CHAPITRE 12. MONDINGUS
Ron était de retour dans la cuisine, l'air boudeur.
- Ils sont ensemble. Dit il d'un ton amer. Hermione et Sirius.
- Ah, dit Harry, qui s'en doutait et était occupé par la lecture de l'article sur Dumbledore.
- Pourquoi elle l'a fait venir ? On était bien tous les trois !
Harry soupira.
- Elle a cru bien faire. Elle n' avait pas prévu de le faire venir, lui. Répondit il avec exaspération.
- Je sais, mais.. Elle aurait pu essayer de le renvoyer non ?
Harry haussa les épaules.
Sa lecture ne lui avait pas apporté les réponses à ses, questions. Il était encore plus troublé, à présent.
il s’apprêtait à reposer le journal et à demander leur opinion à Ron et à Hermione, un crac !
assourdissant résonna dans la cuisine.
Pour la première fois depuis trois jours, Harry avait complètement oublié Kreattur. Sa première
pensée fut que Lupin avait à nouveau fait irruption dans la maison et pendant une fraction de seconde,
il ne parvint pas à distinguer quoi que ce soit dans l’enchevêtrement de membres gesticulants qui était
apparu juste à côté de lui. Il se leva d’un bond tandis que Kreattur se dégageait puis s’inclinait très bas
devant Harry en annonçant de sa voix rauque :
— Kreattur est revenu avec le voleur Mondingus Fletcher, maître.
Mondingus se releva précipitamment et sortit sa baguette. Mais Harry fut trop rapide pour lui.
— Expelliarmus !
La baguette de Mondingus fut projetée dans les airs et Hermione la rattrapa. Le regard fou, il se rua
vers l’escalier.
Ron le plaqua comme au rugby et Mondingus s’abattit sur le sol de pierre dans un craquement
étouffé.
— Quoi ? hurla-t-il en se tortillant pour essayer de se libérer de la prise de Ron. Qu’est-ce que j’ai fait ? Lancer sur moi un maudit elfe de maison, à quoi vous jouez, qu’est-ce que j’ai fait, laissez-moi partir, laissez-moi ou alors…
— Vous n’êtes pas tellement en position de proférer des menaces, répliqua Harry.
Hermione et Sirius surgirent aussitôt,leur baguette brandit..
Il était torse nu, et le tee shurt d'Hermione était à l'envers.
Harry jeta le journal sur la table, traversa la cuisine en quelques enjambées et se laissa tomber à genoux à côté de Mondingus qui cessa aussitôt de se débattre, l’air terrifié. Ron se releva, le souffle court, et regarda Harry pointer délibérément sa baguette sur le nez de Mondingus. Il empestait la vieille sueur et la fumée de tabac. Ses cheveux étaient emmêlés, sa robe tachée.
— Kreattur présente ses excuses pour avoir tardé à ramener le voleur, maître, coassa l’elfe. Fletcher
s’y connaît pour échapper à la capture, il dispose de nombreuses cachettes et de beaucoup de
complices. Mais Kreattur a fini par le coincer.
— Tu as fait un très bon travail, Kreattur, répondit Harry et l’elfe s’inclina à nouveau. On a quelques
questions à vous poser, reprit-il à l’adresse de Mondingus.
— J’ai paniqué, d’accord ? s’écria celui-ci. Depuis le début, je ne voulais pas venir. Sans vouloir t’offenser, mon bonhomme, je n’ai jamais eu l’intention de mourir pour toi et tout d’un coup, voilà que j’avais ce maudit Tu-Sais-Qui aux trousses, n’importe qui aurait fichu le camp à ma place, j’avais toujours dit que je ne voulais pas y aller…
— Pour votre information, répliqua Hermione, sachez que personne d’autre parmi nous n’a transplané.
— Eh bien, vous faites une jolie bande de héros mais moi, je n’ai jamais prétendu que j’étais prêt à me faire tuer…
— La raison pour laquelle vous avez abandonné Fol Œil ne nous intéresse pas, coupa Harry qui approcha sa baguette un peu plus près des yeux cernés et injectés de sang de Mondingus. Nous savions déjà que vous étiez une petite canaille indigne de confiance.
