Chapitre 79 Elena (Tome 2)

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Bonne lecture !

***

Je serrai Grey dans mes bras.

Jamais au début de l'année scolaire je n'aurais pensé qu'il allait me manquer à ce point, mais c'était bel et bien le cas. Je savais qu'on pourrait se voir de temps en temps étant donné qu'il vivrait à New Haven et nous à New York, mais ce ne serait pas pareil.

Dès le moment où je lui avais sincèrement offert mon amitié, il s'était empressé de la saisir et devenir une personne vraiment importante pour moi. Il avait tellement fait, que ce soit en aidant Tyler ainsi qu'Ethan à filtrer le dossier de Jackson dans la presse en jouant des influences de sa famille ou en donnant l'argent dont son demi-frère avait besoin pour quitter le monde du crime organisé. Il ignorait à quel point son cœur était bon, moi-même j'avais voulu me convaincre au tout début qu'il n'était qu'un sale gosse de riche qui s'amusait à faire du mal aux autres pour son petit plaisir, mais au fond, ce n'était rien d'autre qu'une façade afin de se protéger.

J'espérais vraiment qu'à Yale les choses seraient différentes et que dans sa fraternité, il pourrait tisser des liens avec ses nouveaux « frères », se faire de nouvelles amitiés qui en vaudraient le coup. Derrière son air renfermé, Reid ne demandait qu'à être aimé et accepté en réalité, je l'avais parfaitement compris.

Encore dans l'étau de ses bras, il me serrait fort contre lui, malgré le fait que Mayim et Drew soient là, il n'en avait visiblement rien à faire. Tous deux nous avions fini par nous porter une certaine tendresse, j'espérais qu'avec le temps et la distance, ça ne changerait pas.

Reid me lâcha finalement et posa ses mains sur mes épaules, qu'il comprima avec délicatesse, avant de m'adresser l'un de ses petits sourires en coin, de ceux qui me rappelaient incontestablement Tyler. Je ne cessai de me surprendre d'à quel point tous deux pouvaient se ressembler sur le plan physique, mais également en personnalité. Ils n'étaient définitivement pas frères pour rien.

— On se revoit bientôt, déclara-t-il en caressant amicalement ma joue et en me faisant un clin d'œil.

— Il y a intérêt ! J'espère que tout se passera bien pour toi. Fais attention à la route.

Il se retourna vers sa Jeep pleine à craquer de cartons et je sus exactement pourquoi il ne prenait pas l'avion comme Drew, Ty et moi. Visiblement, il voulait complètement effacer sa présence du manoir en emmenant toutes ses affaires. Je me doutais qu'il n'avait aucune intention de revenir dans le coin, pas même pour voir ses parents. À vrai dire, c'était fort compréhensible vu la relation inexistante qu'il entretenait avec son père et sa mère. Ça ne m'étonnait pas.

— Prudence est mon deuxième prénom, plaisanta-t-il.

— Si j'avais su, je t'aurais appelé Prue depuis bien longtemps, renchérit Drew en un ricanement.

Nous pouffâmes tous à l'unisson et de loin, Grey souhaita à sa cousine et à notre ami beaucoup de chance dans cette nouvelle étape de notre vie. Il me donna une petite tape au niveau du bras et contourna sa voiture pour finalement, s'engouffrer sur le siège conducteur avant de la démarrer. Il appuya sur l'accélérateur, s'éloigna de la chaussée et avança jusqu'au rondpoint qui se trouvait au bout de la rue pour faire demi-tour et ainsi quitter le quartier.

Sur le trottoir, Mayim, Drew et moi restâmes quelques instants sans ne rien dire. Ça allait vraiment me faire bizarre de ne plus voir Grey autant qu'avant, il allait me manquer.

— Du coup, tu fais quoi pendant ces vacances ? demanda le blondinet à notre amie.

— Me la couler douce avec Tony et commencer les cours en septembre. L'idée de faire des stages d'été me fichait la migraine.

