Chapitre 27 Elena (Tome 2)

— Tu as déjà acheté le cadeau de Mayim ? me questionna Drew, alors que nous étions à la queue du self.

Sa fête d'anniversaire était dans deux jours et je n'avais toujours pas trouvé de cadeau. Je comptais aller demain à Baytown, au grand mall pour voir si je trouvais quelque chose de joli. Sinon, j'irais au magasin de Mr Schreiber, le seul bijoutier de tout Dayton. Son magasin avait des allures d'Alcatraz étant donné qu'il se trouvait dans le quartier de la ville que lui-même qualifiait de « chaud », la boutique se trouvant à environ deux pâtés de maisons de chez Tyler.

— Non, toujours pas, avouai-je.

Une fois, alors que ma mère et moi nous y étions rendues afin d'acheter des boucles d'oreilles pour bébé pour Blue, Mr Schreiber avait alors commencé à pester quant à ses voisins latinos, m'arrachant plus d'une fois des soupirs agacés. Apparemment, la boutique appartenait à sa famille depuis des générations et avec la déferlante d'immigrants mexicains, le quartier qui en était un respectable, était alors devenu celui des « voyous ». C'était avant que je ne commence à sortir avec Tyler, mais ce genre de propos racistes me gênaient déjà même si je gardais mon opinion pour moi, après tout, les gens en avaient très peu affaire de ce que pouvait penser une personne de mon âge. Mais désormais je ne pouvais tout simplement pas supporter ces propos plein de haine.

C'était à cause de ces rumeurs débiles qu'on avait peur de quelque chose qui en réalité n'existait pas.

La mère de Nacho avait son magasin tout juste à côté de la bijouterie et c'était une femme vraiment agréable, d'ailleurs, son fils sous ses airs de rebelle, l'aidait énormément d'après ce que Tyler m'avait dit.

Toutefois, Mr Schreiber disait qu'ils ne faisaient que lui causer des soucis et qu'ils étaient trop bruyants. C'était bien vrai que les hispaniques avaient une toute autre manière d'être, étant très ouverts et parlant beaucoup et surtout assez fort, mais ce n'était pas pour autant méchant. C'était tout simplement leur culture.

— Et toi ?

— Ouais ! dit Drew, tout fier de lui.

— Qu'est-ce que tu lui as pris ?

Puis il ricana.

— Hors de question que je te le dise, je n'ai pas envie de me faire doubler, jeune fille !

— Genre ! me marrai-je. Comme si c'était mon style de copier les autres ! J'ai plus de personnalité que ça, voyons !

— C'est exactement ce qu'un copieur en puissance dirait, me taquina-t-il, sourire en coin.

Je levai les yeux au ciel et avançai avec mon plateau après l'avoir rempli de deux fruits et d'un yaourt. La nourriture de la cantine n'était pas très appétissante, je préférais m'en tenir le plus loin, si possible.

En me tournant vers la salle, cette dernière était bondée comme à tous les midis, mais j'arrivais toujours à bien repérer la table qu'occupaient Tyler et les garçons. Je les discernai assez vite, mais Ty manquait à l'appel.

Mayim était assise avec Tony et elle nous fit signe à Drew et à moi de les rejoindre, mais je vis Pablo en train de faire l'idiot et n'ayant pas envie de le supporter, je continuai ma route, sans mon ami qui me laissa toute seule pour aller à leur table.

Un peu surprise, je me retrouvai quelques minutes plus tard, assise en train de manger toute seule, à une table vraiment éloignée des autres. Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas retrouvée aussi seule lors de ma pause déjeuner et c'était super bizarre, étant limite mal à l'aise.

Je comprenais que Mayim ait envie de passer du temps avec Tony, mais Drew ? Il n'avait rien affaire à cette table, surtout quand l'autre débile de Pablo semblait être déchaîné à raconter ses blagues douteuses.

Enfin bref, il faisait ce qu'il voulait, mais je trouvais ça très étrange qu'il m'ait laissée toute seule alors que quelques secondes à peine auparavant, nous rigolions et plaisantions.

