18 bis. Un avant-goût de l'Enfer

Bon, j'ai écris ce chapitre avec l'album de Billie Eilish en fond, donc je vous préviens tout de suite, ça va pas être la joie (j'ai même failli pleurer à un moment ;-; ) <3 bon courage j'espère que ça vous plaira quand même ! et du coup tw mention de suicide, mort, et harcèlement

Quand Lance reprit conscience, la première chose qu'il sentit fut le froid.

Un froid terrifiant, glaçant, tel qu'il n'en avait jamais connu. Il lui semblait qu'il mordait ses os, pénétrait sa chair et s'enfonçait au plus profond de ses organes, comme si son corps était aussi fin que du papier de verre. Rien ne faisait barrière à ses effets ; il s'infiltrait partout, et il ne pouvait que céder à ses avances insistantes. Il n'était pas habituée à cette sensation amère, qui lui donnait l'impression d'être piqué par un million de petites aiguilles en même temps. Il avait l'impression d'avoir toujours eu de la chaleur auprès de lui.

Presque aussitôt, il ouvrit les yeux, mais ce fut comme si il les avait gardés fermés : autour de lui il n'y avait du noir, épais et silencieux. Pris de panique, il voulut se relever, mais debout, assis ou allongé, tout revenait au même : la marée d'encre dans laquelle il était plongé ne semblait pas vouloir se dissiper. L'anxiété afflua en lui comme une vague, qui remonta de ses poumons jusqu'à sa gorge. Il se prit le cou à deux mains, se sentant étouffer, et voulut hurler, mais en fut incapable. Terreur. L'omniprésence de ce sentiment balaya tout le reste, et même le froid vint se faire tout petit dans un coin de son esprit.

Il ne comprenait pas, que faisait-il ici, pourquoi faisait-il si noir, pourquoi ne pouvait-il pas crier ? Impuissant, il laissa retomber ses bras le long de son corps, les poings crispés, les nerfs tendus. Il tenta de se calmer, mais la panique avait déjà une trop grande emprise sur lui.

-Il y a quelqu'un ? cria-il.

Surprise de sentir ses cordes vocales fonctionner, il se rasséréna un petit peu. Tout n'était pas perdu s'il pouvait parler. Cela n'était sûrement qu'un mauvais rêve, mais il préférait quand même avoir l'usage de sa voix. Être muet et hurler sans être entendu avait toujours été l'une de ses plus grandes peurs.

-S'il vous plaît !

Aucune réponse, aucun son audible ne se fit entendre. Son soulagement n'avait été que de courte durée : à présent, au noir s'ajoutait la solitude. Sans qu'il le veuille, des larmes se mirent à rouler le long de ses joues. Un étau lui enserrait le coeur. Il ne voulait pas rester seul. Il avait besoin de quelqu'un, besoin de lui.

Lui : avant même qu'il eut pris conscience de qu'il était, c'est son souvenir qui lui était revenu. Lui. Il ne parvenait pas à se rappeler de son prénom, ou de son visage, encore moins du son de sa voix, mais il savait qu'il existait, et cette pensée agissait comme un baume sur les blessures créés par son angoisse. Tout allait bien aller s'il le retrouvait. Il lui avait promis qu'il serait là pour lui quand il n'allait pas bien. Il allait arriver.

Prudent, il s'avança un peu, hésitant où poser son pied dans le noir complet. Guidé par une seule pensée : le retrouver. Il devait être quelque part, forcément. Il avait maintenant l'espoir fou de trouver sa présence.

-S'il vous plaît ? Il y a quelqu'un ?

-Oh, je vois que notre petit humain est réveillé, déclara une voix chaude et doucereuse, grave et dangereuse.

Lance sursauta, et se mit en position de défense, le coeur battant.

-Qui êtes-vous ?

L'autre éclata de rire. Autour de Lance, il n'y avait que du noir. Incapable de voir où était son interlocuteur, il ne cessait de tourner et de se retourner, devenant fou à essayer de deviner d'où venait le son.

-Qui êtes-vous ? répéta-il, la voix cassé. Répondez !

