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𝐏𝐚𝐫𝐚𝐜𝐨𝐬𝐦 (𝐚𝐧𝐠𝐥𝐚𝐢𝐬) : ᥙᥒ moᥒdᥱ
ιmᥲgιᥒᥲιrᥱ ιᥒvᥱᥒtᥱ́ ρᥲr ᥙᥒ ᥱᥒfᥲᥒt
ρossᥱ́dᥲᥒt sᥱs ρroρrᥱs ᥣᥲᥒgᥙᥱ,
hιstoιrᥱ ᥱt gᥱ́ogrᥲρhιᥱ

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Ce n'était qu'une nuit parmi les autres, une de ces nuits où le ciel t'invite à le regarder en offrant ses milliers d'étoiles, ces points lumineux qui brillent à l'intérieur de tes pupilles et qui créent les rêves les plus beaux de ton imagination.

Ce n'était qu'une nuit parmi les autres où l'air si agréable te donne envie de gambader pendant des heures, de tournoyer dans les prés avec les lucioles et t'allonger sur l'herbe pour sentir profondément cet air, cet air qui t'hypnotise, cet air qui te fait perdre conscience.

Pourtant cette nuit était différente.

Cette nuit respirait quelque chose de nouveau, quelque chose d'inconnu. Un subtil parfum de danger. Ce genre de danger qui hérisse tes poils, qui fait battre ton coeur un peu plus vite, qui te fait presque délirer puisque tu ne distingues plus le vrai du faux. Une nuit qui était plus inquiétante que rassurante, une nuit qui se voulait malveillante et maléfique.

Malgré cela, un cheval trottinait calmement dans l'obscurité. Son pas était sûr et assuré, un signe d'habitude. L'animal était détendu, ses sabots foulaient le sol avec aise et son museau soufflait par moments pour indiquer à ses maîtres qu'ils n'avaient rien à craindre. Quant à ces derniers, ils n'étaient nullement inquiétés et avaient une confiance absolue en leur monture, elle qui les avait toujours guidés dans les nuits d'hiver comme dans les nuits d'été. Plus qu'un cheval c'était un véritable allié, un ami. C'est en tout cas ainsi que le décrivait le plus jeune des deux garçons qui étaient aux rênes.

Le plus vieux se prénommait Hoseok. Fils d'un marchand de tissus, il parcourait les terres du pays du haut de ses seize ans pour commercer avec les villages voisins, bravant les dangers avec courage et assurance. C'est cette même assurance qui séduisait les commerçants qui n'hésitaient pas à faire des affaires avec lui, il était rare de voir un adolescent vigoureux, travailleur et surtout enjoué par son travail. Car oui, Hoseok adorait son travail ; la liberté de pouvoir gambader sur son cheval, de visiter d'autres horizons. Certes, il aimait son village et ses traditions, les habitants d'une gentillesse incomparable et surtout la ferme où ils habitaient lui et son petit frère mais rien n'égalait ce sentiment qui envahissait son coeur lorsqu'il visitait les contrées voisines. Et qui savait encore ce qui l'attendait dans le futur.

En ce moment, le jeune garçon rentrait d'une journée plutôt riche en émotions. Il avait quitté son village à l'aube pour rejoindre un riche commerçant de l'autre côté de la forêt. Ce dernier, lors d'une visite il y a de cela quelques semaines, avait été attiré par les tissus de la famille de marchands. Ses yeux avaient été fascinés par la qualité du tissu et l'habileté avec laquelle les dessins avaient été brodés ; des fleurs provenant de contrées lointaines, des symboles mystérieux et animaux légendaires, une imagination débordante de couleurs et créativité. Il avait aussitôt passé commande et dès la fin de semaine Hoseok s'était élancé à sa rencontre. Ils avaient conversé toute la journée tout en visitant le village et ses richesses. Les capacités communicatives du jeune garçon étaient aussi impressionnantes que sa rigueur au travail, il avait fait très bonne impression et repartait à présent les sacs remplis de pièces d'or. Hoseok en était ravi, son père le féliciterait au retour et probablement lui permettra-t-il de garder une bonne partie de la somme gagnée aujourd'hui. Habituellement il conservait un tiers des gains mais ce client leur avait rapporté gros. Nul doute qu'il en serait récompensé.

