25 - Illusions
Point de vue Riku
Je regarde Dabi dormir en déblayant ses cheveux de son visage d'un revers de la main. Il y a longtemps que je ne l'ai plus vu dormir aussi paisiblement. Quand on le regarde au premier abord, on ne jurerait jamais qu'il soit un mari et un père irréprochable, qui plus est convoité par mes amies qui sont pourtant toutes mariées et mères de famille. Ce n'est pas ce qui les empêche de fantasmer sur mon mari en voyant à quel point il peut être performant pour me donner quatre magnifiques enfants.
Ca me rend jalouse au point de songer à peut être lui mettre un antivol autour du cou.
Désolé les filles, mais cet homme est à MOI !
J'ai la chance de le regarder dormir et s'éveiller tous les matins, avec un petit câlin en bonus avant de démarrer la journée. Ca existe l'homme parfait ?
<< Tu vas me laisser dormir ? >>
- Bonjour ?
Il ouvre un oeil endormi et embrasse ma paume en s'étirant.
<< Ca fait longtemps que t'es levée...? >>
- 20 minutes...
<< Je me disais aussi ça fait 20 minutes que je me sens observé comme une proie. >>
- Pff... Tu fais quoi là ?
Il allait se lever et remettre son jogging.
<< Bah je vais faire le déj. >>
- Ah non tu restes ici toi, c'est moi qui y vais.
Je le repousse sur l'oreiller et jette son jogging sur le fauteuil du dressing.
<< Putain tu me fais le coup à chaque fois, reste couchée c'est MON tour ! râle-t-il. >>
- J'ai dis, tu restes ici.
<< Je t'aime chérie. >>
- Aw moi aussi mon coeur... Mais c'est non.
Il grogne en croisant les bras et je descends préparer le déjeuner. C'est notre petit défi du matin, on juge la qualité du déjeuner de l'autre. C'est un peu sans intérêt mais c'est toujours drôle de voir Dabi ruminer. Il n'y a pas tellement de récompense à la clé, c'est juste un petit jeu entre nous... Et puis il veut sans arrêt me faire plaisir, mais je veux qu'il prenne un peu de vacances en ce moment. Je ne suis pas une Déesse pour être autant gâtée... Moi, j'aime le Dabi de l'époque.
Je reviens plus tard avec le plateau présentable et m'allonge à ses côtés avant de lui tendre un cachet. C'est le seul médicament qu'il est obligé de prendre contre les douleurs chroniques, autrement il pourrait avoir de graves problèmes cérébraux et ça exigerait une opération... À cause de ce qu'il s'est passé à l'époque, même si son état s'est beaucoup amélioré, il lui est déjà arrivé de tomber raide au sol sous mes yeux quand il ne prenait pas ce médicament.
Je n'ai jamais eu aussi peur...
De plus, il a dû arrêter l'alcool, ce traitement n'est pas compatible.
- Allez Chéri prends le...
<< Hmm... >>
- S'il te plait.
Il soupire longuement et avale le médicament, puis frissonne. Il dit que c'est amer et je le crois, vu sa tête...
- Alors, avec ton fils...?
<< Il a besoin de digérer, répond-t-il en mangeant. Laisse lui du temps. >>
C'est déjà un bon début je suppose. Dabi me donne un morceau de croissant entre ses doigts que je croque en ronronnant. Les enfants dorment encore à cette heure, ça nous laisse la matinée pour ne penser qu'à nous détendre en amoureux.
Plus tard, avant midi j'allaite Ritsu dans le calme de sa petite chambre. Elle n'a pas encore ouvert les yeux, je me demande bien leur couleur... Quand Dabi lui a donné son nom, il n'a pas réfléchi bien longtemps et m'a souri. La première chose qu'il m'a dite, c'était qu'elle me ressemblait déjà. Et dire que ce petit ange a failli ne pas survivre... Elle était si frêle et fragile, c'est à peine si elle pouvait respirer seule. Durant toute la durée de la grossesse, j'ai enchainé les allées et venues à l'hôpital pour faire des batteries d'examens. Dabi n'en dormait pas. Il ne cessait de me répéter que si on perdait notre fille, ce serait une déchirure pour nous deux...
Mais la douleur serait fatale pour lui si j'y passais aussi...
Après trois naissances, je n'ai jamais vu Dabi aussi émotif et inquiet qu'à cette période là. Il m'a vu tituber à presque tomber d'épuisement et risquer des fausses couches alors que je ne faisais aucun excès physique. Par miracle Ritsu n'a jamais été impactée, mais moi...
La peur et l'angoisse me coupaient l'appétit au point de frôler la sous nutrition, alors forcément que mon mari était très affecté.
