Chapitre 19


« I could stay awake just to hear you breathing,
Watch you smile while you are sleeping,
While you are far away and dreaming,
I could spend my life in this sweet surrender,
I could stay lost in this moment forever,
Every moment spent with you is a moment I treasure. »
Don't want to miss a thing — Aerosmith

Line

— Je pose ça où ? me demande Mme Dubois alors qu'elle n'a même pas fini de fermer sa robe de chambre.

— Je vais prendre le verre !

Je l'attrape au passage, libérant la vieille dame qui retrouve un peu plus de mobilité. Plus tôt dans la journée, ma vieille voisine a eu une petite chute de tension qui lui a valu un tour aux urgences et des prises de sang. Têtue comme elle est — et sûrement parce qu'elle a un peu peur des hôpitaux —, elle tenait absolument à rentrer chez elle mais le médecin a été clair : hors de question de rentrer seule dans un appartement sans personne pour l'aider en cas de besoin, et encore moins avec son handicap ! Elle m'a donc appelée, pestant contre cet « idiot et ingrat » de médecin, qui la discrimine à cause de ses yeux qui lui ont dit merde.

Évidemment, je suis entièrement d'accord avec ce médecin. Mine de rien, elle commence à prendre de l'âge et ne rien voir n'aide pas à améliorer son cas. Même si sa baisse de tension n'est rien d'inquiétant d'après les soignants, je ne me voyais pas la laisser seule dans son appartement pour la soirée.

On ne sait jamais ce qui peut arriver.

Je me dépêche d'aller poser le verre dans l'évier avant d'aller discrètement refermer le peignoir de mon amie. Elle ne dit rien, ronchonne contre ce stupide Paul qui la fuit comme la peste, puis repart vadrouiller pour le trouver.

Pire qu'une enfant quand on y repense.

— Au fait, j'avais un rendez-vous ce soir mais je vais annuler, indiqué-je à Mme Dubois. Vous voulez que je commande une pizza ? On peut chercher un podcast à écouter ou jouer à un jeu mais vous me battez tout le temps...

Mme Dubois émerge de la salle de bain, tenant fermement une touffe blanche entre les bras. Paul est tellement gros par rapport à elle, tellement poilu aussi, que je vois à peine ses yeux bleus qui me supplient de venir l'aider. Dommage pour lui, ma voisine n'est pas du genre à lâcher prise quand elle attrape quelque chose !

— Pardon ? Tu vas annuler ? Ma petite, c'est hors de question ! Tu ne vas pas t'arrêter de vivre à cause d'une vieille dame qui ne voit rien. Rendez-vous avec Godzilla ?

Je ricane, incapable de cacher le sourire qui s'étire sur mes lèvres. Heureusement qu'elle ne peut pas voir ma tête niaise, je suis sûre qu'elle est atroce.

— Non, un autre homme. Mais je peux annuler. Ça m'arrangerait en fait... marmonné-je pour moi-même.

Mme Dubois traverse la pièce en faisant de tous petits pas pour aller dans le canapé où elle disparaît presque entre les coussins. Légèrement heureux d'être forcé à dormir, Paul s'installe sur le ventre de la vieille femme l'air de dire : « mouais, j'avais pas le choix... ».

— Non, tu sors, et moi je m'occupe du chat.

— Mais-

— Pas de mais ! J'avoue que je suis un peu déçue que ça ne soit pas Godzilla — non, Jake, j'ai dit que j'arrêtais de l'appeler ainsi — mais bon, il faut bien que tu soulages tout ça.

— Tout ça ?

À peine le temps de mettre ma main sur ma bouche que je me maudis d'avoir dit ça. Mme Dubois part au quart de tour, m'expliquant pendant cinq bonnes minutes l'importance d'entretenir la mécanique et la fraîcheur de mes espaces personnels. Je ne l'écoute pas, à la fois choquée, pas étonnée plus que ça, et amusée parce qu'en vrai, entendre une vieille dame parler de sexe sans s'arrêter, c'est aussi drôle que gênant.

— Vous avez fini ? demandé-je en haussant les sourcils.

— Je pense que Jake te déboucherait bien la plomberie...

— Ok ! Je m'avoue vaincue ! Je vais à ce rendez-vous rien que pour ne plus vous entendre !

