Chapitre 7

Il va sans dire que la nuit qui a suivi a été un calvaire sans nom, ponctuée de cauchemars et d'autres tortures, et que, à peine les yeux ouverts après trois heures de sommeil, tout ce que j'ai traîné jusqu'au fin fond de la nuit m'attaque sans me laisser respirer.

Dans mes songes, j'ai revu Iris pleurer au moins trois fois, quand elle ne devenait pas ivre de chagrin et de vengeance à m'en transpercer le torse, ou à m'en briser le crâne de ses pleurs suraigus.

Je ne sais pas si c'est ma douleur ou la sienne qui me tuait à chacun de mes cauchemars. Cette souffrance, c'est moi qui l'ai semée, c'est moi qui l'ai faite grandir chez elle, je suis l'auteur de tout ça. Et sur le moment, je ne m'en suis même pas rendu compte.

Est-ce qu'un assassin ne se rend pas compte de son acte ?

C'est si dur, d'assumer un tel rôle, celui qu'on endosse naturellement, et dont on ne se dépêtre pas. Je ne sais pas ce que je vais faire de moi. En fait, je crois que je n'ai jamais réellement su.

Mais bon...Ce n'est pas comme si je voulais me projeter dans l'avenir non plus. Mon présent m'est suffisamment pesant comme ça.

Assis à mon bureau, j'essaie de me distraire un peu de mes pensées noires en occupant mes mains et mon esprit, et pas avec n'importe quoi : avec la petite boîte cubique.

Ça fait plusieurs minutes que je tente de trouver une quelconque beauté à ce cœur rougeoyant qu'elle contient, mais j'ai vraiment du mal. Certes, le voir me devient de plus en plus supportable, mais en rien agréable.

Je me concentre. À nouveau, je fais coulisser le bocal hors de la boîte, et l'inspecte minutieusement.

Le cœur de Gretel...

Ce qu'elle tenait au creux de sa paume... Ce qu'elle me tendait, du bout de son bras tendu... Cette tache de sang qui voilait légèrement son épaule, qui dévalait le tissu blanc jusqu'à sa poitrine, son visage livide, Gretel qui s'éloigne, s'éloigne, s'éloigne sans que je ne puisse esquisser le moindre pas...

Je referme aussitôt la boîte dans un claquement sec, et la repousse loin de moi.

« Tim ? »

Je fais volte-face sur ma chaise, et aperçois ma mère, à l'embrasure de la chambre. Je ne l'avais pas entendue rentrer.

« Tout va bien ? me demande-t-elle. Il fait beau, tu devrais en profiter... »

Sa voix s'éteint sur ses derniers mots, et immédiatement je la devine se repentir de ses paroles. Sortir dehors est étroitement lié avec l'idée de voir des amis. Et la seule amie que je veux voir n'est plus de ce monde.

« Tu travailles ? » reprend-t-elle d'une voix timide.

Je hausse les épaules.

« Un peu. »

Ma mère a son demi-sourire. Brusquement, l'image du magazine Cérémonie apparaît dans mon esprit, celui que j'ai jeté à travers le salon.

Je me demande si ma mère continue de le consulter régulièrement, d'y faire ses reports et ses constats. Épie-t-elle toujours mes faits et gestes, mes sautes d'humeur ? Considère-t-elle l'incident avec Iris comme lié avec ce qu'il m'arrive ? Moi-même je finis par tout rassembler, de tout regrouper dans un seul et même sac, et qui, sans même savoir ce qu'il contient, pèse pleinement son poids.

Si seulement ma mère avait complètement lâché l'affaire... Elle se fait un sang d'encre pour rien. Elle n'a pas besoin de s'inquiéter pour moi, vraiment pas.

Je voudrais y faire quelque chose, mais je ne sais pas comment la rassurer.

Tout comme ma cousine, en fait.

Ma mère me répète si tout va bien. Je hoche la tête, j'ai une petite raideur au niveau du gosier. Elle appuie son regard sur moi, quelques pesantes secondes, puis tourne les talons, et s'éloigne dans le couloir.