Je comprenais bien pourquoi, j'aurais aussi aimé passer les dernières vacances en mode détente, mais j'avais vraiment envie de me plonger dans mes études. J'allais m'y donner corps et âmes pour avoir mon bachelor en quatre ans, puis je poursuivrais avec un master et si je le pouvais, je sortirais première de ma promotion afin d'avoir encore plus de possibilités d'obtenir un travail après mes études. Conseillère d'orientation, c'était vraiment ce que je voulais faire, aider les autres à trouver leur voie que ce soit dans le domaine professionnel, scolaire ou tout simplement dans vie. J'étais douée pour écouter etarranger  les problèmes des autres, plutôt que les miens parfois.

— Vous allez trop me manquer, pleura Mayim en nous prenant Drew et moi dans ses bras. Vous êtes mes meilleurs amis et jamais en déménageant ici je n'aurais pensé que de si belles choses m'attendaient.

Je la serrai doucement contre moi et caressai tendrement l'arrière de son crâne. Je pouvais comprendre sa peine, moi-même je ressentais quelque chose de similaire, mais contrairement à elle, j'allais être avec Tyler et Drew. Elle n'aurait que Tony, même si j'étais certaine que ça lui serait amplement suffisant.

Toutefois, nous ne savions pas quand est-ce que nous allions nous revoir. Ça pouvait être dans quelques mois, comme dans quelques années, nous n'en savions rien. Avec la fin de notre adolescence, tout était un peu sens dessus-dessous, nous étions encore un peu paumés dans les chemins que nous nous apprêtions à emprunter. 

— Allez, on se retrouvera pour ton mariage, ici tous ensemble. D'accord ? dit Andrew.

Mais de quel mariage parlait ce cinglé ?

Mayim ricana et nous relâcha, tout en essuyant ses larmes du revers de sa manche.

— Faisons un pacte, si je suis la première à me marier, peu importe ce qui se passera, vous devrez être là, vous ne pourrez pas vous défiler. C'est vous qui organiserez mon enterrement de jeune fille et qui serez mes demoiselles d'honneur !

— Hey ! se plaignit notre ami. Je suis peut-être gay, mais je ne suis pas une fille !

— Tu m'as compris. Mon damoiseau d'honneur, alors ?

— Voilà, je préfère.

Je rigolai à gorge déployée, qu'est-ce que ces petites joutes verbales entre eux deux allaient me manquer. Je la pris une nouvelle fois dans mes bras et l'embrassai sur la joue. Peut-être bien que je ne le lui avais pas assez dit, mais je lui étais vraiment reconnaissante d'avoir fait le premier pas cette journée-là, lors de notre premier cours de français ensemble. Elle m'avait beaucoup aidé et j'ignorais si elle était consciente d'à quel point je tenais à elle.

— T'inquiètes pas, on se reverra, sois-en certaine.

Nous partions dans deux jours, à six heures du matin pour New York, ce qui voulait dire que nous devrions être à l'aéroport au moins deux heures avant. Alors nous partirions de Dayton sans aucun doute à trois heures du matin, nos familles ne seraient pas avec nous pour nous accompagner, ni aucun ami proche. Simplement, Tyler, Drew et moi. Nous appellerions un taxi pour qu'il nous emmène jusqu'au terminal.

— On s'appelle ! décrétai-je en m'éloignant vers ma voiture.

— Oui ! Dîtes-moi lorsque vous serez installés, on se fera un Skype et vous me montrerez l'appart !

— Promis ! Je t'aime ! déclarai-je en lui faisant un clin d'œil complice.

— Et moi alors ? jalousa Andrew en croisant les bras sur sa poitrine et en prenant un air grognon.

Il avait assurément décidé de me faire rire aujourd'hui.

— Toi aussi je t'aime !

— Idem, ma belle !

Je les saluai tous deux d'un geste de la main et montai dans ma Ford avant d'emprunter le même chemin que Grey quelques minutes plus tôt.