Mais le succès du jour n'était dû ni à lui et ses talents de négociateur, ni au père du garçon qui fabriquait les tissus avec la plus grande application, non. Tout le mérite revenait à ce jeune garçon assis devant l'adolescent, ses petites mains tenant fermement la selle du cheval malgré le bras avenant de son grand frère qui le serrait contre lui. Jimin était un enfant à l'imagination débordante, à l'esprit rêveur. La communication verbale n'était pas son fort, en effet il était plutôt timide et parlait rarement en présence d'inconnus pourtant il adorait accompagner son frère lors de ses déplacements.

Jimin aussi était amateur de nouveaux horizons, de voyages, car ceux-ci stimulaient ses rêves les plus fous. Il aimait dessiner des paysages imaginaires, des animaux venus d'un autre monde et inventer des histoires toutes plus farfelues les unes que les autres. Il prenait du plaisir à les raconter à sa famille autour d'un bon dîner, les yeux brillants de bonheur, fier de présenter ses pensées d'enfant de sept ans à ses proches. Sa mère et son frère trouvaient parfois ses idées sans limites exagérées - Jimin ayant toujours de nouvelles histoires à raconter et ne semblant pas s'en lasser - mais ce n'était absolument pas le cas de son paternel. Il l'écoutait très sérieusement à chaque fois, les sourcils froncés pour retenir le plus d'éléments possibles. Parfois il prenait même quelques notes dans son carnet d'idées puis le soir même il se mettait à la tâche et donnait vie aux rêves de son fils sur les tissus.

Depuis qu'il procédait ainsi, les ventes avaient presque triplé en l'espace d'un seul mois et Jimin était devenu malgré lui un élément important dans l'entreprise familiale. Hormis le fait qu'il soit la source d'inspiration de son père, son jeune âge l'empêchait d'aider plus que tant alors ses parents avaient accepté qu'il accompagne Hoseok pendant certains de ses déplacements comme une sorte d'initiation pour sa future formation. Ces petits voyages étaient bénéfiques pour l'enfant car ils alimentaient sa soif de découverte et détruisaient les limites de son imagination ; à chacun de ses retours, le bambin s'armait aussitôt d'une feuille et de crayons de couleurs avant de laisser la passion qu'il retenait en lui exploser. Les traits tordus, agités créaient des formes saugrenues mais qui avaient un sens pour Jimin qui aussitôt son dessin terminé allait rejoindre son père à l'atelier. Ce petit rituel s'était petit à petit mis en place et encore une fois, le garçon avait hâte de rentrer chez lui pour commencer une nouvelle oeuvre.

- A quoi penses-tu Jiminnie ? demanda Hoseok en voyant son petit frère silencieux, cela était peu commun puisqu'habituellement les deux frères faisaient une mise au point dès qu'ils quittaient une nouvelle ville.

- Dessin, répondit simplement le bambin en se calant un peu plus contre lui.

Le plus âgé comprit aussitôt et ne put s'empêcher de sourire, si Jimin n'avait pas envie de parler c'est qu'il songeait probablement à la future histoire qu'il inventerait. Un petit écrivain motivé dès son plus jeune âge, il n'y avait rien de plus beau et Hoseok savait à quel point les mondes imaginaires de son petit frère étaient des mines d'informations et de beauté.
Il suffisait de voir les étoiles dans les yeux des acheteurs lorsque leurs regard curieux atterrissaient sur les tissus qu'il vendait de ville en ville pour s'en rendre compte. Un tel talent était inconcevable pour un enfant si jeune, et pourtant...

Le cheval continuait de s'enfoncer plus profondément dans la nuit et s'approchait désormais de la forêt située exactement à mi-chemin entre les deux villages, véritable repère pour les chasseurs qui venaient régulièrement y faire des rondes à la recherches d'animaux sauvages. Ici, l'obscurité était plus forte et Hoseok se vit obligée d'allumer sa petite lampe torche afin d'éclairer le chemin. L'air était également plus frais et par réflexe, Jimin se pressa contre son frère qui sentit tout de suite le corps de son cadet trembler.

