Là où il y a de l'unité, la vie se vit pleinement - Partie 1
Chapitre 20 - Là où il y a de l'unité, la vie se vit pleinement - Partie 1
Saint-Pétersbourg, appartement Altin-Plisetsky
« _ Tiens-toi un peu tranquille ! Je n'arrive pas à attacher correctement tes cheveux. Ah mais arrête de bouger cinq minutes ! »
Yuri se leva brusquement pour échapper à Yulia qui le forçait depuis déjà de longues minutes à ne pas bouger. Les longues tresses blondes retombèrent sur ses épaules et il ne put s'empêcher de les repousser d'un geste brusque. Depuis la nuit dernière il était agité. Agitation renforcée par la fatigue et l'angoisse qui n'avaient cessé de croître en lui ces derniers jours. Il fit pour la énième fois le tour de la pièce en se massant les reins.
« _ Ca ne va pas Yuri ?
_ Si ça va. » Maugréa le futur marié avant de s'asseoir de nouveau pour mieux se relever la seconde suivante.
Il se dirigea vers la salle de bain où il s'enferma sous les regards soupçonneux de Sezim et Yulia.
« _ On ne va jamais être à l'heure s'il va aux toilettes toutes les dix minutes !
_ Je n'aurai jamais cru ça de lui ! Il est tellement nerveux ! C'est tellement mignon !
_ C'est vrai que venant de lui c'est surprenant. C'est un athlète de haut niveau, il sait gérer la pression.
_ Et je la gère ! Je suis juste très enceint et le bébé appuie sur ma vessie. Ca va être joyeux à l'église pendant la cérémonie ! Bon, on se grouille ! Je veux pas être en retard à mon mariage ! »
Yuri s'assit de nouveau à la coiffeuse et fit de son mieux pour cacher ses mains qui tremblaient légèrement. Il préfèrerait patiner sur les mains plutôt que d'avouer qu'effectivement il était très anxieux. Son Alpha lui manquait terriblement. Sous prétexte de simplifier les préparatifs de la matinée, Sezim et Yulia étaient venues passer la nuit avec lui tandis qu'Otabek et Nikolaï étaient chez Serik. Dans son état, une nuit loin de son Alpha était une torture pour Yuri. Il avait hâte d'enfin le retrouver pour pouvoir se blottir contre lui.
« _ Ta coiffure est terminée. Ca te plait ?
_ Ca lui convient, Sezim. Nous n'avons pas le temps d'en changer. Allez ! Debout ! Il faut t'habiller maintenant. Ton grand-père et Lilia ne vont pas tarder à arriver. Il faut que nous nous dépêchions.
_ Attends Yulia. Faut que j'aille aux toilettes.
_ Encore ?!
_ Ben ouais le bébé prend ma vessie pour un ballon de football. Je vais jamais pouvoir me retenir à l'église ! On se calme là-dedans ! »
Tout en parlant, il caressa son ventre et se dirigea d'un pas alourdi par la grossesse vers sa salle de bain. Il s'y enferma et s'adossa à la porte. Il inspira et expira à plusieurs reprises tentant de maîtriser la vague d'angoisse qui lui serrait la poitrine. Un sourire se dessina quand il sentit un nouveau coup donné par le bébé.
« _ Du calme mon petit chat. Je sais que tu ressens le manque de ton äke comme moi. On va bientôt le retrouver. Je te le promets. »
Un peu plus calme, il s'avança vers le miroir et sourit en voyant la coiffure réalisée par Sezim. Elle avait tressé ses cheveux partiellement et les avait disposés de chaque côté de sa tête. Elle les avait ensuite réunis en un chignon composé de plusieurs tresses et torsades. De petites fleurs blanches ainsi que des perles nacrées agrémentaient la coiffure et semblaient le couronner. Il passa pensivement son doigt le long d'une des nattes et en arrêta sa course sur sa marque parfaitement visible.
« _ Yuri ! Dépêche-toi ! On part dans trente minutes ! »
Il leva les yeux au ciel en jurant tout bas mais sorti de son refuge. Dans moins d'une heure, il serait entre les bras de celui qu'il aimait. Il avait hâte.
Saint-Pétersbourg, un appartement du quartier de l'Amirauté
« _ Tu n'es toujours pas habillé ?!
_ Je cherche mes boutons de manchette. Ceux que Yura m'a offerts pour le Nouvel An.
_ Où les as-tu laissés la dernière fois ?
_ Je ne sais plus. Je... Attends, j'ai trouvé. Est-ce qu'Erasyl est revenu de la bijouterie ?
_ Non pas encore. Attends, je vais t'aider. »
Amusé par la fébrilité de son frère, Serik saisit des mains d'Otabek le petit écrin de velours. Il l'ouvrit et sourit en voyant son contenu. Tout en fermant les manches de la chemise de son benjamin il l'interrogea. Simple question autant pour faire la conversation et distraire son frère que pour satisfaire sa curiosité.
« _ Des soleils ?
_ Oui. Pour rappeler le Kazakhstan.
_ Ca fait longtemps que tu n'es pas retourné au pays.
_ Depuis que je suis lié à Yura, en dehors des quelques jours pour le championnat national, je n'y vais pas. Je ne veux pas m'attarder là-bas et laisser seuls mes amours ici.
_ Tu ne voudrais pas y emmener ta famille pour des vacances ? Ca serait l'occasion de leur faire découvrir ton pays natal.
_ Peut-être quand les enfants seront plus grands. Pour le moment c'est exclu. Je préfère des destinations de vacances plus... Paisibles. »
Serik n'insista pas. Il savait que cela ne servait à rien d'argumenter sur le sujet avec son frère. Il préféra changer de sujet pendant que son frère finissait de boutonner sa chemise.
« _ Tu as décidé où tu allais partir en voyage de noces avec ton charmant époux ?
_ Pas encore. De toute façon, il est préférable de le faire après que Yura ait accouché et il faut aussi faire ça pendant les vacances scolaires.
_ Et partir quelques jours uniquement avec Yuri juste après le mariage ? Nous nous occuperons de Kolia avec Yulia.
_ Malheureusement je pars bientôt pour le Canada pour une compétition et quand je vais rentrer Yura rentrera dans son dernier mois de grossesse. Il est hors de question de voyager à ce stade.
_ Vous parlez de quoi ? »
Erasyl entra dans la chambre et Otabek, à sa vue et celle du paquet qu'il tenait, poussa un profond soupir de soulagement. Il se tourna vers son aîné et tendit le bras pour lui prendre des mains le précieux paquet.
«_ D'une hypothétique lune de miel. As-tu récupéré ce que je t'ai demandé ?
_ Tu m'as fait courir ! Tout ça pour récupérer un colis au contenu mystérieux.
_ Le contenu n'a rien de mystérieux. C'est le collier de Yura. Je vais le lui rendre ce soir.
_ Le collier qu'il tripote toujours ?
_ Oui. Celui que je lui ai offert lors du premier anniversaire de Kolia.
_ Äke ! Regarde ! »
Nikolaï courut vers son père et se réfugia entre ses jambes sous les rires de Maria qui le poursuivait. Otabek se baissa et prit son fils dans ses bras. Il embrassa doucement sa tempe avant de lui sourire tendrement.
« _ Qu'est-ce que tu veux me monter mon trésor ?
_ Masha m'a mis du rouge ! »
Les trois hommes éclatèrent de rire devant la mine dépitée du petit garçon et le sourire satisfait de sa cousine. Elle l'avait embrassé sur la joue après avoir mis un rouge à lèvres rose clair y laissant une belle trace. Otabek sourit et l'effaça avec un mouchoir.
« _ Voilà mon petit chat. C'est parti. Va jouer en attendant que nous terminions de nous préparer.
_ On voit quand papa ?
_ Bientôt. Il te manque ? »
Pour seule réponse il obtint un hochement frénétique de la tête. Le petit garçon ne cessait de demander à rentrer chez lui pour retrouver son père Oméga depuis la veille.
« _ Bah tu mets ta veste et on y va. Yulia vient de m'envoyer un message. Ils partent de chez vous.
_ Très bien. Erasyl, je peux te confier le collier de Yura ?
_ Oui bien sûr ! Je le prends avec les... Où as-tu rangé les alliances et la bague de fiançailles hier soir ? »
Le sang quitta le visage d'Otabek alors qu'il dévisageait son frère. Il avait confié à Erasyl les trois anneaux la veille au soir. Il ne savait pas où son frère les avait rangés ensuite.
« _ C'est toi qui les as rangé hier soir...
_ Ah... Oui c'est vrai ! Ils ne doivent pas être bien loin !
_ Erasyl ne me dis pas que tu as égaré nos anneaux !
_ Mais non !