J'inspire sans oser soupirer.

Au fait, ma mère sait-elle de quoi Gretel est véritablement morte ?

Quand les ambulances sont arrivées, ce jeudi-là, on pouvait facilement deviner aux actions nerveuses et précipitées des médecins que le patient ne s'était pas simplement coupé le doigt en cuisinant. Ma mère était arrivée à la suite d'un de mes appels (j'ai bien du appeler tout mon répertoire sur le moment), et je crois bien même avoir répété, une ou deux fois, sans vraiment y croire moi-même, que Gretel était... loin de nous, désormais.

Mais me regarderait-elle vraiment dans les yeux si elle savait que son fils avait sur son bureau le cœur de sa défunte amie ?

Non, je ne pense pas.

Et puis cette boîte, dès que je l'ai vue pour la première fois, j'ai tout de suite oublié son existence, comme annihilée par le choc. Comment aurais-je pu en parler à mes parents ? Comment auraient-ils pu me croire ?

Non non, ils ne sont au courant de rien.

Et c'est bien mieux comme ça.

J'attrape la petite boîte, et la fais disparaître en un tour de main au fond de mon tiroir. Temps de réflexion : terminé. Je ne veux plus la voir, cette boîte, et ce, pour toute la journée.

Elle me rappelle que Gretel n'est plus là.

Le petit picotement dans mon cœur devient une véritable piqûre. Je me lève, un peu perdu.

J'ai beau réfléchir, réfléchir, et essayer de m'empêcher d'y réfléchir parfois, je ne comprends toujours pas pourquoi Gretel a fait ça. Et ce qu'elle attend de moi en retour. Ses consignes sont bien maigres, et elles ne me conviennent absolument pas. Il est hors de questions que je « prenne son cœur ».

Et puis quand bien même je voudrais vraiment permuter nos deux organes, comment m'y prendre ? Je ne vais pas me le greffer avec mes ciseaux d'école et trois coton-tiges, et je n'ai clairement pas le temps de réclamer une opération auprès de l'hôpital. Et comment expliquer que j'ai un cœur ? Comment le dire à mes parents, aux infirmiers, que je possède un second cœur, qui n'est pas le mien ? Surtout, en quoi le cœur de Gretel me donnerait-il quoi que ce soit de mieux par rapport au mien ? Aucun de nous deux n'avons de malformation cardiaque, et nous avons tous les deux une plutôt bonne santé. Que disait son mot, déjà ? Goutte à ma personne, et, si elle te plaît, prends mon cœur. La mienne ne me suffit-elle pas ?...

Même si Gretel me disait si souvent que j'étais trop sombre... Même si elle trouvait que je prenais beaucoup de choses avec pessimisme, que mon angle du monde était désastreux...

En vérité, je me suis toujours trouvé neutre. Rien ne m'horrifie et rien de m'émerveille. Rien n'a d'ombre ni de lumière.

Tout est, à mes yeux, ce qu'il est vraiment.

Peut-être que mon manque de subjectivité a fini par lasser Gretel ?

Et, au milieu de tout ça, j'ai si peur de la décevoir, maintenant qu'elle n'est plus...

Un cri me brûle la gorge, mais je puise dans mes plus grandes forces pour l'empêcher de s'enfuir. Ma mère doit avoir raison, je devrais sortir un peu. Peut-être que le soleil me donnera quelques pistes, et éclairera un peu ce que j'ai dans la tête.

Je quitte ma chambre, descends, vais dans l'entrée. J'hésite, puis je finis par prendre le chemin du jardin.

Je marche un peu, pour finalement m'asseoir à côté d'un buisson, dans l'herbe sèche de l'automne. Les clôtures délimitant le terrain sont toutes proches, et j'entends, à travers le feuillage, une discussion étouffée. Les voisins, sûrement. Je me concentre quelques secondes sur leur fins chuchotis, quand mon téléphone sonne. Je le tire instantanément de ma poche.

Tu peux demander à maman si je peux ramener Antoine ?

Signé Noah.

Je soupire.

