, les gens s'approchaient facilement de lui pour essayer d'entamer une discussion. Et il les laissait faire, il aimait parler avec des gens au hasard de sujets au hasard. Mais pas cette fois-ci. Il devait sans doute faire trop peur, ses cernes de six pieds de long et sa mine déconfite. Le trajet fut plus court qu'à l'habitude. En temps normal, il était si excité de rentrer qu'il avait la sensation que le temps se rallongeait. Mais cette fois-ci, ses sentiments étaient quelques peu mitigés. Il avait tellement hâte de voir sa mère et de lui parler de tout ce qui le tracassait. Mais voilà, comment lui en parler, comment attaquer la discussion ?
Vash descendit à son arrêt par pur automatisme, tout comme il rentra chez lui par pur automatisme. Il aurait pu s'arrêter au laboratoire de la femme mais ses pieds l'avaient conduit directement devant sa maison. Celle qu'il considérait comme un endroit sûr et sécurisé, un endroit où il pouvait toujours être lui-même. Entrant doucement, il posa son sac à côté de toutes les chaussures qui trainaient dans l'entrée. Vash les rangèrent en ligne, les siennes à côté. Au fur et à mesure qu'il rentrait dans la maison, il rangeait les choses qui trainaient, les remettaient à leur place ou les glissaient dans un coin.
Rem n'avait jamais été un exemple d'organisation. Du moins, dans sa maison. Si dans son laboratoire, tout était rangé et organisé comme dans un camp militaire, le salon, la cuisine et toutes les pièces de vie dans lesquelles Rem passait donnaient l'impression qu'une tornade y était passée. Au final, c'était peut-être elle et non lui, le typhon humanoïde. Ses pieds glissaient sur le parquet, ne faisant aucun bruit. Il se dirigea instantanément vers le jardin, sachant que l'ingénieure y était certainement. Et il la trouva effectivement de dos, les mains pleines de terre, les cheveux attachés en une queue de cheval basse.
« Rem : Bienvenu à la maison mon bébé.
Vash : *étonné* Comment tu as su ? Je n'ai fait aucun bruit.
Rem : Il ne s'agit pas seulement de bruit. Je sais encore reconnaitre lorsque l'un de mes enfants rentre à la maison. Knives n'est pas avec toi, tu voulais un séjour seul ?
Vash : Euh ... oui. Je ... je sais que c'est pas bien mais pour ce week-end, je voulais pas te partager.
Rem : *rigole* Tu as le droit mon chéri. Alors, je serais toute à toi pour ce week-end. »
Le soir venu et le repas fini, ils se retrouvèrent tous les deux dans la conception exacte à laquelle Vash avait tant pensé. Rem au bout du canapé, et lui, étendu tout du long, étalant ses grandes jambes de mannequin -selon Rem- et reposant sa tête sur ses genoux. Elle y passait délicatement ses doigts, grattant son cuir chevelu. Le volume sonore de la télévision avait été baissé pour ne plus en faire qu'un bruit de fond. A vrai dire, le blond entendait plus le tic-tac de l'horloge dans le coin de la pièce que les dialogues du téléfilm qui se déroulait à l'écran.
Rem attendait qu'il parle. C'était toujours comme ça. Elle non plus ne le forçait jamais à parler et préférait attendre qu'il vienne vers elle s'il voulait se confier à propos de quelque chose. Pas comme Knives qui le secouait parfois quand ils étaient petits pour savoir ce qui n'allait pas avec son jumeau. Alors Vash prit son temps pour organiser quelque peu ses pensées.
« Vash : Je sais pas ce que je ressens pour Nicholas ...
Rem : Est-ce que le problème est de savoir ou de vouloir ? Qu'est-ce que tu veux ressentir pour lui ?
Vash : *enfouit son visage plus profond* *marmonne* Je sais pas non plus ... J'arrête pas d'y penser. Nico est tellement incroyable. J'ai l'impression que c'est si facile pour lui, qu'il sait toujours comment être.
Rem : Ce n'est jamais facile pour personne. Tout le monde se débat avec quelque chose. Il faut juste savoir avec quoi pour comprendre la personne.
Vash : Mais je suis sûr que lui au moins, il sait faire le tri dans ses sentiments.
Rem : Ou alors, il est aussi perdu que toi.
Vash : Raaah, tu ne m'aides pas du tout.
Rem : *rigole* Ce n'est pas de ma faute si tu penses que j'ai réponse à tout. Je n'ai jamais rencontré ton ami, je ne sais pas comment il est à part les petites choses que tu me dis.
Vash : Ami, hein ?
Rem : Tu ne le considères pas comme un ami ?
Vash : Je ne sais pas comment je veux le considérer. C'est bien ça mon problème.
Rem : Qu'est-ce que tu ressens quand il est près de toi ?
