Chapitre XXV
C'est comme si mon corps était tombé en morceaux et qu'il n'en restait plus que quelques cendres. Je suis allongé, toujours aussi dénudé, contre un sol froid. J'ai mal partout, c'est comme si un immense hématome recouvrait chaque parcelle de ma peau. Mon cœur est lourd, j'ai l'impression qu'il s'apprête à tomber dans ma poitrine.
Mais le pire, ce doit être la soif et la faim, je commence sérieusement à en avoir mal au ventre. Ma gorge me fait mal à chaque respiration. En même temps, depuis combien de temps suis-je ici ? Deux jours ? Une semaine ? Je n'ai aucune notion du temps. La pièce dans laquelle je suis n'a qu'une minuscule fenêtre, elle est parfaitement vide, à l'exception d'un jeune homme assis sur une chaise dans le coin de la pièce. Il ne quitte pas son téléphone des yeux, il n'a même pas du voir que j'étais réveillé. Il a l'air bien plus jeune que les autres. Il ne semble même pas majeur. Peut-être que je pourrais essayer de lui parler, si j'y arrive.
- Excuse moi... Je pourrais avoir de l'eau ?
Il ne répond rien. Il a peut-être des écouteurs, je ne vois pas très bien, la lumière est faible, je répète une nouvelle fois, un peu plus fort, quitte à me brûler la gorge.
- J'ai entendu.
C'est une blague... Au bout d'un moment bien trop long, la porte s'ouvre, j'aurais aimé être ébloui par la lumière du soleil mais non, de l'autre côté de la porte il n'y a qu'un immense couloir sombre. Mes yeux se lèvent sur la personne face à moi, c'est Akihito, qui a l'air très fatigué d'ailleurs. Il s'approche de moi sans un mot, une bouteille d'eau à la main. Je suppose que celui sur la chaise lui a envoyé un message.
Le décoloré ne me regarde pas dans les yeux ne serait-ce qu'une seule fois, je peux comprendre, il doit se sentir coupable. Mais je ne lui en veux pas, je suppose que ce n'est pas un choix de sa part...
- Ouvre la bouche.
Je m'exécute et il commence à me faire boire. Ce n'est pas vraiment possible autrement avec mes mains attachées.
- Ça devrait être bon, dis-je entre deux gorgées.
- Non.
Comment ça non ? Il continue à me faire boire contre mon gré... Le problème c'est que s'il continue comme ça je vais vite avoir envie d'aller aux toilettes. Et je me vois mal demander ça à l'autre sur son téléphone. Une fois qu'il a jugé que j'avais assez vu, il s'en va, sans un mot comme d'habitude. Il a eu la gentillesse de me laisser la bouteille tout de même, même si je ne peux pas boire par moi même.
Combien de temps vais-je rester ici ? À vie ? Enfin, jusqu'à ma mort ? Je ne vais pas tarder à mourir de faim de toute façon, je ne suis pas très résistant donc au bout de quelques jours ce sera fini, du moins je l'espère.
Le temps va vite être long à fixer cette bouteille d'eau. Je vais finir par connaître l'inscription sur l'étiquette par coeur. Mais quelque chose m'interpelle, il y a quelque chose à l'intérieur de l'étiquette, vraiment tout petit. Je n'arrive pas vraiment à voir, je plisse les yeux en espérant que celui chargé de me surveiller ne me voit pas mais impossible de lire, j'ai le cerveau réduit en bouillie avec les évènements passés. Néanmoins, je comprends mieux pourquoi il voulait que je boive plus, je n'aurais pas pu lire le message sinon mais malheureusement j'en suis quand même incapable.
Mais au même moment, la porte s'ouvre sur une personne que j'aurais aimé ne jamais revoir. Le jeune homme sur son téléphone quitte la pièce et laisse place à mon tortionnaire, suivi d'Akihito.
- Je sens qu'on va passer une bonne journée, pas toi Akki ? demande le plus vieux.
Mon décoloré ne répond pas.
- Combien de temps tout cela va durer ? dis-je déprimé.
- Toute ta vie.
J'en ai d'horribles frissons.
- Je n'aurais jamais cru dire ça un jour mais je préfère qu'on me tue maintenant, une bonne fois pour toutes... À quoi bon rester en vie si c'est pour rester attacher dans cette pièce.
