Doux réveil et sombres pensées
Chapitre 4 - Doux réveil et sombres pensées
Saint-Pétersbourg, appartement Altin-Plisetsky
Otabek se redressa vivement et alla ramasser le jouet jeté par son fils. Celui-ci le regarda faire et lui sourit quand il lui tendit l'objet du délit. Il l'attrapa de ses petites mains potelées et après un instant l'envoya de nouveau valser. Il éclata de rire et son père le regarda mi- agacé ni-attendri. Le petit manège durait depuis dix minutes et aucun des deux ne semblait se lasser. Otabek fit mine d'aller chercher le jouet sous le regard malicieux de l'enfant. Finalement, il se retourna et attrapa son fils avant de se mettre à le chatouiller. L'enfant éclata de rire et se tortilla pour s'échapper.
« Vous avez l'air de bien vous amuser tous les deux. Je peux me joindre à vous ? »
Yuri les regardait attendri depuis le pas de la porte. Pour toute réponse, Otabek lui tendit la main l'invitant à les rejoindre. Yuri chatouilla à son tour l'enfant qui riait aux larmes. La petite torture prit rapidement fin et son père le déposa sur le tapis d'éveil avec bienveillance. L'enfant se mit aussitôt à ramper et chercha à s'accrocher à la table basse. Il tira sur ses bras cherchant manifestement à se lever.
« Attention Kolia ! »
Otabek saisit Yuri doucement et l'obligea à s'assoir sur le tapis. Ils étaient près de Nikolaï de façon à intervenir mais le laissant faire.
« Ça va Yura. Nous sommes à côté. S'il tombe nous pourrons le rattraper. »
Yuri soupira. Ce petit cascadeur était déjà tombé trois fois au cours de la journée. Il n'avait pas pleuré malgré les bosses et s'obstinait. Il semblait bien décidé à marcher pour ses dix mois.
« _ Ton grand père m'a dit que tu étais aussi casse-cou que lui au même âge.
_ J'ai une jolie cicatrice qui le prouve d'ailleurs.
_ Ah oui ?
_ Tu ne peux pas la voir. Sauf si tu aimes les hommes au crâne rasé ! »
Otabek fit la moue et passa ses doigts dans les longs cheveux blonds. Non, il n'aimerait pas voir son compagnon avec le crâne rasé. Il aimait trop sa magnifique chevelure soyeuse. Yuri se laissa faire et lui jeta un regard enjôleur.
« On pourrait coucher Kolia tôt et s'accorder un moment en amoureux... On se fait livrer et après on se pose devant un film. » Il se rapprocha du Kazakh et ajouta avant de l'embrasser. « Un film qu'on a déjà vu comme ça si on ne voit pas la fin... »
Otabek le regarda les yeux brillants et lui susurra « Et si c'était plutôt toi que je dévorais en guise de diner ? »
Plus tard dans la nuit
Otabek caressait le dos de Yuri tout en lui embrassant et mordillant le cou. Le jeune homme soupirait d'aise sous les tendres caresses.
« _ Ta peau est tellement douce et tu sens tellement bon mon amour. »
Yuri se retourna et embrassa sensuellement son amant. Ils s'étaient déjà aimés une partie de la nuit mais le jour était encore loin. Ils avaient tout le temps de savourer cette parenthèse rien qu'à eux. Otabek parcourut tendrement les flancs du jeune homme, caressant sa peau d'albâtre, embrassant ses lèvres avec passion. Il ne serait jamais rassasié de ce corps. Yuri frémit, se colla davantage à son amant et ronronnant doucement. Les caresses se firent plus sensuelles et la chambre ne tarda pas à s'emplir de doux gémissements.
Le soleil pointait paresseusement par les rideaux entrebâillés. Yuri s'étira tel un félin. Il se retourna dans la douce prison que formaient les bras d'Otabek. Il caressa sa joue doucement. Il était beau quand il dormait. Il semblait paisible, apaisé. La Fée Russe embrassa doucement ses lèvres avant de se lever. Il enfila rapidement un pyjama et sortit de la chambre, silencieux comme un chat.
Arrivé dans le salon, il tendit l'oreille. Seul un petit miaulement de Potya se fit entendre. Il se baissa et prit l'animal dans ses bras. Kolia et Otabek dormaient encore. Il alla à la cuisine dont il ferma la porte pour ne pas risquer de réveiller les autres occupants de l'appartement et nourrit Potya. Il se fit ensuite un thé noir très sucré et s'installa à la table de la cuisine. Il rêvassa un petit moment puis tira d'un tiroir un petit carnet à la couverture bleue. Il hésita un moment. Il avait pris l'habitude d'écrire ces dernières années sous l'insistance de sa psychologue. Il avait été dubitatif au début puis avait réalisé que cela lui faisait du bien. Il l'ouvrit à une page vierge et se mit à réfléchir.