_ C'est bon tous les deux ne vous chamaillez pas. J'ai les anneaux et je vais prendre le collier avec moi. Dépêchez-vous maintenant. Tu ne vas pas faire attendre Yuri le jour de vos noces tout de même, petit frère. Il t'en voudrait à mort. »
Noursoultan, Kazakhstan, demeure d'Andreï Andreïevitch Kourkov
Assise dans le salon, Yulia discutait avec son grand-père tout en regardant par la fenêtre ses fils jouer dans le jardin. Revenue depuis peu auprès de ses enfants et ayant déménagé presque aussitôt d'Almaty à Noursoultan, elle ne cessait de s'étonner de les voir autant changés. Il lui semblait qu'elle les avait négligés trop occupée qu'elle était à faire barrage aux plans de son beau-père.
« _ Ils ont beaucoup grandit pendant ton absence. Je trouve qu'Aybek ressemble de plus en plus à Serik.
_ Oui, c'est tout son portrait. J'ai du mal à croire qu'il va avoir douze ans. Les années sont passées tellement vite.
_ C'est vrai que le temps file à toute vitesse. Il travaille bien pour le moment à l'école tout comme Remir.
_ Ils savent qu'ils doivent travailler dur. Serik ne tolérerait pas une baisse des résultats scolaires.
_ C'est plus côté discipline qu'il commence à y avoir des problèmes.
_ Remir, je suppose. Il a une forte personnalité. Il a recommencé à faire ses coups en douce ?
_ Non, maintenant il s'oppose à ses professeurs frontalement. Il est insolent. Serik et toi devriez intervenir.
_ Je sais. Mais tout n'est pas de sa faute. C'est compliqué ces derniers temps. Serik est souvent absent, Masha est partie et je dois bientôt accoucher. Beaucoup de changements pour un enfant de seulement dix ans. »
Yulia se tut et caressa son ventre arrondi. D'ici quelques jours, elle aurait accouché et elle l'espérait son époux serait rentré. Elle éprouva un fugace moment de colère contre Otabek et Yuri qui monopolisaient son époux alors qu'elle-même avait besoin de lui. Puis, la culpabilité y fit vite place. Elle s'en voulut d'éprouver de la colère à l'encontre du jeune couple qui faisait face à de graves problèmes.
« _ Quand Serik doit-il rentrer ?
_ Demain ou après-demain. Le temps de s'assurer que tout le monde est en sécurité à Saint-Pétersbourg et d'accompagner Erasyl à Moscou.
_ Il revient avec Masha ?
_ Grand-père... » Yulia soupira et inspira profondément pour calmer l'angoisse qui montait à l'évocation de sa fille. « Elle reste avec Yuri et Otabek pour le moment. Elle ne veut plus les quitter.
_ Elle a besoin de sa mère. Je ne trouve pas sage de la laisser avec ce couple. Surtout qu'ils ont déjà beaucoup de problèmes.
_ Ils en ont mais ils font face. J'avoue que je suis impressionnée par leur courage face à l'adversité. A dix-sept ans je n'aurai pas su gérer une grossesse aussi compliquée que celle de Yuri. Et Otabek est vraiment un bon Alpha.
_ Mais ce n'est pas bon pour Masha.
_ Grand-père s'il te plaît n'insiste pas. Je suis certaine que Serik a fait au mieux pour notre fille.
_ Je fais au mieux effectivement. »
Yulia pivota dans son siège avec difficulté à l'entente de la voix adorée de son époux. Il s'avança vers elle et se pencha pour la prendre dans ses bras et nicha son nez dans son abondante chevelure. Yulia se dégagea bien vite de l'étreinte pour le dévisager.
« _ Tu es là. Tu es rentré plus tôt. » Soudain inquiète, elle fronça les sourcils. « Un problème avec Maria ? Tes frères ? Ne me dis pas que Yuri a perdu son bébé... »
Serik s'assit à côté de son épouse pour mieux la tenir contre lui. Il dégagea une mèche folle échappée de son chignon et la glissa d'un geste tendre derrière son oreille.
« _ Tout le monde va bien. Yuri et le bébé vont bien alors j'en ai profité pour avancé le voyage à Moscou d'Erasyl. J'ai ensuite pris le premier vol pour Noursoultan.
_ Et ma petite Masha ?
_ Elle va bien même si tu lui manques énormément. Tout le monde est aux petits soins avec elle, une vraie princesse. Elle adore Yuri et Otabek, surtout Yuri je crois. Ils sont très proches tous les deux. Elle passe son temps à jouer avec lui et à caresser son ventre.
_ Je suis rassurée même si je ne le serai vraiment que lorsque je pourrai être avec elle. Mon bébé me manque.
_ Vous serez bientôt réunies, je te le promets. »
Il se pencha et embrassa doucement le front de son épouse. Il ne s'autorisait pas plus de démonstrations d'affection devant Andreï. Il se redressa et caressa le dos de la main de son épouse du pouce avant de porter son regard à la fenêtre.
« _ Ils ont tellement grandi ! De vrais petits hommes. Remir te ressemble tellement ma Yulia.
_ Oui, ils ont grandi mes petits Alphas. »
Moscou, quartier de l'université d'État Lomonossov de Moscou
Anara debout au pied du lit contemplait Alexandre d'un air dubitatif. Le jeune homme profondément endormi au milieu du lit avait passé la nuit avec elle. Il s'était soumis à la jeune femme et s'était montré un Oméga docile. A cette pensée, elle fonça le nez de mécontentement. Il avait été trop soumis, trop avide de caresses et prompt à la satisfaire. Elle avait pu jouer avec son corps pendant des heures et ce n'est que lorsqu'elle l'avait senti faiblir qu'elle l'avait laissé en paix. Contrariée, elle quitta la chambre puis l'appartement pour aller courir sur le campus universitaire. Elle devait s'éclaircir les idées et rester dans une chambre avec un Oméga qui n'était pas Yuri ne l'aidait en rien.
Elle courut pendant plus d'une heure avant de s'arrêter dans un petit café près de chez elle où elle avait ses habitudes. Anara ne souhaitait pas retourner trop vite à son appartement et y retrouver Alexandre. Nul doute que celui-ci devait être levé à présent et devait l'attendre comme un bon petit Oméga au foyer. Elle frissonna à cette pensée et songea que tout l'opposait à celui auquel elle aspirait se lier. Il n'avait pas ce feu qui brûlait en lui sui rendait Yuri si attrayant. Elle était persuadée que jamais Yuri, lui, ne se serait laissé faire comme Alexandre la nuit dernière. Il lui aurait tenu tête, il se serait défendu, il aurait riposté de toutes les manières possibles. Comme cette nuit-là... Quand elle avait tenté de le posséder et qu'ils s'étaient battus. Un bref instant elle se revit dans la chambre d'hôtel, le pied de la coupe de vin brisé en main avec lequel elle l'avait poignardé. Elle revit le corps brisé de l'Oméga gisant dans une mare de sang et Olga paniquée qui tentait d'arrêter les trop nombreuses hémorragies.
Une odeur lui fit soudain relever le nez interrompant le cours de ses pensées. Elle balaya la salle du petit café du regard et identifia bien vite le propriétaire des phéromones. Incertaine quant à la conduite à tenir, elle se tassa sur son siège et fit mine de regarder par la fenêtre. Elle tourna son regard cependant bien vite lorsqu'elle entendit un gobelet se poser sur la table face à elle et la voix de son frère.
« _ Je ne m'attendais pas à te trouver ici petite sœur. J'allais te rendre visite mais vu l'heure matinale j'ai décidé de prendre un café avant de venir.
_ Salut Erasyl. Ben on est deux à être surpris. Qu'est-ce que tu fais là ? »
Son frère s'assit tout en dévisageant avec amusement sa cadette. Il adorait jouer avec ses nerfs et s'amusait à voir jusqu'où il pouvait pousser la plaisanterie avant de la faire définitivement sortir de ses gonds.
« _ Une subite envie de changement.
_ Lassé d'Almaty et de ton Oméga ?
_ Oui et non. Plutôt l'envie d'ajouter un nouveau tampon sur mon passeport. Plus que deux pages à remplir et j'aurai le droit d'en avoir un tout neuf ! Tu veux voir ? »
Anara leva les yeux au ciel et soupira d'exaspération. Son frère aîné n'était qu'un gamin. Il passait son temps à voyager et ne semblait pas se lasser de faire enrager tour à tour leur père et Serik. A cette pensée, elle se raidit soudain méfiante. Elle ne se rappelait que trop bien des menaces de leur aîné.
« _ C'est Serik qui t'envoie ?