En un éclair, une silhouette apparut à ses côtés. Il entr'aperçu un mèche de cheveux blancs, un bout de peau violette.

-J'espère que tu es prêt, car les plus faibles perdent vite leur sang-froid ici.

Que voulait-il dire par là ? La sensation d'une présence à ses côtés, sans qu'il puisse réussir à déterminer où elle était et ce qu'elle lui voulait, était plus anxiogène que jamais. C'était comme si on comprimait sa poitrine de telle sorte qu'il crut qu'il allait s'évanouir pour cause de manque d'oxygène. La confusion était totale, et il était incapable de savoir comment réagir ou encore comment faire pour ne serait-ce qu'apaiser les battements douloureux de son coeur.

-Je te laisse, j'ai à faire autre part. Amuse toi bien en attendant que ton baby-sitter vienne te sauver !

Puis, aussi rapidement qu'elle était apparut, il sentit la présence partir. Il s'aperçu alors qu'il aurait encore préféré qu'elle reste. Livré à lui-même dans ce lieu effrayant, il hurla du plus fort qu'il pu, à s'en rompre les cordes vocales. Désormais, les larmes coulaient abondamment sur ses joues froides. Paniqué, il s'avança, hasardeux, trébucha sur quelque chose et rétablit de justesse son équilibre. Quand il se pencha pour tâter ce qui avait bien failli le faire chuter, il faillit vomir. Sous ses doigts hésitants, il avait reconnu la forme d'un corps humain.

Presque aussitôt, comme pour accentuer l'horreur de cette macabre découverte, une lumière apparu, lui permettant de constater que son jugement n'avait pas été faussé, et qu'un homme gisait bien là. Choqué, il mit quelques instants à se rendre compte que la lumière ne venait pas, comme il l'avait tout d'abord cru, du sol. Elle venait de l'humain lui-même : tout son corps brillait d'une lueur jaune pâle, qui émanait de dessous sa peau. Son tee-shirt, ses cheveux et son pantalon étaient visibles en transparence, noires ombres qui le recouvraient partiellement. Lance s'approcha pour voir le visage du pauvre malheureux, et quand il voulut tourner son corps, un horrible craquement accompagna son mouvement. Le jeune homme retint un cri. L'être qui lui faisait face, tordu dans des angles improbables, était Keith. Il se rappelait de son nom !

Les souvenirs l'assaillirent en masse. Il revit le premier soir où il avait rencontré l'ange, à quel point il avait été subjugué par sa beauté. Puis leurs disputes, leurs sourires, leur amitié naissante. Ses sentiments, qui devenaient de plus en plus forts au fur et à mesure qu'il se surprenait à penser à lui dans la journée, à rêver de lui la nuit. Keith, qui maintenant lui faisait face, tel un pantin désarticulé qu'on aurait jeté sur le sol.

-Non !

Le cri lui avait échappé, et il venait du plus profond de ses entrailles. Penché au dessus du corps, il cherchait désespérément comment le soigner, comment faire revenir à la vie ces yeux qu'il aimait tant regarder. Mais l'ange restait inerte, malgré les supplications de Lance et ses caresses désespérées.

Désespéré, il tenta de le réanimer, appuyant comme on le lui avait appris sur sa poitrine par petites pressions. Mais il ne se souvenait plus du nombre réglementaire, et il hésita avant de lui faire du bouche-à-bouche, comme s'il s'agissait d'une zone sacrée. Inconsciemment, il aurait voulu l'embrasser depuis longtemps, mais pas comme ça, pas alors que la mort guettait l'ange. Il ne savait plus quoi faire. De toute manière, tout semblait perdu. Aucun pouls ne battait, aucune respiration n'était audible, sa poitrine ne se soulevait pas à un rythme régulier. Lance finit par se laisser tomber en travers du corps, ses mains toujours occupées à caresser la peau laissée nue par les vêtements, ses gémissements hachés de reniflements, qui peu à peu s'apaisèrent alors qu'il cédait au sommeil, le seul état dans lequel il n'aurait pas à supporter le poids de son coeur éploré et la douleur qui creusait son nid en lui.

