❝We are all broken. That's how the light gets in.❞ - E. Hemingway

♪ Battle Scars - Lupe Fiasco ft. Guy Sebastian ♪

Regardant mon visage dans le miroir une dernière fois, je passais mes doigts sur les marques maintenant cachées par le maquillage. Ces marques pouvaient être maintenant enfouies sous cet artifice, mes yeux eux ne se cachaient pas. Ils n'avaient jamais brillé auparavant, mais aujourd'hui, c'était comme si ils étaient éteints, comme si mon humeur avait terni tout mon être, comme si j'étais morte.

Attrapant mon sac, j'inspirais une bonne fois pour toutes. Je n'avais pas fait le travail demandé par le professeur de littérature, et j'espérais de tout coeur qu'il ne m'en tiendrait pas rigueur. Je quittais la chambre, attrapant la clé pour aller la rendre à la femme de l'accueil. Arrivant à l'entrée du motel, je fus déçue de constater que ce n'était pas elle mais une jeune fille d'a peu près mon âge derrière le comptoir, cette dernière plongée dans un livre.

Je déposais la clé sur le meuble en bois, le geste attirant son attention. Elle sourit avant de me remercier pour ma venue, se replongeant presque immédiatement dans son livre.

Je quittais le motel, retrouvant la fraicheur matinale qui me frappa en plein visage. En avançant dans les rues, je réalisais avec stupeur que mon premier cours de sport s'avérait être aujourd'hui, et j'étais loin d'avoir une tenue adéquate. Réfléchissant rapidement, je m'empressais de prendre le premier bus me ramenant à la maison, priant pour ne pas croiser mon beau père.

Normalement, l'alcool ingurgité la veille l'avait endormi jusqu'au beau milieu de la journée, me laissant la voie libre pour revenir. Regardant ma montre, j'avais encore une heure pour arriver au lycée, ce qui me laissait le temps de me changer et récupérer des affaires. Rendue devant la maison, je pris la décision d'escalader jusqu'à ma fenêtre de chambre, une chose que j'avais l'habitude de faire lorsque je ne voulais pas croiser mon beau père. Après quelques reprises, je réussissais à me hisser sur le toit, malgré mon corps souffrant et affaibli. Je poussais ma fenêtre, que je gardais toujours ouvertes pour les situations comme celle ci.

Pénétrant dans ma chambre, je me dépêchais de regrouper un tas d'affaires, cherchant parmi elle une tenue pour le cours de sport. Je la rangeais dans mon sac, échangeant mes cahiers pour les cours de la journée. J'enfilais des vêtements propres, en profitant pour prendre d'autres choses qui pourraient s'avérer nécéssaire au cas où je devais passer une nouvelle nuit hors de chez moi.

Fin prête, je repris le même chemin, sautant du toit pour rejoindre le sol. Je m'empressais de me rendre à l'arrêt de bus le plus proche, montant dans le premier bus pour me rendre au lycée.

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Le cours de science terminé, je trainais le pas pour me diriger vers le gymnase. J'avais toujours haï le sport, depuis ma plus tendre enfance. J'aimais aller courir, donner des coups dans un sac de boxe, mais je détestais les sports collectifs. Les gens étaient obligés de m'avoir dans leur équipe, pour leur plus grand malheur, et je devais supporter les nombreux reproches, et surtout la place sur le banc de touche. Quoi que, cette partie n'était pas si mal.

Nous étions tous dans la salle principale du gymnase, réunis en plusieurs classes tandis que les professeurs faisaient une fois de plus l'appel, commençant ensuite leur long monologue sur le déroulement de l'année. La seule chose que j'avais retenue était que le sport était un moyen facile d'obtenir des points pour valider notre année.

Les professeurs annoncèrent le moment que je redoutais le plus, celui des vestiaires. Ils nous demandèrent de tous aller nous changer pour commencer la séance. Je m'empressais de me lever, tentant de courir vers les toilettes pour pouvoir me changer à l'abri des regards des autres filles. Cependant, je ne fus pas assez rapide, me trouvant obligée d'aller dans les vestiaires.