Saint-Pétersbourg, une semaine avant les Mondiaux, deux ans plus tôt
Cela faisait trois semaines qu'Otabek avait révélé à Yuri les raisons de son silence. Le jeune Russe avait encore du mal à y croire mais il était trop heureux de savoir que son compagnon avait décidé de s'installer à Saint-Pétersbourg et avait changé d'entraîneur. Ce n'était pas le choix le plus judicieux alors que la compétition approchait et que la saison était en cours mais pour être tout à fait honnête il s'en moquait un peu. Il essayait de rester concentrer sur son propre entraînement tout en construisant sa relation de couple. Ce n'était pas facile et malgré les trois jours passés chez Otabek au moment de son anniversaire il était retourné vivre chez Yakov. Il passait des soirées et parfois la nuit chez son amant mais ne précipitant rien. Il n'était pas encore tout à fait prêt à franchir le pas et le Kazakh ne lui mettait pas la pression. Attentionné, il avait laissé une partie du dressing vide pour que Yuri puisse, quand il le voudrait, y ranger son impressionnante garde de robe à motif léopard, ce qui signifierait qu'il faisait son id en quelque sorte. Otabek faisait tout son possible pour ne pas brusquer le jeune homme malgré son impatience. Il allait à son rythme, trop lent à son gout, mais le suivait se rappelant qu'il n'avait que dix-sept ans et des derniers événements. Un soir pourtant alors qu'il n'attendait personne on sonna à la porte.
« _ Yura ?
_ T'as l'air surpris ? Pas content de me voir ?
_ Si bien sûr mais pourquoi est-ce que tu sonnes ? Tu as perdu ta clé ?
_ Non, elle est au fond de mon sac et j'ai les mains prises, gros malin. »
Otabek remarqua seulement à ce moment les sacs dans le couloir.
« _ Bon tu m'aides à tout porter à l'intérieur ou je rentre chez Yakov ?
_ Entre, je vais t'aider.
_ J'en avais marre des allers-retours entre vos apparts et en plus il y a un vrai dressing ici. Chez le vieux je m'y retrouve pas ! »
Yuri entra en portant une partie de ses bagages tandis qu'Otabek portait le reste dans la chambre, leur chambre pensa t'il. Il les déposa sur le sol et avant qu'il ne puisse poser la moindre question, Yuri l'attrapa et l'embrassa passionnément. Il le poussa doucement vers le lit où ils s'allongèrent sans pour autant rompre leur baiser. Au bout d'un long moment, ils mirent fin à leur baiser et se regardèrent tendrement.
« _ J'en avais marre de dormir sans toi le soir. J'ai appelé mon grand-père et il m'a dit que si je le voulais je pouvais m'installer avec toi. Yakov m'a dit de revenir si ça n'allait pas et tout un tas de trucs mais j'ai pas trop écouté. Il m'a aussi dit de te dire que si jamais tu déconnais il te botterait le cul.
_ Il l'a dit avec ces mots ?
_ Nan mais comme j'écoutais pas trop, je sais plus. »
Otabek serra plus étroitement le jeune homme contre lui. Celui-ci passa ses mains sous le pull du Kazakh tout en l'embrassant. Cette vraie première nuit chez eux promettait d'être mouvementée.
Moscou, deux jours avant le début des Mondiaux
Yuri et Otabek étaient installés dans le salon d'une petite maison de la banlieue moscovite. Ils avaient passé la journée en compagnie du grand-père de Yuri. L'accueil avait été un peu froid vis-à-vis du Kazakh puis l'atmosphère s'était réchauffée quand Nikolaï avait vu le bonheur de son petit -fils. Il ne l'avait jamais vu si détendu et souriant. Il se permettait même des gestes tendres envers son compagnon, naturellement, sans rougir ou être gêné à l'extrême.
Nikolaï avait été rassuré. Il avait insisté pour que le jeune couple vienne le voir dès leur arrivée à Moscou. Il ne savait pas le détail de leur dispute mais il en avait été informé. Il avait besoin d'être rassuré et de savoir que son petit-fils bien aimé allait bien. Dès qu'il avait rencontré le Kazakh il l'avait apprécié mais en parent protecteur il était prêt à s'opposer à lui si le bien-être de son cher Yuri en dépendait. Il avait pris soin de lui depuis sa naissance puis il l'avait pris entièrement en charge après que sa mère soit partie. Il l'aimait plus que tout et serait toujours prêt à tout sacrifier pour lui.