_ Serik ?! Ben non pourquoi ?! Je n'ai pas eu de nouvelles depuis... Attend une seconde. » Il attrapa son téléphone posé sur la table et fit mine de consulter l'historique des appels et messages. « Ca fait bien trois semaines qu'il ne m'a pas tapé sur les doigts. Un record ! Tu veux voir ? » Il lui tendit son téléphone mais Anara n'esquissa pas un geste.
« _ Nan, je te crois. Il doit être trop occupé avec sa grosse Oméga enceinte.
_ Ah oui, c'est vrai que Yulia doit accoucher bientôt. Je me n'en souvenais pas mais maintenant que tu le dis. Enfin bref ! Ca ne m'intéresse pas vraiment toutes ces histoires de mioches. Les Omégas ça sert juste à prendre du bon temps. Pour le reste, il vaut mieux se trouver une Alpha ou une Beta. Moins de problèmes.
_ Depuis quand tu parles comme ça ?!
_ Depuis que j'ai viré mon épouse. Cette sale petite traînée... Bon, on rentre chez toi ? Vu que tu es disponible autant y aller. »
Anara s'agita un moment sur sa chaise avant de baisser les yeux. Même si son frère semblait avoir la même opinion qu'elle sur les Omégas, elle n'était pas certaine qu'il apprécierait en trouver un chez elle. Connaissant les raisons du soudain malaise de sa cadette, Erasyl patienta mais ne put se retenir bien longtemps. Il savait que sa sœur voyait un Oméga. Andreï lui avait fait un rapport détaillé de la situation.
« _ Je vois ton petit air gêné.... Laisse-moi deviner. Ta petite séance de sport de ce matin c'était pour te remettre d'une autre séance de sport plus nocturne cette fois ?!
_ Hey ! Mais ça va pas de crier comme ça ! Tu pourrais être discret !
_ Bof... Je me fiche de ce que tu fais de tes nuits. Je ne suis pas un moralisateur de bas-étage. Tu es une grande fille et il faut bien que jeunesse se passe.
_ Tu ne diras rien à Serik ?
_ Pour mémoire, si je l'appelle pour lui dire, il va me casser les pieds sur ma propre conduite. Je préfère rester loin du grand singe ! J'aurai la paix du moment qu'il ne voit rien, n'entends rien et que je ne lui dis rien.
_ Mouais.
_ Bon on y va ! J'ai hâte de voir ton appartement et peut-être ton jouet ! »
Accompagnant le geste à la parole, il prenait déjà la direction de la sortie forçant sa sœur à le suivre. Erasyl s'amusait trop de la situation pour prendre une minute. Le temps était précieux et celui qu'il passerait à embrouiller Anara l'était d'autant plus. Il songea un bref instant à Sezim restée à Saint-Pétersbourg mais repoussa vivement cette pensée. Il n'était pas question de se laisser distraire alors qu'il engageait avec sa sœur une partie d'échec. A part lui il sourit. Il avait toujours adoré les échecs.
Taldykorgan, Kazakhstan, demeure de Vassili Oulitsky
Olga pénétra dans sa chambre d'adolescente heureuse d'être enfin rentrée chez elle. Il lui semblait que cela faisait une éternité qu'elle n'était pas venue rendre visite à sa famille. Depuis ses fiançailles avec Otabek, elle avait vécu prisonnière du gynécée de la famille Altin. Ici au moins se dit-elle la vie serait plus douce et moins oppressante. Son père ne tolérait pas les anciennes coutumes et elle lui avait caché la vérité lors de ses rares visites pour ne pas compromettre son mariage.
Un coup fut frappé à la porte et elle se hâta d'aller ouvrir pensant que c'était sa petite sœur. Quand elle ouvrit la porte, elle ne réussit pas à masquer sa surprise face à son visiteur. Instinctivement, elle recula au centre de la pièce comme pour échapper à l'Alpha qui lui faisait face. Serik entra et referma sans brusquerie la porte derrière lui. Il devait lui parler et il ne voulait pas être entendu du reste de la maisonnée.
« _ Olga, ne t'inquiète pas, je ne te veux aucun mal. Je souhaite juste te parler avant de partir.
_ Vous ne rester pas pour me surveiller ? » Sa voix trembla légèrement sous le coup de la surprise et de la peur.
« _ Non, je ne le peux pas. Mon épouse va accoucher et je ne t'apprends rien en te disant que c'est un moment très particulier pour nous.
_ Oui... Après ce qui est arrivé à votre petite fille. »
Il y eut un léger moment de flottement entre eux. Olga compatissait sincèrement à la douleur de cet Alpha qui avait enterré cinq ans plus tôt son enfant. Serik quant à lui détourna un bref instant le regard pour se donner une contenance mais il reprit bien vite la parole.
« _ Oui mais il n'est pas toujours bon de regarder en arrière. On ne peut pas avancer dans la vie en regardant sans cesse par-dessus son épaule.
_ Sans doute.
_ Je sais que ces derniers mois ont été très difficiles pour toi et l'avenir s'annonce incertain. Je te laisse la carte d'un ami avocat. Si tu as besoin d'aide tu peux lui dire que tu viens de ma part et de celle de Yulia.
_ Yulia ?! »
Elle vit un sourire étirer les lèvres de l'homme qui lui faisait face. Il n'y avait rien d'ironique dans son attitude ni de moqueur. C'était juste un sourire doux et chaleureux qui rendait son propriétaire plus humain, moins effrayant.
« _ Je sais qu'avec Yulia les relations sont tendues. Il ne faut pas lui en vouloir c'est juste qu'elle... Disons qu'elle avait choisi son camp bien des mois avant que tu ne découvres la vérité. Elle a essayé, très maladroitement, de te faire comprendre qu'Otabek n'était pas fait pour toi. Je crains cependant que ses nerfs aient parlé plus souvent qu'ils n'auraient dû.
_ Attendez... Depuis quand savez-vous pour Otabek et ... » Elle se mordit la lèvre pour ne pas avoir à prononcer le nom de Yuri.
« _ Je ne vais pas te mentir. Nous savons pour eux depuis le début, depuis Barcelone. Je n'ai malheureusement pas le temps de tout t'expliquer mais sache que si tu en as besoin nous te viendrons en aide.
_ Et pourquoi vous feriez ça ?! Alors que vous soutenez l'autre Oméga ! » Le venin dans sa voix la surprit.
« _ Parce que je le lui ai promis et que je tiens toujours mes promesses.
_ Vous le lui avez promis... A qui ? »
Serik la dévisagea avec toute la bienveillance dont il était capable. Il savait que toutes ces informations devaient être un choc pour la jeune femme.
« _ Je l'ai promis à Otabek. Je sais que cela va te paraître incroyable mais il se soucie vraiment de ton futur et il est désolé de ce qu'il t'a fait. Il espère sincèrement que tu pourras un jour le pardonner. »
Serik tendit la carte du cabinet d'avocat mais Olga ne fit pas un geste. Il alla donc la poser sur la coiffeuse avant de la saluer. Alors qu'il allait ouvrir la porte, elle l'appela doucement.
« _ Serik Bolatevitch, attendez... Je... » Elle ne se mordit la lèvre avant de reprendre plus fermement. « Quand vous le verrez, dites-lui que je ne suis plus en colère et remerciez-le. Et... J'espère que ça va s'arranger pour lui et son Oméga. Je n'arrive pas à me réjouir pour leur bonheur futur avec le bébé mais je ne veux pas pour autant qu'ils soient malheureux. Et puis... Peut-être que tout est mieux ainsi. Il n'aurait jamais été heureux avec moi, non ?
_ Je lui dirai. Et, oui je crois sincèrement que vous n'auriez jamais été heureux ensemble. Il aime Yuri depuis des années. Bien avant de te rencontrer, bien avant Barcelone. Il l'a aimé dès qu'il l'a vu lors d'un stage il y a longtemps maintenant.
_ C'est un garçon ou une fille ? Leur bébé.
_ Un petit garçon.
_ Ah... Veillez bien sur eux. Maintenant, j'aimerai être seule. Au revoir Serik Bolatevitch.
_ Au revoir Olga. »
Il sortit la laissant seule dans sa chambre. Elle resta plantée un long moment au centre de la pièce. Soudain tout lui apparaissait comme étant mensonges, secrets et complots. Elle se demanda qu'elle avait été et quel serait son rôle dans toute cette histoire. Elle y avait participé à son insu au début, jouet d'Anara et de Bolat. Et maintenant ? Le jeu se poursuivait-il toujours avec Nurasyl ou était-il sincèrement épris d'elle ? Et que penser de l'attitude de Serik ? Tant de questions et aucunes certitudes.