— Alors pourquoi tu envoies des elfes à mes basques ? C’est encore à cause de cette histoire de coupes ? Il ne m’en reste plus une seule, sinon, tu aurais pu les avoir…
— Il ne s’agit pas non plus des coupes, mais vous chauffez, répondit Harry. Taisez-vous et écoutez- moi.
C’était une sensation merveilleuse d’avoir quelque chose à faire, de se trouver face à quelqu’un à qui
on pouvait arracher une parcelle de vérité. La baguette de Harry était si près de l’arête de son nez que
Mondingus s’était mis à loucher pour ne pas la perdre de vue.
— Lorsque vous avez vidé cette maison de tous ses objets de valeur…, commença Harry. Mais Mondingus l’interrompit à nouveau :
— Sirius se fichait bien de toute cette camelote…
Il y eut un bruit de pas précipités, un éclat de cuivre étincelant, un clang ! retentissant et un hurlement
de douleur : Kreattur s’était rué sur Mondingus et lui avait abattu une casserole sur la tête.
— Empêche-le, empêche-le, il faudrait l’enfermer, celui-là ! s’écria Mondingus en se recroquevillant
lorsqu’il vit Kreattur lever à nouveau la lourde casserole.
Un lent sourire éclaira le visage de Sirius.
- Bien joué. Tu remontes dans mon estime Kreattur.
Celui ci lui adressa un regard méprisant, mais ne répondit pas.
— Kreattur, non ! lança Harry.
Les bras frêles de l’elfe tremblaient sous le poids de la casserole qu’il tenait toujours en l’air.
— Peut-être encore une fois, maître Harry, pour porter bonheur ?
Ron éclata de rire.
— Il faut qu’il reste conscient, Kreattur, mais si nous avons besoin d’arguments frappants, c’est toi
qui lui en feras l’honneur, répondit Harry.
— Merci beaucoup, maître, dit Kreattur.
- Pffff, moi il ne m'a jamais parlé comme ça. Grogna Sirius.
- C'est que monsieur Sirius ne le méritais pas.
Sirius fit mine de le frapper, Mais Hermione lui saisit le bras.
- NON ! Ne le frappe pas.
Il soupira et baissa la main.
- Tu vois Kreattur, les né moldu sont plus gentil avec toi que les sang pur que tu aimes tant.
- Il y a des sang pur qui valent moins que les sang de... Né moldu. Se reprit t'il.
- Oui, répliqua Sirius, Moi, par exemple.
- Bon, Sirius, ça suffit ! On est pas là pour te voir régler tes comptes
avec Kreattur.
Comme pour appuyer les dires de Harry, Hermione donna un coup de coude dans les côtes de Sirius.
- Aie, OK, j'ai rien dit. Alors, dit il en se tournant vers Mondingus. Qu'est ce que tu as à nous dire, sale petit voleur.
— Lorsque vous avez dépouillé cette maison de tous les objets de valeur que vous pouviez y trouver,
reprit Harry, vous avez pris un tas de choses dans le placard de la cuisine. Il y avait notamment un médaillon.
Harry sentit brusquement sa bouche s’assécher. Il percevait la tension mêlée d’excitation de Ron, d'Hermione et de Sirius.
— Qu’avez-vous fait de ce médaillon ?
— Pourquoi ? demanda Mondingus. Il vaut cher ?
— Vous l’avez toujours ! s’écria Hermione.
— Non, il ne l’a plus, dit Ron, perspicace. Il se demande simplement s’il n’aurait pas pu en tirer plus
d’argent.
— Plus d’argent ? répliqua Mondingus. Ça, ce n’aurait pas été difficile… Je l’ai laissé pour rien,
figurez-vous. Pas le choix.
— Qu’est-ce que vous voulez dire ?
— Je vendais des choses sur le Chemin de Traverse et là-dessus, elle est arrivée en me demandant si
j’avais une licence pour le commerce des objets magiques. Fichue fouineuse. Elle allait me coller une
amende mais le médaillon lui a tapé dans l’œil et elle m’a dit qu’elle allait le prendre, qu’elle me laisserait tranquille pour cette fois, et que je pouvais m’estimer heureux.
— Qui était cette femme ? interrogea Harry.
