Couleurs d'orages

Chapitre 17 - Couleurs d'orages

Saint-Pétersbourg, appartement Altin-Plisetsky

Nikolaï observait son père d'un œil curieux depuis plusieurs jours si ce n'était semaines. Rien ne lui avait été dit pourtant il sentait que bientôt son quotidien serait totalement bouleversé. Il le sentait comme il avait senti l'odeur des phéromones de Yuri changer. Elles étaient plus douces, plus sucrées. C'était toujours l'odeur de son père mais sans l'être tout à fait. Et puis, il y avait ce geste. Au début, le petit garçon avait cru que son père avait mal au ventre comme lorsqu'il revenait chez lui après « la période du mois où papa était très fatigué ». Cependant, aucune tisane à la camomille avec du miel n'était bue comme d'habitude. Il y avait juste ce geste et le sourire de son père.

« _ Que se passe t'il mon petit chat ? Tu as l'air songeur. »

Perdu dans ses pensées, le petit garçon n'avait pas senti son père Alpha s'approcher. Otabek l'avait interrogé et le fixait avec toujours ce doux sourire aux lèvres. Il n'y avait jamais d'impatience chez lui. Autant papa était le calme et soudain la tempête autant äke était l'apaisement et la sérénité.

« _ Papa ne sent plus papa. » Déclara tranquillement Nikolaï.

Otabek arqua un sourcil, curieux, mais avant qu'il ne puisse ajouter quoique ce soit, son fils fila rejoindre Yuri sur le canapé. Il s'assit précautionneusement à côté de lui et le détailla de ses beaux yeux émeraude. Des doigts blancs caressèrent doucement sa joue et le sourire de son père Oméga l'encouragea à poursuivre.

« _ Tu sens plus pareil, papa.

_ C'est vrai ça mon trésor. L'odeur de papa a changé. »

Avant de poursuivre, Yuri s'assura qu'Otabek vienne les rejoindre. L'Alpha souleva son fils et l'assit sur ses genoux puis de son bras gauche enlaça son Oméga. Otabek déposa un baiser sur les cheveux sombres mais Nikolaï ne réagit pas, il fixait intensément son père attendant patiemment la grande révélation. Il en était certain du haut de ses quatre ans. Ses parents allaient lui révéler un secret. Et à la manière dont son père Oméga prenait son souffle avant de parler, ça se confirmait.

« _ Si l'odeur de papa a changé mon trésor c'est parce que... Beka, on a pas le cadeau.

_ Nous lui offrirons après. Tu vas l'inquiéter si tu continues comme ça.

_ Papa est malade ?

_ Non mon amour ! Non ! Je vais bien. Ecoute mon chat, papa a un bébé dans son ventre. »

Un ange passa et alors que Yuri allait reprendre, Kolia lui coupa la parole.

« _ Ah ? Pourquoi ça se voit pas ? Tata Sara elle avait un gros ventre quand elle avait un bébé dans le ventre.

_ Ca va se voir mais pas tout de suite. On va te montrer avec äke. »

Otabek se leva et alla chercher un livre pour enfant ainsi que l'album de grossesse de Yuri. Il se rassit ensuite et attendit que Nikolaï soit de nouveau installé sur ses genoux pour reprendre la parole tout en tournant les pages du livre pour enfant.

« _ Tu vois Kolia, le bébé est minuscule c'est pour ça que le ventre de papa est encore plat. Et quand le bébé va grandir, le ventre de papa va s'arrondir. Tu vois sur cette photo ? Tu es dans le ventre de papa mais on ne voit rien » Otabek montrait une photographie prise lors des Mondiaux à Moscou puis il tourna quelques pages et désigna la dernière de l'album. « Et là c'est juste avant ta naissance. Tu vois comme le ventre de papa à grossi ?»

Otabek lui montra ensuite les différents dessins schématisant le corps d'un Oméga mâle enceint. Mais Kolia repoussa le petit livre et se focalisa un long moment sur les différentes photographies de Yuri. Ses parents ne disaient rien, le laissant assimiler à son rythme la nouvelle.

« _ D'accord... Ca veut dire que je vais être grand frère ?

_ Oui mon amour. Tu vas avoir un petit frère ou une petite sœur.

_ D'accord. » Conclut tranquillement Nikolaï. Il n'était pas sûr de bien comprendre mais ses parents semblaient heureux alors il l'était.

« _ Papa ?

_ Oui mon trésor ?

_ C'est comme pour Michka ? Quand tu as ramené les bébés ?

_ Oui... Sauf que là, papa a le bébé dans son ventre. On ne va pas le trouver dans un magasin de jouets.

_ J'ai compris, tu sais. »

Nikolaï hocha affirmativement la tête avant de filer jouer dans sa chambre sans rien ajouter de plus. Otabek reposa alors le livre ainsi que l'album photo et prit Yuri dans ses bras alors qu'il commençait à s'agiter.

« _ Tu crois qu'il a compris ?

_ Oui, il n'a peut-être pas encore tout à fait réalisé mais il a compris. Il nous a parlé de sa famille d'ours en peluche qui s'est agrandie à notre retour de Barcelone. Certainement sa façon d'appréhender les choses. Maintenant, laisse-lui du temps. Ca va aller mon cœur. »

Alors que ses parents se serrèrent l'un contre l'autre en silence, Nikolaï profita du calme ambiant, pour faire irruption dans le salon à nouveau. Il regarda droit dans les yeux son père avant de déclarer le plus sérieusement du monde.

« _ Puisque t'as un bébé dans le ventre. Faut que tu fasses dodo. Tata Sara, elle, dormait tout le temps quand elle avait Pacha* dans son ventre.

_ Il a tout compris, tu vois ! » Dit Otabek en étouffant son rire dans la chevelure dorée de son compagnon ébahi par les mots de son fils.