« _ Je veux que ça s'arrête. J'en ai assez de tout ça. »
Saint-Pétersbourg, Eglise de la Nativité de Saint-Jean-Baptiste*
L'église aux façades roses émergeait de la neige dans toute sa splendeur faisant accélérer le pouls de Yuri. Il y était enfin. Dans quelques minutes, il allait entrer dans le vestibule et y retrouver son Alpha et la cérémonie débuterait. Son cœur se gonfla tant de joie qu'il faillit fondre en larmes sous le coup de l émotion. Ce moment qu'il avait tant attendu arrivait enfin. Il allait épuiser l'homme qu'il aimait de toute son âme.
A l'intérieur de l'église régnait un joli chaos que tentaient en vain d'organiser Yakov et Georgi. Ceux-ci devaient s'assurer que les invités soient assis du bon côté de la travée centrale mais personne ne semblait prêter attention aux instructions si bien qu'une joyeuse pagaille régnait à leur plus grand déplaisir.
« _ Quand vous êtes un ami du marié, il faut vous asseoir à gauche ! » Vociféra un Yakov rouge de colère à l'attention de Leo de la Iglesia.
« _ Oui on sait Deda Yasha ! Sara et moi, nous allons à droite. Ca te va ? Du côté des invités de Yuriatchka.
_ Oui ! Et arrêtez tous de m'appeler Deda Yasha !
_ Pourquoi ? » Demanda une petite voix derrière lui.
Yakov se retourna et ne put retenir un sourire face à Maria qui tenait par la main sa petite sœur et son cousin. Il se radoucit immédiatement en voyant ces enfants qu'il adorait par-dessus tout.
« _ Vous vous pouvez mes poussins. Bon Kolia tu vas avec Deda Kolia et vous deux avec vos parents. Il faut faire vite maintenant, ça va bientôt commencer.
_ Et si je veux être avec Kolia ?
_ Laissez Yakov. Je m'en occupe. Venez les enfants. »
Nikolaï tendit la main à son arrière-petit-fils et aux deux fillettes. Les enfants le suivirent sans protester et Yakov se remit tout de suite à la tâche. Les mariés n'allaient pas tarder à faire leur entrée mais tout le monde n'était pas encore assis. Pire, les invités étaient dissipés à l'extrême bavardant ou se prenant en photo dans la magnifique église augmentant ainsi la fureur du vieil entraîneur. Conscient que le vieux Béta n'allait pas tarder à entrer dans une colère noire, Georgi intervint. Il se racla la gorge et attira l'attention de l'assemblée.
« _ Ecoutez-moi tous une minute. Je sais que l'église est superbe et que c'est digne d'un musée mais il faut absolument que vous regagniez vos places. Les mariés sont arrivés et la cérémonie va commencer. Alors on s'assoit et on savoure ce moment de bonheur avec nos amis.
_ Ils arrivent quand au juste ?
_ Sezim, le témoin de Yuri m'a dit que le début était imminent. Le temps pour les futurs époux de rentrer dans le vestibule pour le rite des fiançailles. ».
A peine ces mots furent ils prononcés qu'Otabek accompagné de Serik, son témoin, rejoignit le prêtre dans le vestibule. Ils échangèrent quelques mots et attendirent que le second fiancé les rejoigne. Otabek, nerveux, ne cessait de réajuster sa veste de costume blanc ou de lisser un pli imaginaire. Il n'en pouvait plus d'attendre son futur époux. Celui-ci lui manquait et son absence ne faisait que renforcer une nervosité qu'il ne parvenait plus à dissimuler.
« _ On se calme petit frère. Ca va bien se passer.
_ Oui... Ca va aller. Il va venir, Serik ? »
Le ton interrogateur presque suppliant de son petit frère fit arquer un sourcil de l'aîné. Il avait presque envie de rire mais il s'abstint sachant que cette pensée traversait l'esprit de bon nombre de futurs mariés. Lui-même avait eut cette peur lorsqu'il avait épousé Yulia.
« _ Il va arriver. Sezim est avec lui. Il avait juste besoin d'un instant pour finir de se préparer.
_ S'il avait changé d'avis ?
_ Aucune chance. Il t'aime, vous êtes liés, vous avez des enfants et c'est lui qui a fixé la date du mariage. Tiens, regarde, le voilà. »
Serik, la main sur l'épaule d'Otabek lui désigna son Oméga qui gravissait les quelques marches du perron de l'église. Soutenu par son amie et témoin, Yuri s'avançait prudemment prenant garde à ne pas trébucher sur le sol gelé. Lorsque le Kazakh le vit, ses yeux se mirent à briller d'émotion. Son Oméga était tout simplement magnifique. Bien sûr, il l'avait toujours été mais en ce jour, il était particulièrement époustouflant. Ce qui lui fut confirmé par quelques mots murmurés par Serik.
« _ Le marié est sublime, petit frère. »
Incapable de répondre, ému, Otabek acquiesça. Il dévorait son aimé du regard. Celui-ci n'avait pas comme il l'avait dit revêtu un costume blanc. Il avait revêtu la tenue traditionnelle des femmes kazakhes. Il portait une paire de dambals**, une longue robe de soie blanche brodée d'or et d'argent et un kamzol bleu lui aussi brodé d'or et d'argent. Un zhaktau trônait sur sa poitrine et se soulevait au rythme de sa respiration. Yuri releva la tête et croisa le regard émerveillé de son Alpha. Un petit sourire satisfait se forma alors sur ses lèvres alors que leurs mains se joignaient.
« _ Tu es époustouflant, Yura.
_ Je suis heureux que ma surprise te fasse plaisir.
_ Tu es à couper le souffle. »
Serik se racla la gorge rappelant aux jeunes gens où ils se trouvaient et ce pourquoi ils étaient là. Le prêtre s'avança, les mains se lièrent et le rite des fiançailles débuta. Le prêtre bénit les fiancés et leur remis à chacun un anneau. Otabek saisit l'anneau en or blanc offert quelque mois plus tôt à Yuri que Serik lui tendit. Il le passa au mince annulaire droit de son Oméga, tremblant légèrement. A son tour, Yuri saisit un anneau d'or et tremblant d'émotion le fit glisser le long de l'annulaire droit de son Alpha. Une prière fut prononcée et Serik s'approcha des fiancés avec les alliances. Encore une fois, Otabek saisit en premier l'alliance qu'il passa à l'annulaire de Yuri avant de la retirer et de la reposer sur le petit coussin. Yuri fit de même. Ils répétèrent l'opération une fois, puis à la troisième, les anneaux restèrent aux doigts des mariés. Alors de nouveau le prête entama une prière. Yeux dans les yeux, les jeunes épousés écoutèrent avec émotion. Ils étaient mariés pour le meilleur et pour le pire. Un sourire éblouissant aux lèvres, accompagnés de Sezim et Serik, ils suivirent le prêtre jusqu'à l'autel afin de procéder au rituel du couronnement lorsque la bénédiction s'acheva.
Ils remontèrent la travée centrale main dans la main sous les yeux admiratifs et les regards émus de leurs proches. Ils marchèrent doucement au rythme d'un Yuri très ému et dont les larmes menaçaient dangereusement de couler. Une légère pression sur sa main lui fit tourner la tête et il se noya presque dans le regard d'Otabek. Les onyx brillaient de mille feux, débordant d'amour et de bonheur. Arrivés devant l'autel, le prêtre se tourna vers eux et le rituel du couronnement commença. Sezim et Serik prirent les couronnes d'or reliées par un ruban et les maintinrent au-dessus de la tête des jeunes époux. Ainsi couronnés par les stefana, ils écoutèrent la lecture d'un passage du Nouveau Testament. Une main toujours dans celle de son mari, Yuri caressa de l'autre son ventre arrondi où leur enfant s'agitait. Otabek trop absorbé par cette vision angélique n'écouta que d'une oreille distraite la lecture des Saintes Ecritures. Alors que la lecture était sur le point de s'achever, Yuri retint à grand peine un petit gémissement de douleur. Le bébé s'était semblait-il réveillé et avait décidé de donner des coups de pieds assez violents causant à Yuri quelques douleurs. Tendrement, il continua à caresser son ventre, les yeux perdus dans ceux de son époux murmurant si bas des mots pour son enfant que nul ne pouvait l'entendre.
La lecture des Evangiles s'acheva et le prêtre saisit une coupe dont le vin avait été remplacé par du jus de raisin en raison de la grossesse de Yuri. Elle fut présentée à Otabek qui la porta à ses lèvres sans quitter son époux des yeux. Une fois qu'il eut bu une gorgée, il la rendit au prêtre qui la remit à Yuri. Le jeune homme à son tour but tout en regardant son époux dans les yeux. Une fois le rituel accomplit, guidés par le prêtre, ils entraimèrent la marche nuptiale suivis de Sezim et Serik qui les couronnaient toujours. Le pas lourd, les reins douloureux d'être resté trop longtemps debout, Yuri tira gentiment sur le bras d'Otabek pour que celui-ci adopte un pas plus lent. Ce que le Kazakh fit conscient que son Oméga commençait à souffrir. Doucement, main dans la main, Ils firent trois fois le tour de l'autel où reposaient les Evangiles. A la fin du troisième tour, ils embrassèrent la croix qui leur était présentée. Yuri poussa alors un léger soupir de soulagement. La cérémonie était terminée.
