Chapitre 6. Café, pinte, thé ou chocolat chaud.
C'est mamie en média.
Alors Nathan était malade. Je me dis que c'est plutôt normal que personne n'ait remarqué ses sautes d'humeur, puisque ses parents n'étaient pas là et son frère constamment avec lui.
Quelqu'un qui est super proche d'une autre depuis super longtemps ne remarque plus les choses "bizarres" qui ont lieus chez l'autre.
Quand j'entends toquer à ma porte et un "au lit, c'est l'heure" je soupire et ne me laisse pas le temps de penser que je prends mes somnifères pour pieuter et je file sous la couette. Depuis la mort de Garance, je ne dors plus aussi sereinement et c'est vraiment fatiguant de ne pas faire ses nuits.
Je refuse d'aller voir le psy pour autre chose que ces putains de somnifères, parce que je refuse d'admettre qu'il y a un truc qui ne va pas depuis sa mort. Je vais bien et je le sais. C'est plus pareil qu'avant, c'est sur, mais ça ne veut pas dire qu'il y a quelque chose qui débloque.
Lorsque je me réveille, je mets un peu de temps avant d'émerger. Ca prend du temps, et comme je n'ai pas le droit de sortir, je peux faire la grasse matinée autant que je veux. J'en profite, et comme je suis en vacances mes parents ne pourront pas m'avoir reproché de ne pas avoir fais mes devoirs.
Quand je me réveille, je me rends compte que je m'ennuies. Certes, la lecture des lettres, c'est cool, mais la dernière m'a un peu secouée. Alors Nathan était malade.
C'est étrange, parce que dans ses lettres, il a beau parler des choses qui l'ont rendues émotif et qui l'ont fait sentir des émotions - bonnes ou mauvaises -, tout cela reste malgré tout très distant. Il parle brièvement de ses crises de joie excessive, mais il n'aborde pas trop ce qu'il ressent face à ça.
Par exemple, il n'explique pas s'il est conscient que, pendant ses crises, il fait des crises. Certes, il aborde vite fait qu'il n'avait jamais remarqué un comportement un peu plus... Excentrique que la plupart des gens, mais il restait évasif. J'aimerais bien savoir si son père ou son frère savaient pour sa maladie. Il ne mentionne pas si il en parle avec son frère.
Et moi, je n'arrive pas à me dire que ce sont mes demi-frères. C'est tout bonnement inconcevable, pour moi, qui ne m'étais même pas faite à l'idée de n'être plus que fille unique. Comment cela a-t-il put arrivé ? Comment cela est-il possible ? Je perds ma sœur et quelques mois après, j'apprends que en fait, j'ai deux demi-frères cachés.
C'est... Trop. Seulement quelques jours ont passés depuis que j'ai découvert et plein de phénomènes bouleversants se sont vus défiler dans ma vie depuis.
Alors, récapitulons. J'ai découvert que j'avais deux demi-frères que je ne connais même pas par le biais de lettres plus que suspectes, qui étaient dissimulées dans le grenier. J'ai aussi appris que papa avait une vie cachée avant nous et que en fait, après le décès de son ancienne femme, il a complètement délaissé ses deux gosses de douze ans en leur prétextant des voyages d'affaires. Je me suis prise la tête avec papa et maman, puis avec Sam et Pauline et j'ai réussis à me faire confisquer ma liberté après ce fâcheux épisode.
Je vais avoir dix-sept ans, je ne suis pas si conne que ça. Je sais ce que ça fait de voir quelqu'un qui nous est cher partir. Et encore plus si ce départ n'est pas justifié. Et encore plus si cette personne est notre père. Ou notre sœur.
Quand je finis de déjeuner, je vais prendre une bonne douche d'eau froide. Au moment où je me déshabille, je me stoppe sur cette cicatrice, qui est là, sur mon ventre. Et je sais qu'elle ne partira jamais. Elle est là pour me rappeler à quel point j'ai été irresponsable et stupide ce soir-là. Si Anton, Garance et moi n'étions pas partis en voiture et si j'avais insisté un peu plus, nous n'en serions pas là, aujourd'hui. Garance serait assise à côté de moi pour me dire que tout va bien et que papa et maman ne sont pas si terribles que ça.