- Oh tu veux mourir maintenant ? Mais tu vois, j'ai promis à Akki de ne pas te tuer et je n'aime pas briser mes promesses. Mais bon, on peut lui demander son avis non ? Qu'en penses-tu ? demande-t-il à mon amant.
Il prend une légère inspiration.
- Fais comme tu le sens...
Le plus vieux sourit à nouveau.
- Mais laisse moi lui parler avant. Seul à seul, demande Akihito.
- J'ai un meurtre à préparer de toute façon ! Dis moi Jun, est-ce que tu as un pokémon starter préféré ?
- Feunnec, dis-je sans vraiment comprendre.
- Un starter feu du coup.
Je réalise soudainement ma connerie tandis qu'il s'en va en riant. J'en ai terriblement mal au ventre, moi qui pensais, il y a quelques jours encore, mourir de quelque chose de naturel, comme un AVC, non, je vais mourir brûlé par ce psychopathe.
- Jun !
- Oui ?
- T'es complètement con ?!
- Quoi ? Parce que je veux mourir ? Tu n'as pas vécu ce qu'il m'est arrivé hier, j'ai cru mourir à chaque décharge électrique, je préfère souffrir une bonne fois pour toutes que pendant encore des années. J'ai plus aucune chance de m'en sortir alors à quoi bon rester en vie ?!
Akihito me regarde, l'air triste.
- Tu n'as pas lu le message sur la bouteille ?
- Non, j'ai été incapable de le lire.
Il se penche contre mon oreille.
- Bon ça va être délicat maintenant, chuchote-t-il, mais fais tout pour gagner du temps compris ?
- Tu as une solution ?
- Oui, j'ai du mettre ma fierté de côté pour ça mais si ça permet de te sauver...
- Promets moi que ça ne te mettra pas en danger...
Il pose un baiser sur mon front pour seule réponse.
- Je suis désolé...
- T'y es pour rien.
- Je n'aurais jamais dû entrer dans ta vie.
Je me mords la lèvre, il n'a pas le droit de dire ça, pas après tout ce qu'il m'a apporté.
- Akihito, si je meurs, ce qui a de fortes chances d'arriver, veille sur Hana, même de loin si tu ne peux pas t'en occuper, s'il te plaît.
- Je te le promets. Et je te l'ai déjà dit, tu ne vas pas mourir maintenant.
- Je te fais confiance alors.
Il me sourit avant de regarder tout autour de lui. Lorsqu'il s'est assuré qu'il n'y a personne dans les alentours, il vient poser ses lèvres sur les miennes. Sans aucune hésitation je réponds au baiser, l'embrassant de toutes mes forces. Ses mains se perdent dans mes mèches bleues, sa langue vient chercher la mienne. Jamais un de nos baisers n'a été aussi passionné. J'ai beau ne plus avoir la notion du temps, je sais que le baiser dure plusieurs minutes, sans interruption. À bout de souffle, il s'éloigne, un sourire aux lèvres.
- Je t'aime, chuchote-t-il à mon oreille.
Il me l'a déjà dit plusieurs fois, mais j'ai toujours des frissons lorsque j'entends ces trois petits mots. Je lui murmure que c'est réciproque et il s'éloigne, par précaution, au cas où l'autre fou arriverait. Quelques secondes après, comme si Akihito avait un pouvoir, le plus vieux entre dans la pièce. Il demande à Akihito de partir avant de reporter son attention sur moi.
- On va changer de pièce, c'est du parquet ici, ça risque de déclencher un incendie.
Il me détache les pieds, non sans me tenir fermement. Il m'ordonne de me lever mais j'en suis incapable, mes jambes ne répondent pas. J'espère qu'Akihito comptait pas me faire courir dans son plan.
- T'es un vrai boulet.
- Je n'y peux rien.
- J'ai clairement pas envie de te porter. Tu vas devoir ramper.
Bon, dans un sens ça nous fait gagner du temps mais là je vais laisser mon peu de dignité restant dans cette pièce.
- Je n'y arriverai jamais. J'ai plus de force dans les bras.
Il lâche un long soupir avant de sortir son téléphone. Quelques secondes après Akihito arrive tandis que l'autre quitte la pièce, encore une fois.