Je m'y rendis, évitant les regards de chacune des filles lorsque je pénétrais dans la pièce. Je posais mon sac dans un coin de la pièce, baissant le regard pour y trouver mes affaires. Je sortais mon t-shirt, le posant sur le banc avant de retirer celui que je portais déjà, le rangeant dans mon sac. Ne supportant pas de me retrouver ainsi, je m'empressais de vouloir passer mon t-shirt, cependant, ce dernier ne se trouvait plus sur le banc. Me retournant, je constatais très vite que les filles du vestiaire me l'avaient pris, pour m'embêter.

Je les regardais toutes, leurs sous vêtements de toutes les couleurs, leurs corps quasiment parfaits et leurs rires qui résonnaient dans la pièce. Tous leurs regards étaient braqués sur moi, attendant sans doute que je réagisse. Cependant, je ne le fis pas, alors l'une d'entre elle le fit à ma place.

- Si tu veux ton t-shirt, il faudra venir le chercher.

Et en rigolant une fois de plus, elle le fit tomber dans la poubelle, mimant un air tout sauf triste en me regardant droit dans les yeux. Je ne réagissais pas, à quoi bon. Marchant jusqu'à la poubelle, je tendis le bras pour le récupérer, ce qui fit rire toutes les filles. Une d'entre elle s'approcha de moi, attrapant mes épaules pour me retourner face aux bancs.

- Vous avez vu les filles, elle a plein de bleus sur son petit corps d'enfant. La pauvre petite se fait battre par son papa ?

Je mordais ma lèvre, me retenant de ne pas faire quelque chose que je pourrais regretter. J'ignorais sa question, faisant un pas en avant pour me défaire de son emprise. Cette dernière n'était cependant pas décidée à me lâcher puisque ses mains se reposèrent sur mes épaules, me plaquant violemment contre le mur.

- Tu vas me répondre ?

- Lâche moi, murmurai-je, à bout de force, s'il te plait.

Cette dernière se mit à rire, avant d'ordonner aux autres filles de fouiller mon sac. Ces dernières le renversèrent au sol, vidant tout son contenu. L'une d'entre elle trouva mes somnifères, vidant la boite au sol avant de tous les écraser uns par uns.

La brune devant moi se mit à rire, se retournant vers moi.

- Quel dommage, tu ne vas plus réussir à t'endormir le soir.

Mon coeur tambourinait contre ma poitrine, de colère, de haine, de désarroi, et surtout de dégout. Je ne comprenais pas pourquoi elles s'acharnaient sur moi, je ne leur avait jamais rien fait.

- Les filles dépêchez vous de sortir, le cours va commencer.

La voix du professeur à l'extérieur du vestiaire sembla avoir réveillé tout le monde, les filles se levant toutes une par une pour quitter le vestiaire. Certaines d'entres elles restèrent aux côtés de celle qui me tenait, riant en voyant mon air apeuré.

- Si tu pouvais disparaitre, ça nous ferait le plus grand bien, cracha t-elle de tout son venin.

Je fermais les yeux, pensant que tout était terminé, mais je m'étais bien trompée puisque quelques secondes plus tard, je sentis ma joue me brûler, ouvrant les yeux pour découvrir la main de la brune contre mon visage.

- Ça c'est pour ne pas m'avoir répondu, sale trainée.

Elle ne manqua pas de me pousser contre un des bancs, mon corps faible s'écrasant contre le sol et se heurtant au bois froid. Puis elles disparurent, sans laisser de trace.

Mon corps se remit à trembler tandis que je rapprochais mes genoux de ma poitrine, enfouissant mon visage contre ces derniers. Chaque jour semblait s'empirer, comme si tout était fait pour que je veuille définitivement quitter cette terre.

Je me relevais, tentant d'essuyer d'un bref revers de manche mes larmes, ramassant mes affaires maintenant au sol, mes cahiers éparpillés, et le pire, ma photo de Sasha pliée, abimée par ces sorcières tout droit sorties de l'enfer.

Remettant mes vêtements, je m'assurais que personne ne me voit et quittai le gymnase, essayant d'arrêter ce flot de larmes sur mes joues encore rougies par leurs violences. Je sentais mon corps hurler de douleur, tout comme mon coeur. J'étais humiliée, trainée plus bas que terre pour des choses que je n'avais pas faites. On pouvait ne pas m'aimer, mais je ne méritais pas ça, personne ne le méritait. L'espoir d'enfin rencontrer le bonheur dans ma vie s'estompait petit à petit, me confirmant que je n'aurais jamais du croire à ce mythe qu'était une vie meilleure.

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