— Sais pas, une quelconque harpie du ministère.
Mondingus réfléchit un instant, le front plissé.
— Une petite bonne femme avec un nœud sur la tête. Il fronça les sourcils et ajouta : — Elle avait l’air d’un crapaud.
Harry abaissa sa baguette. Elle heurta au passage le nez de Mondingus et projeta des étincelles rouges
sur ses sourcils qui prirent feu.
— Aguamenti ! s’écria Hermione.
Un jet d’eau jaillit de sa baguette, inondant Mondingus qui se mit à tousser et à crachoter.
Harry leva les yeux et vit sur les visages de Ron et d’Hermione le reflet de sa propre stupeur. Les
cicatrices de sa main droite semblaient le picoter à nouveau.
À mesure qu’avançait le mois d’août, la pelouse en friche, au milieu du square Grimmaurd, s’était
desséchée sous le soleil pour n’être plus qu’un carré d’herbe roussie et craquante. Dans les maisons
environnantes, personne n’avait jamais aperçu les habitants du numéro 12.
Les Moldus qui habitaient
l’endroit s’étaient depuis longtemps accoutumés à l’amusante erreur de numérotation qui avait placé
le numéro 11 à côté du 13.
À présent, cependant, le square Grimmaurd attirait des visiteurs qui semblaient très intrigués par cette
anomalie. Il se passait rarement une journée sans qu’une ou deux personnes arrivent sur la place en
n’ayant d’autre but, apparemment tout au moins, que de s’appuyer contre les grilles situées devant les
numéros 11 et 13 pour contempler la jointure entre les deux maisons. Ces observateurs n’étaient jamais les mêmes deux jours de suite, mais tous avaient l’air d’éprouver la même aversion pour les vêtements normaux. La plupart des Londoniens qui les croisaient étaient habitués aux tenues excentriques et n’y prêtaient guère attention, mais parfois, l’un d’eux jetait un regard en arrière en se
demandant qui donc pouvait bien porter d’aussi longues capes par une chaleur pareille.
Ces visiteurs ne paraissaient pas tirer grande satisfaction de leurs longues attentes. Il arrivait que l’un d’eux fasse un pas en avant d’un air surexcité, comme s’il avait enfin vu quelque chose d’intéressant, mais il laissait aussitôt retomber son élan, visiblement dépité.
Le premier jour de septembre, les curieux vinrent plus nombreux que jamais. Une demi-douzaine d’hommes vêtus de longues capes se tenaient là, silencieux et attentifs, le regard toujours fixé sur les maisons des numéros 11 et 13, mais ce qu’ils étaient venus chercher continuait apparemment de leur échapper.
Alors que le soir approchait, apportant avec lui, pour la première fois depuis des semaines, une averse de pluie froide très inattendue, survint l’un de ces inexplicables moments où ils semblaient
avoir enfin aperçu quelque chose d’intéressant. Un homme au visage tordu tendit le doigt et son
compagnon le plus proche, un petit homme grassouillet au visage blafard, se rua aussitôt en avant,
mais un instant plus tard, ils étaient tous deux retombés dans leur habituelle passivité, l’air déçus et
contrariés.
Pendant ce temps, au numéro 12, Harry venait de pénétrer dans le hall de la maison. Il avait failli perdre l’équilibre en transplanant sur la dernière marche du perron, juste devant la porte d’entrée, et
pensa que les Mangemorts avaient peut-être aperçu son coude, brièvement exposé. Refermant
soigneusement la porte derrière lui, il ôta sa cape d’invisibilité, la replia sur son bras et se hâta de traverser le hall sinistre en direction de la porte qui donnait accès au sous-sol. Il tenait à la main un exemplaire volé de La Gazette du sorcier.
L’habituel murmure de « Severus Rogue ? » l’accueillit, il sentit le courant d’air glacé souffler sur lui
et pendant un instant, sa langue s’enroula.
— Ce n’est pas moi qui vous ai tué, dit-il dès qu’elle eut repris sa position normale.
Puis il retint son souffle pendant que la silhouette du maléfice explosait. Parvenu au milieu de l’escalier qui menait à la cuisine, à bonne distance des oreilles de Mrs Black et à l’abri du nuage de poussière, il annonça
— J’ai des nouvelles et elles ne vont pas vous plaire.