- Tu as froid ? Il y a une couverture dans le sac.

- Non, pas froid.

Le grand frère haussa les épaules, une moue inquiète. C'était rare que Jimin soit si peu bavard, surtout après une visite instructive du village qui aurait probablement dû emballer son imagination et ses idées délirantes. Habituellement l'enfant était plein d'énergie et sautillait tout en racontant ses nouveaux projets, parfois il marchait même à pied tellement il débordait de joie et d'envie de bouger. Il était probable que ce voyage l'avait fatigué, son petit corps avachi témoignait de son envie de repos. Il était aussi très tard, Hoseok ne rentrait jamais la nuit lorsqu'il était avec son jeune frère mais suite à la longue discussion avec le marchand, l'heure de retour avait été retardée.

- Et si tu essayais de dormir un peu ? Le temps passera plus vite et quand tu te réveilleras on sera à la maison.

- Peux pas, répondit le bambin et son bras se leva, pointant une direction de son doigt. Le monsieur me regarde.

Hoseok approcha tout de suite la lampe dans la zone indiquée, tirant légèrement les rênes du cheval de l'autre main pour qu'il s'arrête. Le jeune homme attendit quelques instants, prudent, épiant le moindre bruit suspect ou alertant mais il fut soulagé de constater qu'il n'y avait strictement rien. Il posa une main se voulant rassurante sur la chevelure de Jimin et il caressa la tête ronde.

- Il n'y a rien là-bas Jiminnie, ne t'en fais pas. Repose-toi, la fatigue te donne des hallucinations.

L'enfant ne répondit rien, Hoseok prit ce silence pour une réponse positive mais alors qu'il allait ordonner au cheval de repartir, Jimin posa subitement sa main sur la sienne pour l'arrêter dans son mouvement et il dit à nouveau :

- Il est là, il nous regarde.

- Mais si je te dis qu'il n'y a personne, regarde par toi-même, insista l'adolescent et il balaya à nouveau les environs avec la lumière pour confirmer ses dires. Tu vois ? Allez, dors un peu.

Il secoua les rênes, cette fois sans que Jimin ne l'arrête et le cheval repartit au trot. Hoseok se sentait nerveux, il avait confiance en son frère mais son imagination lui jouait des tours. Il n'y avait personne dans la forêt hormis eux deux, qui se promènerait en pleine nuit sans aucune raison ? Surtout si c'était dans le but de faire peur à deux jeunes qui n'avaient rien fait de mal.
C'était certain, il n'y avait personne.

Un peu plus rassuré, le grand frère décida d'accélèrer. Plus vite ils seraient sortis de cette forêt, plus vite ils seraient rentrés à la maison. Jimin ne bougeait plus contre lui, sans doute s'était-il endormi avec la fatigue alors Hoseok décida de ne pas le réveiller et se contenta de le serrer un peu plus fort contre lui. Mais ce qu'il ne savait pas, c'était que l'enfant était toujours réveillé et que ses yeux étaient écarquillés en grand, presque injectés de sang. Ses paupières ne clignaient pas, ses pupilles étaient fixées droit sur le chemin qu'ils empruntaient. Là où Hoseok voyait une simple route de sable et cailloux, Jimin voyait un homme.

Cet homme était vêtu de noir, il se fondrait entièrement dans l'ombre si sa peau n'était pas aussi pâle et s'il ne se déplaçait pas aussi vite entre les arbres, si vite qu'on le confondrait avec le vent mais il faisait en sorte de rester visible pour les beaux yeux de l'enfant qui l'observait de ses petites prunelles curieuses. Jimin continuait de le regarder, de suivre et d'étudier le moindre de ses mouvements avec une certaine fascination. IIs avaient beau aller vite à dos de cheval, l'inconnu les rejoignait et trouvait toujours un moyen de leur barrer la route or l'animal le traversait tel un spectre.

- Qui êtes-vous ? murmura l'enfant tout bas, de sorte à ce que son grand frère ne l'entende pas.

Hoseok lui avait toujours appris à ne pas parler aux inconnus, on ne savait jamais si ces derniers avaient de mauvaises intentions pourtant Jimin avait eu envie de désobéir. Cet homme, peu importe qui il était, était fascinant à observer. Etait-il humain ? Ou bien était-ce un rêve, une simple hallucination, ce qui expliquerait pourquoi son aîné ne voyait rien ?