Mais bon, c'est comme ça. Je n'y peux plus rien et ce qui devait arriver est arrivé. C'est ça, ma devise de vie. Ce qui doit arriver, arrivera. Je sais que ce n'est pas très précis, mais ça me permet de ne pas réfléchir à demain et de vivre comme je l'entends.
Enfin... Façon de parler, quoi. Mes parents contrôlent ma vie, mes études et mes choix de vie. C'est pour ça que, à dix-huit ans, je me casse faire d'autres études et je leur soutire une pansions alimentaire. La plupart des gens pensent que quand on a dix-huit ans on est plus dépendant des parents. Sauf que ce qu'ils ignorent, c'est que tant que le gosse n'est pas en mesure de pouvoir se mettre un toit au-dessus de la tête et de se mettre de la nourriture dans la casserole, c'est que les parents sont obligés d'aider financièrement leur petit bambin.
Mes notes sont excellentes et mon comportement n'est pas des plus mauvais. La justice sera donc obligée de m'accorder ça. Et oui, parce qu'en plus, je vais devoir porter plainte contre mes parents pour qu'ils me filent cette pansions. Rien que pour les faire chier.
En plus, je déteste ce qu'ils m'ont poussés à faire, comme études. La psychologie, c'est naze. Les thérapeutes sont juste là pour se remplir les poches et bercer d'illusions les gens qui viennent les voir. Comme dit George dans sa lettre quand il parle du centre de rééducation ( Nda : voir lettre 6 ), les médecins sont tous des escrocs. Enfin, je ne dis pas qu'il n'y en a pas qui sont très compétents, mais le reste, ce ne sont que des cons.
Comme je n'ai rien a faire, je me dis qu'aller voir mamie me ferait du bien. Mamie n'est pas vraiment ma grand-mère. Nous n'avons pas de liens de sang, mais je la considère comme telle. Je ne vois pas de différence, parce que c'est tout comme.
J'ai rencontré mamie au marché. Tous les samedis, elle vendait des fleurs et tous les samedis, je venais au marché juste pour ses fleurs. C'est une petite femme très ridée qui, quand je le voie, fume toujours une cigarette. Elle m'a confiée un jour qu'elle ne se résoudrait jamais à arrêter, malgré son rand âge, parce que ça lui rappel trop Simon, son mari défunt. Il est mort à la guère, en quarante-deux, alors qu'ils venaient tout juste de se marier et qu'il avait seulement dix-neuf ans.
Alors quand elle arrêtée de venir au marché parce que son dos lui faisait trop mal pour cueillir les fleurs, je lui ais proposé de les cueillir à sa place. Bien-sur, elle a été ravie parce qu'elle adore les fleurs et qu'elle était vraiment triste à l'idée de devoir arrêter. Maintenant, je vais tous les samedis au marché pour vendre les fleurs et non pour les regarder. Elle, elle se contente de me regarder d'un œil paisible, en arborant un sourire moqueur si je fais une bourde.
Mais mamie n'est pas qu'une bonne compagnie pour vendre les fleurs, non, elle est aussi dotée d'une bonne oreille pour écouter les malheurs des jeunes filles comme moi. Alors des fois, quand ça ne va pas trop et que je ne sais plus qui vers me tourner, je vais boire un thé, un chocolat chaud ou un café - ou une bière si elle este de bonne humeur - avec elle au PMU du village et je lui raconte ce que j'ai sur le cœur.
Bien décidée à aller la voire, je prends un sweat-shirt, où je n'oublie pas de fourrer un paquet de réglisse dans la poche intérieure, parce que mamie adore ça, et prends mon vélo pour aller en direction de sa vieille bicoque.
J'entre sans frapper à la porte, enlève mes chaussures et vais dans le salon où j'entends la musique. Mamie adore la musique d'opéra et quand elle n'est pas dans son jardin à regarder les fleurs, elle est dans le salon à écouter de la musique.