Moscou, Conservatoire Tchaïkovski

Elle admirait les mains blanches courir sur les cordes et créer de merveilleuses suites de notes. Inlassablement, Alexandre répétait sous la direction de son professeur. Appliqué, le jeune homme ne s'était pas aperçu de la présence d'Anara dans un coin de la salle. Lorsqu'enfin la répétition cessa, elle signala sa présence en agitant la main alors qu'il tournait la tête vers elle. Il sourit tout en lui adressant un discret signe de la tête. Il salua ensuite son professeur et le flûtiste qui l'accompagnait avant de se diriger vers la jeune Alpha.

« _ Salut ! Qu'est-ce que tu fais là ?

_ Salut ! Je passais ici voir si à tout hasard mon frère était inscrit comme tu me l'as conseillé. En visitant les lieux je t'ai vu et je suis restée t'écouter. »

Un sourire aux lèvres, l'air avenant, Anara avait débité son mensonge avec un calme et une facilité déconcertants. Elle avait déjà vérifié plusieurs jours auparavant si Otabek était inscrit ici et avait ses réponses. Sa venue de ce matin ne devait donc rien au hasard. Elle avait obtenu, sous couvert d'un habile mensonge l'emploi du temps d'Alexandre. Elle pourrait ainsi le suivre à la trace et se servir de lui à l'occasion. Si, au début, elle pensait utiliser le jeune Oméga que pour se distraire, elle avait revu son jugement. Certes, elle pourrait assouvir grâce à lui certains de ses besoins comme elle les appelait pudiquement mais, aussi, elle pourrait s'en servir comme d'un ticket d'entrée ici. N'étant pas étudiante au conservatoire, elle ne pouvait pas circuler librement mais sous prétexte de venir chercher son Oméga l'accès lui serait autorisé. Ainsi, si Otabek faisait son apparition, elle serait prête.

« _ As-tu encore cours Sasha ?

_ Non. Je suis libre pour aujourd'hui.

_ Je t'invite à prendre une collation ? Tu dois avoir besoin de te détendre.

_ C'est gentil Anara. Laisse-moi un instant pour prendre mes affaires. »

Elle hocha la tête et se rassit en attendant le jeune Oméga. Elle mit à profit ce temps pour entrer d'avantage dans son rôle. Il n'était pas question de se trahir en faisant un faux pas ou en dévoilant un élément incohérent. Le scénario, le personnage, tout se devaient parfait. Elle se mordit la lèvre tout en essayant de se souvenir de quoi ils avaient parlé. Elle avait été sotte de croire qu'elle pouvait tout retenir et se reprocha de ne pas avoir prit des notes. Elle allait devoir faire parler Alexandre pour être certaine de la manière dont elle avait d'ores et déjà présenté les choses.

« _ Je suis prêt !

_ Hein ?!

_ Désolé, je t'ai fait peur.

_ Non, je réfléchissais. Si tu es prêt nous pouvons y aller. J'ai découvert un petit salon de thé que je veux absolument te faire découvrir à ton tour. Je pense que tu vas aimer ! »

Alexandre ne répondit rien et se contenta de se laisser entraîner par la jeune fille. Elle qui semblait si triste c'était d'un seul coup animée et n'était plus que jovialité. Il n'avait pas envie de la voir s'assombrir en lui demandant ce qui la chagrinait ainsi. Certainement une histoire en rapport avec ce frère disparu qu'elle cherchait sans relâche.

Saint-Pétersbourg, un appartement du quartier de l'Amirauté

Le temps était à la tempête depuis le début de la matinée. Si, au début, un simple orage avait grondé maintenant il se déchainait.

« _ Je ne veux pas !

_ Il le faut Sezim. Je dois rentrer à Almaty et Père veut que tu viennes toi aussi.

_ Non ! »

Sezim hurla encore une fois son refus à l'Alpha qui lui faisait face. Si elle l'avait pu, elle aurait jeté tout objet lui tombant sous la main mais elle n'aurait pas pour autant obtenu ce qu'elle voulait, elle le savait. Serik ne changerait pas d'avis. Elle tenta de se reprendre par un effort de volonté mais rien n'y fit. Encore une fois, elle se mit à hurler et à laisser exploser sa colère en une puissante salve sentant le chèvrefeuille.

« _ Ca ne sert à rien de crier ou de m'agresser de tes phéromones. Nous rentrons demain soir à Almaty.

_ Non pas demain soir ! Attend au moins le milieu de la semaine prochaine.

_ Non. Demain soir. Va préparer tes affaires et te calmer maintenant. Si tu es toujours dans cet état de nerfs dans une heure, tu ne viendras pas à l'hôpital avec nous.

_ J'ai le droit d'aller à l'hôpital ! Je veux voir Yuri !

_ Pas si tu es aussi énervée. N'es-tu pas la première à nous faire la leçon quand nous le perturbons trop ? »

Vaincue, Sezim pinça les lèvres et se détourna. Serik avait gagné cette bataille mais elle avait encore vingt-quatre heures pour le faire changer d'avis. Elle ne déposerait pas les armes si facilement, pas lorsque sa vie et sa liberté en dépendaient. Elle ne devait gagner que quelques jours ici pour avoir une chance de faire changer sa vie de trajectoire. Le temps aussi pour qu'Erasyl revienne.

Lorsque l'aîné des Altin fut enfin seul, il poussa un soupir de soulagement. Cette bataille n'avait pas été facile mais après presque deux heures de dispute, il était enfin parvenu à calmer Sezim ou, tout du moins, à la faire taire. Certes, il fallait encore qu'il réussisse à la faire grimper dans l'avion pour le Kazakhstan mais il avait bon espoir d'y arriver. Après tout, même si elle n'était pas son Oméga, elle devrait se soumettre à ses phéromones d'Alpha et lui obéir. Pourtant, il n'était pas certain de vouloir en arriver à cette extrémité. Il méprisait les Alphas agissant ainsi, alors le faire... Mais, il n'avait pas le choix. Il devait à tout prix la faire regagner leur pays natal.

« _ Je suis prête ! Masha vient toujours avec nous ?

_ Oui. Une solution a été trouvée pour sa garde. C'est à toi que je le dois d'ailleurs.