En fin d'après-midi les deux jeunes hommes prirent congés du vieil homme qui leur fit promettre de revenir quand la compétition serait terminée. Yuri promit de revenir et de rester quelques jours avec lui. Il n'avait plus d'engagements professionnels et la saison serait terminée pour lui dans quelques jours. Otabek lui promit également de revenir mais s'abstint de préciser qu'avant cela il devrait affronter sa famille.
À l'hôtel
« Otabek ! »
L'interpelé se figea en reconnaissant la voix qui l'appelait. Il soupira, prit quelques secondes pour se composer calme, et se retourna un sourire de circonstance sur les lèvres.
« _ Mère.
_ Te voici enfin mon fils. Nous t'avons cherché mais ton entraîneur nous a dit que tu étais sorti.
_ Oui, Mère.
_ Allons-nous installer au salon de thé. Cet hôtel à l'air très confortable, es-tu bien installé ?
_ Oui, Mère. »
Sa mère hocha la tête visiblement peu satisfaite par les réponses et l'latitude de son fils. Ils prirent place à une table du salon et commandèrent du thé et des pâtisseries pour l'accompagner. Outre sa mère, Olga et sa sœur Anara étaient présentes. Lorsque le thé arriva Olga se saisit immédiatement la théière et en versa dans une tasse qu'elle tendit à Otabek. Celui-ci s'en saisit et fit mine de ne pas remarquer l'air contrarié de la jeune femme. Il pensait connaître les raisons de sa réaction. Il avait quitté Yuri quelques minutes avant de les rencontrer. Il devait encore porter l'odeur du jeune homme sur lui. Il allait devoir faire attention dorénavant et tenir les deux Omégas le plus éloigné possible l'un de l'autre. Olga se redressa pour se saisir d'une petite assiette qu'elle garnit de douceurs avant de la tendre au jeune Alpha. Il lui fit un geste pour lui signifier qu'il n'avait pas faim. Elle fronça les sourcils encore une fois mais ne dit rien et la reposa. Sa mère qui avait suivi l'interaction entre les jeunes gens garda le silence elle aussi. Elle scruta son fils puis repris la parole.
« _ Etais-tu parti t'entraîner ?
_ Non, je visitais un peu les environs. Moscou est une belle ville.
_ Tu auras tout le temps pour cela après la compétition. » Le gronda t'elle gentiment. « La compétition commence dans deux jours. Tu dois travailler dur si tu veux remporter l'or. Tes concurrents...
_ As-tu vu la Fée Russe ?
_ Anara !
_ Mais Mère ! Je voudrais le voir !
_ Je n'ai pas vu Yuri Plisetsky depuis mon arrivée. Il doit être avec les autres membres de l'équipe russe. De plus, nous ne logerons pas au même étage.
_ Pourquoi ?
_ Olga, les Omégas et les Alphas sont séparés par mesure de sécurité. Et comme je viens de le dire, nos chambres sont à des étages différents.
_ Et à quel étage ils sont ?
_ Anara, dernier avertissement ! Je pensais t'avoir mieux éduqué ma fille. Prends exemple sur Olga. Olga, mon enfant, peux-tu me verser une autre tasse de thé ?
_ Oui, Madame.
_ Mère. Tu seras bientôt ma belle-fille. » Puis se tournant vers son fils « Les chaleurs d'Olga commenceront le jour du gala. C'est fort heureux que cela se produise juste après la compétition. »
Otabek frémit à cette évocation et au sous-entendu. Il ne pouvait pas ignorer ce que sa mère attendait de lui. Il passa le reste de la soirée à réfléchir à ce qu'il allait faire. Il ne voulait pas affronter sa mère et ce n'était pas elle le problème. Il allait devoir affronter son père qui comme sa mère le lui avait appris arriverait seulement le jour du programme libre. Il avait quatre jours devant lui pour trouver une issue. Il devait parvenir à convaincre sa famille que Yuri était et serait son seul Oméga.
Moscou, jour du programme court
Otabek avait passé son temps partagé entre sa famille et ses entraînements. La nuit, il parvenait à s'échapper quelques heures pour aller rejoindre Yuri. Ce dernier tentait de rassurer son Alpha et tentait également de ne pas se mettre en colère à l'évocation d'Olga. Le Kazakh ne pouvait pas en vouloir à son compagnon d'être sur le point de hurler de colère et de frustration. Il le comprenait. La situation était difficile pour lui également.
Le patineur attendait son tour au bord de la patinoire. Il observait les alentours. Il vit Christophe Giacometti et Viktor Nikiforov s'approcher de lui et il les salua simplement d'un signe de tête. Le Suisse amusé par son comportement lui adressa un sourire taquin avant de lui jeter sur le ton de la plaisanterie.