Pour être honnête, je n'étais plus du tout habituée à la solitude.

Je soupirai lourdement, sentant une espèce de poids très énervant au niveau de ma poitrine, me donnant la sensation que j'allais me noyer. Et ça avait commencé lorsque j'avais vu que Tyler n'était pas là.

N'ayant pratiquement pas fermé l'œil de la nuit, je n'avais cessé de ressasser notre conversation dans ma tête, mais surtout, le fait qu'il m'ait repoussé comme ça. Je n'allais pas le nier, il m'avait blessée.

Peut-être aurais-je dû aborder le sujet de manière différente... même si au fond, je savais que quoi que j'ai pu dire, il aurait réagi de la même manière. J'imaginais pourquoi il n'aimait pas en parler, cela avait dû vraiment être dur d'apprendre une telle vérité.

Les pièces du puzzle avaient commencé à s'assembler, mais il en manquait encore une bonne partie pour qu'il soit complet. Je mourais d'envie de savoir, ne pouvant pas le nier, pourtant, je savais que je ne devais pas le presser. Lorsqu'il en ressentirait le besoin, il se confierait sans doute à moi.

Et si jamais il ne ressent le besoin de le faire ? dit la petite voix sinueuse que je détestais.

Dans ce cas, je n'aurais d'autre choix que d'accepter sa décision, même si ça me laisserait un arrière-goût amère.

Tu ne lui fais pas complètement confiance, pourquoi le devrait-il ? C'est donnant-donnant ma chère, continua cette conscience à deux balles que je trimballais avec moi partout et qui avait tendance à m'enfoncer lors des moments de déprime.

— Tu manges toute seule ?

Je relevai instantanément le regard de mon plateau vers le garçon qui venait de me parler. Il s'agissait de Z.J, porteur du blouson de l'équipe de foot, m'observant d'un air curieux.

— Mouais, on dirait que c'est comme ça aujourd'hui.

Cela faisait deux jours que je lui faisais cours et je devais bien avouer qu'il était plutôt gentil, rien à voir avec l'idée que je me faisais de lui.

Et alors, sans même attendre mon accord, il posa son plateau sur la table et s'assit, ce qui m'étonna plus que tout, étant donné qu'il mangeait toujours avec le reste de son équipe de l'autre côté de la salle, à leur table assignée.

— Alors, Elena ! Parle-moi un peu de toi, commença-t-il, un sourire espiègle collé sur le visage.

Lui parler de moi ?

— Euh... je ne suis pas très douée pour ça, avouai-je.

Il fronça les sourcils et se gratta l'arrière de la tête, comme en tentant de trouver quelque chose à dire.

— Bah... par exemple, quel est ton chanteur ou groupe préféré ?

— Pourquoi ça t'intéresse ? demandai-je d'un air méfiant.

Bon, au moins il ne me demandait pas la couleur de mes sous-vêtements, c'était déjà ça de pris.

— Tu es ma tutrice, je veux juste en apprendre un petit peu plus sur toi.

J'esquissai une moue, pas très convaincue.

Peut-être... en faisais-je une tonne ? Après tout, il était gentil et n'avait encore jamais fait de commentaires déplacés ou quelque chose de similaire. Il était courtois et même s'il m'avait un peu dragué l'autre jour, il n'avait pas pour autant été lourd, ayant arrêté lorsque je lui avais imposé des limites.

— Lewis Capaldi, soupirai-je. Et toi ?

— Post Malone.

— Je dérange ?

Je me retournai et vis Tyler, se tenant derrière moi, nous observant d'un air narquois.

En voyant mon copain, Z.J ne sembla pas du tout intimidé, il resta à sa place et fit semblant d'ignorer sa présence.

Tyler s'assit à côté de moi et passa un bras autour de mes épaules pour me serrer contre lui. Agacée, je soupirais comprenant parfaitement son manège : il était en train de marquer son territoire. Dit comme ça, on pourrait penser à un chien, mais il n'en était pas bien loin.

— Tu fais les présentations ou je m'en charge ?

Et il ne savait pas encore que le garçon se trouvant devant moi était mon nouvel élève. Ça allait être bien beau lorsque j'allais lui annoncer.