- Mon enfant.

La voix grave de l'homme s'éleva dans la forêt, puissante et vibrante, comme un écho venant de loin pourtant en tournant la tête vers la droite, Jimin voyait que celui-ci se tenait toujours à ses côtés et était plus proche qu'avant. Cette fois son visage était visible, un teint blanchâtre, de petits yeux perçants noirs comme la nuit et de fines lèvres étirées dans un sourire malicieux. Il semblait bien plus jeune que ce que sa voix laissait paraître mais ses traits restaient légèrement camouflés par l'obscurité ce qui rendait son identification impossible.

- Dis-moi plutôt ce qu'une créature aussi belle que toi fait dans ma forêt ?

Jimin sentit quelque chose de froid caresser sa joue et en réalisant qu'il s'agissait de la main de l'inconnu il eut un mouvement de recul si brusque que le cheval s'arrêta en hennissant, soulevant ses pattes avant dans un geste de panique.

- Qu'y a-t-il Jimin ?! s'écria Hoseok alarmé, se cramponnant à la selle pour ne pas tomber.

Il attendit quelques secondes que le cheval se calme et posa ses mains sur les épaules de son petit frère qui se soulevaient au même rythme que sa respiration devenue rapide.

- J-J'ai... L'enfant balbutiait, posant une main sur son visage, encore surpris par ce contact inattendu. L'homme... Il...

Il leva les yeux vers le haut, l'homme était perché sur une branche d'arbre au-dessus de leurs têtes et semblait se délecter de la scène. Ce dernier ricanait la main devant la bouche, ses yeux noirs profond l'observant avec intérêt et amusement.

- Pourquoi avoir peur ? reprit l'homme en riant. Il n'y a que nous dans cette forêt, c'est toi qui t'es aventuré dans mon territoire.

Jimin était confus, Hoseok et l'homme ne se voyaient-ils pas ? Une main caressa son dos et il sursauta par réflexe avant de se rendre compte qu'il ne s'agissait que de son grand frère qui le regardait avec inquiétude.

- Qu'est-ce qu'il se passe Jimin ? demanda-t-il d'une voix plus douce pour le rassurer. Tu commences sérieusement à m'inquiéter là...

L'enfant se mordit les lèvres, levant à nouveau les yeux vers l'homme avant de le pointer du doigt.

- Hyung, tu ne vois pas le m'sieur dans l'arbre ?

Hoseok sentit un désagréable frisson parcourir son échine, ce n'était pas la première fois que Jimin évoquait la présence d'une tierce personne et il commençait à être de plus en plus nerveux et moins sûr de lui. Encore une fois, il balaya la zone autour et au-dessus d'eux avec sa lampe torche mais toujours rien.

- Jimin... commença-t-il mais l'enfant lui coupa la parole, l'implorant de ses grands yeux.

- Là-bas hyung ! chouina-t-il en pointant une autre direction.

L'homme avait profité que l'enfant ne le regarde pas pour se déplacer à toute vitesse.
Il se tenait bien droit entre les arbres toujours en les observant de son sourire joueur et malsain. Ses yeux luisaient dans la nuit, il tentait de prévoir la suite des évènements et la peur de l'enfant l'amusait beaucoup.

- Il nous regarde, ne le vois-tu pas ? Avec ses yeux brillants...

- Jimin, je... reprit le grand frère et il avala sa salive. Je ne comprends pas ce que tu racontes. Il n'y a personne là-bas.

Il avait volontairement prit un ton plus ferme pour à la fois rassurer Jimin et à la fois masquer une certaine angoisse qui commençait à le gagner. Il craignait que ce ne soit qu'une mauvaise plaisanterie de son petit frère, il avait beau vérifier il ne semblait véritablement y avoir personne d'autre dans cette forêt et comme Jimin devait s'ennuyer pendant ce long trajet il utilisait probablement sa plus belle imagination et ses talents d'acteur pour lui faire une frayeur... Pourtant ses yeux apeurés semblaient tout à fait crédibles et c'est ce qui faisait douter le plus Hoseok qui se promit de rester vigilant. S'ils étaient véritablement suivis par quelqu'un, il s'assurerait d'écarter quelconque menace pour leur sécurité. Il posa une main contre sa poche de pantalon, vérifiant que le poignard que lui avait confié son père était toujours là au cas où il aurait à se défendre.