« _ Alors comme ça tu es le dresseur du petit fauve ? »
Otabek le dévisagea. Il parvint à garder son masque d'impassibilité et répondit au Suisse de la façon la plus neutre possible.
« _ Je ne vois pas de quoi tu parles.
_ Vraiment ? Alors ce n'est pas toi qui te faufile dans la chambre d'un certain félin et le fait ronronner la nuit. Quoique ronronner ne soit pas le terme approprié !
_ Moins fort Giacometti !
_ Ben quoi ? Tu crois que je suis le seul à avoir remarqué votre petit manège ? JJ l'a aussi remarqué Si j'étais toi je garderai un œil sur l'objet de tes désirs.
_ Ce n'est pas un objet ! »
Otabek lui lança un regard glacial. Il n'aimait pas que quiconque parle de Yuri comme d'une vulgaire chose. Il sentit la jalousie mordre son cœur et ne put s'empêcher de jeter au patineur suisse quelques mots bien sentis.
« _ Peut-être es-tu jaloux mais tu ne t'approche pas de lui et si jamais tu t'avises de poser un seul doigt sur lui....
_ Tout doux Otabek ! Je ne te savais pas si possessif ! Et pour ta gouverne je suis lié et heureux de l'être. Mon Oméga et moi sommes très heureux ensemble. Mais tu devrais être plus discret. »
Viktor hocha la tête d'un air entendu. Il avait fait son possible pour tenir à distance les deux amants mais il ne pouvait contrôler les regards parfois enflammés que ceux-ci se lançaient. La discussion finalement fut détournée par Viktor sur un terrain moins glissant. Le lieu était après tout mal choisit pour avoir cette conversation. Il y avait trop d'oreilles indiscrètes.
Le premier jour de compétition s'acheva finalement avec au classement provisoire Yuri en tête. Ce n'était guère surprenant aux vues des progrès qu'il n'avait cessés de faire. Avant de regagner l'hôtel, Yuri attrapa Otabek et le conduisit dans un vestiaire vide. La porte à peine fut elle refermée que le Russe s'empara avidement des lèvres tant convoitées. Otabek mit cependant fin au baiser rapidement.
« _ Beka...
_ Yura ce n'est pas prudent.
_ Juste cinq minutes. S'il te plaît ! »
Le ton suppliant de Yuri le fit fondre. Devant lui il n'avait aucune volonté ces derniers temps et se demandait qui était le chaton et qui était le dresseur pour reprendre l'expression du Suisse. Ils s'embrassèrent longuement savourant la douceur des lèvres de l'autre, la chaleur de leur corps et l'odeur de leurs phéromones qui se mélangeaient. Ce n'était pas prudent mais ils avaient besoin de cette étreinte.
Lorsque Yuri regagna l'hôtel avec Yakov et Lilia, il avait la tête ailleurs. Il ne faisait même pas le plus petit effort pour écouter ce que disaient ces entraîneurs. Ils étaient mécontents de sa petite escapade, pourtant courte, et ils rappelaient au jeune homme qu'il devait se concentrer sur son libre au lieu de batifoler dans les vestiaires. Tout à ses réflexions, le Tigre ne s'aperçut pas des regards appuyés que lui lançait une jeune fille à la peau mate. Il ne reprit contact avec la réalité que lorsque celle-ci se planta devant lui et l'interpella.
« _ Bonsoir. Joli programme.
_ Qu'est-ce que tu veux. Bouge !
_ Yuri Plisetsky ! Excusez la grossièreté de ce jeune insolent ! Il sera ravi de prendre une photo et de vous signer un autographe. »
La jeune fille rit à cette remarque et au regard assassin que lançait Yuri à Lilia. Il ne répliqua cependant rien et avec un soupir s'avança pour exécuter ce qu'il considérait comme une corvée. La jeune fille se rapprocha de lui et se prit en photo avec lui. Une fois la photo prise Yuri s'éloigna d'elle considérant en avoir terminé.
« _ Et mon autographe ? »
Il soupira encore une fois, signa la photo qu'elle lui tendait et s'apprêtait à partir quand elle l'arrêta de nouveau. Elle était plus collante que de la glu se dit-il. De plus, son instinct lui disait qu'il fallait s'éloigner. Il n'aimait vraiment pas ce qu'elle dégageait.
« _ Je m'appelle Anara Altina. Vous avez devancé mon frère, Otabek Altin, au classement aujourd'hui. »
Yuri fut foudroyé sur place. Son admiratrice n'était autre que la petite sœur de son amant. Un frisson glacé dévala sa colonne et ses mains devinrent moites. Il se rappelait les paroles de Beka quelques semaines plus tôt.