- Pas mal pour gagner du temps, murmure-t-il contre mon oreille.
Alors, comment lui dire que ce n'était absolument pas volontaire ? Il me porte comme une princesse pour m'emmener dans une salle qui s'apparente aux sous-sols servant de salle de torture dans les films, elle est entièrement bétonnée, sans aucune fenêtre et une horrible odeur d'humidité s'en dégage.
- Pose le sur la chaise et laisse nous, ordonne mon tortionnaire déjà présent dans la pièce.
Akihito me fait un faible sourire avant de s'exécuter. Ok maintenant faut que je fasse tout pour gagner du temps, peu importe comment, Akihito compte sur moi, je le fais aussi pour Hana.
- Je pourrais avoir une dernière faveur avant de mourir ? dis-je pendant qu'il m'attache les pieds à la chaise.
- Tu t'es cru dans un film ou quoi ? Je peux savoir ce que tu veux demander encore ?
- Quelque chose à manger...
- Ne t'inquiète pas, rit-il, bientôt tu n'auras plus faim.
- Je ne demanderai rien d'autre.
Il semble réfléchir.
- Bon, je peux demander à Akki, doit y avoir un reste de pizza dans la cuisine.
- De la pizza ?
- Oui de la pizza.
- Pizza à quoi ?
- Quatre fromages je crois.
- Y a pas moyen d'avoir une hawaïenne ?
Il me foudroie du regard, je crois que je l'agace.
- Tu penses que t'es au restaurant peut-être ? Tu vas bouffer ce qu'on te donne et si t'es pas content je te tue direct.
- Ok ok, va pour la quatre fromages...
Je suis si peu confiant, si j'abuse, il pourrait me tuer plus rapidement que prévu. Mais je fais de mon mieux pour gagner du temps.
- Bon t'as intérêt à la savourer ta pizza, annonce-t-il en pianotant sur son téléphone.
- Bah pas vraiment comme c'est pas une hawaïenne.
Bon il est au bord de l'explosion. Je fais celui qui est sûr de lui mais je suis mort de peur au fond de moi. Mais je n'ai pas vraiment le choix, si je me tais, je vais peut-être y rester. Puis savoir que je suis soutenu par Akihito me rassure l'air de rien.
Un autre homme ouvre la porte et lui donne un carton de pizza avant de s'éclipser. Le brun, donc c'est à dire l'ex d'Akihito, me tend une part, presque dégouté de devoir me faire manger.
- Mais c'est froid.
- Fais pas chier et bouffe.
- J'aime pas la pizza froide.
- Ok alors je vais te cramer avec la pizza.
- Non non c'est bon, je vais quand même manger.
En réalité, je suis si heureux de pouvoir manger cette part de pizza froide, j'ai l'impression de ne pas avoir mangé pendant des jours . Bien évidemment, je fais ça le plus lentement possible.
- Dépêche toi !
- Je savoure, c'est mon dernier repas.
- T'es presque aussi chieur qu'Akki, sauf que lui il est mignon comme ça.
J'ai beau être aveuglé par l'amour, je sais reconnaître qu'Akihito est chiant quand il a envie de l'être.
- Je me demandais un truc.
- Quoi encore ? répond-il en passant sa main sur son visage.
- Pourquoi uniquement me torturer physiquement ? La torture psychologique c'est violent aussi.
- Parce que je veux pas te rendre fou mais te tuer.
- Pourtant ça me tuerait de l'intérieur de, par exemple, connaître les détails de ta relation avec Akihito. Mais bon, c'est pas ton but de me détruire mentalement aussi donc passons à autre chose.
Je dois vraiment passer pour le dernier des abrutis mais je ne sais pas comment gagner du temps autrement. Surtout que je n'ai en aucun cas envie de savoir comment s'est déroulée sa relation malsaine avec Akihito mais je n'ai rien trouvé d'autre.
- Tu me penses si bête ?
- Comment ça ? dis-je bien moins confiant.
- Je sais bien que tu ne veux pas mourir et que tu fais tout pour gagner du temps. Mais ta mort arrivera quoique tu y fasses. Mais comme tu l'as cherché, je vais te détruire mentalement aussi.