« _ Soyez heureux mes enfants. Puisse votre mariage être heureux et fécond. » A ces mots les époux posèrent leurs mains sur le ventre arrondi de Yuri. « Vous pouvez embrasser votre époux Otabek Bolatevitch. »
Otabek ne se fit pas prier. Il attira doucement Yuri dans ses bras qui s'y blotti avant de l'embrasser tendrement. Ce fut un baiser lent, doux, empli d'amour. Ils savourèrent ce petit moment de complicité sous les regards émus de l'assistance. Quand le baiser cessa, ils caressèrent dans un même mouvement le ventre arrondi de l'Oméga. Ivres de bonheur, ils se sourirent tendrement et ne bougèrent pas. Ils étaient mariés. Puis doucement, Otabek se pencha de nouveau pour embrasser son époux qui lui murmura quelques paroles auxquelles il répondit avant de de nouveau celer leurs lèvres.
« _ Moi aussi je t'aime Yura. De tout mon corps, mon cœur et mon âme. »
Saint-Pétersbourg, patinoire Vladimir Kovalev
Otabek pénétra tôt dans la patinoire en ce petit matin d'automne. Il avait décidé de reprendre l'entraînement bien qu'il ne sache pas encore s'il allait reprendre la compétition. Yuri avait insisté pour qu'il n'abandonne pas sa carrière mais le Kazakh n'avait pas encore pris de décision. Trop de questions restaient à régler avant de pouvoir songer à recommencer la compétition. Si son père et sa sœur n'étaient pas mis en échec, il ne pourrait pas participer au championnat national kazakh qui aurait lieu en décembre. Il ne pourrait se résoudre à laisser seuls son Oméga et leur enfant à naître. Sans compter que Yuri serait si proche d'accoucher qu'il ne voulait prendre le risque d'être absent et de manquer la naissance de son fils. Un sourire ourla ses lèvres quand il songea que dans quelques mois, il tiendrait enfin son enfant dans ses bras. Il avait hâte et pourtant redoutait ce moment. Une peur insidieuse ne cessait de s'insinuer dans ses pensées. Il avait peur pour les deux êtres les plus importants de sa vie.
« _ Tu reviens t'entraîner ? »
Mila d'habitude matinale s'avançait vers lui sincèrement heureuse de voir son ami. Celui-ci lui rendit le sourire qu'elle affichait.
« _ Oui. Yura a insisté pour que je prépare ma saison.
_ Il a insisté ? Pourtant, il a du mal à se séparer de toi.
_ Il a eu di mal à me laisser partir ce matin et je t'avoue que je n'avais pas très envie de le quitter mais il n'est pas seul donc ça va aller. Nikolaï a promis de m'appeler s'il y avait le moindre problème et Sezim et Masha vont venir le voir dans la matinée.
_ Comment va-t'il ? Et le petit bout ?
_ Ils vont bien tous les deux. Yuri va beaucoup mieux depuis qu'il n'est plus hospitalisé. Ca lui fait du bien d'être chez nous. La grossesse reste compliquée mais au moins il n'est plus dans une chambre d'hôpital.
_ C'est sûr que l'hôpital ça ne lui convenait pas. »
Otabek hocha la tête tandis qu'il sortait ses patins de son sac. Il prit également des bandes et commença à préparer ses pieds afin de les protéger d'éventuelles blessures tout en discutant de tout et de rien avec Mila. Il apprit ainsi que la patineuse s'était liée avec la patineuse italienne, Sara Crispino, et qu'elles projetaient de s'installer durablement en Russie toutes les deux.
« _ Sara va s'entraîner avec nous vu que Yuuri et Viktor repartent au Japon.
_ Ils ne restent pas à Saint-Pétersbourg ?
_ Non. Viktor trouve que c'est mieux de retourner à Hasetsu pour le moment. Selon lui c'est trop compliqué ici.
_ Ils ont des problèmes ? »
Gênée, Mila dansa d'une jambe sur l'autre. Le couple russo-japonais n'avait pas de problème en particulier de ce qu'elle savait. Les deux patineurs avaient juste annoncé leur intention de retourner auprès de la famille de l'Oméga japonais rien de plus. Bien entendu, Mila soupçonnait que la situation de Yuri et Otabek avait joué dans leur décision.
«_ Ils viennent de se marier et ils vont faire une petite cérémonie là-bas. Ils ont dû vous en parler pour pouvoir trouver une solution pour que vous puissiez voir le mariage comme pour celui ici.
_ Non, ils n'ont rien dit et Yura ne m'en a pas parlé non plus.
_ Ah... Ils ont peut-être oublié. Ca arrive.
_ Oui comme ils avaient oublié pour la cérémonie orthodoxe. S'ils ne veulent plus avoir de contact avec nous ils peuvent nous le dire une bonne fois pour toute. » Dit froidement Otabek.
« _ Mais non ! Je suis sûre que c'est un oubli ! Ils vont forcément vous en parler.
_ Ecoute Mila, c'est gentil à toi de prendre leur défense mais ça commence à très sérieusement m'agacer. Au début de la grossesse, ils ont été très présents et du jour au lendemain plus personne. Je sais que notre situation à Yura et moi est compliquée mais ça n'excuse pas tout. Leur attitude affecte le moral de Yura. Ca je ne peux pas l'accepter. Il est fragile en ce moment. Il a besoin de ses amis et sans vouloir t'accuser de quoique ce soit Viktor, Yuuri et toi n'êtes pas très présents pour lui. Je sais que nous avons tous des vies, des carrières, mais ça n'empêche en rien de passer de temps en temps le voir. Seul Georgi prend la peine de venir et de passer un moment avec lui. Je sais que tu vas me dire qu'il y a Nikolaï, Sezim, Lilia et Yakov mais ce n'est pas un argument valable. Surtout au regard de votre attitude passée où vous ne vous priviez pas de mettre votre nez dans notre relation.
_ Je sais que je ne prends pas beaucoup de nouvelles mais c'est difficile pour moi de le voir comme ça. Il... Il n'est... Enfin ce n'est pas le Yuratchka que je connais. Quand je le vois, je vois un chaton blessé et affaibli.
_ Et ? Tu crois que c'est évident pour moi ? L'homme que j'aime a été blessé par ma faute, il est alité par ma faute. Tu crois que je ne souffre pas ? Et que je ne culpabilise pas ? Je savais que je devais attendre de régler mes affaires pour me lier à lui mais je ne l'ai pas fait. Je lui ai fait un enfant alors qu'il n'aurait pas fallu et ça le tue... Alors vos petits cas de conscience ne sont rien par rapport à ma culpabilité. Si vous êtes ses amis, prenez un petit peu plus soin de lui. Ce n'est pas un si gros effort à faire.
_ Otabek, je...
_ Je vais aller m'entraîner maintenant.
_ Otabek ! »
Le jeune Alpha ne se retourna pas et s'élança sur la glace. Il était en colère, sentiment auquel il ne cédait pas facilement d'ordinaire. Décidé à ne pas poursuivre cette discussion, il s'entraîna assidument sous la direction de Yakov. Vers midi, le vieil entraîneur interpella Otabek depuis son poste d'observation. Le patineur glissa vers lui en sueur et essoufflé. Il appréhendait le jugement du coach particulièrement intransigeant de l'équipe russe. Pourtant, celui-ci le surprit quand il lâcha d'un air bourru qu'il avait bien travaillé et qu'il pouvait rentrer chez lui.
« _ Je peux encore travailler. Je suis très en retard pour ma saison.
_ Je sais mais... Yuratchka doit avoir besoin de toi et je ne tiens pas à le mettre en colère.
_ Je ne tiens pas non plus à affronter sa colère si je rentre trop tôt à la maison. Il va trouver ça suspect.
_ Tu es sûr ?
_ Je vais l'appeler pour prendre de ses nouvelles. Si tout va bien on continue sinon je rentrerai.