— Oui. Z.J voici Tyler...

— Je sais parfaitement qui il est, dit-il, le regardant d'un air suffisant et dégoûté. Franchement, je te pensais plus intelligente.

Il me contempla, l'air déçu pour ensuite se lever, ramasser son plateau et dire :

— Il ne te causera que des ennuis, Elena.

Mon sang ne fit qu'un tour dans mes veines en l'entendant dire ça, sentant la colère monter en moi.

Comment osait-il se mêler ainsi de ma vie ? Pour qui se prenait-il au juste ?

Puis quand Tyler se leva afin de lui faire comprendre sa façon de penser grâce à l'aide de ses poings, je lui saisis la main, enroulant mes doigts aux siens. Il ne bougea plus d'un pouce, me regardant depuis sa hauteur tandis que j'étais toujours assise, le regard dans le vide tentant de ravaler mon agacement, qui augmentait à chaque seconde qui passait et surtout, à chaque nouveau mot qui sortait de la bouche de Z.J.

— Tu es une fille bien et tu mérites beaucoup mieux que ce... dealer.

— Et mon poing dans ta gueule, ducon ?! lança Tyler.

Je serrai d'autant plus fort sa main dans la mienne, jusqu'à y planter mes ongles. J'ignorais quel était le problème de Z.J, mais s'il ouvrait une nouvelle fois la bouche, je laisserais Tyler faire.

— Retourne auprès de tes potes, Z.J. Ça vaut mieux pour toi.

Il me lança un regard plein de reproches et s'en alla, à mon plus grand soulagement, ne voulant surtout que Tyler s'attire des problèmes à cause de ce genre de mec.

Je n'arrivais toujours pas à croire que ces mots étaient sortis de sa bouche. Ce n'était juste pas croyable et... tellement blessant. Je ne pouvais m'imaginer ce que Ty pouvait ressentir en cet instant.

Il s'assit et serra ma main fort dans la sienne, tentant de se contrôler et de ne pas aller à la table des footballeurs pour lui casser la gueule.

— Je peux savoir ce que tu faisais avec ce crétin ? marmonna-t-il en tournant son regard vers moi.

Il essayait de cacher son énervement, mais aujourd'hui, il y arrivait assez mal. Je voyais bien qu'il n'était pas jaloux, simplement furax à cause de ce que ce débile avait eu le toupet de dire quelques instants auparavant.

— C'est mon nouvel élève, soupirai-je.

— Génial, continua-t-il. Et tu comptais me le dire quand ?

Bon... peut-être qu'il était un petit peu jaloux enfin de comptes.

— On n'a pas vraiment eu l'occasion de parler.

Il ne pouvait pas me rétorquer à ça.

C'était lui qui était parti la veille, pas moi. Si seulement il n'avait pas pris la fuite, car c'était bien ce qu'il avait fait, alors je lui en aurais sans aucun doute parlé. Toutefois, je gardai cette remarque pour moi, ne tenant nullement à me disputer avec lui à cause d'un mec qui était totalement insignifiant à mes yeux.

Tyler poussa un long soupir et sembla se détendre, du moins, l'emprise sur ma main était devenue plus tendre et son pouce faisait des petits cercles sur ma peau.

— Pourquoi tu manges toute seule d'ailleurs ? Pourquoi tu n'es pas avec les autres ?

Puis il tourna encore une fois son visage vers moi, afin de me regarder droit dans les yeux, ses prunelles noires ayant une toute autre lueur que précédemment, il y avait quelque chose de tellement doux dans ses iris, que je sentis mon cœur fondre petit à petit.

— Tu n'étais pas là et je n'avais pas envie de supporter Pablo.

Il ricana face à ma remarque tout en posant son coude droit sur la table pour placer sa joue sur son poing fermé, m'observant avec une réelle attention.

— Quoi ? J'ai quelque chose sur le visage ?

— Non, rien. Tu es tout simplement magnifique.

Je sentis mes joues s'empourprer atrocement, sous son regard amusé.