- Ça a dû être un coup de vent ou l'ombre des feuilles qui a dû t'induire en erreur, reprit-il en lui caressant les cheveux. Endors-toi s'il te plaît, le voyage sera moins long.

Jimin hocha doucement la tête, sans quitter néanmoins l'homme mystérieux du regard et finalement il décida d'obéir et ferma ses petits yeux d'enfant. Sa main en quête de réconfort vint agripper celle de son grand frère et c'est ainsi que le cheval reprit la route. Alors qu'il galopait, s'enfonçant toujours plus loin, Hoseok observait les environs et restait attentif au moindre bruit et mouvement. A l'aide d'un système ingénieux à base de cordes, il avait réussi à fixer la lampe torche sur les rênes du cheval, pointée vers le chemin qui s'ouvrait devant eux. Ainsi, il s'assurait encore plus leur protection. Il avait confiance en sa monture et savait qu'elle les guiderait sans problèmes dans cette forêt obscure tant que la lumière les aidait, lui pensait à sa sécurité et surtout à celle de Jimin.

Quinze minutes passèrent, Hoseok voyait bientôt le bout de la forêt et savait qu'ils en seraient bientôt libérés. Rien d'alarmant s'était produit, il avait donc volontairement accéléré pour espérer s'échapper plus vite de cette prison d'arbres. Jimin avait enfin trouvé le sommeil, semblait-il. Il ne bougeait plus et le grand frère pouvait sentir sa respiration calme et son dos se soulever doucement à chacun de ses souffles. Cela avait grandement rassuré l'adolescent qui croyait de plus en plus à la théorie du manque de sommeil qui avait donné des hallucinations à son protégé, il n'y avait donc rien à craindre et ils pouvaient continuer le trajet sans crainte. Mais alors qu'il pensait que tout allait se dérouler tranquillement à présent, il y eut un bruit non loin qui le força à s'arrêter. Son coeur battait à toute allure et malgré sa peur il prit le risque d'éteindre sa lampe torche, pensant que la meilleur solution était de ne pas bouger et de faire aucun bruit avant de déterminer la source de cette soudaine nuisance. Fort heureusement, le grand frère constata quelques secondes après qu'il ne s'agissait que d'une chauve-souris qui s'était posée sur la branche d'un arbre et qui avait probablement frotté ses ailes contre les feuilles en voulant s'envoler, d'où ce bruit similaire à un frottement de vêtement. Il soupira de soulagement, il paniquait vraiment pour rien depuis cette histoire d'homme qui les suivait. Le garçon se demandait vraiment où est-ce que Jimin trouvait toutes ces idées grotesques, autant elles servaient au commerce familial autant elles pouvaient causer des frayeurs qui n'avaient pas lieu d'être. Avant de repartir, il s'assura que son petit frère dormait toujours et encore une fois, il reprit la route.

❃°•°❀°•°❃

Dans l'ombre, les deux frères étaient observés et suivis à pas de loup, invisibilité et discrétion étaient primordiales pour ne pas se faire repérer. Chacun de leurs gestes était étudié précisément et l'on attendait qu'ils baissent leur garde avant d'intervenir. L'attention était portée vers la figure enfantine dans les bras de son grand frère. Une bouille d'ange assoupie et paisible qui attendrirait n'importe qui avec ses yeux de biche fermés dont on ne distinguait que de longs cils clairs encore humides suite aux larmes formées par la peur, ou bien ce visage rond et innocent, cette peau douce et laiteuse qui faisait penser à un gâteau qu'on aurait envie de croquer, ses lèvres fines plissées dans un sourire inconscient, symbole d'un doux rêve d'enfant. Une créature tout droit descendue du Paradis entourée d'une aura de pureté, une créature qui paraissait à la fois si proche mais si loin, à la frontière entre le monde réel et l'au-delà, une créature si belle qu'on la craignait, mais en même temps on l'appréciait, on la désirait et c'est ce désir qui conquit. Les mains tentatrices se glissèrent doucement autour du cou innocent, touchant enfin l'épiderme chaud et la bouche malveillante s'approcha de l'oreille de l'enfant endormi, s'apprêtant à lui susurrer les plus beaux cauchemars.