_ En compensation, tu pourrais peut-être me laisser rester ici ? »

Serik se contenta de lever les yeux au ciel et de garder le silence pour toute réponse. Il n'était nullement nécessaire de jeter une nouvelle fois de l'huile sur le feu. Ils auraient bien le temps de se disputer durant leur voyage.

Saint-Pétersbourg, hôpital international, service gynécologie, section Oméga

Yuri et Otabek regardaient cette petite fille sagement assise sur une chaise. Elle était aussi immobile qu'une poupée de porcelaine. Elle n'avait pas bougé depuis que son père l'y avait installée en lui disant d'être sage. Maria Serikevna Altina, était une Oméga et était demeurée caché à Almaty ces cinq dernières années. Pour la dérobée aux idées conservatrices de son grand-père la mettant en danger, ses parents l'avaient faite passée pour morte. Cela aurait dû continuer si par un malheureux incident, son existence n'avait pas été divulguée. Yuri écoutait à peine son beau-frère, il gardait les yeux fixés sur cette jolie poupée. A l'instant où il l'avait vue, il avait eu envie de la protéger et de veiller sur elle. Son instinct lui avait crié de ne pas la lâcher du regard et d'aller tenir fermement sa petite main dans la sienne.

« _ Je te remercie Otabek de veiller sur elle les quelques jours où Erasyl et moi serons absents.

_ C'est tout à fait normal.

_ Je suis également désolé de t'apprendre que tu as une nièce dans ces circonstances.

_ Pourquoi avoir rien dit à Beka ? »

La question de Yuri fit l'effet d'une douche froide à Serik. Toutefois, elle était légitime. Il avait menti par omission pendant cinq ans à son frère cadet et maintenant il quémandait son aide.

« _ Disons que le silence était selon moi la meilleure protection pour ma fille.

_ Dis plutôt que tu faisais pas confiance à Beka !

_ Yura.

_ Ben quoi ?!

_ Yura, si Serik n'a rien dit c'est pour de bonnes raisons.

_ Mouais ! Vous aimez un peu trop les secrets et les magouilles dans votre famille.

_ Et encore un point pour Yuratchka ! »

Sezim saisit un petit calepin sur le chevet de Yuri, l'ouvrit et y nota de la manière la plus cérémonieuse possible le dit point. Puis, elle le referma et le reposa à sa place avant de planter ses yeux d'orage dans ceux noir de l'Alpha. La guerre n'était vraisemblablement pas terminée. La chose n'échappant à personne, Yuri décida de poser clairement la question restée en suspens.

« _ Ouais et à part la petite, c'est quoi l'embrouille ?

_ Oh, il ne t'a rien dit ?!

_ Sezim ne commence pas.

_ T'as pas d'ordre à lui donner, t'es pas son Alpha. Alors ? » Dit Yuri d'un ton sec.

Il se retourna dans son lit pour mieux faire face à celle qu'il considérait comme une amie maintenant. Sezim, elle aussi, changea de position de sorte à ne faire face qu'au jeune homme.

« _ Maître Serik le renard a décidé que je rentrerai demain soir à Almaty.

_ Quoi ?! »

Tout se passa très vite. Le rugissement poussé par Yuri fit sursauter Maria qui se ratatina sur sa chaise. Otabek se mit précipitamment à relâcher des phéromones pour apaiser son lié. Serik fusilla Sezim du regard. Celle-ci le défia du regard très fière d'elle. C'est à ce moment précis, dans ce chaos, que Yakov et Lilia firent leur entrée.

« _ Je peux savoir ce qu'il se passe ici ? »

Le ton glacial de l'ancienne danseuse étoile fit se figer l'air.

Saint-Pétersbourg, appartement Altin-Plisetsky

Yuri passait nerveusement ses mains sur son ventre tout en contemplant la table sur laquelle il venait de déposer les zakouski. Il vérifia une dernière fois qu'il ne manquait rien pour se rassurer. Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis l'annonce des fiançailles et de la grossesse à leur famille, c'était maintenant au tour de leurs amis de l'apprendre. Bien entendu, Yuri et Otabek avaient de nouveau invité Yakov et Lilia. Depuis plusieurs années, ils étaient des soutiens indéfectibles et les grands-parents d'adoption de Nikolaï. Perdu dans ses pensées, il ne s'aperçut pas qu'Otabek arrivait derrière lui pour le prendre dans ses bras.

« _ Ca va ?

_ Je vais bien. Juste un peu nerveux.

_ Ca va bien se passer. Et le premier qui fait une réflexion désagréable, je le mets à la porte.

_ J'espère qu'on n'en arrivera pas là. Heureusement, Kolia est chez Deda. Il ne subira pas les questions débiles du vieux du style « tu veux un frère ou une sœur ? », comme s'il avait le choix.

_ C'est vrai que j'aimerai que nous évitions ce genre de questions.

_ Impossible avec... »

Yuri suspendit sa phrase en entendant la sonnette de la porte retentir. Otabek déposa un rapide baiser sur ses cheveux avant d'aller ouvrir. Yuri, quant à lui, ne put s'empêcher de caresser son ventre en un geste devenu réflexe tout en allant s'asseoir sur le canapé. Il redoutait cette soirée depuis plusieurs semaines déjà. Il fut néanmoins soulagé de voir que les premiers arrivés étaient Mila, Sara avec leur fils et non le couple Russo-japonais. La soirée commençait plus en douceur. Elles le saluèrent à tour de rôle avant que Mila ne commença à taquiner Yuri.

« _ T'as pas un peu grossi Yuratchka ?! Ca ne te réussi pas de sécher les entraînements.

_ Ca va la vieille ! J'en ai pas loupé tant que ça !

_ Ca fait plus d'un mois que t'es pas venu patiner.

_ Amore, laisse le un peu tranquille. Va t'occuper de ton fils plutôt. » Elle mit d'autorité Pavel, leur fils âgé d'un an dans ses bras puis se tourna vers Yuri et lui chuchota. « Dis-moi, gattino, tu n'aurais pas une bonne raison pour fuir la patinoire ?

_ J'étais blessé.