« _ Anara ! Voyons ce ne sont pas des manières ! »
Une femme plus âgée suivit d'une plus jeune s'approchèrent de la jeune fille. C'étaient sans aucun doute possible la mère d'Otabek et Olga. Yuri ne put s'empêcher de dévisager la jeune femme. Elle était belle avec ses longs cheveux bruns, ses lèvres pleines et ses yeux noisette. Yuri la détailla un peu plus pendant que la mère réprimandait sa fille. Olga était grande et mince, sa taille était étroite et sa peau était joliment dorée. Son maintien était parfait. Le jeune homme sentit son sang se figé dans ses veines quand elle leva les yeux vers lui et fonça les sourcils. Elle semblait contrariée.
« _ Mère que se passe-t-il ? »
La voix d'Otabek fit se redresser les deux Omégas à l'unisson. Toutefois, Yuri se rembrunit lorsqu'il vit Olga se rapprocher de ce dernier visiblement l'air ravi de le trouver ici. Elle saisit son bras et passa la sien par-dessus à la manière des couples d'amoureux. Yuri avait envie de bondir de la pousser loin de son amant. Il parvint à rester clame au prix d'un grand effort de volonté. Olga reposa sur lui ses ravissants yeux et lui adressa un discret sourire satisfait.
« _ Ta sœur a dérangé Yuri Plisetsky et ses entraîneurs. Anara présente tes excuses immédiatement.
_ Mais... » Devant le regard de sa mère visiblement irritée la jeune fille s'exécuta.
« Maintenant que les choses sont réglées nous devrions laisser ces Messieurs dame. » Trancha Otabek. Ils se saluèrent et partirent chacun de leur côté. Olga passa délibérément près de Yuri et ses traits se contractèrent légèrement. Otabek trop occupé à éloigner le plus vite possible sa famille de Yuri ne remarqua rien.
Moscou, jour du programme long
« _ Ben alors princesse, tu te balades tout seul ? A moins que tu cherches quelqu'un.
_ Lâche moi JJ ! » Cracha le jeune homme.
Il n'avait pas revu Otabek depuis le soir du court. Ils avaient seulement échangé des messages et le Tigre n'était pas d'humeur à se laisser faire. JJ se rapprocha de lui et effleura sa joue.
« _ Tu sens bon jolie princesse !
_ Je t'ai dit de me lâcher ! Va jouer avec ton laideron !
_ Dis-moi, Otabek ne t'a pas bien dressé ! On ne parle pas comme ça à un ...
_ Ta gueule Leroy ! »
Pour toute réponse JJ attrapa le jeune homme et colla ses lèvres aux siennes dans un geste possessif. Elles étaient douces comme s'y attendait le Canadien. Il écourta toutefois le baiser sentant que Yuri était prêt à le mordre. Mieux valait se reculer car il n'aurait pas hésité. Il dégagea des phéromones qui commencèrent à indisposer le jeune Oméga. Pourtant, celui-ci n'avait pas renoncé et se débattait.
« _ On se calme princesse ! Je ne vais pas te manger ! Je veux juste...Discuter, faire connaissance.
_ Casse-toi, putain ! ! »
Yuri lui balança son poing qui le manqua de peu. JJ lui saisit le bras pour l'immobiliser et commença à baisser sa veste au niveau de son cou. Mais il s'arrêta net.
« Leroy ! »
La voix de Christophe Giacometti résonna dans le couloir. Il s'approcha à grandes enjambées et fit lâcher prise au Canadien qui n'était pas décidé à la faire de lui-même.
« _ Fiche lui la paix !
_ Je peux me défendre seul Giacometti ! »
Le Suisse ignora royalement la remarque et l'entraîna à sa suite. Yuri se débattit et ne se calma qu'une fois que le Suisse lui expliqua en quelques mots qu'il savait pour sa relation avec Otabek et qu'il le ramenait auprès de ses entraîneurs. Une fois avec Yakov le patineur suisse partit et alla prévenir Viktor de ce qu'il venait de se passer. Ce dernier lui demanda avec un air amusé.
« _ Combien de coups de griffe de la part du chaton ?
_ Trois. » Ils pouffèrent de concert avant que Viktor reprenne la parole, parfaitement sérieux.