_ D'accord mais à la moindre alerte tu files chez toi. Une fois que t'auras appelé, il faudra qu'on parle de tes programmes. » Il se détourna puis fit volte-face. « Passe-lui le bonjour de ma part. »
Otabek acquiesça et glissa vers la sortie de la pantoire. Il avait hâte de prendre des nouvelles de son petit fauve bien-aimé et de savoir comment s'était déroulée sa matinée. Il était toutefois un peu anxieux. Il était difficile de laisser son Oméga aux soins d'autres même s'il s'agissait de son grand-père et de Sezim. Depuis des mois, il veillait sur lui sans relâche et d'un coup i se sentit coupable. Lui pouvait sortir, se distraire, s'échapper de l'appartement et ainsi s'éloigner un peu de leurs soucis. Yuri ne le pouvait pas. Il ne connaissait que les murs de sa chambre d'hôpital ou de son appartement. Il n'était pas sorti depuis des mois et n'avais pu profiter de l'été et encore moins de ce début doux d'automne. Il se trouva bien égoïste et se promit de réfléchir à une solution pour que son amoureux puisse se divertir un peu.
Noursoultan, Kazakhstan, demeure d'Andreï Andreïevitch Kourkov
Yulia tenait fièrement entre ses bras le nouveau-né alors que Serik la tenait dans ses bras. Les heureux parents regardaient avec une fierté non dissimulée leur fille. Tendrement, Serik caressa le fin duvet de cheveux d'un noir de jais. Sa fille était magnifique. Emu, il tenta de dissimuler son trouble en embrassant le haut du crâne de son épouse. Yulia sourit face à l'attitude pudique de son époux. Celui-ci avait tant de mal à laisser ses émotions même les plus naturelles s'exprimer librement.
« _ Tu as le droit de verser ta petite larme tu sais.
_ Ne dis pas de bêtise. Ce doit être de la fatigue rien de plus. »
Yulia n'insista pas. Elle savait d'expérience qu'il attendrait d'être seul et à l'abri des regards pour se laisser aller. C'était ainsi qu'elle l'aimait son Alpha si sévère et dur et pourtant si tendre.
« _ Comment veux-tu l'appeler ? Nous n'avons même pas réfléchis à son prénom.
_ Je ne sais pas Youlka. Je... Un prénom russe ?
_ Non, je préférerais un prénom kazakh. Un joli prénom de notre beau pays. Ca l'aidera à se souvenir de ses racines quand nous serons partis.
_ Tu veux donc déménager à Saint-Pétersbourg ? » Tendu, Serik attendit la réponse de son épouse.
« _ Je ne le voulais pas il y a quelques mois mais... Nous ne serons pas en sécurité ici. Je le sens. Mon grand-père et mes parents sont trop âgés pour nous protéger.
_ Ce ne sera pas évident en Russie non plus.
_ Je le sais. Mais au moins nous serons avec toi. Et ma fille me manque terriblement. Je veux être près de ma petite Masha adorée.
_ Très bien. Il en sera fait selon tes souhaits. Nous pourrons partir d'ici une petite semaine. Le temps pour vous deux d'être un peu remises.
_ Nous allons bien et le plus tôt sera le mieux. J'ai peu Serik. »
L'Alpha serra fort contre lui son épouse et son enfant. Il n'avait jamais vu son épouse avoir peur. Bien au contraire, de leur couple s'était-elle la plus forte. Mais il la comprenait. Son père s'était remis de ses problèmes de santé et avait pris connaissance de l'identité de l'acheteur de Sezim. Il devait être furieux. Fureur ce qu'il le rendait d'autant plus dangereux.
« _ Alors comment nous l'appelons ? » Reprit Seri pour ne pas laisser leurs sombres pensées les envahir et briser ce moment.
« _ Kadia***. Notre jolie petite princesse s'appelle Kadia.
_ Comme toujours tu as choisi un magnifique prénom mon amour. Je t'aime Yulia. »
Yulia bougea précautionneusement dans les bras de son époux pour l'embrasser doucement. Elle essaya de faire passer à travers ce baiser tout l'amour qu'elle ressentais pour lui.
Moscou, quartier de l'université d'État Lomonossov de Moscou
Anara pénétra dans son appartement suivie de près par Erasyl qui dissimulait mal son impatience à l'idée de rencontrer l'Oméga de sa sœur. Durant tout le trajet retour, l'aîné n'avait cessé de bavarder et de gentiment taquiner la jeune fille. La bonne humeur de son frère l'exaspérait particulièrement. Il faisait preuve d'un enthousiasme qu'elle ne partageait pas et peinait à le dissimuler.
« _ Ben alors pas contente de retrouver ton bien-aimé ?
_ Si bien sûr.
_ Anara ! Je... »
Alexandre se tut en apercevant l'Alpha qui suivait Anara. Il s'immobilisa ne sachant comment réagir face au nouveau venu. Il la consulta du regard et n'obtint pour toute réponse qu'un regard noir qui lui fit instinctivement baisser les yeux. Il n'était visiblement pas de bon ton de se montrer familier et volubile devant le nouveau venu. Docilement, il s'écarta du passage libérant ainsi le passage pour que les Alphas puissent aller au salon. Cette attitude soumise fit arquer un sourcil à Erasyl. Il s'était attendu à trouver un Oméga qui serait la copie conforme de Yuri, pas son exact opposé. Il se demanda ce que cela pouvait bien signifier. Anara n'aimait pas les êtres soumis enfin pas si elle ne les avait pas brisés avant. Or, des renseignements qu'il avait, sa sœur ne fréquentait pas ce jeune homme depuis assez longtemps pour que celui-ci ait déjà été brisé par la volonté de sa sœur. Très vite, il prit sa décision. Il s'était montré curieux et joyeux jusqu'à présent autant continuer sur cette lancée. Il aviserait plus tard quel comportement serait le plus adéquat. Il s'avança dans le couloir dépassant sa sœur qui fixait toujours l'Oméga et se planta entre les deux regards interrompant l'échange muet.
« _ Bonjour. Je suis Erasyl, l'un des frères aînés d'Anara. Vous êtes ? »
Le ton courtois et chaleureux surpris Alexandre qui redressa timidement la tête. Il hésita un instant puis avec un maigre sourire se présenta-le plus succinctement possible.
« _ Bonjour Alpha Je suis Alexandre Yurievitch Petrov.
_ Bonjour Alexandre Yurievitch. Je suis enchanté de faire ta connaissance.
_ Je.. Heu.. Moi aussi. »
Le jeune homme ne savait comment réagir. Il ne s'attendait pas à cette douceur venant d'un Alpha, un être supérieur auquel il devait respect et soumission. Il rendit timidement son sourire à l'Alpha, restant cependant sur ses gardes. Il ne voulait pas commettre d'impairs devant le grand frère de son Alpha.
« _ Bon on passe tous les trois au salon ! » Lança soudainement une voix derrière Erasyl faisant sursauter l'Oméga.
« _ Oui volontiers ! Et une tasse de thé et un petit quelque chose à grignoter seraient les bienvenues ! »
Sans plus attendre, Erasyl gagna le salon alors qu'il entendait sa sœur donner ses ordres dans son dos. La première chose qu'il vit en entrant fut le grand plan de Moscou punaisé au mur. Il n'en fut pas surpris. Andreï l'avait prévenu que sa sœur avait mis en place tout un dispositif de traque. Aussi, il s'assit le plus naturellement du monde dans un fauteuil feignant d'être amusé par la carte. Il n'avait pas envie d'éveiller les soupçons de sa paranoïaque de sœur. Quand elle le rejoignit au salon, elle le trouva donc en train d'examiner la carte un sourire amusé aux lèvres.
« _ Tu sais qu'il existe plus simple pour se repérer dans la ville ? » Lui lança-t'il d'un ton badin.
« _ Oui je sais mais ça m'aide à mieux visualiser.
_ Visualiser quoi ? Combien la ville est étendue ?
_ Ca m'aide à savoir où j'ai déjà cherché et où je devrais chercher. »
Erasyl l'interrogea du regard ne paraissant pas comprendre ce qui fit soupirer bruyamment Anara. La jeune fille se laissa tomber sur le canapé avant de lui répondre sur un ton mordant.
« _ Tu as vécu dans une grotte où quoi ?!
_ Plutôt des chambres d'hôtel en bonne compagnie. » Lui répondit-il taquin. Ce qui eût pour effet d'exaspérer Anara.
« _ T'es vraiment qu'un coureur de jupons ! Tu es marié je te signale !
_ Tu ne vas pas me faire la morale ! Je suis ton aîné et j'ai déjà assez de Serik ! Fais attention où tu vas vite ressembler au grand radoteur ! »
L'atmosphère se fit d'un coup plus légère. Anara adorait quand l'autorité de son frère aîné était remise en cause par les cadets.
« _ Ouais ben j'ai pas trop envie de lui ressembler.
_ En parlant de lui, tu as une nièce. Elle s'appelé Kadia. Petit conseil, envoie-lui un joli cadeau et des félicitations. Ca détournera son attention des tes affaires.
_ Comme si j'avais le temps de faire le tour des magasins pour mioches !
