21

Il pensait à elle : la réaction qu'elle avait eue lorsqu'il était entré dans cette douche. Il revit son corps, maladroitement couvert de cette fine serviette blanche. Sa peau mouillée et pâle, recouverte de frissons ; cette même peau qui avait rougit lorsque leurs regards c'étaient croisés. Il sourit bêtement. Elle était belle, dans ce linge clair et doux. Elle était belle.

Il soupira, jouant avec deux morceaux de bois ramassés plus loin dans la forêt. Il réfléchit, longuement, traversant la forêt sombre et endormie. Il faisait noir, mais cela ne l'inquiétait pas. Personne ne pouvait le voir. Il était seul.

Lui qui pensait qu'il n'y avait pas pire que la souffrance ; et bien si, il y avait bel et bien pire. Ne rien ressentir était épouvantable, une vraie torture : ne rien ressentir était ce qu'il y avait de plus douloureux.

Il atteint rapidement le château. De la cour, il observait les derniers élèves monter les escaliers en souriant, finissant rapidement de la nourriture volée au buffet. Puis il s'assit là, sur ce banc de pierre sur lequel elle l'avait rejoint quelques fois. Que se passait-il ? Pourquoi pensait-il autant à elle ? Il le savait au fond : cette réponse, ce comportement le troublaient. Depuis la douche elle n'était plus la même. Comme distante. Un mur de glace les séparait, le même mur qu'il y a des années. Il secoua la tête :

Arrête de penser à ça, se dit-il intérieurement.

Mais c'était impossible. Il voyait son visage, souriant, sérieux, rougissant et pleurant. Elle avait beaucoup pleuré, beaucoup souffert ces derniers temps, depuis cette guerre sanglante. Beaucoup trop. Il se souvint de ce soir, où elle l'avait rejoint près des carreaux trempés pour pleurer avec lui.

Le monde pleure pour nous, dit-elle dans son esprit.

Incapable de ressentir quoi que ce soit, il était pourtant sûr de sentir une vague de chaleur, de frissons ; comme si son corps était engourdi. Et s'il était vivant, son cœur aurait voulu sortir de sa poitrine, il le sentait au fond, ce vide. Mais pourquoi ?

Lasse de ce vide, il soupira, passant nonchalamment la main dans ses cheveux emmêlés.

Puis il se perdit dans ses pensées : avant tout ça, avant d'être ici et d'être là pour elle, il n'était rien ; qu'un simple garçon, qui enchaînait les conquêtes.

Il était mauvais.

Hermione n'avait pas toujours été si belle ; il fallait le dire, à son arrivée à Poudlard, elle n'avait pas grand-chose pour plaire, cette Miss-je-sais-tout. C'est à partir de la quatrième année qu'elle avait commencé à attirer son regard. Parfois, dans la grande salle, il se surprenait à la regarder, ayant quelques pensées qu'il ne pouvait s'avouer à lui-même.

Il n'avait jamais vraiment connu l'amour : à part celui de sa mère. Son quotidien se réduisait à quelques conquêtes, sans sentiments. Il ne faisait qu'utiliser les femmes. Alors, dès qu'il avait commencé à avoir des pensées sur cette fille, sur cette sang-de-bourbe, sa seule réaction fut la violence. Comment accepter d'être attiré par la race que son père cherchait à élimer ?

Impossible.

Tout était bien différent. Il était là, et elle était là. Il était là, et elle était la seule à pouvoir le voir, à pouvoir communiquer avec lui. Et il était le seul à pouvoir la sauver.

Tout était différent : car, dans cette douche, il n'avait pas eu de pensées, pas eu de frissons. Il était là, elle était là. Il n'était plus le même. Et, pour une fois, il se sentit coupable de regarder un corps ; ce corps si innocent, qui avait rougit sous son regard de garçon. Elle s'était couverte timidement, resserrant la serviette contre elle comme si celle si allait la recouvrir davantage. Il sourit de nouveau dans le vide.

Elle l'avait changé, et il trouvait ça beau. Il s'aimait comme ça. Le changement ne fut pas difficile, comme s'il attendait cela depuis des années. Finalement, c'était peut-être ça : il attendait cela depuis des années. Il l'attendait, cette main qui viendrait l'aider.

Deux êtres en détresse, deux mains qui se lient : il pensa à leurs mains qui s'entrelaçaient. Il

La couvre-feu passé, Drago pénétra dans le château et s'assied dans les escaliers, le regard toujours dans le vide. Avait-il dit ou fait quelque chose qu'il ne devait pas ? Il n'en savait rien ; tout ce qu'il sentait, c'était la gêne de la jeune fille. Ressentir tout ce qu'elle ressentait n'était peut-être pas souvent une bonne chose.

