Akihito conduit tandis que j'ai le front collé à la boîte à gants. Quand est-ce que ce foutu médicament va faire effet ? Et pourquoi j'ai autant bu ? Et pourquoi Akihito lui va bien ?

- On y est, je t'attends là.

Un soupir s'échappe de mes lèvres et je quitte la voiture, la boule au ventre. Mon stress ne veut décidément pas me quitter, c'est encore pire lorsque je toque à sa porte, j'ai horriblement mal.

- Jun ? demande Nori en ouvrant. Qu'est-ce que tu fais là ?
- J'aimerais parler à Hana.
- Elle est en cours.

Comment est-ce que j'ai pu oublier ça ?

- Je vais la chercher à l'école alors, ne viens pas la chercher.

Elle a l'air embêtée.

- Je lui ai promis que j'irais la chercher. On peut toujours y aller ensemble.

C'est la dernière chose dont j'ai envie mais je n'ai pas le choix.

- Tu peux rester ici en attendant, histoire que t'ais pas fait le trajet pour rien.
- Non merci.
- J'aimerais te parler, insiste-t-elle.
- Je vais pas te cacher, j'en ai pas spécialement envie.
- C'est à propos de la garde d'Hana.

Mon coeur fait un bond dans ma poitrine. J'entre donc pour lui faire comprendre que j'accepte d'en parler bien que l'envie ne soit pas là. Je m'assois, son appartement parait si grand avec la gigantesque baie vitrée. Je me sens si petit, presque écrasé par tout ce mobilier. Mon téléphone vibre, c'est Akihito.

De sans__titre :
Excuse moi, j'ai du partir, j'ai un imprévu vraiment urgent. Je serai pas là ce soir

Ça m'arrange presque, mais mille questions traversent mon esprit, je lui fais confiance, mais il m'a donné si peu d'informations que je suis obligé de m'inquiéter. Je lui demande si tout va bien et ce qu'il compte faire de sa soirée avant de reporter mon attention sur mon ex.

- Du coup, pour la garde d'Hana ? demande-t-elle comme si cela était discutable.
- Elle reste avec moi, c'est tout. Elle est légalement à ma charge.
- On peut toujours s'arranger non ? Tu l'aurais une semaine sur deux et un mois pendant les grandes vacances.
- Non, on ne s'arrangera pas. Tu as abandonné Hana une fois, alors pourquoi pas deux ?
- Parce que j'ai appris à la connaître, que je suis désormais prête à être mère. Si tu n'es pas prêt à partager, on peut régler ça au tribunal, mais j'aurais pour sûr sa garde.
- T'as l'air bien confiante.

Elle me fait un sourire en coin dont je ne veux même pas connaître la signification.

- Du coup tu restes jusqu'à ce qu'on aille chercher Hana ?
- Oui, dis-je tout bas.

Ce serait une réelle perte de temps de rentrer chez moi, je ne suis même pas sûr d'avoir le temps d'y retourner puis d'aller chercher Hana.

- Tu l'as rencontré comment ton copain ? Il s'appelle comment d'ailleurs ?
- Akihito. On s'est rencontrés à l'hôpital.
- À l'hôpital ?
- Hana avait l'appendicite.
- Et lui, il faisait quoi là bas ?

Elle pose beaucoup trop de questions.

- Ça ne regarde que lui.
- Il a une maladie grave ?
- Non.
- Une opération lourde ?
- Non plus.
- Il est infirmier ?

Je lui lance un regard blasé.

- C'est vrai qu'il a pas vraiment l'étoffe d'un infirmier.
- C'est à dire ?
- Il n'a pas l'air de prendre énormément soin de sa santé et encore moins de celle des autres.

Elle marque un point, mais elle n'a pas besoin de le savoir.

- Tu ne connais pas Akihito.
- J'ai touché une corde sensible ?

Il est lui même ma corde sensible. Je n'aime pas entendre quelqu'un dire du mal de lui, que ce soit Nori ou bien même Mayuri.

Nous avons fini par partir chercher Hana tous les deux. Sa présence me met mal à l'aise, je ne saurais dire pourquoi. Lorsque Hana sort de l'école, son visage s'assombrit en nous voyant. Ce serait de ma faute ? Ou alors sa mère a été horrible avec elle. Il faut vraiment qu'on ait une discussion elle et moi.