Je capitule ce qui fait bien rire la femme, fière d'elle. Même si je ne peux pas lire son regard, son visage est devenu très expressif avec le temps ce qui nous laisse facilement deviner ce qu'elle ressent. Pour deviner ce qu'elle pense néanmoins, bonne chance.

Je file prendre une douche qui fait du bien à ma tête groggy par la veille et enfile une jolie robe chaude verte. Les souvenirs d'hier soir me reviennent en pleine gueule comme depuis le début de la journée, la honte dans les veines. Claire m'a évidemment tout raconté comme j'ai oublié une bonne partie de mon état, surtout la partie post salle de bain. En fait, je ne me souviens absolument pas d'avoir été trainé au sol par ma meilleure amie, ou encore balancée sur le lit par Jake sous les rires d'Emma.

Honte.

C'est le seul mot qui trotte dans ma tête depuis ce matin.

Pour me rassurer, je me dis que ça arrive à tout le monde et que ça sera vite oublié. Mais en vrai, je suis déçue de moi-même plus qu'autre chose. En général, je me gère très bien sur l'alcool, a contrario de Claire qui se laisse plus souvent aller, mais là, je n'ai rien senti. Plus qu'à espérer que cette soirée soit enfouie à jamais dans nos mémoires et qu'elle n'en sorte pas.

— Waouw, tu es ravissante !

Mme Dubois passe la tête par l'encadrement de la porte, un sourire aux lèvres.

— Vous ne pouvez rien voir ! Votre avis est biaisé.

— Je n'ai pas besoin de voir pour savoir que tu es belle. Et ce dans toutes les formes de beauté qui existent.

Ses paroles me touchent bien que je ne sois pas forcément d'accord avec elle. Je ne me trouve pas laide mais ce n'est pas pour autant que je me trouve belle. Comme tout le monde, j'ai des complexes. La seule chose que je souhaite, ce que je sois réellement belle à l'intérieur. Pour moi, c'est le plus important.

— Vous pensez que le vert et le mauve vont ensemble ?

— Pourquoi tu me demandes ça ? Je ne suis pas vraiment sûre de connaitre ces couleurs tu sais.

— Ah oui, zut, ce n'est pas grave.

— Mais pourquoi ?

— Ma robe est verte, mes cheveux mauves. Je me dis que ça fait peut-être trop...

— Est-ce que tu aimes ?

— Pardon ?

— Est-ce que là, quand tu te regardes dans le miroir, tu te trouves belle ?

Face à moi, dans le miroir, une jeune femme à la peau trop claire me dévisage de ses yeux bleus qu'elle a longtemps trouvé trop foncés pour être beaux. Ses cheveux mauves sont pétants grâce à la récente coloration, ils tombent dans un carré long sur ses épaules. Lisses, légèrement encore humides. Son nez est droit, un peu gros je trouve, mais il brille grâce au maquillage qu'elle a mis au bout. Ses lèvres pulpeuses juste comme il faut sont décorées d'une fine couche de gloss pailletée, et ses yeux sont juste un peu maquillés pour ne rien alourdir. Ses sourcils mériteraient un petit coup de pince à épiler mais bon, la flemme a dû l'emporter.

Ses clavicules sortent un peu malgré la robe verte qui remonte jusque dans son cou, masquant son décolleté qui ne dévoile pas grand-chose parce qu'elle n'a pas une poitrine très généreuse. Sa robe la moule jusqu'aux genoux, dévoilant son ventre pas lisse qu'elle a longtemps détesté mais avec qui elle a fait la paix — uniquement si elle met un short gainant en-dessous.

— Je pense qu'il y a pire, avoué-je avec hésitation.

— C'est-à-dire ?

— Ça va, j'ai fait mieux.

— Donc tu es belle.

— Je n'irai pas jusque là.

Mme Dubois hoche la tête et disparaît de la porte, sûrement pour retourner dans le salon.

Je me sens toute drôle, comme hors de mon corps. Je ne sais pas si ce moment d'introspection m'a fait du bien ou du mal, mais je la sens. Je la sens la nouvelle Line.