Devant lui, une personne passa. Il ne leva pas les yeux. Puis, deux, puis trois.

Le château était bien silencieux. Il fronça les sourcils. Qui pouvait bien pénétrer dans le château à cette heure-là ? Il n'eut pas besoin de voir leurs visages ; les cheveux bouclés d'un brun intense lui firent comprendre de qui il s'agissait.

Il se redressait rapidement alors que Bellatrix Lestrange, son père et un mangemort montaient les escaliers en silences, aux aguets. La seule pensée qu'il eut fut :

Hermione !

Il arriva aussitôt dans le dortoir. La jeune fille était endormie paisiblement. Il n'avait pas une seconde à perdre. Il la secoua, la sortant de son sommeil profond. Elle fronça les sourcils en écarquillant les yeux.

- Hermione, réveille-toi, vite.

Elle n'eut pas le temps de poser de questions ; en bas, dans la salle commune, la porte claqua bruyamment. Elle le regarda. Il sentait la peur en lui.

- Ils sont là, cache-toi. Ils viennent te chercher.

Elle se redressa rapidement, vêtue d'un petit débardeur et d'un short aux couleurs de la maison Gryffondor. Elle regarda autour d'elle.

- Le placard, vite.

Elle s'exécuta. Refermant la porte en bois derrière-elle, elle s'accroupit. Son cœur battait rapidement en lui ; il ressentait sa peur, ses frissons.

- Ne fais pas de bruit, surtout. Reste-là, tout ira bien.

Il se colla contre la porte quand les trois individus pénétrèrent dans la pièce en criant :

- Debout. Tous.

Les filles sursautèrent. Quelques-unes poussèrent des cris stridents à la vue des baguette tendues droites sur elles. D'autres reculèrent de peur. L'incompréhension et la peur marquait leurs visages. Drago quant à lui fixait son père en serrant la mâchoire : ce n'était pas lui le lâche, mais bel et bien son père.

- Nous cherchons Hermione Jean Granger.

Tous les regards se dirigèrent vers le lit vide aux draps encore fraîchement froissés.

- Où est-elle ?

- Elle est partie, elle ne se sentait pas bien, répondit Ginny froidement.

Son regard courageux se déposa dans celui de Lucius Malefoy qui la dévisagea.

- Weasley, je suppose.

La rousse ne répondit pas et le dévisagea à son tour, se redressant fièrement dans son lit.

- Nous n'avons pas de temps à perdre, dit Bellatrix. Petite peste...

Elle avait dit ces mots en sifflant tel un serpent. Elle se mit à jouer avec une de ses boucles, dévoilant ses dents noires.

- Je vous ai dit, elle ne se sentait pas bien et a quitté le dortoir il y a quelques minutes. Vous perdez votre temps en la cherchant ici.

Les autres filles ne disaient pas un mot, ne bougeaient plus, comme totalement paralysées.

- Bellatrix, allons-voir, finit par dire le père de Drago. Toi, tu restes avec elles, surveille-les bien.

Ils partirent aussitôt, laissant le brun avec les filles. Son visage recouvert de cicatrices ne ressemblait plus à grand-chose. Tout ce qu'on distinguait était ce sourire diabolique. Il déshabilla les filles du regard en souriant.

- Bien mes jolies, vous allez rester sages sinon je devrai vous punir.

Personne ne parlait.

Drago, il faut faire quelque chose... Il est dangereux et malsain... S'il s'en prend à l'une d'elle alors que je suis dans ce foutu placard...

Tu ne bouges pas de là.

Ne crois pas que je ne bougerai pas s'il bouge le petit doigt.

Il faut trouver un moyen de te sortir de là, rapidement. Ils se rendront vite compte que tu es cachée quelque part dans ce dortoir.

Il regarda autour de lui rapidement à la recherche d'une issue. La seule qu'elle pouvait emprunter était celle barrée par l'homme. Il soupira.

- Qu'est-ce que vous lui voulez ? Demanda une fille.

La moitié d'entre elles ne semblait pas comprendre ce qu'il était en train de se passer : les yeux dans le vide, certaines pleuraient, d'autre priaient sûrement.

Il faut prévenir McGonagall Drago.

Comment veux-tu que je la prévienne ? Tu es la seule à me voir.

Réveille-la, fais quelque chose pour qu'elle comprenne. Prend un bout de papier.

Il se retourna et fixa les portes du placard. Il sentait sa présence derrière ces bouts de bois épais, il sentait sa peur et sa tristesse. Mais il sentait aussi sa rage.

Il n'avait aucune envie de la quitter, cela la mettrait en danger. En fait, si cela ne tenait qu'à lui, il ne partirait jamais.

Drago, je ne bougerai pas d'ici, tu as ma parole. Dépêche-toi avant qu'il revienne, s'il te plaît.