Chez Nori, Hana n'a toujours pas prononcé un mot. Nori n'est pas là, elle est partie faire des courses. Elle fait tout mal, mais là elle a bien fait de nous laisser seuls. J'aurais aimé qu'on rentre chez moi mais on se serait encore disputés et je ne veux pas que ça arrive devant Hana.

- Je suis désolée, murmure ma fille.
- Pourquoi ?
- Je suis pas restée avec toi...

Elle redresse enfin sa tête, me dévoilant ses yeux embués de larmes. Je lui ouvre mes bras et elle vient s'y enfouir.

- Je ne t'en veux pas. Dis moi juste pourquoi t'as choisi de rester ici.
- Tu t'énerveras pas ?
- Promis.
- J'avais envie de la connaître... À l'école, quand on me demandait le nom de ma maman je pouvais pas répondre... Puis, quand elle est venue me chercher de l'école, elle m'a raconté pleins de choses que je savais pas... Pardon...
- T'inquiète pas, du moment que tu ne regrettes pas.
- Si... C'était nul avec maman hier...

Elle l'appelle maman...

- Pourquoi ?
- Au début c'était pas nul mais pas bien, elle était pas beaucoup avec moi... Mais dans la nuit, j'ai fait un cauchemar et quand je suis allée la voir pour dormir avec elle elle m'a crié de partir...
- Pourquoi ?
- Elle était pas seule je crois.

Donc, elle revoit sa fille après plusieurs années et s'est quand même dit que c'était une bonne idée de... je vais m'arrêter là sinon je vais m'énerver.

- Tu retournes à la maison ce soir ?

Elle hoche la tête.

- Je peux te demander quelque chose ? demande-t-elle d'une voix pratiquement inaudible.
- Bien sûr.
- Je pourrais la revoir ?

Je suppose que je n'ai pas le choix.

- Oui.
- On rentre du coup ? questionne-t-elle.
- Nori nous a laissé ici sans fermer, on peut pas vraiment partir.

Heureusement, elle ne met pas longtemps.

- J'ai acheté à manger pour ce soir ! annonce-t-elle.
- On ne va pas rester.

Elle fait une moue. Celle qui me faisait craquer à chaque fois quand nous étions ensemble.

- J'ai déjà tout acheté !

Là, j'ai juste envie de rentrer et de dormir dans les bras d'Akihito. Ah mais non, il n'est pas là. Je vais voir s'il m'a répondu.

De sans__titre :
Oui tout va bien, et je t'expliquerai en rentrant, c'est compliqué

Le message date déjà de plusieurs heures, il m'inquiète.

- Bon Jun ?
- On reste à une condition, lui dis-je.
- Oui ?
- À moins qu'Hana le demande, tu nous laisses tranquille après ça.
- Deal.

Ça n'a pas été aussi horrible que ça, bien que ça n'était pas non plus agréable. J'ai pu apprendre qu'elle n'était plus avec celui avec qui elle m'a trompé. Elle vit au gré du vent, allant de droite à gauche.

À la maison, enfin, à l'appartement, je pars directement coucher Hana qui est déjà bien fatiguée. Tout ça doit vraiment être éprouvant pour elle. Il faut que je la préserve, elle est encore si jeune.

- Dis papa, commence-t-elle en se glissant dans ses draps, Akki il va vivre avec nous maintenant ?

Je n'y ai même pas pensé...

- On verra. Il reste ici pour l'instant en tout cas.
- Il a pas de maison ?
- Je t'avais déjà dit qu'il vivait avec quelqu'un de très méchant ? Et bien, pour pas rester avec cette personne méchante, je lui ai proposé de rester ici pour un temps.
- Et pourquoi pas pour toujours ?

Si seulement tout était si simple.

- Tu lui demanderas.
- Je vais oublier.
- Mais non, tu le notes dans un coin de ta tête et tu t'en souviendras demain.
- Mais c'est pas possible d'écrire dans ma tête...
- C'est une expression...

Je ris doucement avant de lui dire bonne nuit et de la laisser. Une fois dans ma chambre je pousse un cri suraiguë en voyant Akihito sur le lit, en étoile de mer. Il m'a fait peur !