J'avais encore certaines petites choses à préparer pour que tout soit à point lors de mon départ. Étant seule à la maison pendant toute l'après-midi, j'allais en profiter. Teagan était parti avec des amis à la plage, Chris était avec sa petite bande, Dani était allé à un anniversaire, Blue était chez sa nourrice et ma mère travaillait.

En tout cas, avoir un petit peu la paix pendant les vacances était un véritable luxe. Avec mes frères et ma sœur, c'était toujours le boucan, sans parler de mon cousin qui en leur compagnie retournait en enfance.

Même si mes bagages étaient prêts depuis au moins deux semaines, je devais les revérifier, afin de faire du ménage dans tout ce que j'avais pris. On dira qu'il s'agissait de la dernière phase avant que tout soit fin prêt !

***

À peine rentrée, que je m'étais assise dans le par terre de ma chambre, mes deux grandes valises ouvertes. Mon coude appuyé sur mes jambes pliées en tailleur, mon menton reposait sur la paume de ma main, tandis que je regardais tous ces vêtements et que j'essayais au mieux d'analyser la situation. L'état de New York n'avait rien à voir avec le Texas, certes en été il faisait chaud, un peu comme dans tout le pays, mais une fois l'automne arrivé, les températures modérées d'ici je ne les retrouverais pas là-bas. Je devais donc prendre quelques habits frais pour cet été et en prendre des plus dodus afin de pouvoir affronter le froid du nord, au moins avant que l'hiver n'arrive. J'étais consciente que je devrais refaire une certaine partie de ma garde-robe, mais autant repousser l'échéance le plus possible.

Soudain, la sonnette d'entrée retentit et je fronçai les sourcils. Je regardai l'heure, il était exactement quinze heures trente et je n'attendais personne. Je me relevai, malgré que mes jambes soient endormies, et descendis au rez-de-chaussée où je me dépêchai d'aller ouvrir la porte.

On sonna à nouveau, à croire que j'étais beaucoup trop lente pour la personne qui se trouvait de l'autre côté du battant.

— J'arrive ! hélai-je pour qu'elle arrête d'appuyer sur la sonnette.

Mais qu'est-ce qu'il pouvait y avoir d'aussi urgent franchement ?

Je tournai la poignée de la porte et l'ouvris en grand pour retrouver Tyler tout juste en face de moi, un peu en retrait. C'était bizarre, il ne m'avait pas dit qu'il comptait passer, à vrai dire, je n'avais pas vraiment eu le temps d'être avec lui ou de lui parler ces derniers jours. Nous avions plein de choses à faire, chacun de notre côté, avant notre départ. On pouvait parfaitement dire qu'on était débordés et qu'on n'avait de temps pour rien.

Toutefois, le voir me fit énormément plaisir, alors avant même qu'il ne dise quoi que ce fut, je lui sautai littéralement dessus et m'accrochai à son cou avant de plaquer mes lèvres sur les siennes. Je mentirais si je disais qu'il ne m'avait pas manqué ces derniers jours. Il sembla surpris par mon entrain, car, il mit quelques secondes à réagir et à me rendre mon baiser.

Il posa délicatement ses mains sur mes épaules et me sépara de lui, avant de prendre mon visage en coupe et déposer un baiser sur mon front, chose qui m'étonna. Généralement, il ne ratait jamais une occasion pour me faire perdre la tête avec ses baiser langoureux et remplis de passion. Pourquoi était-il si chaste tout à coup ? Peut-être pensait-il que mes frères étaient à la maison ? Non, ce ne pouvait être ça, auparavant, ça ne l'avait jamais empêché de me rouler une pelle, alors je me doutais que ce n'était pas maintenant qu'il allait commencer.

— Ça va ? lui demandai-je en lui saisissant les poignets pour les serrer tendrement.

Il portait un t-shirt qui moulait son buste, ainsi qu'un pantalon en jean qui devait marquer à la perfection son derrière d'enfer. Dommage que je ne puisse pas faire le tour pour le mâter, car ce n'était pas très discret.

— Tu es toute seule ?