La cuisine était presque méconnaissable. À présent, la moindre petite surface brillait de tous ses feux : les marmites et les casseroles de cuivre avaient été astiquées et luisaient d’une teinte rosée, la table de bois miroitait, les coupes et les assiettes déjà disposées pour le dîner étincelaient à la lumière du feu qui ronflait joyeusement dans la cheminée et sur lequel bouillonnait un chaudron. Mais le changement
le plus spectaculaire était sans nul doute celui de l’elfe de maison qui se précipitait maintenant vers Harry, vêtu d’une serviette d’un blanc de neige, les poils de ses oreilles aussi propres et duveteux que du coton hydrophile, le médaillon de Regulus sautillant sur sa poitrine.
— Voulez-vous enlever vos chaussures, s’il vous plaît, monsieur Harry, et vous laver les mains avant
le dîner ? coassa Kreattur.
Il prit la cape d’invisibilité et alla la suspendre à un crochet fixé au mur, à côté de robes démodée, fraîchement nettoyées.
— Qu’est-ce qui s’est passé ? demanda Ron avec appréhension.
Hermione, Sirius et lui étaient occupés à examiner une liasse de feuilles griffonnées et de cartes tracées à la main, étalées à un bout de la table.
Levant les yeux, ils regardèrent Harry s’avancer à grands pas et jeter le journal sur leur tas de parchemins.
Sur la première page, un homme au visage familier, le nez crochu, les cheveux noirs, les regardait
sous une manchette annonçant :
SEVERUS ROGUE CONFIRMÉ
COMME DIRECTEUR DE POUDLARD
— Non ! s’exclamèrent Ron, Hermione et Sirius.
Hermione fut la plus rapide. Elle s’empara du journal et commença à lire à haute voix l’article qui
accompagnait la photo :
— Severus Rogue, depuis longtemps maître des potions à l’école de sorcellerie de Poudlard, a été
promu aujourd’hui au rang de directeur. Cette nomination constitue le changement le plus important
parmi ceux intervenus dans la réorganisation du personnel de l’antique établissement. À la suite de la démission de l’ancien professeur d’étude des Moldus, ce poste sera désormais confié à Alecto Carrow,
tandis qu’Amycus, le frère de cette dernière, sera chargé de la défense contre les forces du Mal.
« Je me réjouis que l’occasion me soit donnée de maintenir et de perpétuer les plus hautes valeurs et traditions de la sorcellerie…»
- Comme de commettre des meurtres ou de couper les oreilles des gens,
par exemple ! Rogue, directeur ! Rogue dans le bureau de Dumbledore – par le caleçon de Merlin !
s’exclama soudain Hermione d’une voix perçante qui fit sursauter Harry, Ron et Sirius.
Elle bondit de sa chaise et se rua hors de la cuisine en criant :
— Je reviens dans une minute !
— Le caleçon de Merlin ? répéta Ron, l’air amusé. Elle doit être dans tous ses états.
Il prit le journal et lut en détail l’article consacré à Rogue.
— Les autres profs n’accepteront jamais ça. McGonagall, Flitwick, Chourave, tous connaissent la
vérité, ils savent comment Dumbledore est mort. Ils ne voudront pas de Rogue comme directeur. Et
d’abord, qui sont ces Carrow ?
— Des Mangemorts, répondit Harry. Il y a des photos d’eux en pages intérieures. Ils se trouvaient au
sommet de la tour quand Rogue a tué Dumbledore, ils sont tous copains.
Harry tira une chaise et poursuivit d’un ton amer :
— Je ne vois pas ce que les autres profs pourraient faire. Si le ministère et Voldemort sont derrière Rogue, ils auront le choix entre continuer à enseigner ou passer quelques joyeuses années à Azkaban – et encore, s’ils ont de la chance. J’imagine qu’ils préféreront rester pour protéger les élèves.
Kreattur revint vers la table d’un air affairé, une grande soupière entre les mains. À l’aide d’une louche, il remplit de soupe les bols impeccables, en sifflotant entre ses dents.