« _ JJ ne peut pas toucher Yuratchka. » Puis il ajouta devant l'air sceptique du Suisse « Tu n'as rien remarqué ? Je crois qu'Otabek l'a marqué. Son odeur a changé. C'est difficile à dire puisque les phéromones d'Otabek sont toujours sur lui mais il se pourrait bien qu'il y ait plus. »
Yuri rayonnait sur le podium. Il avait gagné. Il était champion du monde chez lui à Moscou. Son grand-père était dans les tribunes et il souriait. Yuri ne pouvait voir que cela, le sourire du vieil homme qui brillait, il l'aurait juré, plus que les flashs des photographes. A ses côtés se tenaient Otabek et Yuuri Katsuki. Le Japonais souriait doucement aux photographes et à son entraîneur qui était aussi son mari et Alpha. Otabek quant à lui souriait doucement peu à son aise. Il n'aimait pas ces situations à moins que ce ne soit la perspective d'affronter son père qui le rendait nerveux.
Moscou, hôtel, plus tard dans la soirée.
« _ Otabek, pourquoi ? »
Les cris d'Olga se faisaient entendre jusque dans le couloir. La jeune femme tempêtait, pleurait, jetait tout objet lui passant à porter de main. Otabek tentait de la calmer mais rien n'y faisait. En désespoir de cause, il utilisa des phéromones de soumission. Il détestait le faire mais il n'avait pas le choix. Il fallait qu'elle se calme avant d'ameuter tous les occupants de l'hôtel et ses parents.
« _ Je suis désolé Olga. Je ne peux tout simplement pas me lier à toi. Je ne suis pas et ne serais jamais ton Alpha.
_ Pourquoi tu me rejettes ? N'ai-je pas toujours été une bonne Oméga ?
_ Ça n'a rien ç voir. Olga... Tu es quelqu'un de bien et tu mérites que quelqu'un t'aime. Je ne peux juste pas être cette personne. Je ne veux pas continuer à te mentir.
_ Il y a un autre Oméga c'est ça ? »
Cette conversation avait pour Otabek un goût de déjà-vu. Sauf que le dénouement de ladite conversation avait été différent de ce qu'il allait être ce soir.
« _ Effectivement, il y a un autre Oméga.
_ C'est lui ! N'essaie pas de mentir !
_ Lui qui ?
_ Le sale petit Oméga russe que ta sœur convoite ! Celui qui se trémousse sur la glace comme une chatte en chaleurs !
_ Yuri... Oui, il s'agit de lui.
_ Et alors quoi ? Vous avez fait un pari avec ta sœur à celui qui coucherait en premier avec lui? Tu testes la marchandise avant de lui laisser.
_ Olga, ne dis pas ça ! C'est répugnant ! Yuri n'est pas une passade ou l'objet d'un pari. C'est lui que j'aime et avec qui je passerai le reste de ma vie.
_ C'est répugnant ! Jamais ton père ne laissera faire...ça ! »
La jeune femme cracha cette dernière phrase avec tout le mépris dont elle était capable. Jamais Otabek ne se serait attendu à une telle réaction de sa part. Cette jeune femme si douce s'était transformée sous ses yeux en une personne qu'il ne connaissait pas.
« _ Olga, il est trop tard... Je l'ai marqué et il y a eu nouage. Rien ne peut défaire notre lien maintenant. »
Il avait prononcé cette phrase avec le plus de douceur possible. Il tenta de s'approcher de la jeune femme mais celle-ci le repoussa vivement. Il battit en retraite.
« _ J'en parlerai ce soir à Père et Mère. Je suis désolé Olga, je ne voulais pas te faire souffrir.
_ Tes parents ne l'accepteront jamais. Ils te forceront à rentrer avec moi au Kazakhstan et à me marquer. Je serai ton Oméga et cette chose devra...
_ Ça suffit ! Ce n'est pas une chose et je te prie de le respecter. Je ne rentrerai pas à Almaty. Ma vie est désormais à Saint-Pétersbourg auprès de lui.
_ Mais...
_ Non, Olga. C'est terminé. Il est grand temps que tous ces mensonges s'arrêtent et que tu reprennes ta liberté.
_ Ma liberté ? Laquelle ? Tu es stupide Otabek ! Je n'ai rien ! Tu es mon avenir. Si tu me laisses je devrais retourner chez mes parents et me trouver un autre Alpha.
_ Tu trouveras quelqu'un de bien, j'en suis persuadé.
_ Qu'en sais-tu ?! »
Elle le défia du regard. Elle ne voulait pas abandonner. Il représentait depuis des années son avenir et elle n'avait pas envie de le laisser partir. Il n'était pas question que ce Russe lui prenne ce qu'elle désirait. Elle se leva et quitta la chambre de son compatriote. Il fallait qu'elle trouve ce maudit Oméga et qu'elle mette les choses au clair. Otabek rentrerait avec elle au Kazakhstan pour se lier à elle.
