Chapitre 24 Tyler (Tome 2)
Je ne savais toujours pas quoi dire, ou même penser, ignorant même comment réagir face à la scène qui se déroulait sous mes yeux.
Alvaro... avait-il perdu l'esprit ?
Tony, à mes côtés, serrait les poings tout en ayant du mal à tenir sur place, voulant déguerpir sans aucun doute autant que moi. Sans même le vouloir, nous étions mêlés à ce nouveau trafic qu'Alvaro avait désigné comme « spécial ».
Les autres ne semblaient pas surpris, mais plutôt excités, ce que je n'arrivais vraiment pas à comprendre.
Nous nous trouvions dans le hangar où le gang stockait d'habitude la drogue pendant quelques heures avant de la distribuer, mais la boîte ouverte se trouvant devant mes yeux, n'était pas remplie de coke ou d'un tout autre genre de came.
Il s'agissait d'armes à feu automatiques telles que des pistolets mitrailleurs et tous les dérivés. Les autres caissons étaient encore fermés, mais il ne m'était plus très difficile d'en imaginer le contenu.
Trafic d'armes... il était sérieux ?
— Je me suis dit qu'il serait bon pour nous d'agrandir notre marché, déclara-t-il en prenant un de ces pistolets mitrailleurs.
— La drogue ne te suffit plus ? ne pus-je m'empêcher de rétorquer.
Je n'attendais pas de réponse de sa part. Bien entendu que ce n'était plus assez, voulant toujours gagner encore et encore plus. Vendre de la drogue, c'était une chose que je pouvais accepter, mais vendre des armes... je refusais.
Toutefois, il se tourna vers moi et me sourit, l'air irrité par mon intervention. Je savais que je jouais gros en me montrant irrespectueux, mais je n'allais tout simplement pas laisser passer ça.
Mais il ne dit rien, ce qui voulait dire qu'il me prendrait à part lorsqu'il aurait terminé son petit speech où il raconterait ses belles motivations pour vendre des armes. Je n'avais pas envie de l'écouter déballer toutes ces conneries, pourtant, je ne pouvais pas m'en aller.
— Samedi prochain, dans deux semaines, nous ferons une grosse affaire, certifia-t-il. Voilà pourquoi je vous ai demandé de venir aujourd'hui. Vous devrez tous être là.
— Nous ne sommes pas des gradés, l'interrompit cette fois Tony. Qu'est-ce que nous faisons là au juste ?
— J'ai besoin de vous, étant donné que vous faîtes partie des meilleurs. Ce sera un gros échange et j'ai besoin d'avoir des yeux partout lorsque ce dernier se réalisera.
Ça ne me suffisait pas comme explication.
— À qui comptes-tu vendre ces armes ? questionna Sofia, à mon plus grand étonnement, alors qu'elle ne remettait jamais la parole d'Alvaro en doute.
— Est-ce vraiment important ? C'est juste des affaires, ce qui nous intéresse c'est l'argent.
— Je ne suis pas d'accord. Je pensais que tu avais plus d'éthique que ça.
Tout le monde se tourna vers moi, car je venais de proférer une belle insulte envers notre chef.
Il me regarda, l'air encore plus énervé, et soupira.
— Je te prie, Tyler. Dis-nous ta manière de penser.
Je n'allais pas me gêner, et au diable les conséquences !
— Vendre de la drogue c'est une chose, ça regarde la personne qui consomme même si nous incitons cette nécessité. Mais des armes... c'est le monde autour de cette personne qui achète qui est mis en danger, ne le vois-tu pas ?
Il haussa les épaules, définitivement, le fait que des personnes innocentes meurent à cause de son trafic de merde lui était bien égal.
Je n'étais pas innocent, si je devais mourir en cet instant, alors soit. Mais ces personnes qui allaient se retrouver avec le canon d'un pistolet mitrailleur pointé sur elles, alors qu'elles n'avaient rien demandé.
— D'autres le font, pourquoi pas nous ?
— À qui vas-tu les vendre ? À d'autres gangs ? Aux Corbeaux ?
En m'entendant prononcer le nom de notre gang rival, il serra les mâchoires à s'en péter les dents.
Los Cuervos de la Noche – les Corbeaux de la Nuit – était l'autre gang du secteur de Gulfton. Il y en avait d'autres à Houston bien entendu, mais c'était avec celui-là que nous avions sans cesse des problèmes de territoire. Pendant une époque, c'était la guerre entre les Anges et les Corbeaux, pourtant Alvaro avait réussi à faire une trêve avec leur chef, Hugo. Désormais les choses semblaient calmes, mais ce n'était qu'une question de temps avant que les hostilités ne reprennent, j'en étais certain.