— Merci, Kreattur, dit Harry qui retourna La Gazette pour ne pas avoir la tête de Rogue sous les yeux. Enfin, au moins, on sait exactement où se trouve Rogue, maintenant.
Il prit une cuillerée de soupe. La qualité de la cuisine de Kreattur s’était améliorée de manière
spectaculaire depuis qu’il avait reçu en cadeau le médaillon de Regulus. Jamais Harry n’avait goûté une soupe à l’oignon aussi délicieuse.
— Il y a encore toute une bande de Mangemorts qui surveillent la maison, dit-il à Ron en continuant
de manger. Ils sont plus nombreux que d’habitude. On dirait qu’ils espèrent nous voir sortir avec nos
bagages pour aller prendre le Poudlard Express.
Ron jeta un coup d’œil à sa montre.
— J’y ai pensé toute la journée. Le train est parti il y a près de six heures. Ça fait bizarre de ne pas être dedans, tu ne trouves pas ?
Harry eut l’impression de revoir la locomotive rouge vif que Ron et lui avaient un jour suivie par la
voie des airs, scintillant parmi les prés et les collines, telle une chenille écarlate qui rampait au- dessous d’eux. Il était sûr qu’en cet instant, Ginny, Neville et Luna étaient assis ensemble, se demandant peut-être où ils se trouvaient, Ron, Hermione et lui, ou discutant de la meilleure façon de
saper le nouveau régime de Rogue.
— Tout à l’heure, les Mangemorts ont failli me voir au moment où je rentrais, reprit Harry. J’ai mal
atterri sur la marche et la cape a glissé
— Ça m’arrive tout le temps. Ah, la voilà, ajouta Ron en se dévissant le cou pour voir Hermione revenir dans la cuisine. Et maintenant, par tous les caleçons les plus avachis de Merlin, peux-tu nous expliquer ce que tu fabriques ?
— Je me suis souvenue de ça, haleta Hermione.
Elle avait à la main un grand tableau encadré qu’elle posa par terre avant de prendre sur le buffet son petit sac en perles. Elle l’ouvrit et entreprit de faire entrer le tableau à l’intérieur. Bien qu’il fût manifestement trop grand pour tenir dans le sac minuscule, il disparut en quelques secondes dans ses vastes profondeurs, comme toutes les autres choses qui y étaient rangées.
— Phineas Nigellus, expliqua Hermione en jetant sur la table le petit sac qui produisit à nouveau un
bruit sonore d’objets entrechoqués.
— Pardon ? dit Ron.
Mais Harry, lui, avait compris. L’image peinte de Phineas Nigellus avait la faculté de passer de son
portrait du square Grimmaurd à celui qui était accroché dans le bureau du directeur de Poudlard : la pièce circulaire, au sommet d’une tour, où Rogue était sans aucun doute assis en ce moment même, triomphant à l’idée d’avoir en sa possession la collection de fragiles instruments d’argent de Dumbledore, la Pensine en pierre, le Choixpeau magique et, à moins qu’elle n’ait été déplacée vers un autre lieu, l’épée de Gryffondor.
— Rogue aurait pu envoyer Phineas Nigellus regarder ce qui se passe ici, expliqua Hermione à Ron
tandis qu’elle se rasseyait à la table. Mais maintenant, s’il essaye, tout ce que Phineas verra, c’est
l’intérieur de mon sac.
— Bien pensé ! s’exclama Ron, impressionné.
— Merci, dit Hermione avec un sourire en prenant son bol de soupe. Alors, Harry, qu’est-ce qui s’est
passé d’autre, aujourd’hui ?
— Rien, répondit-il. J’ai surveillé l’entrée du ministère pendant sept heures de suite. Pas la moindre
trace d’elle. Mais j’ai vu ton père, Ron. Il paraît en bonne forme.
Ron hocha la tête, satisfait d’entendre la nouvelle. D’un commun accord, ils avaient estimé trop dangereux de tenter d’entrer en contact avec Mr Weasley quand il entrait dans le ministère ou en sortait car il était sans cesse entouré de collègues.
L’apercevoir de temps en temps était cependant rassurant, même s’il semblait très tendu et anxieux.