Il distingua dans sa conscience un monde féerique et complexe, un univers des plus beaux dans l'imaginaire d'un enfant. Dans ce monde tout semblait possible, voler dans le ciel à toute vitesse ou nager dans les profondeurs de l'océan sans se noyer n'était pas un problème. Les rêves les plus beaux et les plus fous étaient exaucés ici, il n'y avait aucune limite à ces derniers tant que la paix régnait. Toutes les espèces, existantes et imaginaires, cohabitaient en harmonie dans ce paradis de couleurs. Les nuages flottaient doux comme de la barbe à papa dans le ciel rose, les prés étaient recouverts de fleurs géantes et la rivière étincelait comme un miroir, offrant une lumière majestueuse à ce cadre idyllique. Quiconque entrait dans ce monde enchanteur était libéré de ses soucis parmi toutes les merveilles qu'il offrait. La fascination qu'on ressentait était tout à fait normale, le nombre de choses à admirer était hallucinant et prendrait toute une vie. Chaque jour il se remplissait un peu plus, grâce à de simples paroles qui se transformaient comme par magie ou grâce à des paysages et expériences du monde réel. Jimin avait créé ce monde en se basant sur sa propre vie, c'était son petit paradis dans lequel il aimait se réfugier lorsqu'il en ressentait le besoin. Il s'imaginait vagabonder dans les champs fleuris en sautant de fleur en fleur, se baigner dans la rivière avec les poissons multicolores, voler dans le ciel avec des oiseaux de feu qui remplaçaient le Soleil en apportant lumière et chaleur dans ce monde imaginaire. Et il y avait encore tellement de choses que l'enfant créateur lui-même ignorait, des endroits flous et cachés qui apparaitraient au fur et à mesure de sa croissance et qui se révéleront peut être encore plus impressionnants ; seul le destin le savait.

Mais une proie endormie était sans défense et sans son créateur, le monde imaginaire était accessible à toute malveillance.

Sans que Jimin ne puisse faire quoi que ce soit, le ciel se colora bientôt de rouge sang, celui des oiseaux de feu dont on ne distinguait plus qu'un cri d'agonie, la rivière s'assécha d'un coup, ne laissant que des cadavres de poissons et de coraux derrière elle et toute population disparut comme si elle n'avait jamais existé. Toute la magie disparut, le monde plongea dans les ténèbres, une noirceur sans nom enveloppa l'entièreté de celui-ci et les doux gazouillis des oiseaux furent remplacés par un silence mortel. Le paradis devint un enfer, un lieu désert et vide, sombre et effrayant. Le petit Jimin parmi les fleurs mortes s'accroupit en boule, apeuré, tandis qu'une main gigantesque descendant du ciel s'apprêtait à l'attraper. Il était prit au piège dans son propre univers parce qu'il n'avait pas fait attention, parce qu'il avait laissé toutes ses idées folles se matérialiser en ce lieu, parce qu'il n'avait pas prévu qu'une menace allait un jour tomber. Le cauchemar était né, il était venu troubler la quiétude de ce doux rêve et n'allait pas s'arrêter avant d'avoir eu ce qu'il voulait. L'air devint soudain irrespirable et étouffant, une désagréable odeur de brûlé envahit les narines de l'enfant qui se mit à tousser bruyamment.

- C'est bien mon ange déchu, laisse-toi aller. Viens à moi, abandonne ce monde qui n'est pas fait pour toi.

Jimin écoutait à peine la voix de l'intrus, trop concentré à essayer de ne pas respirer la fumée toxique qui se répandait autour de lui. Il se tenait la gorge, allongé sur le sol et gigotait désespérément pour se libérer de cette emprise. C'est comme s'il n'était plus conscient de lui-même, ses propres mains augmentaient la prise et serraient de plus en plus fort. Il commença à crier avec peine, sa voix fut étouffée par le manque d'air et la poigne augmenta un peu plus comme si l'entité voulait l'empêcher d'appeler à l'aide. Qui aurait-il pu appeler de toute façon ? Il n'y avait personne ici, il était condamné, condamné à hurler sans un seul bruit dans son ancien monde utopique.