_ Vraiment ? »

Yuri s'empourpra et bafouilla une réponse avant de bondir sur ses pieds. Il se précipita dans l'entrée pour aller ouvrir aux autres invités qui venaient de sonner à l'entrée. Sara ne fut cependant pas dupe et ne put retenir un sourire. Il était clair que le chaton n'était pas blessé et qu'il avait une toute autre raison pour ne pas venir s'entrainer.

La soirée se passa, comme toutes les soirées, dans un calme relatif. Très vite les chamailleries entre Viktor, Mila et Yuri avaient dû être arbitrées par leurs compagnons respectifs avec plus ou moins de réussite. Lilia et Yakov, juges de paix à la sérénité inébranlable, avaient tranché en faveur des uns ou des autres en intimant un silence qui ne durait guère plus de quelques minutes. Ainsi Viktor fit remarquer que pour une fois, Yuri était plus calme sur un ton plein de sarcasmes.

« _ Fatigué le chaton ? Pourtant, tu brilles par ton absence depuis un mois à la patinoire !

_ Qu'est-ce que ça peut te foutre le vieux ?!

_ Tu as une saison à préparer.

_ Vitya, Yurio n'est pas ton élève. Peut-être que...

_ Ben vous savez quoi le vieux et le porcelet ? Vous êtes pas prêts de me revoir à la patinoire ! Et ça fait huit semaines que je ne suis pas venu patiner soit deux mois. Apparemment vous savez même pas compter !. »

Tous les patineurs se turent pensant que Yuri allait poursuivre sur sa lancée mais il se tut à la surprise générale. Il saisit la main d'Otabek qui l'embrassa avant d'enfin lever le voile.

« _ Nous avons deux annonces à vous faire Yura et moi. La première est que nous allons nous marier. »

Un concert d'applaudissements et de félicitations accompagnèrent cette nouvelle. Alors que déjà Georgi et Mila levaient leur verres, ils furent interrompus par Viktor.

« _ Et la deuxième nouvelle ?

_ Je suis enceint de quinze semaines. »

Almaty, Kazakhstan, résidence Altin, gynécée

Aliya faisait les cent pas dans le petit salon depuis une quinzaine de minutes quand enfin Yulia entra. A peine sa bru entrée et sans lui laisser le temps de s'asseoir, elle la pressa de questions.

« _ As-tu des nouvelles de Sezim ? Serik doit-il vraiment la faire revenir ici ? N'y a-t-il aucun moyen de la faire rester en Russie ? Et... As-tu des nouvelles de mes fils ? De mes trois fils... »

Avec un soupir Yulia s'assit lourdement sur un sofa. Elle dévisagea sa belle-mère et une incommensurable peine lui serra la gorge. Il y avait tant de douleur dans ses yeux couleurs d'ambre. Comment pouvait-il en être autrement après tout ? Depuis quelques mois sa vie se recouvrait de la poussière des murs qu'elle avait mis des années à construire. Tous les mensonges, les faiblesses, les meurtrissures, tout lui étaient de nouveau visibles et cette vision devait être insupportable. D'un geste las, Yulia invita Aliya à s'asseoir. Elle attendit qu'elle le fasse pour lui prendre les mains et prendre la parole.

« _ Tu sais que Serik ne me dit pas tout. Il a ses secrets comme tous les Alphas. Je sais qu'il sera de retour dans quelques jours. Il ne m'a pas dit quand exactement. Je crois qu'il doit régler une affaire à Noursoultan**. Pour ce qui est de Sezim... Je ne sais rien. J'avais espéré qu'elle puisse rester avec Erasyl mais il semblerait que...

_ Je sais que Bolat veut qu'elle revienne ! Il a prévu de la vendre à cet homme. Ce... Kourkov, je crois ?

_ Il est dangereux d'écouter aux portes.

_ Je ne l'ai appris que par accident. J'étais allée déposée un plateau avec une collation à Bolat et je l'ai entendu.

_ Cela importe peu en fait. Pardonne-moi, je n'aurais pas dû réagir ainsi. Tout ce que je sais, tu le sais donc déjà.

_ Rien de plus ? Pourtant mon fils et toi, vous vous parlez plus d'ordinaire. »

Le ton de regret teinté d'amertume fit presque céder Yulia mais elle se ressaisit à temps.

« _ Serik est très préoccupé en ce moment. Il s'assure que tout va bien avec Anara, cherche Otabek et Yuri, prend soin de Sezim, gère les affaires familiales. Et puis, je suis tombée enceinte au pire moment.

_ Ne dis pas ça. Cet enfant... Après la perte de votre dernière née. Cette petite Maria. Dieu veille sur elle maintenant mais qu'il a été cruel de vous l'arracher. »

Si Yulia n'avait pas été enceinte, si elle n'avait pas été si sensible du fait des hormonons qui poussaient son instinct d'Oméga à s'exprimer plus que de coutume, elle n'aurait pas céder à ses émotions. Elle se mit à sangloter et dû se mordre violement la langue pour ne pas tout dire. Elle avait envie, là, maintenant, de tout dire. Pour une fois, elle avait envie de laisser tomber le masque et d'offrir à celle qui se comportait avec elle comme la plus tendre des mères toute la vérité. Fort heureusement, Saltanat choisit ce moment pour faire son entrée et rallumer sa fougue et sa rage.

« _ Olga et Nurasyl sont encore dans le jardin. »

Yulia inspira par le nez, se composa un nouveau masque et annonça.

« _ Pour en revenir à notre conversation Aliya. Serik et Erasyl vont bien. Quant à Otabek et Yuri, puissent-ils rester loin de cette folie le plus longtemps possible. »

Moscou, quartier de l'université d'État Lomonossov de Moscou

Andreï fronça les sourcils en sentant un parfum de rose flotter dans l'air. Serik avait pourtant été clair, pas d'Oméga ici, jamais. Il était déjà suffisamment compliqué de gérer Anara, il n'était pas utile qu'une difficulté supplémentaire vienne s'ajouter. Il s'avança dans le salon pour découvrir un jeune homme docilement assis au piano. Il jouait un air de Mozart distraitement et ne semblait même pas surpris de sentir des phéromones de quelqu'un qui n'était pas Anara. La voix rude d'Andreï le fit toutefois sursauter.