Je la prend dans mes bras et lui fais deux bises sur les joues. Et elle me prend les deux mains en me demandant :
- Comment vas-tu, depuis le temps ? Tu ne viens plus me voir, quand nous ne sommes pas au marché. Et je sais que cette mine fatiguée correspond aux jours mauvais.
- Ca va mamie, mais c'est un peu compliqué avec papa et maman. Tu sais bien que quand je ne fais pas ce qu'il leur plait, ils ne sont pas contents. Et il m'est arrivé plein de trucs bizarres quand j'ai été au grenier. J'aimerais te raconter.
- Bien. Je me ferais un plaisir de t'écouter. Je ne sais pas pourquoi, mais tes histoires sont abracadabrantesques et beaucoup trop étranges pour une jeune fille de ton âge. Mais avant ça, tu as mangé ? Il est presque treize heures.
- Non mamie, je pensais que nous pourrions manger ensembles.
- Mais oui, avec plaisir. Viens par là, j'ai fais une quiche aux lardons pour midi et tu sais que je ne la finirais pas toute seule. Elle va bientôt sortir du four. Qu'en dis-tu ?
- Ca marche, tu sais que tes quiches sont toujours meilleurs que celles de maman.
- Oh la la, ma pauvre chérie, si ta mère t'entendais, je suis sure que tu te ferais enguirlander.
Je lui souris et nous nous dirigeons vers la petite cuisine. J'aime bien cet endroit, il sent toujours l'orange et les agrumes. Je dispose deux assiettes sur la table et deux couverts, pendant qu'elle sort la fameuse quiche du fourre. Elle nous sert deux parts et nous commençons à manger tout en discutant de samedi prochain.
- Bon, ma puce, tu sais que comme c'est la saison estivale, il va y avoir du monde au marché. Ca va être serré, parce que cette cruche de Simone s'y est mise aussi. Mais l'originalité et l'expérience de notre stand va jouer en notre faveur. Tout les gens du village te connaissent comme la petite au fleurs et ils envoient souvent les touristes à notre adresse. Tu sais comment ça fonctionne, depuis le temps. Un joli sourire peut valoir dix millions de belles fleurs, ne l'oublie surtout pas. Et il faudra que tu viennes m'aider vendredi soir, pour cueillir toutes les fleurs que tu pourras.
- Ouais, mais tu sais, ça m'étonne que Simone s'y soit mise en même temps que la saison des touristes, elle n'a pas beaucoup d'expérience. Et pour vendredi, c'est d'accord.
- Oh mais tu sais, les vieilles dames comme elle ou comme moi n'ont pas beaucoup de choses à perdre et c'est bien pour ça qu'elle s'y est mise. Elle n'a rien à perdre et elle sait que les gens sont attirés par les jolis bourgeons. Bien qu'elle, avec sa face toute ridée ne soit pas si jolie que ça...
Le côté vieille garce de mamie me fait ricaner. Elle peut se montrer un peu vache avec les gens qui lui font concurrence, mais au fond, elle ne pense que du bien d'eux.
Comme nous avons finis notre repas, nous débarrassons la table et mamie finit par me dire :
- Bon, maintenant allons prendre un petit remontant pendant que tu me racontes pourquoi tu a l'air si fatiguée. A ton âge, voyons, ça ne devrait pas arriver.
- Je sais mamie, je sais. Mais c'est pas toujours facile, toi aussi, tu sais, je réponds avec un soupire dans la voix.
Ensuite, nos chaussures enfilées et le manteau de mamie mis, nous prenons sa petite voiture et allons au PMU du village. J'adore cet endroit. Il y a plein de monde et c'est toujours convivial. Un homme a un geste déplacé à cause de l'alcool, et il se fait littéralement pourrir, c'est pour ça que je sais que je peux venir tranquille.
Quand nous entrons dans le bar, les gens nous saluent et nous disions bonjour à tout le petit monde.
Je m'accoude au comptoir et je hèle le barman, Cody, et je prends notre commande, toujours la même :
- Salut Cody ! Une pinte pour moi et un café pour mamie, s'il-te plais !
- Je vous apporte ça de suite. Mais dis-moi, t'es pas trop jeune pour boire de l'alcool ?