***

Nils est un très bel homme, je ne vais pas le nier. Charmant, blagueur et de bonne compagnie, il m'a emmené dans un petit restaurant qui ne paye pas de mine mais où nous avons vraiment passé un superbe moment. Plutôt petit, pas très musclé mais pas fin non plus, ses cheveux bruns bien coiffés, il a un charme évident qui doit plaire à beaucoup de filles je pense, cependant, quelque chose m'empêche de le voir comme plus qu'un homme avec qui je passe une bonne soirée.

Il m'a tenu la porte, ne m'a pas incendiée quand je lui ai dit qu'on faisait moitié-moitié pour le repas, il ne m'a pas coupé la parole une seule fois. Il ne m'a pas non plus incendié en me traitant de profiteuse devant tous les clients, n'a pas cherché à reconquérir son ex. Il ne m'a pas non plus emmené dans un drôle d'endroit comme nous marchons le long de la Seine, rien de tout ça. Mais je ne sais pas pourquoi, je ne ris pas pour de vrai. Tout sonne faux autour de moi, comme si j'avais planifié le moindre de mes gestes, la moindre de mes paroles.

Oui, son travail de médecin légiste m'a intriguée et il a eu des centaines d'anecdotes à me dire. Oui, savoir qu'il ne vient pas de Paris mais du Luxembourg m'a aussi intriguée que quand il m'a avoué avoir la phobie du chou-fleur. Oui, son sourire blanc m'a fait rougir une fois et je l'ai laissé me tenir par le bras pendant que nous nous baladons au bord de l'eau.

Mais non, mon cœur ne s'emballe pas comme avec lui.

Non, il n'a pas mis mes talons en se pavanant comme un mannequin surentrainé. Non, il ne m'a pas emmené sous la petite pluie qui a éclatée tout à l'heure mais m'a mise à l'abri. Non, il ne m'a pas proposé d'aller courir malgré ma gueule de bois.

Non, parce qu'il n'est pas Jake. Et ça me rend folle de penser ça.

— Et donc, tu travailles demain matin ? Je pourrai passer te voir si tu veux.

— Hum, ne vas pas trop vite s'il-te-plait, on verra bien ! Mais oui, malheureusement j'ai un chat qui me tuerait si je n'avais pas l'argent pour ses croquettes qui me coutent une blinde chez le véto.

Nils rit doucement avant d'essayer de glisser discrètement sa main dans la mienne. Je ne sais pas pourquoi je me laisse faire mais ça me gêne. Je ne me sens pas à l'aise. Ce simple geste m'hérisse directement le poil, comme si mon corps m'indiquait qu'il n'aime pas du tout ce contact.

— Paul, c'est ça ?

— C'est ça, tu as bien retenu, c'est chouette.

Merde, je ne mets aucune dynamique dans ma réponse, il va se rendre compte que quelque chose ne va pas. Mais qu'est-ce que je vais lui répondre s'il me pose la question ? Il est top, je n'ai rien à dire...

Il commence à raconter l'histoire d'un chat trouvé dans la rue mais je n'écoute plus. Je réponds vaguement quand il me sollicite, mais ma tête est ailleurs, focalisée sur sa paume dans la main moite. Je n'arrête pas de remettre ma robe en place, l'impression qu'elle remonte, que les gens qui courent ou qui se baladent comme nous me dévisagent. L'eau de la Seine est trop noire, la nuit trop froide, Paris trop brouillant et silencieux à la fois.

— Tu m'écoutes ?

Alertée, je me tourne vers Nils qui me regarde, un air amusé au visage. Ses yeux bruns semblent briller à cause des réverbères, mais il n'a rien qui pétille réellement.

— Oui, désolée, je suis un peu fatiguée ce soir. Je vais sûrement rentrer.

— Avant, je voulais te dire que j'ai passé une excellente soirée.

Moi aussi ! Oh, tu n'as pas froid ? Ça caille ce soir quand même... On se dit à plus tard ? Check ! Bonne nuit !

— Moi aussi, c'était sympa.

Je ne mens pas, j'ai passé une super soirée. Nils est vraiment un super type, mais malheureusement pour lui, j'en ai un autre qui me trotte dans la tête.