— Papa nous a toujours dit que la plupart des gens qui travaillent au ministère utilisent le réseau des
cheminées pour se rendre au bureau, expliqua Ron. C’est pour ça que nous n’avons pas vu Ombrage, elle ne se déplace jamais à pied, elle pense qu’elle est trop importante pour ça.
— Et cette drôle de vieille sorcière avec ce petit sorcier en robe bleu marine ? demanda Hermione.
— Ah oui, le type de la maintenance magique, répondit Ron.
— Comment sais-tu qu’il est à la maintenance ? interrogea Hermione, sa cuillère suspendue en l’air.
— D’après papa, tous les gens du Service de la maintenance magique portent des robes bleu marine.
— Tu ne nous avais jamais raconté ça !
Hermione laissa tomber sa cuillère et fit glisser vers elle la liasse de papiers et de cartes qu’elle étudiait avec Ron et Sirius lorsque Harry était entré dans la cuisine.
— Il n’y a rien sur des robes bleu marine, là-dedans, rien ! s’écria-t-elle en feuilletant fébrilement les
pages.
— Et alors, qu’est-ce que ça change ?
— Ça change tout, Ron ! Si nous voulons pénétrer dans le ministère sans être démasqués alors qu’ils
recherchent forcément d’éventuels intrus, chaque petit détail compte ! Nous en avons parlé longuement. À quoi peuvent bien servir tous ces voyages de reconnaissance si tu ne prends même pas la peine de nous informer…
— Enfin quoi, Hermione, j’ai simplement oublié une petite chose…
— J’espère que tu t’en rends compte : pour nous, il n’y a sans doute pas d’endroit plus dangereux au
monde que le ministère de la…
— Je crois que nous devrions agir dès demain, l’interrompit Harry.
Hermione s’immobilisa, bouche bée. Ron faillit s’étrangler en avalant sa soupe.
— Demain ? répéta Hermione. Tu n’es pas sérieux, Harry ?
— Si, répliqua-t-il. Je pense que même si nous passions encore un mois à rôder autour du ministère, nous ne serions pas mieux préparés que maintenant. Plus on retarde l’opération, plus le médaillon
s’éloigne de nous. Il y a déjà de grands risques qu’Ombrage l’ait jeté. Il est impossible de l’ouvrir.
— À moins, dit Ron, qu’elle y soit parvenue et qu’elle soit maintenant possédée.
— Dans son cas, ça ne changerait rien, elle a toujours été maléfique, fit observer Harry avec un haussement d’épaules.
- Moi je suis partant ! Assura Sirius. J' en ai marre de l' inaction. Et puis, il n'y a plus rien à boire.
Hermione se mordait la lèvre, plongée dans de profondes réflexions.
— Nous savons tout ce qu’il est important de savoir, poursuivit Harry en se tournant vers elle. Nous
savons qu’ils ont interrompu tout transplanage, pour entrer dans le ministère ou pour en sortir. Nous
savons que seuls les fonctionnaires de haut rang sont autorisés à connecter leur maison au réseau des cheminées, car Ron a entendu deux Langues-de-Plomb s’en plaindre. Et nous savons à peu près où se trouve le bureau d’Ombrage puisque toi-même, tu as entendu ce que le barbu disait à son copain…
— « Je monte au niveau un, Dolores veut me voir », récita aussitôt Hermione.
— Exactement, dit Harry. Et on sait que pour entrer, il faut une de ces drôles de pièces, ou de jetons,
ou je ne sais quoi, parce que j’ai vu une sorcière qui en empruntait un à une amie…
— Mais on n’en a pas !
— Si le plan marche, on en aura, assura Harry, très calme.
— Je ne sais pas, Harry, je ne sais pas… Il y a tant de choses qui pourraient aller mal, c’est vraiment
une question de chance…
— Ce sera toujours vrai même si on passe trois mois de plus à préparer notre coup, répliqua Harry. Il
est temps d’agir.
Il savait, d’après l’expression de leurs visages, que Ron et Hermione avaient peur. Lui-même n’était pas très rassuré mais il avait la conviction que le moment était venu de mettre leur plan en application.
Sirius avait l'air détendu, mais ça ne voulait rien dire. Il était impossible de savoir ce qu'il pensait vraiment, derrière le masque impassible qu'il affichait en permanence.