- Beh ça vaaaaa ! Disons que c'est pour mamie ! Là, tu ne peux rien redire !
- Ralalala... T'es vraiment un petit diable, toi. Rien ne t'arrêtes. Fais gaffe, un jour, ça va te retomber dessus.
- Ouais, je sais... C'est déjà fait... Je souffle, en repensant au savon que papa m'a passé.
- Mais tu vas bien, poulette ? Je sais bien que quand tu viens-là, c'est que ça va pas trop.
- Ouais, t'inquiète, Cody. Bon, et cette commande, elle arrive ? Je change de sujet pour le rassurer.
- Bien sur, poulette, j'arrive, allez vous assoir. Et mamie, tu vas bien ? Il dit en s'adressant ensuite à mamie.
- Mais oui, mon petit, ne t'inquiète pas pour moi, va. Tu sais toujours que le café ça requinque.
Nous allons nous assoir près de la fenêtre, comme d'habitude. Tout le monde appelle mamie "mamie". Personne ne sait réellement quel âge elle a vraiment, mais je sais que c'est la dame la plus ridée que j'ai jamais vue. J'ai pu regarder des photos d'elle quand elle était jeune et quand elle était avec Simon, avant qu'il ne parte à la guerre et elle était belle. Simon avait bon goût.
Je questionne mamie sur Simon :
- Dis, mamie, il était comment, Simon ?
- Il était beau, dit-elle après quelques secondes de réflexions. Il était beau, attentionné et doux. Tu sais, ma chérie, Simon c'était l'amour de ma vie. Et je me demande des fois, si, au paradis, je vais pouvoir retrouver Simon comme j'étais à dix-sept ans. Peut-être qu'il ne voudra plus de moi.
- Tu sais mamie, je pense qu'il voudra toujours de toi, parce que même comme ça, tu es belle. Je t'assure que c'est vrai. Tu sais bien que je ne te ment pas à toi.
- Oh tu sais, ce n'est pas l'avis de tout le monde, mais si tu le dis, je te crois. Et tu sais, un jour, je mourrais.
- Je sais, mamie, je sais. C'est juste que...
Cody nous interromps en nous apportant notre commande, nous souhaite une bonne consommation, puis tourne les talons pour retourner derrière le comptoir.
- Je disais... Je disais que je sais, mais tu sais que c'est depuis Garance...
- Oui je sais, ma puce. Mais tu sais, j'ai eu une belle vie. Quand je mourrais, c'est que j'aurais fait mon temps et que je devrais partir rejoindre Simon. Ce n'est que la fin d'une chose et le début d'une autre. Ne t'en fais pas, va, tout ira bien. Mais sinon, nous étions là pour que tu me parles de toi et de tes choses étranges que tu as trouvé dans le grenier.
- Ah oui, j'ai trouvé des lettres ! Il me semble que c'est une histoire d'amour !
- Que c'est romantique ! Et qui sont les deux protagonistes ?
- Les deux quoi ?
- Les deux protagonistes ! Ce sont les deux personnages principales de ton histoire !
- Eh bien...
Et voilà qui commença une explication des plus abracadabrantesque pour une histoire abracadabrantesque.
Une bonne heure plus tard, après une autre pinte et quelques rires, je finis de lui raconter mon histoire. Quand nous partons du PMU, je donne les réglisses à mamie et elle fais semblant de se fâcher, tout de même heureuse que je me sois souvenue de ce petit détail :
- Eh bien en voilà des manières ! Tu aurais pus me les donner quand je buvais mon café !
Je lui réponds simplement par un sourire insolent et nous prenons le chemin de sa petite maison. Une fois à l'intérieur, mamie propose que nous allions prendre du bon temps à l'extérieur, à l'ombre des arbres, à côté du bon parfum des fleurs.
Elle prend un oreiller pour dormir sur la pelouse, m'ordonnant de la réveiller dans une heure, et moi, je me content des lettres, profitant de se moment pour en continuer la lecture.
---------------------------------------------
Voilà. C'est le chapitre le plus long que j'ai jamais écrit. C'est pas chiant, mais presque. Disons que j'ai hâte de changer de chapitre.
2750 mots au total.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top