À l'heure de l'accouchement je n'avais plus de forces. J'étais tentée d'abandonner en plein milieu, alors que les sage femmes m'encourageaient à continuer. Elles étaient venues en urgence directement à la maison parce que j'ai perdu les eaux beaucoup trop vite. Tout est allée trop vite... Je me souviens encore de voir Dabi trembler à mes côtés en tenant ma main avec force. S'il pouvait encore pleurer à ce moment là, il aurait fondu en larmes, mais sa voix déraillait quelques fois quand il me parlait.
C'était presque comme s'il me suppliait de rester en vie...
Mais tout ça, il ne voulait pas l'avouer. Quand Ritsu est née, toute la pression s'est tue en un instant pour laisser place à des sourires. Malgré les conditions et le lieu inadapté pour un accouchement je suis encore en vie aujourd'hui, avec ma fille dans les bras. Moi aussi, j'ai tenu ma promesse...
En retour je ne demande rien de plus que la santé de ma famille, loin de tout conflit désormais.
Enfin...
Ce matin là, pourtant si parfait, si paisible et harmonieux, était le dernier jour de soleil que je verrai...
Les nuits suivantes étaient cauchemardesques. Je faisais des insomnies, j'avais des sauts d'humeur, des migraines atroces, le temps dehors était maussade et je devais subir les disputes entre frères et soeurs dès le matin.
Mais le pire de tout était mes cauchemars à répétition, où je commençais à croire que Dabi me trompait réellement. Je le voyais souvent le nez sur son portable sans me prêter la moindre attention et partir l'air de rien dans les bras d'une femme différente à chaque rêve, dont je ne voyais jamais le visage.
Puis je voyais du sang partout sur mes enfants... Je n'ai plus rien compris.
Un jour je me lève avec l'horrible impression d'avoir fait nuit blanche et me rends dans la chambre de Ritsu comme tous les matins.
- Ritsu, c'est l'heure du--
Je me raidis en ne voyant aucune réaction. Ritsu ne se réveillait pas, alors qu'elle m'attendait toujours pour l'heure du lait. La panique m'envahit aussitôt--
- DABI !!
Le pauvre se réveille encore secoué et s'empresse de me rejoindre en essayant de me calmer.
<< Ca va pas de crier comme ça, qu'est-ce qu'il y a ?? >>
- Ritsu ne se réveille pas !!
<< Calme toi ! >>
- Ritsu ne se réveille pas je te dis !
Par pitié pas mon bébé...! La hantise de toutes les mères a toujours été de vivre la mort subite du nourrisson... Pitié, je ne veux pas ça !!
Dabi se penche sur Ritsu et palpe en vitesse son cou pour trouver le pouls, mais au même moment elle se met à pleurer à cause de son réveil brutal. Alix et Touya sont arrivés sur les entrefaites, complètement paniqués.
<< Qu'est-ce qui se passe ??? panique Touya. >>
<< Rien, répond Dabi en portant Ritsu pour la calmer. Fausse alerte... >>
<< Maman ça va ? demande Alix. >>
Je n'osais plus quoi répondre et mes mains tremblaient encore. J'ai pourtant vu que Ritsu ne respirait plus ! Touya m'attire doucement hors de la chambre en me tenant par les épaules.
Est-ce que je deviens folle...?
<< Alix occupe toi de ta soeur, ordonne Dabi en lui donnant sa soeur dans les bras. Touya, tu gères ton frère. >>
Tora ne doit pas me voir dans cet état, il est beaucoup trop réceptif au mal être des gens... J'ai peur qu'il soit affecté à cause de moi. Les enfants obéissent tandis que Dabi me raccompagne dans notre chambre et m'aide à me rallonger.
<< Qu'est-ce qu'elle a...? demande Alix, inquiète. >>
<< Un état de choc, laisse nous seuls s'il te plait. >>
- Je l'ai vu...
<< Hé... >>
Il m'oblige à le regarder dans les yeux et caresse mon front, ce qui me calme un peu.
<< Elle n'a rien ça va aller... >>
- Tu es sûr...?
<< Riku. Elle n'a rien je t'assure. Qu'est-ce qui t'a pris ? >>
À cette question, sans savoir pourquoi, mon cerveau bug complètement. Aucune réponse ne se traitait dans mon esprit, c'était le flou total. Dabi attrape le tensiomètre et l'enroule autour de mon bras. J'ai encore le coeur palpitant, ça me donne le vertige...
- Dabi...
<< Reste couchée. >>
Je le regarde préparer un verre d'eau sucré qu'il chauffe légèrement dans sa main pour tiédir l'eau, plutôt que les médicaments ce n'est pas dangereux pour l'organisme et c'est très léger. Un peu de sucre remonte simplement la tension.
Je ne comprends pas ce qui se passe... Peut être qu'on est entrés dans une période de l'année où le karma s'abat sur nous totalement gratuitement. Personne ne peut le confirmer... Je ne sais plus distinguer le vrai de l'illusion, je vois mes phobies prendre vie, la tension à la maison est électrique...C'est peut être le manque de sommeil qui me fait perdre la raison.
Néanmoins j'ai eu la peur de ma vie...
À suivre...
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