Je hochai la tête et le contemplai avec une certaine envie. Ça faisait bien deux semaines qu'on n'avait pas fait l'amour et maintenant qu'il était là, j'avais vraiment envie de remettre ça. Pendant ces quelques jours, j'avais été tellement enfouie dans les préparatifs de notre départ, que je m'étais pour ainsi dire interdite de penser à lui et à nos soirées pleines de passion. Mais désormais qu'il était là, il m'était presque impossible de ne pas m'enflammer de la tête aux pieds.

— Oui, tu veux entrer ? lui proposai-je d'un timbre de voix qui ne pouvait pas porter à confusion, tout comme mon regard.

Je me collai à lui et passai mes bras derrière son dos, pour les reposer tout juste au creux de ses reins, sans cesser de le contempler de cette manière vorace qu'il m'avait dit plus d'une fois adorer voir dans mes pupilles.

— Je pensais plutôt à une balade, dit-il en faisant omission de la proposition que j'étais en train de lui faire.

Pour ainsi dire, je m'offrais sur un plateau à lui et il préférait aller je ne sais où se promener ? Il était malade ?

Automatiquement, je portai une main à son front afin de voir s'il n'avait pas de la fièvre, car son comportement était en train de fortement m'inquiéter. Tyler, laisser passer une occasion de coucher avec moi ? Il était définitivement souffrant. Bon, il pouvait ne pas en avoir envie, il était dans tous ses droits bien évidemment, mais je trouvais cela tout simplement très bizarre.

— Euh... qu'est-ce que tu fais ?

— Je m'assure que tu n'es pas malade.

Il attrapa mon poignet et cligna des paupières à plusieurs reprises, avant de pouffer, même si je remarquai qu'il se réprimait. Qu'avait-il ? Était-il nerveux face à notre départ ? Après tout, toute sa vie il n'avait connu que Dayton, il n'avait jamais vécu nulle part ailleurs. Oui, ce devait être sans doute ça.

— Je te propose un tour en moto, comme aux bons vieux temps, se reprit-il.

Je l'observai pendant quelques instants, dubitative. Étant donné que nous partions en avion, sa belle bécane resterait ici, d'après ce que j'avais cru comprendre, Tony veillerait et prendrait soin d'elle – oui, oui, comme si c'était son gamin. Je devais bien avouer que cette beauté allait me manquer, ainsi que nos balades à l'air libre en roulant à toute vitesse, sentant le vent frôler mes joues et m'aidant à me sentir plus vivante que jamais. Alors peut-être que Tyler voulait lui faire ses adieux – pas définitifs, jamais il n'abandonnerait son petit bijou – et qu'il désirait en profiter avec moi.

— D'accord, acquiesçai-je enfin, un sourire en coin. Je vais enfiler des chaussures et je te rejoins.

Il hocha tout simplement la tête et se défit de mon emprise, avant de se retourner, descendre les marches du perron et d'aller m'attendre près de sa bécane.

Une fois à l'intérieur de chez moi, je remontai au premier étage afin de mettre mes baskets, en même temps qu'une espèce de petit doute s'insinuait en moi. Je ne savais pas pourquoi, mais je sentais comme une certaine tension, je n'aurais su le dire pour être honnête. Mais peut-être qu'il était juste à fleur de peau et que je me faisais des films. Oui, c'était sans aucun doute ça.

Une fois prête, je sortis de la maison et fermai la porte à clé, avant de traverser la rue afin de rejoindre Tyler, qui en me voyant sortir, avait mis son casque et enfourché sa moto. Une fois près de lui, il me tendit le casque spécial passagers et je le plaçai convenablement sur ma tête, pour finalement, m'asseoir à califourchon et passer mes bras autour de sa taille pour me tenir à lui. J'enfonçai mon visage dans son dos et humai son parfum tellement enivrant. Il se raidit pendant quelques secondes, mais finalement, enleva la béquille et la démarra.