Vash : Je suis heureux. Tellement heureux. A chaque fois qu'on est ensemble, je veux pas que ça s'arrête, je veux que ça continue, que l'instant dure pour toujours.
Rem : Et quand il te sourit, qu'est-ce que tu ressens ?
Vash : ... C'est compliqué à déterminer. J'ai l'impression que ça me bouleverse.
Rem : Te bouleverse ? Dans quel sens ?
Vash : Le bon sens. J'en veux plus. Je veux le voir sourire plus. Pour tout et n'importe quoi, même si c'est pour se moquer de moi. Il est beau quand il sourit.
Rem : Tu le trouves beau ?
Vash : *sourire rêveur* Il est sensationnel. Il a ce look cool sans effort. La chemise ouverte, ses lunettes de soleil, même si l'odeur s'accroche, la cigarette lui donne un aspect mauvais garçon. Il a une moto. Tu te rends compte, il a une moto. Ses cheveux sont tellement noirs qu'on ne les voit même pas la nuit, pareil pour sa veste et son pantalon. Il respire la classe.
Rem : *rigole à nouveau* Il doit être sacrément cool alors.
Vash : T'imagines pas à quel point. Et même s'il est grossier, il est attentionné avec ceux qu'il apprécie vraiment, c'est tellement mignon. Il a cet aspect dur mais je peux voir dans ses yeux qu'il n'est absolument pas méchant. Il envoie balader les autres tellement facilement et dit tellement facilement quand il n'aime pas quelque chose. Et il est tellement gentil. Il prend soin de moi. Et tu sais ... je veux pas te vexer, Rem, mais ses câlins sont aussi bien que les tiens, voire même mieux.
Rem : Donc ses câlins sont mieux que les miens ? *taquine*
Vash : ... Presque ...
Rem : Tu sais, avec tout ce que tu me dis, je veux pas te diriger vers quelque chose de précis mais tout ce que je sais c'est que tu l'aimes énormément.
Vash : Oui. Ça, j'en suis certain.
Rem : Alors, n'est-ce pas tout ce qui est important ? Je sais, mon chéri, que tu aimes définir les choses mais est-ce que tu as besoin de classer Nicholas quelque part ?
Vash : J'ai envie de classer Nico parce que je sais que ça me fera du bien et me libérera. Mais j'ai aussi l'impression qu'il est tellement unique que je ne peux pas le classer.
Rem : Alors, pour l'instant, et si tu ne le faisais pas et que tu laissais les choses suivre naturellement son cours ? Peut-être qu'à un moment, plus tard, des choses changeront, elles évolueront et tu verras vers où tout ça te mènes. Tu devrais lâcher un peu la bride et au lieu de te triturer l'esprit, tu devrais simplement profiter de lui et des instants que tu passes avec lui. Tu veux profiter de Nicholas, n'est-ce pas ?
Vash : Oui, je veux ça. Je veux passer tellement de temps avec lui, je veux plus le lâcher. Je veux qu'il soit à mes côtés tout le temps, à chaque instant. Je veux juste Nico avec moi.
Rem : Alors garde-le avec toi. Il a aussi l'air d'apprécier puisque tu me dis qu'il n'hésite pas à dire ce qu'il pense et ce qu'il n'aime pas et qu'il ne t'as toujours pas repoussé. »
Et alors que la discussion sur le noiraud se taisait et que les dialogues sans importance de la télévision reprenait la place, Rem continuait inlassablement de passer ses doigts dans les folles mèches blondes. Au mouvement répétitif et apaisant dans ses cheveux, Vash s'endormit rapidement, l'esprit plus léger, se sentant libéré d'un poids qui lui pesait tellement sur la conscience, plus que jamais heureux d'être venu chercher conseil auprès de sa mère.
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Quatorzième chapitre !
Ce fanart est tellement parfait pour l'illustration de ce média, je pensais pas trouver aussi bien en cherchant. Juste Rem souriante et le mot home donc maison, parfait.
Le fait que les yeux de Vash soient sensibles à la lumière est un headcanon que j'ai eu avec Ludivine et ça explique pourquoi il les garde constamment. Alors je suis allée avec et je l'ai intégré.
J'ai aussi ce headcanon que Vash pose sa prothèse de bras lorsqu'il est chez lui. Donc les chapitres où il est tranquille à la maison, considérez qu'il n'a pas son bras gauche. Autant à l'appartement que chez Rem d'ailleurs.
Ah, au fait, je sais que Vash appelle Knives "Nai" mais je l'avais totalement oublié lorsque j'ai commencé d'écrire et je m'en suis rendue compte trop tard. Et ça me soûlait un peu aussi de devoir TOUT changer alors on va garder le fait que Vash appelle son frère Knives.Idem pour Rem.
Vash adore Rem plus que tout, je ne fais pas les règles.
Sinon, en espérant que vous avez aimé ^^
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