Évidemment que j'ai cru, durant un ultime instant, qu'il s'agissait de Gretel. Qu'elle s'ennuyait, qu'elle me demandait un renseignement sur les cours, qu'elle voulait absolument me partager un moment mirobolant de sa vie. Il est quinze heures, une heure qui aurait parfaitement convenu à ce genre de message et à ce genre de discussion. Après des textes et des textes, des mots et des mots, on aurait peut-être décidé de se rejoindre en ville. Vu le soleil, on aurait pu aller au parc. Ou alors, on aurait mangé. Des crêpes, peut-être, celles du supermarché du coin. Ou alors, des viennoiseries de la boulangerie, où l'on doit finir par nous reconnaître à force. Je me demande ce que dira la boulangère, tiens. Va-t-elle se demander où sont passés ces deux adolescents, l'un avec ses cheveux blancs et l'autre avec son sourire éclatant ? Nous reconnaîtrait-elle, se souvient-elle de nous ? Ou alors, sommes-nous des clients bien quelconques, ceux qui suivent et qui précèdent les autres ?

Mon soupir se bloque dans ma gorge. Je fixe le message de Noah, une bonne minute, avant de trouver la force de laisser tomber mon portable dans l'herbe, et de m'étaler.

J'aimerais bien écrire les mêmes mots que mon frère. Tu peux demander à maman si je peux ramener Gretel ? Je dois certainement les avoir écrits des milliards et des milliards de fois, et cette habitude a pris brutalement fin.

J'imagine que oui, écris-je sans grande passion. Je crois qu'elle part dans une dizaine de minutes, elle doit racheter quelque chose.

Et puis, pris dans mon élan, j'ouvre nos conversations avec Gretel.

Mon dernier message remonte à un peu plus d'une semaine. Mercredi dernier, la veille de notre rendez-vous. Et il disait : Ne t'inquiète pas, je serai à l'heure.

Au moins, je l'étais.

Gretel avait-elle prévu de débouler dans un pareil état ? Avait-elle prévu sa propre mort ? Sans doute. Une chose pareille... ça se prépare à l'avance, n'est-ce pas ? S'arracher son propre cœur...

À cette pensée, je me redresse brusquement. Je sens tous mes muscles tendus comme des cordes de violon, celui qui s'apprête à jouer la plus acerbe et la plus nasillarde des musiques. J'essaie de me détendre en regardant un petit bouquet de fleurs mauves, poussant non loin de moi sur la pelouse, mais leur délicate couleur ne m'apaise pas. Alors je me rallonge, et je commence à lire — ou relire — les messages de Gretel. Tous ces moments où je savais qu'elle était là, derrière son téléphone, à me répondre. Tous ces moments que je ne voyais pas si précieux, à l'époque.

Et, plus je remonte les anciens messages aux dates de plus en plus lointaines, plus cette petite voix chantonne vicieusement à mon oreille :

Un mois et une semaine... Un mois et une semaine...



Un mois et une semaine... Un mois et une semaine...

Je n'arrive pas à dormir.

Enfin, j'ai du dormir, puis me réveiller, puis me rendormir, et à force de berner mon esprit, je ne sais plus quelle heure il est, ni quel jour nous sommes. Il fait noir, j'ai chaud.

Mais je n'allume pas.

Un mois et une semaine... Un mois et une semaine...

Je me penche, tâtonne jusqu'à ma table de chevet, et ouvre le tiroir.

Un mois et une semaine... Un mois et une semaine...

J'attrape la boîte cubique.

Ce que me chante la petite voix, c'est la date de mort de cette chose, cette si petite chose qui suffisait, entre autre, à maintenir Gretel en vie.

C'est incroyable comme la présence d'un cœur est identifiable. On aurait pu me mettre n'importe quoi dans la main d'allure cubique, j'aurais pu distinguer s'il contenait un cœur ou non. C'est si... spécial. Gretel avait peut-être raison de croire en un quelconque pouvoir ? Je ne sais pas, je n'en sais rien. Je l'ai peut-être tout simplement beaucoup trop tenu dans ma main, aujourd'hui.