Quand il se réveilla, le paysage autour de lui avait changé, et il se trouvait au coeur d'un jardin potager familier. Il lui fallut quelques secondes avant de se souvenir à qui appartenait celui-ci. La mémoire lui revint au même moment où une voix derrière lui l'appela tendrement. Il se retourna, et regarda, incrédule, son abuelita ramasser des tomates dans un grand panier en osier.

-Je t'ai dit de ne pas jouer ici, gronda-elle gentiment. Abuelito ne va pas être content si tu détruis ses plantations !

Son ton n'était pas celui qu'on utilisait pour parler à un jeune adulte. Lance baissa les yeux vers son corps, et se rendit compte qu'il avait l'apparence d'un petit garçon d'une dizaine d'années, avec des pansements aux genoux et des mains sales, comme s'il avait joué dans la terre.

-Allez, retourne à la balançoire avant que je ne t'attrape !

-Tu es trop vieille pour m'attraper !

-Vieille ? Tu vas voir si je suis vieille !

Lance était bizarrement pris d'une énergie frénétique et d'une envie folle de courir. Il se leva et elle le poursuivit sur quelques mètres, avant de le laisser gambader librement, un sourire aux lèvres.

-La prochaine fois, tu verras ! cria-elle.

Sauf qu'il n'y eu pas de prochaine fois. La seconde d'après, le décor autour de Lance ondula, puis devint flou et enfin se stabilisa complètement. Il se retrouva dans une école primaire, au milieu de dizaines d'autres enfants. Mais cette fois, il ne reconnaissait personne autour de lui. Pourtant, à en juger par l'apparence des gens autour de lui, il devait être resté dans la même tranche d'âge. Alors pourquoi n'avait-il aucun souvenir de cette école, alors que l'image de sa grand-mère avait été si claire dans son esprit ?

Il eu la réponse quand ses yeux rencontrèrent son reflet dans une vitre. Malgré la différence d'âge, il reconnut les traits de Keith, ses cheveux déjà plus longs que ceux des autres garçons. Il vivait un des souvenirs de l'ange !

Méfiant, il observa tout autour de lui. Agissait-il de son plein gré, ou reproduisait-il inconsciemment les mêmes gestes que le petit Keith des années auparavant ? Pourquoi se retrouvait-il ici ?

Ces questions ne furent que brièvement étudiées, alors qu'il repartit jouer avec les autres enfants en criant et en riant, parce que c'était ce qui lui semblait le plus naturel. Il lui semblait que rien n'était plus amusant que ce qu'il était en train de faire, à savoir suivre son instinct sans aucun doute. Quand la maîtresse vint le chercher d'un air triste, il avait déjà oublié qu'il n'était pas Keith, mais Lance. Son identité avait peu d'importance, seul comptait la joie de s'amuser.

Il la suivit jusque dans son bureau, située après la montée de trois longs escaliers. Intrigué, il se demanda ce qu'elle pouvait bien lui vouloir. Il avait été sage ces derniers temps, enfin, il croyait. Pourquoi faisait-il noir dans le bureau ? Elle lui dit de s'asseoir tandis qu'elle restait debout à côté de lui.

-Keith, j'ai une triste nouvelle à t'annoncer. Ton papa et ta maman on eu un accident de voiture tout à l'heure. Ils ne pourront pas venir te chercher à l'école ce soir. Ton grand frère Shiro va venir te récupérer après le collège. Il a été prévenu lui aussi.

Puis elle avait éclaté en sanglots avant de le serrer dans ses bras, tandis que Keith était resté de marbre, imperméable à l'annonce qu'on venait de lui faire. Un accident ? Mais pourquoi cela voulait-il dire qu'ils ne pourraient pas venir le chercher? Ce matin encore, sa maman lui avait dit qu'elle lui amènerait un pain au chocolat pour le goûter. Sa maman achetait des barres qu'elle mettait dans un pain au lait. C'était toujours très bon, et c'était le goûter des jours exceptionnels. Il lui avait fait coucou avant de partir. Sa maman ne devait pas être très loin, elle avait dû lui amener un goûter. Shiro aussi en aurait un. Ensuite ils iraient au cinéma. C'était quoi, un accident ? Ils avaient mal ? Ils avaient la jambe cassé ? Keith s'était cassé le poignet, une fois. Lance aussi. Ça faisait mal.