Yuri était avec Viktor et Yuuri. Ces aînés le félicitaient pour sa médaille mais ils ne purent s'empêcher de lui faire la morale quant à son altercation avec JJ.
« _ Tu dois faire attention à toi Yurio.
_ Ca va Katsudon ! Je me suis pas laissé faire !
_ Heureusement, Christophe est intervenu.
_ Je m'en sortais très bien sans lui ! »
Yuri préfèrerait patiner sur les mains plutôt que d'avouer qu'il n'était pas mécontent que le Suisse soit intervenu. Il se détendit un peu puis se rembrunit quand il sentit la présence de JJ derrière lui. Instinctivement, il se retourna prêt à lui sauter à la gorge si le Canadien tentait quoique ce soit. Celui-ci resta à distance, gêné.
« _ Désolé pour tout à l'heure.
_ Quoi ?! »
Les deux Russes et le Japonais le regardèrent les yeux agrandis par la surprise. Le King JJ venait de s'excuser.
« _ Est-ce que je peux te parler Yuri. Seul à seul mais pas loin de façon à ce qu'on puisse nous voir ?
_ Euh... Ouais... »
Il se leva hésitant. Viktor lui désigna la terrasse. Ils pourraient se parler sans être entendu mais ils seraient toujours visibles. Yuuri fit comprendre à son ami qu'ils ne le lâcheraient pas des yeux et qu'au moindre problème, ou suspicion de problème, ils interviendraient aussitôt.
« _ Tu veux me dire quoi ?
_ Que je suis désolé d'avoir agi comme un con. Je te présente mes excuses Yuri.
_ Mouais...C'est bon...
_ Je ne me suis pas rendu compte de ce que je faisais et bon... Je crois que je suis jaloux aussi.
_ Hein ?
_ Ouais... Je t'ai vu avec Otabek. Je crois que je voulais avoir une chance avec toi... Mais bon c'est trop tard, n'est-ce pas ?
_ T'as vu ma marque ?
_ Ouais... Il n'y est pas allé de main morte !
_ Ouais, elle est pas discrète mais je m'en fout. »
Le Canadien lui sourit. Il était un peu jaloux d'Otabek. Ils avaient été proches à une époque puis c'étaient éloignés quand JJ avait commencé à faire un peu n'importe quoi avec ses conquêtes Omégas. Le Kazakh n'approuvait pas ce type de comportement. Il se montrait toujours très respectueux et réservé. JJ pensait au départ que c'était parce qu'il avait déjà une fiancée mais de toute évidence il s'était trompé.
« _ Il paraît qu'il s'est installé à Saint-Pétersbourg.
_ Ouais, on s'est installé ensemble. Il ne va pas rentrer à Almaty. Et...
_ Il va rentrer à Almaty ! »
Les deux patineurs se tournèrent vers la voix furieuse qui les avait interrompus. Yuri se tendit aussitôt. Olga lui faisait face et semblait très en colère. Ses yeux le foudroyaient. Le jeune homme se recula instinctivement. Il n'avait pas peur mais il ne voulait pas non plus qu'Otabek ait des ennuis par sa faute bien que l'intervention de la Kazakhe laisse présager le contraire. Il savait que son compagnon devait parler à ses parents ce soir et il semblait qu'Olga soit déjà au courant de ses intentions.
« _ Suis moi, il faut qu'on parle tous les deux. D 'Oméga à Oméga.
_ Beka et moi, on est lié. Fin de la discussion ! Va te trouver quelqu'un d'autre et fiche nous la paix !
_ Tu viens et on parle ! Tu me voles mon Alpha et tu crois que je vais te laisser faire ! Otabek et moi sommes destinés à être ensemble. Alors tu vas le laisser rentrer avec moi à Almaty et te faire oublier.
_ Non ! Putain mais tu crois quoi ? Que je vais te laisser faire sans rien faire ? Je t'ai dit, on est lié !»
A cet instant, JJ intervint et attira Yuri vers l'intérieur de l'hôtel. Il avait compris ce qu'il se passait et il était préférable d'éloigner les deux jeunes gens avant qu'ils se sautent à la gorge.
« _ Du calme, princesse ! Je vais aller chercher Otabek. Reste avec Yuuri et Viktor en attendant. »
Yuri fut ramené manu militari auprès de Viktor et Yuuri. Ceux-ci avaient assisté à la scène sans pour autant entendre l'échange. Yuri leur fut de nouveau confié pendant que le Canadien partait à la recherche du Kazakh. La situation avait l'air compliquée e et il fallait qu'il intervienne avant que ça ne s'envenime.