« _ Je peux savoir qui vous êtes ?

_ Alexandre Yurievitch Petrov. Un ami de votre sœur.

_ Ma... Oui. Pardonnez ma rudesse, elle ne m'avait pas prévenu.

_ Elle m'a dit de l'attendre ici pendant qu'elle allait faire une rapide course. Je suis désolé de m'imposer.

_ Non, il n'y a pas de problème Alexandre Yurievitch. Anara a-t-elle dit quand elle revenait ?

_ Non. Elle m'a dit d'attendre c'est tout.

_ Très bien petit pianiste...

_ Harpiste. Je joue très mal du piano.

_ Peut importe. »

Andreï laissa filer ses phéromones et en menaça le jeune Oméga qui le regarda, éberlué.

« _ Je ne suis pas le frère d'Anara et toi tu es en danger. Alors tu vas sortir de sa vie très vite et te tenir très éloigné d'elle. Le dernier Oméga dont elle s'est entichée dort maintenant dans un cercueil six pieds sous terre. Est-ce que tu comprends ? »

Le beau visage prit une teinte cireuse et les yeux s'agrandirent de peur et de surprise. Andreï s'approcha et lui glissa à l'oreille.

« _ Veux-tu connaître le même sort ? »

Un simple mouvement de tête lui répondit.

« _ Prend tes affaires et file. »

Alexandre attrapa son sac et se précipita à l'extérieur aussi vite que ses jambes le lui permirent. Il aurait voulu demander de plus amples explications à cet Alpha qui lui faisait si peur mais il n'y était pas parvenu. Les phéromones lourdes lui avaient intimé d'obéir alors en Oméga docile, il avait obéi.

Andreï referma la porte derrière lui en espérant qu'il ne soit pas déjà trop tard pour lui. Il avait été surpris de le trouver ici tout d'abord puis l'effrayer lui avait paru être la meilleure solution. Maintenant, restait à savoir pourquoi Anara avait fait venir un Oméga ici. Elle continuait de traquer Yuri qui était selon elle son Oméga alors pourquoi ce jeune homme était ici. Il avait dit être harpiste... Il comprit soudain et envoya un message à Serik pour le prévenir des manœuvres de sa sœur.

Saint-Pétersbourg, hôpital international, service gynécologie, section Oméga

« _ Non ! Arrêtez ! »

Le cri avait jailli de ses lèvres et la sueur couvrait son corps tremblant. Des phéromones boisées se firent alors sentir tandis que deux bras puissants le collaient davantage contre son torse. Otabek berça doucement Yuri qui sanglotait encore, peinant à s'extraire de son cauchemar. Lui chuchotant des paroles apaisantes à l'oreille, le jeune Alpha tenta de ramener le calme dans l'esprit de son Oméga qui faisait de nouveau des cauchemars.

« _ Doucement Yura. Tout va bien. Je suis là et je vous protège. Rien de mal ne va arriver.

_ Elles étaient là ! Je te dis qu'elles étaient là ! Elles voulaient m'arracher Kolia du ventre comme elles ont prit mon autre bébé.

_ Non Yura, il n'y a que moi avec toi. Personne ne va nous prendre notre enfant. Je ne laisserai personne vous toucher.

_ J'ai peur Beka.

_ Je suis là. Je serai toujours là. »

Sentant que les mots ne suffisaient pas, Otabek mordilla doucement la marque sur la nuque de Yuri. Se faisant, il passa sa main sur l'arrondi de son ventre et sentit une légère pression qui le fit sourire. Peu à peu, Yuri se calma et après avoir veillé un petit moment il se rendormit, épuisé. Son compagnon, lui, ne le put pas. Il resta les yeux ouverts à fixer le noir ou les différents écrans de contrôle. Il voyait ainsi la tension de Yuri redescendre, son rythme cardiaque se calmer. Sur un autre moniteur, il pouvait suivre les constantes de Kolia. Tout allait bien cette nuit encore mais tout pouvait si vite basculer. Se forçant à ne pas penser au pire, il resserra son étreinte sur le corps qu'il tenait fermement contre lui. Il n'était pas minuit et Yuri n'avait fait que son premier cauchemar. La nuit promettait d'être longue.

Aux premières heures du jour, une infirmière réveilla Otabek en voulant doucement prendre la main de Yuri pour lui faire une prise de sang. Epuisé, le jeune homme blond n'avait pas réagi quand elle lui avait pris la main mais son Alpha avait perçu comme une vague menace.

« _ Je ne voulais pas vous réveiller.

_ Ce n'est rien. Attendez, je vais me lever pour que vous soyez plus à l'aise.

_ Non, ne bougez pas. Je n'en ai pas pour longtemps et il ne se réveille pas quand il est dans vos bras. C'est toujours plus compliqué quand il est éveillé et que vous n'êtes pas là.

_ Il n'est pas toujours coopératif.

_ Je crois qu'il en a marre d'être ici. Je peux le comprendre.

_ Il y a trois jours, nous avions l'espoir de rentrer à la maison et puis hier on nous a dit qu'il était finalement trop faible.

_ Peut-être devriez-vous demander un autre avis. Je ne devrais pas vous dire ça mais peut-être qu'un œil neuf vous aiderait. »

Otabek hocha la tête et garda le silence. Les paroles de la jeune infirmière faisaient écho à une idée qu'il avait en tête depuis un petit moment déjà. Les médecins de Yuri disaient toujours la même chose sans rien apporter de nouveau ou de concret. Cette situation exaspérait son Oméga qui ne pouvait s'empêcher après leurs visites de s'agiter contrevenant ainsi à leurs recommandations. Il déposa un baiser sur les cheveux d'or et se leva tentant de déranger le moins possible son amour. Il avait un appel important a passer.