***

La route ne fut pas très longue, j'ignorais où il voulait m'emmener jusqu'à ce qu'il gare la moto devant une plage. Ce fut là que je reconnus la plage, ou plutôt, notre plage, celle où nous étions venus quelques mois plus tôt, au début du mois de novembre, après qu'il m'avait eu dit qu'il me choisissait. Nous étions en plein lycée et il m'avait proposé de sécher les cours. Pendant toute la matinée, j'avais été anxieuse de connaître sa réponse et bien que maintenant je sache qu'il s'agissait d'un mensonge, ça ne me gênait pas autant qu'avant. Je comprenais les raisons pour lesquelles il ne m'avait pas dit la vérité, je ne lui en voulais plus. C'était également ici qu'il m'avait dit m'aimer pour la première fois. 

Je descendis de la bécane et enlevai mon casque. Je sentais à peine mes joues à cause de la vitesse et du vent qui les avait frappées, mais ce genre de balades allaient me manquer une fois à New York. Peut-être pourrions-nous trouver un moyen pas très cher pour emmener la moto jusqu'à là-bas dans quelques mois.

Malgré le fait qu'on soit proches de l'été, il manquait toujours juste quelques jours avant d'être le vingt-et-un du mois, et qu'il fasse chaud, la plage était déserte. Ce n'était pas la principale du coin, elle était un peu plus reculée, ce qui donnait un peu plus d'intimité. Je n'étais venue ici qu'une fois – deux en comptant celle-ci –, mais j'adorais cet endroit et l'odeur qu'il dégageait. Ça sentait la mer, la liberté. Je pouvais également entendre les mouettes au loin et les repérer près de la rive.

— Tu viens ? me sortit Tyler de ma contemplation en me tendant la main.

Je lui souris et la lui saisis, avant d'enrouler mes doigts autour des siens. Sa poigne chaude était rassurante, familière, tout comme la pression qu'il exerçait.

Nous longeâmes la promenade toute faîte en bois qui parcourait une partie de la côte, dommage qu'il n'y ait pas de jetée comme à Holly Beach.

— Tu veux aller te baigner ? lui demandai-je.

Après tout, il faisait assez chaud et je commençais à avoir envie de tremper mes pieds dans l'eau. J'étais certaine qu'elle devait avoir une température idéale.

— Pas vraiment, répondit-il d'une voix éteinte.

Je fronçai les sourcils, mais me disait que son humeur maussade avait à voir avec notre départ. Il devait être nerveux, puis j'étais certaine qu'il s'en voulait d'une certaine manière de partir en laissant sa grand-mère et sa sœur ici. Je pouvais parfaitement le comprendre, parfois, j'avais l'impression d'abandonner ma famille. Alors il m'était aisé de me mettre dans ses baskets.

S'il ne souhaitait pas en parler, je n'allais pas le forcer, je désirais seulement lui remonter le moral et lui rappeler que d'ici quelques mois, nous reviendrions pour fêter Thanksgiving ou Noël avec nos proches. Partir pour New York ne signifiait pas disparaître pour toujours, simplement vivre ailleurs. Puis il existait les appels vidéo, on pourrait voir notre famille derrière un écran ! Certes, ce n'était pas pareil que d'être auprès d'eux, mais c'était mieux ça que rien du tout.

Le pouce de mon copain faisait des petits cercles sur le dos de ma main, de manière incessante, c'était presque devenu un tic. Je le voyais aussi de temps à autres serrer les mâchoires, le regard droit devant lui et fronçant les sourcils. Il ne m'accordait même pas un coup d'œil, chose étrange venant de lui, il ne ratait aucune occasion pour me dévorer du regard. Il devait vraiment s'en vouloir et être enfoui dans ses pensées.

Ainsi, je poussai un léger soupir, arborai un sourire sur mes lèvres et mis tous ces doutes dans un coin de ma tête. Tout allait bien se passer, c'était l'appréhension du départ, de l'inconnu. Je ne voulais pas dire que ça allait être simple, loin de là, mais tant que nous resterions ensemble, tout irait bien.