- Papa ?! demande Hana en courant dans ma chambre.
- Tout va bien... J'ai juste eu peur en voyant Akihito.
- J'aimerais dormir, marmonne-t-il.
- Habillé ? Sur la couette ? Et surtout en prenant toute la place ?

Il ne me répond même pas.

- Akki ! J'ai une question ! s'exclame ma fille.

Elle ne perd pas le nord.

- Pourquoi tu vis pas ici ? demande-t-elle.
- C'est compliqué...
- T'as pas envie ?
- Si mais...
- Tu aimes papa ?
- Oui aussi...
- Alors voilà, tu peux vivre avec nous !
- Y a pleins de démarches à faire et j'ai la flemme, prononce Akihito d'une voix cassée. Mais pourquoi tu veux que je vive ici ?
- Bah t'es comme mon deuxième papa, je veux que tu sois avec nous tout le temps !

Akihito se redresse d'un coup, les joues rouges écarlates et les yeux brillants. Je dois avoir la même tête actuellement, elle considère Akihito comme son père, ça me fait tellement plaisir...

- Je vais en discuter avec Jun alors, mais tu devrais te coucher, il est tard.
- D'accord... Bonne nuit.

Et elle repart. Le décoloré me fusille du regard.

- T'es rentré tard, fait-il remarquer.
- On a mangé chez Nori, je pensais que tu serais pas là.
- J'ai pu rentrer plus tôt.
- T'étais où d'ailleurs ?
- Demain.
- Comment ?
- Je t'explique demain. Là je suis crevé.

Mais il est parti faire quoi ? Je le revois, avec sa "meilleure amie" dans ce même lit. Une horrible sensation s'empare de mon ventre.

- Je dois m'inquiéter ou pas ?
- Ça dépend du point de vue.
- Attends attends c'est grave ? T'étais avec qui ? Où ça ? Vous avez fait quoi ?

Il fronce les sourcils.

- Je ne t'ai pas trompé si c'est ce à quoi tu penses. Maintenant laisse moi dormir.

Il m'inquiète, mais il n'a pas l'air d'humeur à parler. Je le pousse sur le bord du lit, non pas pour le faire tomber mais pour avoir un minimum de place. Je me change rapidement et me glisse sous les draps. Akihito, lui, ne prend même pas la peine de se changer véritablement et se contente de retirer tous ses vêtements à l'exception de son sous-vêtement.

Je n'ai absolument plus sommeil, pourtant je devrais, je dois aller travailler demain, enfin, si on ne m'annonce pas mon licenciement.

Je me retourne vers Akihito, qui lui me tourne le dos. Bon je pense que ça va être comme ça tous les soirs, c'est un peu triste. Je me demande où il était cet après midi. J'ai très peur que ça ait un rapport avec son ex. Connaissant Akihito, il va m'inventer un mensonge pour que je ne m'inquiète pas. Sauf que je m'appelle Jun Fujihara et que si je n'étais pas inquiet, je ne serais pas moi.

Le temps passe à la fois très lentement et très vite, je devrais dormir mais ça me travaille vraiment trop.

- Tu dors ? dis-je à mon amant.
- Non, soupire-t-il en se retournant vers moi. Je suppose que tu réfléchis encore trop.
- Ça doit être ça...
- Bon, tu veux savoir quoi ?
- Tu étais où cet aprem ?
- À Tokyo.
- T'y faisais quoi ?
- C'est un interrogatoire ?

Je lui jette un regard blasé.

- Quelqu'un voulait absolument me voir, répond-il finalement.
- Qui ça ?
- Mon père.

Mes lèvres s'entrouvrent. Je m'attendais à tout sauf à cette réponse.

- Vous n'étiez pas en mauvais termes ?
- On l'est toujours.
- Ça s'est pas si mal passé que ça aujourd'hui non ?
- Bien sûr que si. Il a commencé à me faire le même chantage que d'habitude, sauf que contrairement à lui je ne vis pas pour l'argent.
- C'est ce genre d'homme ?
- Complètement oui. Au point que l'argent compte plus que sa propre famille.
- Et ta mère dans tout ça ? Il l'a aimé non ?
- Je refuse d'y croire.