Saint-Pétersbourg, patinoire Vladimir Kovalev***

Otabek rejoignit rapidement le bord de la patinoire pour calmer son fiancé. Yuri était dans une colère noire, ses yeux lançaient des éclairs, ses phéromones se déployaient et ses mains étaient crispées sur son ventre. Face à lui, Yuuri et Viktor tentaient vraisemblablement de lui parler. Il n'était pas difficile pour Otabek de connaitre le sujet de la dispute en cours. La soirée où Yuri et lui avait annoncé le mariage et la venue prochaine d'un enfant s'était terminée par des cris et des larmes. Depuis, le couple russo-kazakh avait refusé d'adresser la parole au couple russo-japonais malgré les tentatives de celui-ci.

« _ Du calme Yura. Tu dois éviter de t'énerver. Viens, Tu seras plus tranquille là-bas pour attendre Kolia. »

Protecteur, Otabek entraîna son compagnon vers un coin de la patinoire où ils pourraient attendre tranquillement la fin du cours de patinage de leur fils. Cependant, Viktor ne l'entendait pas de cette oreille et avait la ferme intention d'avoir cette discussion. Il ne supportait plus le silence glacial d'Otabek et surtout de Yuri.

« _ Yuratchka, Otabek, attendez. Nous voudrions vous parler.

_ Je crois que tout a été dit il y a un mois, Viktor. Cesse de nous importuner maintenant.

_ Je veux juste que nous discutions comme des adultes.

_ Ah vraiment, le vieux ! » Persifla Yuri entre ses dents. « Tu veux qu'on parle entre adultes ? Ben déjà commence par t'excuser et ensuite on verra.

_ Je n'ai pas à m'excuser pour t'avoir dit la vérité, Yuratchka.

_ La vérité ?! Tu sais quoi en fait ?! Rien ! T'es pas gynéco que je sache ! Si les médecins ont dit que je pouvais faire un autre bébé qu'est ce que t'as à ajouter ?! T'as eu un diplôme de médecin dans la nuit ?! » Le ton cassant et saccarique de Yuri fit légèrement battre en retraite Viktor. Mais Yuuri voyant son époux faiblir vint à sa rescousse.

« _ C'est juste que... Pour Kolia ça a été si dur... Vous... Tu...

_ Ca suffit. Yura a raison en disant que si les médecins nous ont donné leur aval vous n'avez rien à dire. Nous n'avons pas non plus à nous justifier. Par ailleurs, Yura a aussi raison quand il dit que vous ne savez pas grand-chose sur sa première grossesse. Vous n'avez pas été parmi les plus présents. Maintenant, nous partons. Notre fils nous attend. » Le ton glacial d'Otabek n'admettait aucune réplique.

Le couple s'éloigna laissant leurs aînés méditer sur leur conversation. Otabek sentait Yuri fulminer et il s'employa par tous les moyens possibles à le détendre avant que le cours de Kolia ne se termine. Ils regardèrent le petit garçon patiner et suivre docilement les instructions tendrement enlacés sur le bord de la glace. A l'abri des bras protecteurs, Yuri se laissa peu à peu aller mais il ne put s'empêcher de repenser à la soirée gâchée et à la conversation qu'ils avaient eue un peu plus tôt.

Un mois plus tôt, Saint-Pétersbourg, appartement Altin-Plisetsky

« Je suis enceint de quinze semaines. »

Le silence se fit puis des exclamations de joie retentirent autour de la table. Les verres furent levés et un toast en l'honneur du couple fut porté par l'assemblée puis la soirée reprit son cours.

« _ Je me disais bien que tu avais grossi Yuratchka !

_ J'ai pas grossi, je suis enceint !

_ C'est vrai amore ! Un peu de respect pour nous autres Omégas qui portons la vie. Félicitations encore une fois à vous. Depuis le temps que tu voulais un autre enfant, Yuri. Tu as réussi à faire plier ton Alpha.

_ Ben en fait, c'est Beka qui a... Bref ! Kolia va avoir un frère ou une sœur.

_ Comment ça Beka a voulu ? »

La question de Viktor fit se figer Yuri qui se tendit aussitôt. Il avait espéré que le vieux ne commenta pas l'annonce mais ça aurait été trop beau. Il passa nerveusement une main sur son ventre tandis qu'Otabek serra l'autre. Ce fut d'ailleurs l'Alpha qui prit la parole ne souhaitant pas que son Oméga, toujours prompt à rugir, ne s'emporta.

« _ Nous avons planifié cette grossesse avec Yuri et ses médecins. Aucun n'a émis d'objection.

_ Mais ce n'est pas prudent. Pour rappel, le corps de Yuri n'a pas très bien supporté la première grossesse. Et Kolia... Vous n'êtes pas raisonnables. Il est évident que le corps de Yuri n'est pas fait pour enfanter.

_ Quoi ?! Mais tu te fous de moi le vieux ?! Qu'est-ce que tu en sais ?! Vous n'étiez pas là ! Vous étiez au Japon à vous dégouliner dessus !

_ C'est tout à fait vrai Viktor. Yuuri et toi n'étiez pas là.

_ Georgi cesse d'être toujours du côté du chaton ! Il a quand même perdu un des jumeaux. »

Otabek rattrapa son fauve qui avait bondi de sa chaise dans le but évident de mettre en pièce son compatriote. Il le serra contre lui tout en l'entraînant dans leur chambre. Yuri se débattait, hurlait, griffait, rejetait des phéromones en pagaille. Son Alpha resserra son étreinte autour de lui et émit à son tour des phéromones pour l'apaiser. Il fallut de longues minutes avant que Yuri ne retrouva un semblant de calme mais bien vite les larmes se mirent à couler et de gros sanglots l'étranglèrent.

« _ Il a osé parler de mon bébé perdu. Il a osé dire... J'ai pas fait exprès de l perdre, Beka ! Mon tout petit et...