J'entrepris de me coller un peu plus à lui et de passer son bras par-dessus mes épaules avant de passer le mien autour de sa taille. Il tourna enfin le regard vers moi et me fixa, l'air interloqué, puis finalement, un petit sourire s'esquissa sur le coin de ses lèvres au même moment qu'il serrait délicatement mon épaule.

Il sembla se détendre au fur et à mesure que nous avancions sur la promenade. Le bruit de la mer était vraiment très relaxant, puis le fait qu'il n'y ait pratiquement rien aux alentours rendait l'endroit vraiment paisible.

J'aimais vraiment cette plage, c'était encore un autre petit coin à nous.

Arrivés à la fin de la promenade, il n'y avait pas une jetée, mais plutôt une espèce de petit observatoire qui se trouvait sur des piliers tout juste au-dessus de la mer. Le soleil au loin était tout bonnement magnifique et j'avais été tellement absorbée par ce moment de quiétude avec Tyler, que j'ignorais même quelle heure il était, mais sans aucun doute plus de dix-sept heures maintenant.

Je m'appuyai contre la rambarde et contemplai la mer, le soleil se reflétant tel un miroir sur elle. C'était un beau spectacle et je devais bien avouer que cette balade me faisait du bien, ça faisait trop de jours que j'étais restée enfermée chez moi, obsédée par les derniers préparatifs.

— Une fois à New York, il faudra qu'on achète des vêtements d'hiver, me souvins-je. Pas dans l'immédiat, mais il ne faudra pas attendre non plus à nous retrouver sans rien à nous mettre sur le dos.

Mains appuyées sur la rambarde et bras tendus tel un arc, Tyler ne virevolta même pas vers moi lorsque je fis ce commentaire. Il serrait les mâchoires et semblait encore plus nerveux que depuis qu'il était venu sonner à ma porte.

J'observai ses réactions, il serrait tellement les muscles de ses bras, que je pouvais facilement les voir rouler sous sa peau. Une espèce de petite alerte se déclencha à l'intérieur de moi, faisant battre mon cœur la chamade et remplissant mon esprit de tout un tas d'insécurités, que j'essayais de balayer du mieux que je pouvais.

— Tu n'as presque pas ouvert la bouche depuis que tu as débarqué chez moi.

Il n'était pas du genre à garder le silence, même quand ça n'allait pas, il ne me laissait jamais voir que quelque chose le tracassait. Il souriait puis se montrait aussi bavard et câlin comme à son habitude. Ce manque de contact physique commençait également à m'inquiéter, il faisait généralement tout pour me prendre dans ses bras ou m'embrasser, et ce, même s'il n'était pas forcément dans son assiette.

— Je ne peux plus continuer comme ça, Elena, dit enfin sa voix rauque, sans pour autant me regarder. Je n'y arrive plus.

Je fronçai les sourcils, ne comprenant pas ce qu'il voulait dire par là.

— Je suis aussi nerveuse de quitter la maison, tentai-je de le rassurer, m'imaginant qu'il faisait référence à notre départ, mais ça va bien se passer. D'accord ? On sera ensemble, c'est ce qui compte.

Je posai une main sur la sienne, mais il la retira brusquement, avant de se tourner vers moi et me fixer de manière presque glaciale. Son geste me fit l'effet d'une douche froide. Mais qu'est-ce qu'il lui prenait ? Je ne comprenais absolument plus rien, avais-je fait quelque chose pour le contrarier ?

— Tu commences à me faire peur, Tyler.

Ma voix tressauta sans que je ne le veuille vraiment, mais en ce moment, mes nerfs étaient vraiment à fleur de peau tandis que mon esprit se posait tout un tas de questions.

— De quoi tu parles ?

— De toi et moi, lâcha-t-il enfin, comme s'il se libérait d'un immense poids. J'ai voulu y faire abstraction pendant la plus grande partie de notre relation, mais nous sommes bien trop différents. Nous appartenons à des mondes opposés.

Encore avec cette rengaine débile ? Mais qu'est-ce qu'il lui prenait à la fin ?!