_ Fais le ! Et puis emmène ton Oméga. Ca vous fera faire une petite promenade. Et qui sait éveillera en toi l'instinct maternel ! » Erasyl avait lancé cette petite phrase aussi innocemment que possible. Pourtant il avait entendu les pas d'Alexandre qui s'approchaient. Il rajouta désireux de semer le dote dans l'esprit de l'Oméga. « Au fait, ton Oméga, je ne m'attendait pas à ça. Tu les aimes plus minces, aux yeux clairs et très blonds en général. »
A ce moment précis, Alexandre entra et déposa un plateau chargé de tasses et de pâtisseries qu'il avait cuisinées le matin même. Il se redressa, pâle, soudain fébrile, et allait se retirer quand Erasyl l'interpella.
« _ Il manque une tasse.
_ Il y a deux tasses Alpha. En voulez-vous une autre pour votre usage ? »
Erasyl éclata d'un rire franc et joyeux. Ce jeune homme l'amusait beaucoup d'un seul coup. Il était si soumis, si docile. Il était si éloigné par sa personnalité et son apparence de Yuri qu'il était étonnant que sa sœur ne lui ait accordé qu'un seul regard. Pourtant, si elle s'intéressait à lui c'est qu'il devait bien y avoir une raison.
« _ Je ne veux pas une autre tasse. Va en prendre une pour toi et joins toi à nous. J'aimerai beaucoup faire ta connaissance. »
Alexandre hésita et jeta un coup d'œil anxieux vers Anara qui acquiesça bien que visiblement tendue soudain.
« _ Viens Sasha. Tu peux prendre ma tasse. Je n'ai pas envie de thé.
_ Tu veux autre chose ? Je peux te faire du café ou ...
_ Assis maintenant. »
Elle n'avait pas élevé la voix mais l'ordre était limpide. Sans protester le jeune homme s'assit sur le bord du canapé, le dos droit, les mains jointes sur les genoux. Il avait l'attitude parfaitement soumise que lui imposait son second genre du point de vue de certains Alphas ou même Bêtas. Erasyl ne dit rien se contentant d'observer la scène. Anara les yeux fixés sur le jeune, lui attendant qu'on lui donne la permission de parler. D'un simple geste du menton, Anara lui désigna la table basse et aussitôt il se saisit de la théière et fit le service. Il y avait quelque chose d'extrêmement familier dans cette scène. Erasyl pinça les lèvres et choisit de fixer son attention sur le plan. Dun seul coup, il fut de nouveau à Almaty dans le salon familial Il revit sa mère, Sezim et Saltanat faire le service humiliées par son père. L'amusement des dernières heures céda la place à une colère contenue. Il devait mettre en échec ceux de sa famille qui étaient restés bloqués dans un autre siècle pour offrir à ceux qu'ls aimait un avenir meilleur et sans danger.
« _ Ca va Erasyl ? T'as l'air en colère d'un coup »
Il regarda de nouveau sa sœur et lui sourit gentiment.
« _ Non, je réfléchissais. Je me disais que tu fouilles Moscou mais que tu as fait chou blanc pour le moment.
_ Pas la peine de me le rappeler ! » Siffla t'elle entre ses dents.
« _ Ce n'est pas un reproche. Je me dis juste qu'Otabek est plus doué que je ne le pensais pour disparaître.
_ Ca donne rien du côté des hôpitaux.
_ A ce sujet, Anara. » Commença d'une petite voix Alexandre avant de s'interrompre.
« _ Oui jeune homme ? » L'encouragea Erasyl.
« _ Votre frère est un grand patineur et DJ. Je me suis renseigné sur lui sur Internet. Plutôt que de chercher son Oméga pourquoi ne pas le chercher lui dans les patinoires et les clubs ? Ils doivent avoir besoin d'argent pour vire. Et puis, la saison de patinage va bientôt commencer alors ça sera peut-être plus simple de le trouver. »
Anara se redressa d'un seul coup sur son siège et saisit le jeune homme pour l'embrasser à pleine bouche sous le regard surpris de son frère.
Voilà pourquoi elle te garde avec elle. Tu réfléchis et analyses alors qu'elle s'agite et se laisse manipuler. Tu es sa tête. Ca te rend beaucoup trop dangereux. Je suis désolé jeune Sasha mais tu vas bientôt disparaître du tableau. Songea-t-il
Saint-Pétersbourg, Belmond Grand Hôtel Europe****
Lorsque la voiture s'arrêta devant le grand hôtel, Yuri écarquilla les yeux de surprise. Il avait délégué à Sezim et Yulia le plus gros de l'organisation de la réception et ses belles-sœurs lui avaient assuré avoir trouvé un charmant lieu pour la fête. Il ne s'attendait toutefois pas à ce qu'elles choisissent l'un des plus beaux hôtels de la ville. Il avait imaginé un lieu simple et discret plus en accord avec ses goûts et ceux de son époux. Attendri par la réaction de son mari, Otabek l'attira doucement à lui.
« _ Ta surprise te plaît mon amour ?
_ Tu... T'étais au courant ?! » Lui répondit un Yuri toujours incrédule.
« _ Bien sûr. Yulia et Sezim m'ont consulté même si je pense qu'elles l'ont fait uniquement pour la forme. Elles avaient déjà réservé quand elles m'en ont parlé.
_ Mais putain c'est trop luxueux ! On n'a pas les moyens ! Ca coûte une fortune une chambre ici ! »
Otabek serra plus étroitement Yuri contre lui et relâcha des phéromones pour l'apaiser. Il lui embrassa doucement le front avant de le regarder dans les yeux.
« _ On en a les moyens Yura. Ne t'inquiète pas de ça. Et puis, rien n'est trop beau pour toi.
_ Mais Beka...
_ Je t'ai dit que tout va bien. Serik a des appuis qui nous permettent ce genre de fantaisie. Surtout pour un jour comme aujourd'hui. Un endroit spécial pour un jour spécial pour la personne la plus spéciale. Viens maintenant. Nous n'allons pas faire attendre nos invités. »
Encore sous le choc, Yuri acquiesça et aidé d'Otabek sortit de la voiture. Ses yeux émeraudes parcoururent la façade de l'hôtel un instant avant qu'il ne soit bien vte entraîné à l'intérieur. Pénétrant dans le hall de marbre, Yuri fut ébloui par la beauté du lieu. Il avait l'habitude de fréquenter les hôtels du monde entier mais jamais il ne descendait dans des hôtels de luxe. Otabek passa un bras autour de sa taille et le guida doucement vers le grand escalier qu'ils gravirent escortés par un employé de l'hôtel élégamment vêtu de la livrée de l'hôtel. Celui-ci mena le couple jusqu'à une grande salle de réception dont il ouvrit la prote avant de leur céder le passage. Ils entrèrent dans la grande salle de réception et furent applaudis par leur famille et amis. A ce moment, les nerfs de Yuri craquèrent et il se réfugia contre le torse de son époux pour y enfouir son visage ruisselant de larmes. Attendri par la réaction de son tigre qui s'était soudain mué en chaton, Otabek le câlina, lui murmura des paroles apaisantes au creux de l'oreille et doucement l'aida à reprendre le contrôle de lui-même.
« _ Bah alors princesse on pleure ?! » Lui lança JJ à l'autre bout de la pièce arrachant un éclat de rire à l'assistance.
« _ Ta gueule ! C'est pas moi qui pleure ! C'est le gros Oméga enceint à l'intérieur de moi !
_ Tonton Yuratchka les gros mots ! »
Cette remarque d'une fillette de dix ans arracha un nouvel éclat de rire aux convives.
« _ Pardon Masha ! Je crois que je te dois encore une pièce !
_ Ca serait bien des billets. Je suis trop grande pour me faire avoir par ta petite monnaie maintenant.
_ Serik ta fille braque mon époux.
_ J'ai le sens des affaires. Comme papa !
_ Oui bon on verra ça plus tard Masha. Laisse tes oncles tranquilles. Vous entrez ou restez sur le pas de la porte ? »
Un baiser échangé sous les applaudissements et le couple main dans la main s'avança au centre de la pièce où il salua la famille proche d'Otabek et Yuri. Très ému, Nikolaï serra un long moment son petit-fils dans ses bras. Le vieil homme lui murmura la voix emplie d'émotions ses félicitations et ses meilleurs vœux de bonheur puis il serra chaleureusement la main d'Otabek. Puis vinrent les frères d'Otabek, leurs épouses et enfants et enfin Lilia et Yakov. Les deux entraîneurs du patineur russe eurent bien du mal à dissimuler leur fierté et leur émotion de voir le jeune homme marié. Ils l'avaient connu si jeune et l'avaient vu s'épanouir tant comme patineur que comme homme et père de famille.
« _ Où est mon Kolia ? » Demanda soudain inquiet Yuri.
« _ Avec ses tantes et ta surprise.