Moscou, restaurant Karlscon*
Son père le foudroyait du regard. L'homme d'âge mûr toisait son fils qui n'osait pas bouger. Il s'attendait à tout sauf à ça. Son fils avait déshonoré sa famille, bafoué leurs coutumes et traditions pour un Oméga, un être inférieur et sans valeur. Il ne pouvait l'accepter et jamais il ne l'accepterait. Le jeune homme lui tenait tête pourtant refusant de plier aux exigences paternelles. Ce n'allait pas se passer ainsi. Il n'était pas question que son fils conteste son autorité. Il se leva et pointa un doigt menaçant.
« _ Tu fais ce qu'il faut pour quitter cet Oméga ou je m'en chargerai personnellement.
_ Il n'y a plus rien à faire ! Nous sommes liés lui et moi !
_ Rien n'est définitif dans la vie et tu vas faire le nécessaire ou sinon...
_ Ou sinon quoi ? Je ne ferai rien. Je suis désolé Père de vous décevoir mais je n'abandonnerai pas mon Oméga et compagnon! Je l'aime et c'est lui que j'ai choisis. Maintenant, je vais vous laisser et aller le rejoindre.
_ Otabek ! »
Ce dernier ne se retourna pas et quitta la salle privatisée du restaurant où ils dinaient. Il savait qu'il ne reverrait pas sa famille. Cela lui brisait le cœur mais il avait un choix à faire et il l'avait fait. Désormais, sa famille serait Yuri et seulement lui. Il partit en direction de l'hôtel impatient de retrouver son bien-aimé.
Moscou, Hôtel
Yuri avait réussi à convaincre Yuuri et Viktor de le laisser retourner à sa chambre. Il avait envie d'être un peu seul avant de retrouver Otabek. Il devait réussir à se calmer avant le retour de celui-ci. Il allait devoir être là pour le soutenir, ou pour entendre qu'il le quittait, mais il préféra écarter cette pensée. En chemin, il croisa Christophe Giacometti et un jeune homme qui lui fut présenté comme étant l'Oméga du Suisse. Il discuta quelques minutes avec eux avant de poursuivre sa route.
Il entra dans sa chambre et alla se doucher. Il avait besoin de se relaxer. Il prit son temps sachant que son compagnon ne rentrerait pas avant une bonne heure. Il se séchait les cheveux quand il entendit la porte claquée. Son cœur fit un bond et il se précipita dans la pièce voisine.
Elle courait à en perdre haleine bousculant les passants qui lui jetaient des regards courroucés. Elle ne savait pas où elle allait. Elle ne pensait plus à rien. Elle courait. La neige qui tombait abondement lui fouettait le visage. Elle avait froid mais ne pouvais arrêter sa course folle. Elle dérapa sur une plaque de verglas et tomba. Elle essaya de se relever et c'est à cet instant précis qu'elle le remarqua. Du sang tâchait la neige blanche.
Il pressait le pas courant presque. Il le sentait. Il le savait. Quelque chose n'allait pas. Il ne saurait si c'était le lien qui parlait ou si les menaces de son père qui l'inquiétaient à tort ou à raison. Il entra dans l'hôtel essoufflé et se précipita le plus vite possible à l'étage où se trouvait la chambre de Yuri. Plus il progressait vers celle-ci plus il sentait son angoisse montée. Il sentait maintenant très clairement que quelque chose était arrivé. Il devait le voir et se rassuré. Il arriva enfin au bout du couloir et remarqua l'agitation qui régnait. Il se précipita vers la chambre du jeune homme. Un poing glacé lui saisit le cœur et un cri d'animal blessé franchit ses lèvres.
« Yura ! Non ! »
Saint-Pétersbourg, appartement Altin-Plisetsky
Des babillements et une douce odeur vinrent tirer Yuri de ses pensées. Il sourit devant le beau tableau que lui offrait son compagnon. Il tenait leur fils qui se réveillait doucement dans ses bras et le cajolait tout en s'avançant vers lui.
« _ Bien dormi mes amours ?
_ Oui et toi ?
_ Toujours quand tu es près de moi. »
Yuri déposa un tendre baiser sur ses lèvres puis il embrassa avec la même tendresse son fils. Ils restèrent un moment ainsi. Puis, le petit garçon s'agita doucement.
« _ Attends mon ange. Je vais te préparer ton petit déjeuner. »
Yuri se leva et commença la confection du petit-déjeuner familial. En se tournant pour saisir un biberon propre il posa ses yeux émeraude sur Otabek et Nikolaï. Non, il ne devait plus penser au passé. Son avenir était devant lui et il s'annonçait radieux.
* Restaurant Karlsson : restaurant moscovite
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