Personne n'allait l'aider. 

Il était seul.

Seul dans l'agonie et la souffrance.

Et seule l'entité qui l'observait mourir de loin s'amusait en se frottant les mains.

❃°•°❀°•°❃

- Jimin ! Jimin tu vas bien ?! Réponds-moi petit frère !

Une voix lointaine appelait son nom. Ce n'était pas celle qui avait tenté de l'envoûter et qui avait détruit son monde, c'était une voix familière. Elle était douce et rassurante, chaleureuse malgré le fait qu'elle soit tremblante et imprégnée de panique. L'enfant la connaissait, il l'avait déjà entendue de nombreuses fois. Il sentit ses paupières s'ouvrirent doucement et la première chose qu'il vit fut le visage d'un adolescent penché au-dessus de lui. Il ne comprit pas tout de suite qu'il s'agissait de son grand frère, son esprit étant encore embrouillé par tout ce qu'il venait de vivre mais bientôt deux bras vinrent l'envelopper avec force.

- J'ai eu si peur ! exclama Hoseok en le serrant contre lui, laissant toute l'inquiétude et la panique qui avaient gagné son corps s'échapper. Tu n'arrêtais pas de crier et de bouger, j'ai cru que tu n'allais plus jamais te réveiller !

Les lèvres de Jimin se plissèrent et il se sentit d'un coup plus soulagé, comprenant que tout ce qu'il avait vu et ressenti n'avait été qu'imagination.

- Hyung... murmura Jimin en se calant contre lui, essuyant les larmes qui se formaient dans ses yeux. J'ai fait un horrible cauchemar.

- J'avais remarqué petit ange... C'est fini, je suis avec toi. Tu n'as plus rien à craindre maintenant.

Hoseok le berça quelques instants, calmant  les pleurs de l'enfant qui se remettait petit à petit de ses émotions. Il ne comptait pas lui demander de raconter son cauchemar, cela ne servirait qu'à lui rappeler de mauvaises choses et il ne voulait absolument pas que son protégé pleure à nouveau. La petite pause qu'avait faite l'adolescent s'allongea un peu plus afin que Jimin puisse prendre tout le temps de se calmer.

Ils étaient sortis de la forêt depuis un moment déjà, la lune était à nouveau visible et les éclairait de sa lumière rassurante. L'air était doux, les environs calmes. Ils voyaient enfin autre chose que des arbres et cela avait beaucoup rassuré l'enfant qui, après avoir bu un peu, se sentait prêt à repartir. Le grand frère donna également à boire à leur monture qui avait encore une fois accompli son voyage avec perfection. Ils allaient enfin pouvoir rentrer chez eux et terminer ce périple déjà bien trop long.

- On est loin de la maison ? demanda Jimin, sa petite main tenant celle de son grand frère.

- On arrive bientôt. Hoseok lui sourit tendrement. Tu pourras faire un bon dodo cette fois.

- Je pourrai dormir avec toi hyung ?

- Bien sûr, je te ferai une petite place dans mon lit.

Les pleurs étaient finis, cette aventure éprouvante prenait enfin fin. Le cheval continuait d'avancer sur le chemin de pierre, au loin l'on distinguait un petit village. Jimin était beaucoup plus tranquille, il savait que tout ce qu'il s'était passé était loin derrière eux et que leur maison était à portée de main mais il ne pouvait s'empêcher de repenser à l'homme de la forêt.

L'enfant sentait encore la froideur de cette main qui avait caressé sa joue, avait-il imaginé cette sensation ? Il entendait sa voix profonde résonner au plus profond de lui, cette voix puissante, charmeuse, malicieuse. Il voyait encore ses yeux brillants dans la nuit, ses mouvements agiles et son allure effrayante. L'enfant ne savait pas si ce qu'il avait vu était vrai, son imagination lui avait vraiment joué un mauvais tour cette fois-ci. Il ne voulait même pas en garder un souvenir, il ne voulait pas revoir son monde se faire avaler par les ténèbres.