Il continue de me répugner, ce cœur. Mais étrangement, il m'apaise, dans cette nuit remplie de tourments. Il me terrifie, mais me fascine à la fois. Comme un art tourmenté et tiraillé, qui effraie les yeux mais qui parle à l'âme.

Gretel, dans un sens, tu es encore un peu là... N'est-ce pas ?

Doucement, j'entoure la petite boîte de mes bras, et la presse près de mon cœur, en espérant qu'il s'en sente un peu moins seul, en espérant qu'il survivra à cette fin de semaine que j'espère ne plus jamais connaître.

***

Finalement, ce terrible week-end se termine enfin. Même si deux autres jours très similaires à ceux que je viens de passer m'attendent à la sortie de cette nouvelle semaine, je me sens plutôt soulagé de pouvoir m'occuper l'esprit et le corps avec les cours. Même si, en vérité, je ne sais plus trop réellement où j'ai envie de me tenir, sur cette planète. « Là où se trouve Gretel » est impossible, malheureusement.

J'arrive quand-même à me mettre en retard, et résultat : quand je claque la porte de ma maison, je suis exténué, je me mets à courir sous ce soudain soleil qu'on n'attendait plus. La pluie s'est effacée dans le week-end, semble-t-il.

Je traverse les rues, et étrangement, je sens ma fatigue grandir. Mon ventre semble tout engourdi, alors qu'avec mon départ précipité, il ne doit pas digérer grand-chose...

Je change de trottoir, quand soudain j'entends quelqu'un appeler :

« Hé, Timothée ! »

Je me détoure, et j'ai à peine le temps de pivoter qu'une silhouette apparaît à côté de moi : Mathias.

Une des conséquences d'arriver en retard. Impossible de savoir si c'est une bonne ou une mauvaise chose.

« Eh bah, s'esclaffe-t-il, t'as l'air de bonne humeur, toi ! »

De l'ironie, bien entendu. Je ne sais pas quelle tête j'affiche. Sûrement celle de quelqu'un qui vient d'apprendre qu'il doit se coltiner un personnage tel que Mathias durant un trajet variant d'un quart d'heure à vingt minutes. Mélangé avec ce drôle de sentiment vertigineux, mon visage ne doit pas être des plus agréables, en effet.

Mathias reprend d'un air goguenard :

« Toujours pas de nouvelles de ta miss ? »

Sa capuche fait tache sous ce ciel bleu. Aujourd'hui, elle est d'un bleu foncé, si foncé qu'on le confondrait avec du noir. Il doit vraiment être sensible au soleil. Ou alors, c'est sa mère qui lui coupe les cheveux, et je compatis.

On recommence à marcher vers le lycée d'un pas automatique, j'en profite pour lui répondre :

« Selon toi, Gretel et moi ne sommes plus ensemble. Pourquoi est-ce qu'on se verrait ?

— Donc là, tu me certifies que mon hypothèse est bonne. »

Je lève les yeux au ciel. Il a quand-même le don de me désespérer, alors que je n'ai même pas la tête à espérer quoi que ce soit.

On dépasse une femme qui se débat avec son chien. On enjambe son petit caniche, qui se rue joyeusement dans les poubelles, sous les cris effarés de sa maîtresse.

« Timothée, t'es tout pâle. »

Il me faut un instant pour saisir que ce commentaire m'est destiné. Je me détourne, perplexe.

« Pâle ? répété-je.

— Ouais, acquiesce Mathias. Tout blanc. Vraiment.

— Je sais ce que ça veut dire, merci !

— On dirait que tu as vu un fantôme... »

Ma concentration dans le monde présent saute brutalement. Je m'arrête net sur le trottoir, mon cœur se serre.

Mathias s'arrête à son tour, et se détourne vers moi, surpris.

« Eh bah ? T'as oublié quelque chose ? »

Je me fais violence pour ne pas le dévisager, parce que oui, j'ai bel et bien l'impression qu'il me manque quelque chose. Ce quelque chose continue de courir sans moi, et plus le temps passe, plus il me sera difficile de le rattraper.