Au moins, il pouvait être certain d'une chose : il me faisait toujours le même effet, de ce côté-là, rien n'avait changé.

Puis avant que je puisse dire ou faire quoi que ce soit, il se pencha sur moi et m'embrassa délicatement, effleurant à peine mes lèvres des siennes. Ce fut telle la caresse d'une plume.

C'était tellement alléchant, que j'en voulais davantage.

Mais il se sépara presque instantanément de moi, me laissant à peine le temps de savourer ce baiser furtif qui avait réussi à réveiller cette étrange sensation au creux de mon estomac.

— Je... je tenais à m'excuser pour ma réaction d'hier.

— Et moi d'avoir abordé le sujet comme ça.

Il me saisit à nouveau la main et fixa nos doigts entrelacés, donnant l'impression de se sentir coupable de quelque chose.

— C'est un sujet sensible et j'ai réagis de façon extrême. Tu n'y es pour rien et tu n'as pas à t'excuser. Je me doute que depuis que tu as compris... ça a dû te travailler.

— Tu n'imagines pas à quel point, ricanai-je, soulagée qu'il ait lui-même abordé le sujet et que ce froid entre nous soit en train de se dissiper.

— Pardonne-moi également de t'avoir repoussée hier, je sais que tu essayais de bien faire. Ce baiser, c'était...

— Je m'y suis mal prise et tu es dans tous tes droits de me rejeter.

— Elie...

Il poussa encore une fois un long soupir et passa sa main gauche dans ses cheveux, l'air nerveux.

— Je...

Mais avant qu'il ne dise quelque chose, je pris les devants en lui saisissant les deux mains et en le regardant droit dans les yeux afin d'avoir toute son attention.

Je ne voulais pas qu'il y ait de malaise entre nous, nous devions passer à autre choses. Alors s'il ne tenait pas à en parler, à se confier à moi, alors je devais respecter son choix.

— Ça va, Ty. Tu n'as pas à te sentir coupable. Je comprends que tu ne veuilles pas en parler, ce doit être vraiment quelque chose de très dur pour toi.

— Tu ne m'en veux pas de ne pas t'avoir dit la vérité ? s'étonna-t-il.

— J'aurais aimé que tu le fasses, avouai-je, mais... pourquoi m'aurais-tu parlé d'un homme qui ne fait même pas partie de ta vie ? Ou pour Reid ? Ce n'est pas un sujet facile pour toi, c'est normal que tu n'aies rien dit et je te comprends. Alors, non, je ne t'en veux pas.

C'était la vérité, il avait fait omission, pas menti. Pour moi, ce n'était pas la même chose. Puis cette découverte, après tout, elle n'affectait pas notre relation proprement parlant, même si ça me permettait de comprendre certaines de ses réactions vis-à-vis de Reid.

Pourquoi il avait ce manque de confiance en lui ou encore pourquoi il avait pensé plus d'une fois que je préférerais être avec Greyson plutôt qu'avec lui.

— Je veux juste que tu saches que quand tu seras prêt à en parler, je serai là pour t'écouter.

Il me contempla pendant quelques instants, sans pour autant ne rien dire, se contentant de me fixer en silence, alors qu'un sourire en coin éphémère vint étirer la commissure de ses lèvres.

— Et si je ne veux jamais en parler ?

L'air resta coincé en plein milieu de ma gorge face à sa question, mais je me repris assez rapidement, ne laissant aucune émotion transparaître sur mon visage.

— Alors je respecterai ton choix.

Même si ça me briserait le cœur que tu n'aies pas assez confiance en moi pour m'en parler, pensai-je, peinée qu'il en puisse être ainsi.

Tyler hocha tout simplement la tête face à ma réponse et le malaise reprit, celui que je voulais tant éviter.

Quelque chose coinçait, je le sentais. Mon cœur le savait.

Mais j'ignorais si cela venait de lui ou de moi. 

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Voilà! J'espère que ce chapitre vous a plu ! 

On se retrouve MERCREDI 17H pour la suite avec le chapitre 28, qui sera cette fois un point de vue de Tyler. 

Je vous souhaite un bon weekend ! 

Tamar.

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