Cela faisait deux ans que nous avions la « paix », mais elle ne saurait durer.
Je n'avais jamais eu de problèmes avec eux, mais je savais qu'ils avaient tué pas mal d'Anges pour tenter de s'annexer notre territoire. Mais mon gang n'était innocent, vu qu'il avait aussi essayé de s'approprier le leur, donc... on pouvait dire qu'ils étaient à égalité. Il n'y en avait pas un meilleur que l'autre.
La seule chose qui intéressait, c'était d'agrandir le territoire et de gagner à chaque fois encore plus d'argent. J'avais pensé qu'Alvaro serait différent, mais à croire que j'avais porté de œillères pendant trois ans.
J'avais toujours eu conscience de qui il était et ce qu'il représentait, mais jamais je n'aurais imaginé qu'il tomberait aussi bas. J'étais vraiment déçu.
— Ça ne te regarde pas. Tu dois juste te contenter d'obéir, c'est clair ?
— Et si je refuse de participer à ça ?
Tony me donna un coup de coude, pour que je la ferme, mais je ne pouvais. Je ne pouvais tout simplement pas fermer les yeux face à ça. Je ne voulais en aucun cas avoir sur la conscience la mort de quelqu'un parce que je n'avais pas eu les couilles de m'opposer à Alvaro.
— Tu crois sincèrement que j'en ai quelque chose à foutre ? dit-il d'un ton plat.
Puis il rigola.
— Mon pauvre Tyler, n'as-tu pas encore compris ? Tant que ta dette n'est pas soldée, tu n'as pas le droit de donner ton avis. Moi j'ordonne et toi, tu exécutes ! Me suis-je bien fait comprendre ?
D'autres auraient baissé la tête, mais pas moi. Je soutins tout simplement son regard, ce qui sembla l'énerver encore plus.
— Tu as des couilles, gamin, je te l'accorde. Mais ne joue pas aux cons avec moi parce que celui qui perdra à la fin, ce sera toi. Ce serait vraiment dommage qu'à cause de tes états de conscience, il arrive quelque chose de regrettable à ta jolie gringa, tu ne crois pas ?
Mon cœur cessa de battre et l'air resta coincé à l'intérieur de mes poumons, alors qu'une colère noire montait progressivement en moi. Comment savait-il pour Elie ? J'avais certes dit avoir une copine, mais à aucun moment je n'avais fait référence à ses origines, tout comme je n'avais jamais dévoilé son prénom, afin de la protéger.
— De même pour toi, Tony, enchaîna Alvaro.
Mon ami réagit exactement de la même manière que moi, mais sembla toutefois mieux se contenir, parce que pour ma part, j'étais vraiment à deux doigts de me jeter sur Alvaro, qui nous toisait d'un air satisfait en voyant nos regards effrayés.
Qu'il s'en prenne à moi, je m'en foutais. Mais qu'il ose nommer Elie... c'était vraiment un coup bas pour nous obliger à ployer le genou.
Cet enfoiré avait osé nous espionner.
— Vous croyez vraiment que je ne vous observe pas ? Je sais toujours tout ce que vous faîtes. J'ai des yeux partout, qui me rapportent jusqu'au moindre de vos mouvements. Alors ne jouez pas avec moi, car même si je vous apprécie, ma patience a des limites.
Je dus faire appel à toute ma maîtrise pour ne pas péter un câble. Nous surveiller ? Mais pour qui se prenait-il ? Cela voulait aussi dire qu'il savait depuis longtemps que Pablo dealait pour moi et qu'il avait fait semblant de l'ignorer.
Il se détourna de nous et continua avec ses explications, mais je ne l'écoutais plus, ayant complètement déconnecté de la réalité.
Finalement... pouvais-je me fier à sa parole ? Car je commençais sérieusement à en douter. Me laisserait-il partir une fois ma dette soldée ou trouverait-il un prétexte pour me garder enchaîné ?
***
Après la « réunion », Alvaro m'ordonna de me rendre à son bureau afin que l'on puisse parler tranquillement. Je n'avais aucune envie de lui taper la discute, mais je n'avais d'autre choix que me plier à sa volonté.
Plus il me donnait des ordres et plus j'en avais marre.
Tony et Pablo étaient partis m'attendre dans la voiture, vu que nous étions venus ensemble.