On dirait que tu as vu un fantôme...

Est-ce qu'au final, ça existe, les fantômes ? Est-ce qu'un jour, je pourrais revoir Gretel sous sa forme spectrale ?

Non... Non, bien sûr que non. C'est stupide, comme idée.

Je sens une boule s'épaissir dans ma gorge. Je tente de l'avaler.

Quand brusquement, je sens une pression à mon poignet.

J'ai un mouvement de recul, je tire mon bras pour me dégager, et je découvre, hébété, que c'est Mathias qui vient de s'emparer de mon bras.

J'ai un instant de latence.

« ... M-Mais... qu'est-ce que tu...

— Ne t'inquiète pas, je prends ton pouls. »

Mon pouls ?

On s'arrête de marcher.

Mathias se concentre, il presse doucement deux doigts à la naissance de ma main.

Mais qu'est-ce qu'il trafique ? Qu'est-ce qu'il a, mon pouls ?

« ...Je vais bien, tu sais, assuré-je après quelques instants silencieux. Je n'ai pas couru, j'ai un pouls normal... »

Mes mots tirent un sourire chez Mathias. Il ne s'interrompt pas pour autant dans ses manipulations. Je le regarde faire, ses gestes sont drôlement précis, stratégiques et surtout extrêmement minimes. Il commence alors à me raconter :

« C'est ma mère qui me l'a appris, il y a longtemps. Elle travaille un peu dans le domaine médical. Écouter le pouls des autres... Pour comprendre ce qui s'y passe. »

Je sens la pression de sa prise s'accentuer. Il relève :

« . T'es un peu tendu, non ? »

Je redresse le regard, et le dévisage. Mathias a un petit sourire en coin que je ne parviens pas à qualifier. À mi-chemin entre la moquerie et l'attendrissement. Bien que les deux n'aient absolument rien à voir.

« Ben... fais-je, je t'avoue que c'est quand-même bizarre, ce que tu fais... »

D'autant plus que le pouls au creux du poignet, je n'ai jamais réussi à l'entendre. Son existence m'est si muette que parfois je l'oublie. Le seul que je peux à peu près sentir, c'est celui à mon cou, et encore, il faut déjà que j'aie sollicité mon souffle à la course. Que Mathias l'ait trouvé rien qu'en positionnant deux doigts en un quart de seconde est tout de même stupéfiant.

Il a du s'entraîner, certainement. Même si c'est un drôle d'entraînement.

« ... Et tu arrives à comprendre ce qu'il y a dans ma tête ? » j'interroge.

Mathias a un rire sardonique :

« Je ne lis pas dans tes pensées, gros malin ! Je ne connaîtrais jamais la raison de tes émotions, je peux simplement voir celles que tu ressens. »

Il baisse les yeux sur mon poignet en cours d'analyse. À nouveau, je le sens modifier légèrement sa prise, et grimper quelques infimes centimètres de ma peau. Mathias reprend d'un air songeur :

« On ne peut jamais connaître quelqu'un par cœur... Et n'est-ce pas cette part d'ombre éternelle qui nous attire chez quelqu'un ? »

Finalement, il ôte sa main. Je parviens enfin à formuler :

« J'ai juste cru que j'avais oublié mes clés. »

Mathias reste silencieux quelques secondes, les yeux ronds.

Puis tout à coup, il se tord de rire.

« Quoi ? je lâche.

— C'est que, nous, ça fait quatre ans qu'on ne connaît plus le problème.

— Hein ? Comment ça ? »

Il calme son rire, et, tout en tirant sur sa capuche, m'explique ;

« Mon père perdait tout le temps ses clés, ma mère devenait folle. Puis un jour, elle les a perdues aussi, en même temps que mon père. Il a fallu que je rentre des cours pour que je puisse leur ouvrir ! Ce jour-là, ils ont décidé d'investir dans une serrure électronique. Il faut un code, ou un badge.

— Comme un immeuble, en fait.

— Exact. Ou comme une base d'agents secrets, ça le fait aussi. » 

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