_ Oublie tout ça et ne t'occupe pas de ce qu'il pense mon amour. Je sais que tu vas mener à bien cette grossesse. Tout va bien se passer cette fois. Tu sais bien que du moment que nous sommes ensemble nous sommes invincibles. »

Il fallut à Otabek plus d'une heure pour calmer complètement son amoureux et une de plus pour que celui-ci s'endormisse enfin. Quand il retourna au salon, ce fut pour trouver Lilia et Yakov qui finissaient de ranger les vestiges du dîner.

« _ C'est gentil mais laissez tout ça. Je vais le faire.

_ Nous avons terminé. Nous avons dit aux autres de partir. Comment va-t-il ?

_ Mal. Il est furieux contre Viktor et je suis également très en colère.

_ Yakov, contre mon avis, a dit à Yuuri et Viktor de vous appeler demain.

_ Qu'ils s'épargnent cette peine. Qu'ils restent à distance de Yura et mon fils. Ils ont fait suffisamment de mal. »

Noursoultan, Kazakhstan

Les larmes dévalaient les joues de Sezim depuis qu'ils étaient arrivés dans la capitale kazakhe. Elle aurait voulu hurler de rage et de désespoir mais rien ne venait. Elle se sentait vidée de toute cette énergie qui l'avait jusque là maintenue en vie. Et à quoi bon lutter même lorsque son âme-sœur n'avait pas levé le plus petit doigt pour lui venir en aide. Elle aurait aimé en vouloir à Erasyl d'être absent et de ne pas la protéger mais savait-il seulement que Serik profiterait de son absence pour la vendre ? Enfin, Serik ne faisait qu'obéir à son père. Elle avait pourtant cru qu'il lui viendrait en aide comme il le faisait pour Otabek et Yuri. Un instant, une pensée folle lui traversa l'esprit.

« Et si Serik aidait Otabek et Yuri maintenant pour mieux les livrer par la suite à Bolat... »

Elle secoua la tête pour tenter de se débarrasser de cette folle idée mais ne le put. Il ne pouvait pas faire ceci, il n'était pas fait de la même cruauté que on père. Pourtant, ne s'apprêtait-il pas à la vendre au plus offrant comme une simple tête de bétail ? Une bouffée de chaleur la prit et elle serra les lèvres pour étouffer un petit gémissement. Le renard avait bien choisi son moment pour faire son coup. Ses chaleurs étaient en train de se déclencher. Qui que fut cet Alpha qui l'achetait, il pourrait la marquer dès cette nuit.

Saint-Pétersbourg, hôpital international, service gynécologie, section Oméga

« _ Bonjour Yuri

_ Salut petit fauve ! »

Le couple suisse entra dans la chambre d'hôpital précédé par Otabek à la plus grande surprise de Yuri. Il savait bien sûr que le couple devait venir à Saint-Pétersbourg pour le mariage de Viktor et Yuuri mais celui-ci n'avait pas lieu avant dix jours.

« _ Comment va notre félin préféré ? » Lui demanda Christophe dans un sourire.

«_ Ca va. Enfin aussi bien que je peux aller dans un hôpital. Qu'est ce que vous foutez là ?

_ Une envie de tourisme ! Mon très cher Oméga a enfin prit des vacances !

_ Tu es dur. Nous avons fait du tourisme cet hiver à Moscou.

_ Entre deux consultations.

_ Désolé, c'est...

_ Ce n'est pas de ta faute Yuri. Je suis ton médecin. Il est normal que je m'occupe de toi et de ton enfant. D'ailleurs, comment se porte le chaton ? »

Yuri soupira et caressa son ventre. Il avait envie de parler de son enfant mais rien n'était facile. Les médecins qui le suivaient ne lui annonçaient jamais de réelles bonnes nouvelles. Tout était toujours en demi-teinte. Stefan devant le désarroi du jeune homme s'adoucit. Il s'approcha de lui pour lui parler. Il savait qu'il avait une nouvelle à lui faire qui pourrait le ravir.

« _ Je sais que tu es examiné sans arrêt et que tu détestes ça mais j'aimerai te proposer quelque chose. A coté de votre appartement se trouve une clinique pour Oméga. J'ai fait connaissance avec le personnel et le directeur et tout le monde est très compétent. Il pourrait t'accueillir en cas de besoin. Et ...

_ Super ! Beka fais ma valise on se casse d'ici !

_ Tu ne veux pas écouter la suite, mon amour ?

_ Quelle suite ?

_ Si et seulement si ton examen est bon, tu pourrais rentrer chez toi. Les soins et le suivit de grossesse pourrait être fait par le personnel de la clinique dont je t'ai parlé. »

Les mots, pour une fois, manquèrent à Yuri. Il regarda le médecin les yeux écarquillés et la bouche ouverte. Il allait pouvoir rentrer chez lui. Bien sûr, il fallait que physiquement tout aille bien, mais il allait enfin pouvoir rentrer chez lui, chez eux.

« _ Je sors quand ?

_ J'ai dit si ton examen est bon. Et de toute façon, pas avant quelques jours. Il faut que je fasse quelques démarches avant. On se programme l'examen pour demain matin ?

_ Pourquoi pas tout de suite ?

_ Laisse-moi le temps d'arriver ! »

Almaty, Kazakhstan, résidence Altin, gynécée

Saltanat dévisageait Olga comme si une deuxième tête lui était poussée. Elle était ébahie par l'audace de la jeune fille.

« _ Je ne te demande pas grand-chose. Juste de me dire si Yulia sait quelque chose à propos d'Otabek.

_ Tu veux des nouvelles d'Otabek alors que tu flirtes ouvertement avec Nurasyl ?

_ Je ne flirte pas avec lui. Nous passons du temps à discuter tous les deux. Il a été abandonné par son Oméga.

_ Abandonné ?! »

Décidément, Saltanat n'en croyait pas ses oreilles. Soit elle devenait folle soit Olga le devenait. Il ne pouvait y avoir d'autre explication.

« _ Mais Olga tu sais bien que je ne sais rien sur Otabek.

_ Bolat ne te dit rien sur l'oreiller ?

_ Comme c'est charmant d'ainsi sous-entendre des choses Olga ! »

La voix claire et chaude de Yulia s'était élevée dans son dos. Elle sentit les phéromones douces et florales se rapprocher en même temps que leur propriétaire.