Il ne comprenait pas tout, mais voir sa maîtresse en pleurs lui faisait monter les larmes aux yeux.

*

Après ça, il y eu d'autres flashs. Des éclipses d'enterrement, de pleurs, de personnes habillées en noir qui regardaient d'un air attristé les deux pauvres enfants laissés orphelins. Et mélangés à tout ça, des souvenirs heureux de Lance, sa mère qui lui lisait des histoires avant d'aller dormir, ses frères et soeurs qui le réveillait par une bataille de polochon, son père qui embrassait sa mère et qui se mettait à danser avec elle au milieu du salon. L'enfance sombre de Keith entrecoupée de fragments de celle, lumineuse, de Lance. Puis l'adolescence, où il avait vu ses propres sorties avec ses amis, leurs rires, et la seconde d'après les moqueries et les brimades que subissait Keith. Plus ils avançaient dans le temps et plus les souvenirs s'enchainaient rapidement, comme s'ils étaient moins clairs dans leur mémoire, ce qui était ridicule et aurait dû être l'inverse.

Quand ce méli-mélo cessa, et que le silence et les ténèbres revinrent autour de lui, il en fut presque soulagé. Assister aux événements les plus douloureux de la vie de l'ange était presque aussi insupportable que s'il les avait vécu lui-même, car il se trouvait comme à l'intérieur de Keith qui revivait ses souvenirs, ressentant par extension les mêmes choses que lui. Et ce qu'il avait traversé était si noir qu'il en chancelait encore. Ce que Shiro avait raconté ne représentait même pas un quart de ce à quoi le jeune homme avait survécu. Enfin, survécu. Malheureusement, il semblait justement que Keith n'y avait pas survécu.

Alors que Lance se préparait pour ce qu'il savait être la suite logique des choses, il entendu du bruit derrière lui. Il reconnu la voix de Keith, mais pas le timbre aiguë de ses cinq ans. C'était la même voix qu'il connaissait depuis maintenant trois mois. Il sentit sa gorge se serrer. Il n'était pas sûr de vouloir assister à ça, surtout que Keith, le Keith qu'il connaissait, ne s'en rappelait même pas. Il avait la désagréable impression de violer son intimité, en s'immisçant malgré lui dans des scènes plus que personnelles. Mais sa curiosité pris le dessus, et il finit par se tourner, la respiration hachée, comme s'il allait fondre en larmes à tout instant.

Ce qu'il vit lui fit l'effet d'un coup dans le coeur. Le jeune homme se tenait face à lui, comme s'il lui parlait, avec l'exacte même apparence auquel il était habitué. Mais ses yeux regardaient quelqu'un que Lance ne pouvait voir, et les mots qui sortaient de sa bouche ne lui étaient pas adressés. Tremblants, ils s'évaporaient dans l'air sans jamais atteindre leur destinataire, des appels à l'aide que personne n'entendait.

-J'ai déjà tout essayé, Shiro ! Je suis juste pas fait pour ça !

Lance leva la main pour le toucher, et ne rencontra que le vide. Même s'il s'était attendu à ce que son action soit inutile, quelque chose en lui se craquela un petit peu. Il réalisait pour de bon qu'il n'avait aucun poids dans ce souvenir, aucun moyen d'agir et de changer ce qui allait se passer. Le cœur lourd, il détailla les traits de Keith, si familiers, si beaux. Il avait beau savoir qu'ils resteraient les mêmes dans l'au-delà, leur vue était douloureuse, car même si ce Keith-là n'était qu'une pâle copie de l'original, un écho, une réminiscence sans plus de consistance qu'un nuage de vapeur, à l'époque où il avait prononcé ces mots pour la première fois, il était vivant. Cette scène à laquelle il assistait s'était déjà déroulée plus d'une trentaine d'année auparavant, et Lance en connaissait l'issue. Il voyait le jeune homme en face de lui s'expliquer avec son frère, lui dire qu'il n'y arrivait plus, qu'il ne voulait plus aller en cours. Sans explicitement mettre ses tourments en mots, il voulait faire comprendre qu'il était arrivé au bout de ses limites. Mais Shiro, qui tout ce temps avait été tenu ignorant de tout ce que traversait son cadet, ne voulait rien entendre.