Le voyage avait été long et troublant, Jimin adorait partir avec son frère mais il songea qu'il devrait rester à la maison ces prochains jours et accompagner Hoseok uniquement s'ils rentraient en journée. Il ne voulait surtout pas retenter l'expérience de nuit. Il frotta ses petits yeux endormis, ceux-ci étaient encore humides à cause de ses pleurs et il renifla un coup. Heureusement qu'ils étaient bientôt arrivés, sa mère les attendait sûrement avec un repas bien chaud et son père allait sûrement leur demander comment s'était passé l'échange commercial, il sera probablement heureux de revoir ses fils arriver avec deux bourses pleines de pièces d'or.
Et puis il allait dormir avec Hoseok, la soirée avait mal commencé mais allait bien se terminer, il allait bien dormir dans les bras de son grand frère.

Jimin observa leurs deux mains liées et eut un sourire qui s'effaça petit à petit lorsqu'il remarqua quelque chose qu'il n'avait pas vu jusqu'à maintenant.

Ses mains.

Ses mains d'enfant étaient recouvertes de sang.

Son coeur commença à battre plus vite. Ce n'était pas possible, il devait être en train d'halluciner ! Il les frotta contre son pantalon avant de les observer à nouveau, ça ne partait pas. Il retenta une nouvelle fois, la panique prenant contrôle de son corps mais encore une fois sa tentative fut vaine. Et alors qu'il s'apprêtait à parler, il remarqua quelque chose d'autre de plus glaçant encore.

Ses mains commencèrent à trembler, quand est-ce que ce poignard avait été enfoncé dans sa poitrine ? Jimin ne distinguait rien d'autre que le sang rouge qui coulait le long de son ventre, sa blessure qui s'ouvrait encore plus grand comme si quelqu'un était en train d'enfoncer l'arme encore plus profondément dans son petit corps.
Il ne sentait rien, aucune douleur. Seuls ses yeux paniqués observaient la scène, il ne comprenait plus rien, il comprenait encore moins ce rire qui résonnait au lointain. Mais bientôt il comprit, il reconnut cette voix.

- L'homme ! L'homme ! hurla-t-il avec tout l'air possible dans ses poumons. Il essaye de me tuer !

Hoseok secoua violemment les rênes, la panique l'avait gagné sans raison. Son esprit était perdu, embrouillé, son corps agissait tout seul et lui ordonnait de se dépêcher. Il ressentait le danger tout autour d'eux, ils n'étaient pas en sécurité. Le cri déchirant de son frère l'avait convaincu, ils devaient rentrer au plus vite.

- Tiens bon Jimin, on est bientôt arrivés, lui murmura-t-il en le serrant contre lui. Bientôt tu arrêteras de faire ces horribles cauchemars.

Le cheval galopait à toute allure, Hoseok le forçait à avancer. Ils devaient rentrer au plus vite, il le savait. Le temps filait à toute allure, il fallait se dépêcher. Le vent s'était levé, il n'y avait aucun bruit hormis celui des sabots martelant le sol et le souffle frénétique d'Hoseok. Ils y étaient presque, le village se rapprochait chaque fois plus.
Les lumières à l'intérieur des maisons étaient de plus en plus visibles, plus lumineuses, leur ferme était si proche.

Si proche.

Le cheval s'arrêta, ils étaient enfin arrivés.
Leur habitat se dressait devant eux, prêt à les accueillir, à leur offrir chaleur et protection. Le cauchemar était enfin terminé, ils allaient pouvoir oublier cette histoire et vivre à nouveau une vie normale...

Mais l'enfant était déjà mort.

Et dans sa conscience détruite se dressait l'homme qui l'avait tourmenté dans ses derniers instants de vie, son pire cauchemar.

❃°•°❀°•°❃

C'est la première fois que je tente un autre style, ça change de mes histoires fluff et je suis plutôt satisfaite du résultat.

Avez-vous des théories ?
Jimin est-il mort naturellement ou a-t-il été tué par une force malveillante ? Mystère, mystère... :)

Merci beaucoup d'avoir lu mon OS, j'espère qu'il vous a plu ! ❤️