Je ne sais pas quoi en penser, Akihito doit avoir raison, je ne connais pas son père à vrai dire.

- Il vivait pas en Corée ? dis-je.
- Si, il est venu au Japon pour me voir, c'est pour ça que j'ai pas réussi à refuser. Et encore au début il voulait venir chez moi, s'il savait que son fils n'a même pas de vrai logement, il me retirerait probablement de son testament.
- Tu restes son fils, il pourrait t'aider non ? Il n'est pas vraiment pauvre.
- Tu vis trop dans le monde des Bisounours, c'est mignon.

Il doit avoir raison, je n'ai jamais été dans une situation similaire, du coup, j'ai des solutions toutes faites.

- Mais, il est venu te voir pour quoi concrètement ?
- Reprendre l'entreprise familiale. Sauf que j'ai clairement d'autres choses à faire que m'occuper d'une société qui vend des produits de merde hors de prix aux riches. Surtout que son entreprise est basée en Corée, hors de question que j'aille vivre là bas.
- Pourquoi pas ?

Il me regarde quelques secondes.

- Parce que tu es là toi.

Mes joues s'empourprent. Je me demande s'il a parlé de moi à son père. Quoique ça m'étonnerait, ils n'ont pas dû se raconter leurs vies.

- C'est étrange qu'il soit revenu te parler après tout ce temps.
- Il a jamais vraiment coupé le contact, c'est juste moi qui l'ignorait.

C'est étrange toute cette affaire.

- Pourquoi tu ne l'aimes pas déjà ?
- Parce qu'il ne m'a jamais aimé et qu'il m'a toujours vu comme une perte d'argent.

J'allais lui demander s'il était désiré mais tout compte fait, ça ne se fait pas de demander ça.

- Puis, il n'avait aucun respect envers ma mère, il l'a trompé, plus d'une fois, il a même eu des enfants avec une autre femme. Enfants qu'il traite bien mieux que son unique fils légitime.
- Et ta mère dans tout ça ?
- Elle est partie.
- Elle a bien fait.
- Elle s'est suicidé.

Mes yeux s'écarquillent. Merde, j'ai mal compris, je suis beaucoup trop gêné...

- Excuse moi...
- Pourquoi tu t'excuses ?
- J'ai dit qu'elle avait bien fait. Mais j'avais mal compris ! Je pensais qu'elle l'avait quitté !
- T'inquiète pas, je me doute que t'as pas dit ça volontairement.

Avec tout ce que j'apprends sur lui, j'ai un peu honte de m'être plaint de ma vie face à lui.

- Je te laisse dormir du coup, lâche-t-il finalement.
- Non non ! Ça m'intéresse vraiment !
- Y a pas grand chose à dire.
- Tu as perdu ta mère à quel âge ?
- Quand j'avais quatorze ans.
- Tu as vécu avec ton père après ça ?
- Oui, je suis parti dès que j'ai atteint la majorité.
- C'était si horrible que ça ?
- Je supportais pas de vivre avec sa femme qui essayait de voler la place de ma mère.
- Elle voulait pas plutôt que tu l'acceptes ?

Ses lèvres s'entrouvrent, il ne semble pas avoir envisagé cette possibilité auparavant.

- Ça m'étonnerait, elle ne m'a jamais aimé et encore moins vu comme son fils.
- Ah bon ?
- Oui, mais j'ai pas envie de parler d'elle là.
- Excuse moi, je ne savais pas que c'était un sujet si sensible.

Il se contente de me répondre par un soupir et m'enlace doucement. Je me blottis contre lui et inspire pour mieux sentir son odeur.

À mon réveil, Akihito n'est plus là. Je ne comprends pas comment il fait pour toujours se lever aussi tôt. Il m'a envoyé un message.

De sans__titre :
J'ai du partir pardon, m'attends pas ce matin, j'irai chercher Hana par contre

Les histoires avec son père ont vraiment l'air compliquées.

~~~
J'ai vraiment failli ne pas pouvoir le poster à temps ce chapitre 😭😭 (si je passais pas tout mon temps sur Mystic Messenger aussi)

Bref j'espère qu'il vous plaît tout de même et qu'il n'a pas l'air trop rushé

Kargisa~