Nils bouge, se met en face de moi tout en lâchant ma main. Bizarrement, l'ambiance est plus lourde d'un coup. Déjà que je ne me sentais pas à l'aise, le regard que porte cet homme sur moi a changé en l'espace de deux secondes. Sombre, malsain... Je sens mes mains se mettre à trembler, mon cœur s'emballer et mon cerveau buguer. Le coup d'œil que je jette autour de moi ne me rassure en rien, la rue est vide. Punaise, en pleine soirée à Paris sur les quais de Seine, comment c'est possible !?

Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche que Nils prend ma mâchoire en coupe et plaque ses lèvres sur les miennes. Je recule, choquée de ce contact brutal, mais mon corps tombe sur un mur. Je suis coincée entre lui et cette masse derrière moi avec une curieuse envie de pleurer.

Nils ne sait pas embrasser, je ne peux pas m'empêcher de grimacer, répugnée d'avoir sa bouche sur la mienne. Mon cœur bat si fort que j'ai l'impression que je vais tomber dans les pommes.

D'un coup, il s'éloigne légèrement pour m'observer, toujours cette drôle de lueur dans le regard.

Il me fait peur.

Mon cerveau passe en mode automatique, arrêtant de faire trembler mes membres. La grimace que je tire devrait lui indiquer que je n'ai pas aimé, que je ne veux pas, alors pourquoi il s'approche encore ?

J'essaye de me reculer, de tourner la tête, incapable de prononcer un seul mot, mais il est plus fort. Nils revient à la charge en serrant mes joues pour presser ses lèvres humides sur les miennes gercées.

Si je ferme fort les yeux, ça va s'arrêter. Il va disparaître comme dans un rêve d'enfant.

Malheureusement, ce n'est pas le cas. Nils ne presse pas son corps contre moi, ce qui est déjà un miracle, mais sa langue force le passage dans ma bouche. Je ne peux rien faire, il s'immisce dedans, tournant dans tous les sens à m'en faire gerber.

Je suis tétanisée. J'ai beau crier à mon corps de bouger, je suis coincée dans tous les cas, priant pour que ça s'arrêter. C'est horrible.

J'ai l'impression d'avoir une limace dans la bouche.

Il va sûrement remarquer que je suis statique, que je ne réponds pas du tout et que je suis tétanisée. Il va s'en rendre compte et s'excuser. Il va libérer ma bouche.

Il ne le fait pas. Sa langue qui tourne dans ma bouche continue, ça dure une éternité avant qu'il ne daigne s'écarter.

J'ai envie de pleurer.

Il a l'air satisfait, réellement heureux. La seule chose que j'arrive à faire, c'est m'essuyer discrètement les lèvres du revers de la main, avec encore la sensation de ce truc dans ma... rien que d'y penser, un violent frisson me parcourt.

— Tu veux venir chez moi ? demande-t-il innocemment en essayant de prendre ma main que je lui refuse.

La première chose que je fais, c'est calmer ma respiration en m'écartant du mur pour être enfin à l'air libre. Nils sourit toujours, sans remarquer que je ne vais pas bien du tout. Au contraire, il se rapproche de moi avec ce regard qui me glace le sang.

Non, pas encore.

— Je... désolé... je dois y aller...

— Tu es sûre que tu ne veux pas ?

— Non ! Rentre chez toi, moi chez moi. Je travaille demain, je dois y aller.

Je recule mais il avance toujours, je le salue de la main mais il esquisse un pas vers moi, plus précipité.

— Laisse-moi au moins te dire au revoir.

Une petite larme coule le long de ma joue.

— Au revoir !

Je prends mes jambes à mon coup, faisant marche arrière. Il ne me suit pas. Parce qu'au fond, il n'a même pas remarqué que je ne voulais pas. Mais je ne l'ai pas dit. J'étais trop naïve je pense. Je ne voulais rien de plus avec lui, peut-être que je lui ai laissé penser le contraire ? C'est vrai, un rencard ça porte à confusion en vrai. Ce n'est pas de sa faute. La mienne sûrement. Je dois arrêter d'être naïve. Ce n'était rien après tout ! Le nombre de mes amis qui couchent à droite à gauche ou embrassent en soirée comme si de rien n'était...

Les images et la sensation de sa langue me font lâcher un sanglot.

Merde, un taxi. Vite avant que je ne me mette à pleurer en pleine rue.