Il s'adosse contre le mur, me racontant sa rencontre avec Akihito, pour l'instant raccord avec ce que m'a dit ce dernier. Plus il avance, plus son récit devient insupportable à entendre Je m'attendais à ce qu'il me raconte quelque chose d'incohérent, plein de mensonges, mais non, il a choisi de me raconter l'horrible vérité. Je ne connaissais pas tous ces détails et j'aurais préféré ne jamais les savoir.
Je réalise qu'Haru avait raison, lorsqu'il me disait de m'éloigner d'Akihito parce qu'il avait fait pleins de choses horribles, effectivement, c'était vrai. Mais il y a malheureusement été contraint, c'est tout ce que je comprends donc jamais je ne m'éloignerai de lui pour ces raisons.
- Toi qui pensais qu'Akki était quelqu'un de fort, capable de te protéger, je n'ai jamais connu plus faible que lui, c'est pour ça qu'il a besoin de moi.
J'ai envie de lui crier d'arrêter, que je ne veux pas en entendre plus, mais je dois rester fort. Il sait que je suis sur le point de craquer et il en profite. Il se met alors à me raconter dans les moindres détails les multiples viols qu'à subi l'homme que j'aime. Viols qui ont été organisés par cette même personne horrible qui se tient face à moi, c'était sa manière de se venger de la moindre petite douleur qu'Akihito lui faisait ressentir. Je n'ose même pas imaginer ce qu'il lui prépare après "ma mort".
Mon estomac se tord, j'ai envie de vomir. Cet homme est un pervers narcissique, il n'aime pas Akihito, c'est une obsession malsaine. Mon corps entier se contracte, des larmes de rages commencent à monter, c'est plutôt lui qu'on devrait brûler.
- T'es presque aussi fragile que lui, rit-il.
- Tu ne mérites pas Akihito...
- Bien sûr que si, je l'aime comme jamais personne ne l'aimera.
Je pense très sincèrement que c'est impossible d'aimer Akihito comme je l'aime, je ne saurais expliquer mais en si peu de temps, il est devenu ma raison de me lever tous les matins.
- Bon on va enfin pouvoir s'amuser maintenant.
Il vient me bander les yeux avant de, probablement, allumer un feu. Ok Jun il faut encore gagner du temps.
- Tu vas t'y prendre comment ?
- Je vais allumer un feu sous tes pieds.
- Ça va prendre du temps non ?
- J'aurais pu faire ça avec de l'essence mais tu mourrais beaucoup plus vite. Ça aurait été drôle de te voir flamber mais je veux que tu souffres.
Mon corps entier se tend lorsque je sens une forte chaleur au niveau de mes pieds... Que fait Akihito... Un bruit de porte se fait entendre, il a du partir. J'ai envie de crier, mes pieds me brûlent. Il ne faut pas que je bouge trop sinon la chaise pourrait se renverser. Je ne connais pas l'étendue du feu, je pourrais me brûler le dos et le crâne. Je réfléchi à cent à l'heure à un moyen de m'enfuir.
La fumée devient vite irrespirable, j'en déduis que le feu est immense. Bon je n'ai jamais été croyant mais ça ne me coûte rien de prier maintenant... Donc s'il y a un dieu quelque part, j'aimerais que ma fille ait une belle vie, que ce soit aussi le cas d'Akihito. Ah et si je dois mourir aujourd'hui, j'aimerais ne pas trop souffrir.
Ma tête commence à tourner, je n'arrive pratiquement plus à respirer. J'espère que ça va me tuer avant le feu. Même si on me sauve, mes pieds ne ressembleront plus à rien. Ça ne m'étonnerait même pas que mes orteils aient fusionnés ensemble.
J'entends comme un bruit lointain, des coups de feux je crois. Mais mes yeux se ferment et ne veulent plus se rouvrir, j'ai l'impression d'entendre la voix d'Hana, je dois rêver.
~~~
Chapitre un peu spécial ahah, je me suis rendue compte qu'à la fin de l'écriture que j'avais mis une playlist joyeuse en l'écrivant 😭😭
Il a un peu de retard désolée. Dans ma vie c'est le gros bordel, je suis un peu dans la situation d'Akihito, avec un ex un peu fou sur le dos :') mais j'espère en tout cas que vous allez bien, c'est le plus important
À lundi prochain pour un autre chapitre, ou alors l'épilogue, qui sait 😌
Kargisa~
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