Au cours des quatre semaines précédentes, ils avaient endossé à tour de rôle la cape d’invisibilité
pour aller espionner l’entrée officielle du ministère que Ron, grâce à Mr Weasley, connaissait depuis
l’enfance. Ils avaient suivi des employés qui se rendaient au travail, écouté leurs conversations et
appris, en les observant attentivement, quels étaient ceux dont on pouvait être sûr qu’ils apparaîtraient seuls, chaque jour à la même heure. Parfois, l’occasion leur était offerte de subtiliser La Gazette du sorcier dans l’attaché-case de l’un d’eux. Peu à peu, ils avaient accumulé les cartes rapidement esquissées et les notes qui s’entassaient à présent devant Hermione.
— Très bien, dit lentement Ron. Admettons qu’on fasse ça demain… Je pense que nous devrions y aller tous les trous, Harry, Sirius et moi.
— Ah, non, tu ne vas pas recommencer, soupira Hermione. Je croyais qu’on avait réglé la question.
— Se poster sous la cape à l’entrée du ministère est une chose, Hermione, mais là, c’est différent. Ron tapota du doigt un numéro de La Gazette du sorcier daté de dix jours auparavant.
— Tu es sur la liste des nés-Moldus qui ne se sont pas présentés à l’entretien obligatoire !
— Et toi, tu es censé être en train de mourir d’éclabouille au Terrier ! Si quelqu’un devait ne pas y aller, ce serait Harry. Sa tête est mise à prix dix mille Gallions.
— Très bien, dans ce cas, je resterai ici, répliqua Harry. Si jamais vous arrivez à vaincre Voldemort,
n’oubliez pas de me prévenir, d’accord ?
Tandis que Ron, Hermione et Sirius éclataient de rire, Harry ressentit une douleur à sa cicatrice et plaqua une
main contre son front. Voyant les yeux d’Hermione se plisser, il s’efforça de transformer son geste
pour lui faire croire qu’il dégageait simplement une mèche de cheveux.
— Très bien, mais si nous y allons tous les quatre, nous devrons transplaner séparément, reprit Ron.
Nous ne pouvons plus tenir à quatre sous la cape.
La cicatrice de Harry lui faisait de plus en plus mal. Il se leva. Kreattur se précipita aussitôt.
— Monsieur n’a pas fini sa soupe, Monsieur aimerait-il mieux un savoureux ragoût, ou bien une de
ces tartes à la mélasse qui plaisent tant à Monsieur ?
— Merci, Kreattur, je reviens dans une minute… heu… toilettes.
Conscient qu’Hermione l’observait d’un air soupçonneux, Harry se hâta de monter l’escalier qui menait dans le hall.
- Je prendrais bien du ragoût moi. Dit Sirius.
- Si monsieur Sirius veut du ragoût, il n' a qu'à se le préparer lui même.
- Pfff, saleté d'elfe !
-- Si tu étais plus gentil avec lui..
Sirius leva les yeux au ciel.
- C'est un elfe, Hermione. J' ai pas à être gentil avec lui, et il est sensé obéir.
- Mais il le ferait si tu étais...
- STOP ! ÇA SUFFIT. Si ça te plaît de t'abaisser devant ce... Moins que rien, soit, mais ne me demande pas d'en faire autant. Ce crétin d'elfe a pourri toute mon enfance, il est hors de, question que je le traite comme s'il avait une quelconque importance.
- Rappelle toi que c'est lui qui te prépare ton repas, lave ton linge, et..
- Je peux très bien me débrouiller tout seul. Coupa t'il.
- Très bien, tu as entendu, Kreattur ? Monsieur Sirius n'a pas besoin de toi.
- Kreattur ne s'occupera plus de monsieur Sirius, dans ce cas.
- Parfait ! S'exclama Sirius. D'un ton rogue.
- Très bien ! Répliqua Hermione.
Ils se tenaient face à face, les yeux dans les yeux, tous deux emprunts d'une terrible colère.
Ron sourit. Hermione et Sirius passaient leur temps, à se chamailler, depuis quelques temps. Et cela le réjouissait. Peut être qu'elle finirait par comprendre qu'il n'était pas fait pour elle.
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