Il se faisait tard déjà, étant plus de vingt heures. Si je ne rentrais pas avant vingt-deux heures, ma grand-mère allait se poser des questions et je ne tenais pas à ce qu'elle appelle Dom et que ce dernier lui dise que je n'étais pas allé bosser.
C'était vraiment du grand n'importe quoi. Mais quelle journée gâchée franchement !
Mon chef me toisait, alors que je gardais le silence, attendant qu'il me lance une autre menace afin de me montrer qui de nous deux était le plus fort... ou plutôt, pour me montrer qui avait la plus grosse paire de cojones de nous deux.
— C'est quoi ton problème, Tyler ? Je ne te comprends vraiment pas.
Il appuya ses coudes sur sa table de bureau qui nous tenait à distance l'un de l'autre, et soupira un grand coup.
— Jamais tu ne m'aurais parlé ainsi avant. Qu'est-ce qui se passe ? Tu as un grand potentiel et tu vas tout jeter par la fenêtre !
Je ne dis rien, car quoi que je dise, ça ne servirait à rien.
Alvaro n'était pas quelqu'un de mauvais ou du moins... c'était ce que je pensais il y avait à peine une journée. Désormais, je voyais les choses sous un angle bien différent.
— C'est cette fille qui te tourne la tête ?
— Je t'interdis de parler d'elle ! répliquai-je d'un ton ainsi que d'un regard menaçant.
Je ne permettrais pas qu'il mêle Elena à tout ça. Quitter le gang était mon choix, ça n'avait rien à voir avec elle. Tôt ou tard, je l'aurais fait. Elle m'avait juste donné le coup de pouce dont j'avais besoin.
— Tu ne m'as pas laissé le choix plus tôt. Si je t'avais laissé faire, qu'auraient pensé les autres de moi ? Ma réputation est très importante et cela même si j'ai une grande affection pour toi, gamin !
Affection ? Sa manière de la montrer n'était pas la bonne dans ce cas !
— Quand tu es venu me demander de l'aide, je t'ai tendu la main. Je t'ai donné l'argent dont tu avais si désespérément besoin. C'est toi qui es venu me trouver et non l'inverse, ne l'oublie jamais.
Oui, je devrais le remercier d'avoir bercé d'illusions un gamin désespéré au lieu de lui faire entendre raison. Désormais, je regrettais vraiment que quelqu'un ne m'ait pas ouvert les yeux alors qu'il en était encore temps. Si je pouvais revenir en arrière et savoir ce que je savais à présent, alors... jamais je n'aurais rejoint les Anges.
— Nous sommes une famille, Tyler !
— J'en ai déjà une.
— Je ne te veux aucun mal !
— Et c'est pour ça que tu épies mes moindres faits et gestes ?! m'emportai-je.
Le pire dans tout ça, c'était qu'après m'avoir poignardé dans le dos, il voulait que je continue à le voir comme avant, alors que c'était tout bonnement impossible.
Je pensais qu'Alvaro était une personne dure mais juste, compatissante... mais j'avais l'impression de ne plus le connaître du tout.
— Ce n'est pas personnel, Tyler, marmonna-t-il en serrant les dents. Mais je ne tiens pas à finir comme mon frère, est-ce que tu comprends ?!
Ses yeux sombres lançaient des éclairs.
Il se gratta le visage au niveau de sa barbe de deux jours, pour ensuite se lever et venir s'asseoir sur le coin de son bureau. Il me rappela Stephens en prenant cette pose.
— Je me méfie de tout le monde. Mais si cela te rassure, je ne connais ni le nom, ni l'adresse de ta copine. Je sais juste qu'elle est... blanche. Je t'ai juste menacé pour que tu la fermes et n'aggraves pas ton cas. Pareil pour Tony.
— Et c'est censé me rassurer ? ironisai-je.
— Tu penses vraiment que je te ferais du mal ?
— Je ne sais plus rien, Alvaro. Mais la chose que je me demande c'est : me laisseras-tu partir une fois que je t'aurais remboursé ce que je te dois ?
Ma question le blessa, je le vis à son expression soudaine prise d'effroi.
— Je suis un homme de parole, Tyler ! s'énerva-t-il. Si tu veux quitter les Anges après avoir soldé ta dette, je ne t'en empêcherais pas. Je veux juste que tu considères toutes les options et que tu ne fasses pas ça pour une fille.
— Je fais ça pour moi, Alvaro. Encore plus maintenant que tu prévois de trafiquer des armes !
Je n'arrivais toujours pas à y croire d'ailleurs. C'était complètement surréaliste !
— Je veux juste élargir notre marché.
— Tu te prends pour une multinationale maintenant ? rétorquai-je, toujours aussi acide.