« _ S'assurer une place parmi nous en manipulant un frère pour obtenir l'autre. Attention c'est un jeu dangereux.

_ Je ne manipule personne ! Je passe juste un peu de temps avec Nurasyl mais il n'y a rien entre nous. Je suis fidèle à Otabek même si lui ne l'est pas.

_ Il est pourtant fidèle... A son Oméga. Je te rappelle le nom de son lié et âme-sœur ou ça ira ? »

Yulia prenait de toute évidence un malin plaisir à cette conversation. Elle tourna autour de sa victime désignée et préférée en caressant son ventre. Elle s'apprêtait à donner l'assaut quand Aliya entra et les fixa tour à tour.

« _ Pas de disputes, pas de cris. Rien de tout cela ce soir. Bolat est de très mauvaise humeur aussi faisons nous discrètes pour celles qui restent. Yulia, ton chauffeur t'attend. Serik t'envoie auprès de ta famille. Olga et Saltanat dans vos chambres, tout de suite. »

Les deux femmes quittèrent le salon sans rien dire alors qu'Aliya et Yulia s'étreignaient.

« _ C'est un adieu ou un au revoir ? »

Aliya serra contre elle un peu plus fort sa belle-fille avant de lui glisser à l'oreille.

« _ C'est un adieu. »

Et elle l'embrassa sur ses joues qui se mouillaient de larmes.

Saint-Pétersbourg, centre commercial

« _ Donne-moi la main Kolia sinon tu vas te perdre.

_ Papa, tu me portes ?

_ Non, tu es un grand garçon Kolia et Papa porte déjà le bébé. »

Otabek tendit la main à son fils qui l'attrapa un peu à contrecœur. Le petit garçon avait envie d'être porté par son père Oméga mais depuis que celui-ci était enceint, son äke l'avait interdit. Il avait aussi interdit beaucoup d'autres choses qui selon lui fatiguait trop son père.

« _ Tu sais Beka, je peux le porter un peu.

_ Yura, il est trop lourd maintenant.

_ S'il est fatigué ?

_ Je le porterai dans ce cas. »

Yuri avait bien envie de lancer un commentaire bien senti à son compagnon mais faire un scandale dans une galerie commerçante devant leur fils ne le tentait pas. Il préférait ajouter ce sujet de discussion à sa longue liste de sujets à aborder avec son Alpha. Alpha qu'il aimait de tout son cœur mais qui depuis l'annonce de la grossesse était devenu beaucoup trop protecteur à son goût. Il n'était pas étonné outre mesure mais tout ceci commençait à lui peser sérieusement.

« _ Yura, nous pourrions regarder dans cette boutique pour Masha ?

_ Ah oui, c'est vrai que c'est son anniversaire la semaine prochaine. Yulia nous laisse carte blanche cette année.

_ On pourrait lui offrir un jeu de société.

_ Genre un jeu de stratégie pour apprendre à dominer le monde. Vous avez de bonnes dispositions pour ça dans ta famille.

_ Yura !» Otabek n'ajouta rien et secoua la tête. Il ne pouvait rien rétorquer à son Oméga qui avait parfaitement raison sur ce point.

Ils pénétrèrent dans le magasin de jouets après avoir expliqué à Nikolaï qu'ils cherchaient un cadeau pour sa cousine. Le petit garçon patienta tranquillement en essayant divers jeux en bois dans son coin. Les petites voitures lui faisaient furieusement envie mais il savait que ses parents ne lui achèteraient rien s'il réclamait. Aussi, il abandonna les objets de sa convoitise pour aller caresser un renard en peluche. Le pelage orange foncé était doux sous ses doigts et il rendit à l'animal son sourire cousu de fils brun.

« _ Il te plaît Kolia ? »

Otabek avait posé doucement la question arrachant son fils à sa contemplation. Le garçonnet acquiesça doucement puis alla vers Yuri et posa sa petite main sur son ventre rond.

« _ Tu crois que ça pourrit être le Michka du bébé ?

_ Je... Oui ça pourrait. Si äke veut bien.

_ Oui. Je crois que le bébé sera heureux d'avoir un doudou choisit par son grand frère, mon trésor. »

Otabek prit la peluche sur le portant et tendit la main à Nikolaï pour aller avec lui payer le cadeau que faisait le grand frère. Nikolaï préféra toutefois prendre la peluche et se diriger seul, en grand garçon qu'il était désormais vers la file d'attente. Otabek laissa aller le petit garçon et s'arrêta un court instant au niveau de son compagnon pour lui murmurer.

« _ On pourrait lui prendre la petite voiture ?

_ Je croyais qu'il ne fallait pas trop le gâter ?!

_ Je sais, Yura. C'est juste que...

_ Oui, on lui prend. Il a été adorable toute la journée et depuis le début de la grossesse. Il mérite bien un petit cadeau. »

Un rapide baiser échangé et le couple rejoignit son fils perdu dans la contemplation d'une voiture en bois jaune.

« _ Laquelle veux-tu, mon trésor ?

_ Celle-là, s'il te plaît.

_ D'accord. »





* Point diminutifs

Pacha : diminutif du prénom Pavel

Sasha : diminutif des prénoms Alexandre, Alexander et Alexandra

Olia : diminutif du prénom Olga

Katia : diminutif du prénom Yekaterina

Mila : diminutif des pénoms Ludmilla, Milena etc.

** Noursoultan : nom de la capitale du Kazakhstan. Le précédent nom était Astana.

*** Patinoire Vladimir Kovalev : lieu inventé par mes soins. Toutefois, Vladimir Nikolaïevitch Kovalev est un ancien patineur soviétique.





Et le voici enfin ce chapitre! Je vous ai fait attendre mais j'espère que vous ne m'en voulez pas trop et que vous avez aimé votre lecture.


L'image en début de chapitre ne m'appartient pas. Je l'aime bien et c'est bien Yuri d'immortaliser son test de grossesse par un selfie.

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