***

Je vérifie que personne ne m'a suivi avant de fermer la porte du hall de mon immeuble. Je n'allume pas la lumière et me laisse avancer jusqu'aux escaliers. J'ai l'impression d'être vide.

Soudain, mon téléphone se met à vibrer dans mon petit sac à main en cœur noir qui est plus joli que pratique. Je l'attrape et regarde le numéro.

Nils.

Mon téléphone tombe au sol comme s'il avait brulé ma main.

Je le regarde sonner.

Pendant trois longues minutes.

Jusqu'à ce que son nom disparaisse de l'écran.

C'est un bruit dans l'escalier qui me fait sursauter.

— Line ?

Jake me regarde en fronçant le nez, lunettes de vue dessus. Il est en pyjama, chaussons au pied, et tente de me voir malgré la pénombre.

— Qu'est-ce que tu fais là ? Mme Dubois est venue me voir parce que tu n'étais pas rentré et que tu ne répondais pas à ses messages. Normal, elle s'est trompée de personne mais bref, j'ai entendu la porte du hall comme ma fenêtre de chambre était ouverte et...

Il s'interrompt, son regard tombant sur mon téléphone au sol qui ne cesse de vibrer à cause des messages que je reçois. Tous de la même personne.

Je suis incapable de le récupérer.

En silence, Jake descend les dernières marches qui me séparent de lui et vient récupérer l'appareil qu'il me tend. Comme je n'arrive pas à bouger, il hoche la tête et le glisse lui-même dans mon sac avant de fermer doucement la glissière.

— Est-ce que tu vas bien, Line ?

Sa voix grave est sérieuse, inquiète presque.

— Non, répondis-je tout bas.

Il ne dit rien, ne tente pas de me prendre dans ses bras en voyant mes membres se mettre à trembler de nouveau. Je revois la limace dans ma bouche, un frisson me secoue.

— Tu veux qu'on aille parler ?

J'hoche lentement la tête, retenant les larmes qui menacent de couler depuis mon trajet en taxi, puis Jake ouvre la marche en remontant l'escalier. Prenant mon courage à deux mains, je le rejoins dans le silence.

Nous montons tous les étages en silence sans allumer la lumière ce qui me va étant donné que je pleure comme un bébé. Jake attrape quelque chose en plafond et je devine qu'il s'agit de la trappe qui mène au toit. Sans un mot, il déplie l'échelle puis grippe à l'extérieur comme si tout était normal. Je le suis à mon tour, les yeux embués de larmes, puis c'est la contemplation.

De nuit, les toits de Paris sont magnifiques. C'est dommage que ma soirée soit si mauvaise et gâche ce moment.

Mon ami s'installe un peu plus loin, m'invite à venir m'assoir avec lui. Je m'exécute, ne voyant pas trop la ville à cause des larmes qui flouttent les lumières. Je dois avoir du mascara partout, c'est horrible.

Jake ne parle pas de suite, respectant mon silence et le torrent que je déverse. Au bout de quelques minutes, je suis recroquevillée sur moi-même à tenir mes genoux entre mes bras quand il me parle enfin.

— Je peux ?

Il m'ouvre ses bras, attendant ma réponse que j'ai du mal à sortir alors je hoche la tête. Jake m'entoure de ses bras et je me cale contre lui, reniflante et humide. Encore une fois, un doux silence s'installe et je ferme les yeux. Sa chaleur me réchauffe un peu et ses bras me réconfortent, me faisant oublier ce dont je ne veux plus penser.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Tu n'es pas obligé de m'en parler, évidemment.

Je ne sais même pas par où commencer. En fait, je ne sais même pas si j'ai envie de me remémorer cette soirée qui avait commencé si bien, mais terminé si mal.

— Ne m'en parle pas, me devance-t-il en me serrant un peu plus contre son torse. Ce n'est pas le moment, tu dois être fatiguée. Tu sais quoi ? Pleure. Je pense que ça ne peut te faire que du bien vu ton état. Demain, je te ferai des pancakes, ok ?

J'hoche la tête une nouvelle fois puis un sanglot s'échappe et il me serre plus fort encore. Il a raison, parler est trop dur. Je me contenterai de ses bras et de Paris endormit le temps que mon esprit s'en remette... ou pas.

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