Ses motivations, je ne voulais pas les connaître. Je m'en fichais, la seule chose que je savais, c'était que je ne voulais pas me voir mêlé à toute cette histoire.
— Tu as un énorme potentiel, Ty. Tu pourrais même me succéder dans quelques années.
J'arquai un sourcil. Moi ? Prendre la relève du gang ? Il fumait quoi sérieusement ?
Sans le vouloir, j'éclatai de rire. On avait beau dire que j'avais l'âme d'un leader, d'un chef inné, ce n'était pas vrai du tout. Ça ne m'avait jamais intéressé ce genre de rôle et ce n'était pas demain la veille que ça allait changer.
— Ça ne m'intéresse pas.
— Tu as envie d'être Tyler Mendoza, le mécano ? Au lieu d'être, Tyler Mendoza, le chef de Los Angeles de Calaca ?
— Je préfère être Tyler Mendoza, mécano vivant, plutôt que Tyler Mendoza, chef en taule ou encore, chef mort, répondis-je sans aucun détour. Tu ne vois que l'argent, mais ces armes que tu comptes vendre à dieu sait qui, pourraient finir entre les mains de terroristes, de gamins pas bien dans leurs têtes qui les utiliseraient contre leurs camarades de cours, ou même des suprémacistes blancs par exemple. N'y as-tu pas pensé ?
— Vois la chose de cette manière : moi je ne fais que vendre, ensuite ce n'est plus de mon ressort.
— Bien entendu que ça l'est, mais ça doit t'aider à dormir la nuit de te dire le contraire.
Il esquissa un sourire en entendant ma réponse, mais je ne voyais vraiment pas ce qu'il y avait de drôle là-dedans.
Savoir qu'une personne pouvait mourir à cause de moi, parce que j'avais vendu l'arme à un assassin potentiel... je crois bien que je ne m'en remettrais jamais.
La seule arme que j'avais tenue dans ma main, c'était celle que j'avais pointé sur la tête de Jackson cette fois-là, et encore, elle n'était pas chargée. Je savais que d'autres membres se baladaient avec des flingues ou encore des couteaux afin de se protéger de membres d'autres gangs ou même de leurs clients. Mais Dayton étant un coin tranquille, je n'avais jamais eu de soucis à me faire de ce côté-là. Et c'était bien mieux comme ça.
— J'ai besoin de toi pour l'échange.
— Pourquoi moi ? Il y en a tout un tas qui voudraient le faire !
— Mais c'est moi qui décide et je veux que toi et Tony veniez, car j'ai confiance en vous.
— Pourquoi mêler Pablo à tout ça alors ?
Il ne le connaissait pas, alors pourquoi vouloir qu'il participe à ce trafic ?
— Il doit bien faire ses preuves, non ? S'il réussit ce que j'attends de lui, alors il pourra porter fièrement notre emblème.
J'espérais alors qu'il le décevrait, j'allais tout faire pour que ce soit le cas. Je ne laisserais pas mon cousin gâcher sa vie, c'était tout bonnement hors de question.
— Faisons un deal, tu veux ?
Un marché ? Quel genre ?
— Je réduis ta dette actuelle de cinq mille dollars, à deux mille si tu participes à cet échange. Je crois, que ça montre bien ma bonne foi. Tu en dis quoi ?
Je devrais le faire d'une façon ou d'une autre, alors si on réduisait ma dette... je n'allais pas dire non, ce serait stupide de ma part. Il fallait juste que je ravale ma conscience pendant l'échange et le tour serait joué. Mais c'était plus facile à dire qu'à faire.
— L'offre expire dans quelques secondes, m'annonça-t-il, l'air agacé par mon silence, étant donné que j'aurais instantanément dû sauter sur l'occasion.
Alvaro me tendit alors la main, tentant une nouvelle approche.
— On est d'accord ?
Ça m'écœurait tout autant, mais avais-je le choix ?
Résigné, je soupirai et me levai, pour être à sa hauteur et ainsi lui serrer la main pour conclure notre marché.
— D'accord.
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Voilà! J'espère que ce chapitre vous a plu !
EXCEPTIONNELLEMENT LA SEMAINE QUI VIENT, JE NE POURRAI PAS PUBLIER LE MERCREDI, ALORS IL N'Y AURA QU'UN CHAPITRE PUBLIÉ ET CE SERA SAMEDI, ENSUITE LE RYTHME REPRENDRA COMME D'HABITUDE.
Je vous souhaite à tous un bon week-end et on se voit SAMEDI prochain !
Tamar 😘
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