_ D'accord.
_ Une surprise ?
_ Oui Alpha. » Yuri embrassa rapidement les lèvres pour faire taire son époux et reprit la parole à l'adresse de ses convives. « Beka et moi nous vous remercions d'être tous présents. Nous savons que ce n'était pas évident pour vous de vous libérer vu la date mais ça nous touche que vous ayez fait l'effort de vous libérer.
_ On voulait surtout tous te voir pleurer princesse !
_ Ta gu... Bouche JJ ! »
Yuri allait de nouveau s'emporter mais Otabek prit les devants et poursuivit tout en attirant son Oméga contre lui pour qu'il se calme.
« _ Nous vous remercions énormément et nous espérons que la fête vous plaira. Le buffet est en train d'être servi donc servez-vous et amusez-vous.
_ Ah ! Et tout à l'heure on va vous annoncer le nom des parrains et marraines du bébé. Et si vous voulez jouer à notre petit jeu la boîte est là-bas. Est-ce que tu peux expliquer les règles Georgi ? J'ai besoin de m'absenter quelques minutes avec Beka.
_ Pas de souci ! »
L'annonce fut accueillie avec enthousiasme et applaudissements. Georgi prit la parole et commença à expliquer en quoi consistait le jeu. Les convives étaient invités à noter sur un morceau de papier le sexe du futur bébé et sa date de naissance supposée. Le vainqueur recevrait un cadeau du couple quand Yuri aurait accouché.
Pendant que Georgi distrayait les invités, Yuri saisit la main d'Otabek et ils sortirent discrètement de la salle de réception. Apercevant Erasyl qui leur faisait signe, ils se dirigèrent vers lui et sans un mot prirent la direction des ascendeurs. Ne comprenant pas ce qu'il se passait Otabek dévisagea Yuri puis son frère qui semblait beaucoup s'amuser de la confusion de son petit frère.
« _ Vous allez me dire ce que vous complotez tous les deux ?
_ Tu vas vite le savoir ihi.
_ Patience mon amour. Ah ! On est arrivé ! »
Yuri bondit autant qu'il le pouvait compte tenu de son état hors de la cabine. Il entraîna avec lui un Otabek perdu vers une chambre dont Erasyl lui avait remis la clé quelques secondes plus tôt. Ils s'immobilisèrent devant la porte et Yuri, soudain nerveux, se retourna vers son époux. Il se mordilla la lèvre inférieure comme il le faisait toujours quand l'anxiété le prenait. Il prit une longue inspiration en caressant son ventre puis planta son regard de soldat dans celui de l'homme qu'il aimait.
« _ Beka... N'oublie jamais que je t'aime à l'infini et encore plus. Je sais que depuis notre rencontre ça n'a pas toujours été rose. Je suis pas tous les jours facile et tout mais je t'aime et je ne cesserais jamais de t'aimer.
_ Je le sais Yura. Qu'est-ce qu'il se passe ? Tu m'inquiètes.
_ Beka, je... Tu te souviens du premier anniversaire de Kolia.
_ Oui mais...
_ Je t'avais dit qu'il fallait bien faire un premier pas et depuis on n'a jamais vraiment fait plus. C'est de ma faute. J'avais encore peur à l'époque et ça me terrifiait.
_ Yura, de quoi tu parles ?
_ J'ai été égoïste. Je n'ai pas pensé à toi et bon... Tu sais, j'ai pas de parents. Mais toi... Je vais ouvrir la porte et tu me promets de rester calme ?
_ Oui bien sûr mais... »
Otabek était totalement perdu. Il ne comprenait pas ou n'osait pas comprendre où son Oméga voulait en venir. Il n'eut cependant pas le loisir d'y réfléchir plus avant. Yuri avait déverrouillé la porte et l'entraînait l'intérieur de ce qui semblait être un petit salon privé. Et avant qu'il n'ait pu comprendre son fils se précipita vers eux. Il se baissa, le souleva dans ses bras et l'embrassa sur une joue alors que Yuri lui embrassait l'autre.
« _ Ca va mon petit chat ?
_ Oui papa ! T'es trop beau !
_ Merci mon chaton d'amour. Ca s'est bien passé ici ?
_ Oui ! Äje est gentille.
_ Äje ? » Interloqué, Otabek dévisagea son fils.
« _ Selemetsis ve Otabek.»
Le cœur d'Otabek cessa de battre un instant avant de bondir dans sa poitrine et de cogner contre ses côtes. Cette voix... Il ne l'avait plus entendu depuis des années. La dernière fois qu'il l'avait entendue c'était dans le hall de l'hôpital de Moscou plus de cinq ans plus tôt. Yuri était alors dans un état critique et il venait d'apprendre que son amour attendait leurs enfants. Il dû fermer les yeux un instant pris par un vertige. Il sentit la main de Yuri légère comme un papillon sur son bras.
« _ Ca va pas äke ?
_ Si mon chat. Descends un moment par terre tu veux. »
Sans attendre Otabek déposa son fils qui alla près de Yulia qui lui faisait signe. Yuri quant à lui soutint son époux en se blottissant tout contre lui. Il relâcha doucement des phéromones pour le calmer et attendit nerveux. Au bout d'un moment, Otabek le serra doucement contre lui, le nez dans ses cheveux pour se gaver de son odeur rassurante.
« _ Pourquoi Yura ?
_ Parce que c'est ta mère et qu'il faut bien faire un autre pas.
_ Ils ont failli te tuer. On a perdu un bébé. »
Yuri posa ses fines mains sur les joues de son Alpha et le força à le regarder dans les yeux. La voix tremblante d'une émotion qu'il tentait de contenir tant bien que mal il reprit.
« _ Ce n'est pas elle et tu le sais. Beka, amour, c'est du passé.
_ Yura...
_ Ta mère t'aime et son fils lui manque terriblement. Ca fait longtemps qu'elle n'a pas pu serrer son enfant dans ses bras. Si... C'était moi... Ca me détruirait. Et puis... J'ai pas de parents Beka. Même si je dis que je m'en fous, parfois ça me ronge. Toi, ta maman, elle est venue de super loin pour te voir même pas longtemps. Peut-être que.... C'est à toi de prendre la décision mais... »
Otabek posa un doigt sur les lèvres de Yuri et celui-ci se tut. Il ne parla plus, ne bougea pas, attendant la décision de son compagnon. Il l'accepterait quelle qu'elle puisse être. Il lui avait donné une possibilité de réconciliation mais ne le forçait pas à l'accepter. Otabek, sous un déluge d'émotions contraires embrassa tendrement après quelques minutes l'ange blond qui lui faisait face. Encore sonné par la surprise faite par son époux, il releva néanmoins la tête.
« _ Selemetsis ve sheshe. »
* Eglise de la Nativité de Saint-Jean-Baptiste ou église de Tchesmé : église orthodoxe construite en 1780 pour la tsarine Catherine II de Russie. Elle se trouve près du palais de Tchesmé sur la route de Saint-Pétersbourg à Tsarskoïe Selo.
** Je mets ici toutes les indications sur les tenues et le mariage.
Les invités doivent s'asseoir du bon côté de l'église et ne peuvent se placer où ils veulent. Les invités du marié vont à gauche et les invités de la mariée à droite.
Dambals : pantalons traditionnel kazakh. Kamzol : veste traditionnelle kazakhe. Zhaktau : pendentif indiquant le rang social de la mariée. Il est normalement rattaché au saukele, chapeau conique traditionnel.
Normalement, l'anneau de la fiancée est en argent et celui du fiancé en or. Les anneaux se passent à l'annulaire droit tout comme les alliances. Les alliances s'échangent trois fois selon un rituel bien précis.
Les couronnes de mariage (stefana) en or ou argent sont reliées par un ruban qui symbolise l'unité du couple. Elles symbolisent aussi le Calvaire du Christ.
*** Kadia : prénom signifiant « cadeau ». Comme à chaque fois, que je créé un personnage j'essaie de trouver une symbolique. C'est le cas pour tous les personnages dont les noms sont inspirés par des écrivains etc.
**** Belmond Grand Hôtel Europe : luxueux hôtel de Saint-Pétersbourg situé non loin du Palais d'Hiver et du musée de l'Hermitage.
Selemetsis ve : bonjour en kazakh.
Äje : grand-mère en kazakh.
Ihi : petit-frère quand dit par un frère aîné sinon bauir est utilisée par la sœur aînée.
Ana : mère, sheshe : maman
« Là où il y a de l'unité, la vie se vit pleinement » Proverbe kazakh.
Le voici enfin ! Après vous avoir tant fait patienter voici le chapitre du mariage partie 1!
J'espère que ça vous aura plu et n'hésitez pas à me faire part de vos réactions et remarques en commentaire.
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