Sa voix était tremblante. Il jeta un dernier coup d'œil au placard dans lequel elle se tenait et disparu.

Quelques secondes après, il se trouvait dans le bureau de la professeure. Sa chambre qui se trouvait à côté était fermée, et, bien qu'il puisse traverser cette porte épaisse, il ne le fit pas ; le faire avec Hermione ne le dérangeait pas, mais avec la professeure McGonagall, cela lui était gênant. Il grimaça. D'un coup de bras violent, il renversa le bureau de la femme, songeant qu'elle n'aurait pas de mal à le ranger avec de la magie. Et, quelques secondes plus tard, la vieille femme encore endormie sortie de sa chambre et tendant sa baguette.

- Qui est là ?

Il ne pouvait pas lui répondre.

- Montre vous.

Drago s'empara du parchemin au sol et se mit à écrire.


Attaque Poudlard. Mangemorts cherchent Hermione, cachée placard dortoir. Besoin aide.

Quand McGonagall lu le parchemin, elle fronça d'abord les sourcils. Puis un air surpris et terrifié s'empara de son visage alors qu'elle dit :

- Retourne auprès d'elle. Je préviens les autres professeurs.

Il se retrouva rapidement devant le placard.

Tout va bien ?

Quelle question...

Pardon.

Pourquoi t'excuses-tu ?

Pour la dernière fois.

Je ne pense pas que ce soit le bon moment pour en parler Drago.

Ce n'est jamais le bon moment si je t'écoute. Une fois que tout ça sera terminé, tu me fuiras encore, comme tu l'as fait ces derniers jours.

Comme elle ne répondit pas, il ajouta :

Je suis désolé. Je ne sais pas pourquoi tu m'en veux, ni pourquoi tu me fuis, mais sache que je suis désolé. Pour ce que j'ai fait ou pas fait.

Elle resta silencieuse. Mais il sentait le rouge lui monter aux joues : une chaleur s'empara de son visage.

Tu pourrais au moins répondre quelque chose... Ce n'est pas dans mes habitudes de m'excuser.

On en parlera plus tard, dit-elle en entendant les mangemorts rentrer dans la pièce.

Lucius Malefoy paraissait furieux. Drago le fixa, le regard remplit de haine. Il le détestait, plus que tout. Plus que ce n'était possible. Il aurait aimé qu'il le voit, qu'il voit ce regard tueur et qu'il ait peur de lui comme il avait eu peur ce jour. Ce jour où il lui avait ôté la vie, à son propre fils. Une douleur s'empara de lui.

Ne pense pas à tout ça, pas maintenant, dit Hermione souffrante.

Il ne répondit pas. Il regardait la scène impuissante, attendant impatiemment l'arrivée de la professeure. Elle avait sûrement prévenu les autres professeurs à cette heure-là ; ils devaient être en chemin. Il tapa du pied, les bras croisés, comme si quelqu'un allait le voir. Mais il faisait ça dans le vent.

Lucius Malefoy s'approcha du lit de Ginny Weasley et l'attrapa violemment par les cheveux. La rousse poussa un cri strident et serra les dents.

- Petite menteuse. Où est-elle ? Je sais que tu me caches quelque chose.

Tu ne bouges pas de là, siffla Drago à Hermione comme en lisant dans ses pensées.

Il l'entendit s'accroupir de nouveau.

- Je vous ai dit, elle est partie, elle ne se sentait pas bien.

Il tira davantage sur les cheveux. Elle grimaça. Drago contemplait la scène avec dégoût. Il l'avait traité comme ça, autrefois, comme un vulgaire étranger, comme un esclave. Même un esclave ne méritait ce traitement. En fait, personne ne le méritait.

- Ne me mens pas !

- EXPELLIARMUS.

Le blond fit volte-face : les professeurs venaient d'arriver. En une fraction de secondes, les mangemorts disparurent dans une épaisse fumée noire, sous le regard surpris de Minerva qui s'approcha en écarquillant les yeux. Quelque chose n'allait pas ; Drago parvenait à le lire dans son regard.

D'un geste vif, elle traversa Drago pour venir ouvrir la porte à travers lui, dévoilant Hermione. Elle était là, recroquevillée dans le coin droit du placard, ses bras enlaçant ses jambes resserrées. Son regard se posa dans le sien. Mais elle le quitta rapidement pour celui de Minerva McGonagall.

- Suivez-moi.

La brune en face de lui se releva et passa à côté de lui, laissant leurs peaux s'effleurer ; et, même s'il frissonna parce qu'il ressentait tout ce qu'elle ressentait, il savait qu'il aurait frissonner. Il provoquait en elle le même effet qu'elle provoquait en lui.

Elle quitta la pièce, lui jetant un dernier coup d'œil. Elle était belle.

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