— Ty... mais qu'est-ce que tu...

— Ça ne marchera pas, certifia-t-il. Tu pensais sérieusement qu'on finirait notre vie ensemble ? C'était bien tant que ça a duré, mais il nous faut revenir à la réalité, Elena.

J'avais l'impression de recevoir gifle sur gifle à chaque nouveau mot qu'il prononçait. Non, ce n'était pas possible, il ne pouvait pas me faire ça ! J'étais en train de faire un cauchemar, Tyler ne me ferait jamais une chose pareille !

— Qu'est-ce que j'ai fait ? murmurai-je.

— Ce n'est pas ta faute, j'ai juste laissé ça durer trop longtemps, soupira-t-il en enfouissant ses mains dans ses poches. Le lycée est fini, nos chemins se séparent, point barre.

Grand dieu, mais que s'était-il passé en ces deux dernières semaines pour qu'il change à ce point d'avis ? Je ne comprenais absolument plus rien à rien !

— Je ne peux pas me permettre le luxe de partir, pas comme toi.

— Si c'est à cause de ta famille... je peux encore demander à aller à l'université de Houston ! Jackson est en prison, plus rien ne m'empêche d'aller là-bas.

Je le pensais vraiment, qu'importait New York ou Houston, la seule chose que je voulais c'était être auprès de lui. 

Il serra les mâchoires et leva les yeux au ciel, avant de soupirer, grandement agacé.

— Le fait que tu restes ne changera rien, Elena. Je ne veux pas être avec quelqu'un qui m'en voudra de lui avoir coupé les ailes au moment de vouloir accomplir son rêve.

— Mon rêve, ce n'est pas Columbia ou New York ! clamai-je, en perdant peu à peu les nerfs. C'est d'être avec toi, pour moi, rien n'a de sens si tu n'es pas là !

Il ne pouvait pas me faire une chose pareille. Pas maintenant, pas alors que tout prenait un sens dans nos vies et que nous nous libérions de nos vieux démons.

— Je t'aime ! déclarai-je en avançant vers lui, mais il recula de deux pas.

Ce fut alors qu'il me regarda droit dans les yeux et qu'il dit d'une voix plate ainsi qu'extrêmement calme :

— Mais pas moi.

En l'entendant prononcer ces mots, le monde autour de moi commença à s'écrouler, à se déchirer en lambeaux, tout comme mon cœur ainsi que mon âme. En réalité, tout mon être criait de désespoir, même si aucun son ne sortait de ma gorge. Un énorme poids commença à comprimer ma poitrine et une boule se forma en plein milieu de ma gorge, m'empêchant de respirer. J'avais l'impression de me noyer en plein milieu de l'océan et qu'il n'y avait personne pour me porter secours. 

Je n'arrivais pas à concevoir ce qu'il venait de me dire. Avais-je mal entendu ? Étais-je vraiment dans un cauchemar ? Non, c'était bien réel, un rêve ne me ferait pas aussi mal et ne me détruirait pas émotionnellement à ce point.

— Je ne suis plus amoureux de toi, Elena.

Et cette dernière phrase finit par m'achever complètement. 

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Voilà... 

Vu la fin du chapitre 78, vous vous doutiez bien ce qui allait se passer. Ce n'est pas fini, la semaine prochaine, le chapitre 80 sera du point de vue de Tyler et vous verrez ce que lui-même ressent et plus encore.

CEPENDANT, il y aura une surprise demain, je ne vous dis pas encore quoi, mais soyez attentifs vers 20h, je publierai une nouvelle partie en annonçant une nouvelle que vous attendez depuis quelque temps déjà. Ça a à voir avec un personnage qui apparait dans ce chapitre 😉 Tentez de deviner 😏

Donc on se retrouve demain pour cette surprise et on se retrouve VENDREDI PROCHAIN à 20h pour la fin de ce deuxième tome avec la publication du chapitre 80 et de l'épilogue ! 

Passez un bon week-end ! 

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