- J'ai tout sacrifié pour que tu puisses avoir une bonne éducation, un logement, que tu puisses vivre ta vie sans te soucier des questions d'argent ! Et tu me dis que tu veux tout arrêter ? N'as-tu donc pas idée de ce que tu fous en l'air?

Sa voix résonnait autour de Lance comme diffusée à travers des haut-parleurs. Il ne pouvait donc voir l'expression de son visage, mais celle de Keith exprimait assez bien la violence de ses paroles sur lui. Bien sûr, Shiro n'était pas à blâmer. Il n'avait aucune idée de tout ce qui s'était passé, et pour lui, le bonheur de son frère était le plus important, seulement il en avait une vision différente. Chacun des deux tenait à l'autre, mais aucun ne l'exprimait de la bonne façon, celle qui aurait permis de se comprendre. Pour un spectateur qui connaissait le point de vue des deux parties, il était plus dur encore d'observer à la scène sans pouvoir agir. Lance regardait la situation dégénérer et le ton monter, impuissant, sachant que le compte à rebours était déjà lancé, et qu'il ne pourrait rien faire.

Quand Keith, les yeux baignés de larmes, finit par partir en claquant la porte, le noir se fit et le silence s'installa. Ainsi, Lance serait épargné de la scène à laquelle il se préparait mentalement depuis tout à l'heure. Il n'en éprouvait aucun soulagement, car qu'il en soit témoin ou pas, elle aurait tout de même lieu. Il s'avança de quelques pas, se trouvant là où l'image de Keith hurlait encore il y avait à peine deux minutes, et il attendit. Il avait mal à la tête, envie de vomir, de se rouler en boule et de ne plus bouger. Son cœur battait comme s'il allait sortir de sa poitrine à tout instant, et aucune pensée, aucune tentative de relaxation n'aurait pu agir efficacement. A tout instant, Keith pouvait apparaître de nouveau. Lance savait qu'à ce moment, il ne pourrait retenir son chagrin. Mais en attendant, il était au bord des larmes et d'un précipice de douleur, sans pour autant tomber dedans, comme s'il avait encore l'espoir, comme si l'histoire allait changer.

Après ce qui lui parut une éternité, une lumière s'alluma tout près de lui. Avant même qu'il puisse vérifier de qui il s'agissait, il éclata en sanglots en tombant à genoux, le corps agité de soubresauts incontrôlables. Il se traîna à quatre pattes jusqu'à la source d'éclairage. Il s'agissait du même corps auprès duquel il avait pleuré à son arrivée ici. Même s'il l'avait su, s'il avait deviné à quoi conduirait toute cette mascarade de souvenirs en apparence sans queue ni tête, l'avoir en face de lui était pire que ce qu'il avait imaginé. Il avait cru que s'y attendre réduirait la souffrance, mais il n'en était rien, et ses gémissements résonnaient, seule source de bruit dans les ténèbres environnants. Le corps de Keith était habillé du même tee-shirt noir, du même pantalon qu'il portait depuis que Lance le connaissait. Les mêmes habits que la scène qui s'était joué juste avant. Les vêtements avec lesquels il était mort.

Lance essuya les taches de sang qui gouttaient sur le sol, les dernières traces de la vie qui s'échappait de lui. Il pleura longtemps, entourant Keith de ses bras et le berçant jusqu'à ce que sa peau soit froide, le regard vide, l'esprit embrumé, la main caressant ses cheveux noirs, lui répétant que tout irait bien. Peut-être qu'au fond, c'était à lui-même qu'il se disait cela.

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