Numérisé•es

Et voici la nouvelle complète ! J'espère qu'elle vous a plu :)


Papelard

TW : éléments de body horror ; cigarette ; décès (cancer des poumons) ; hétéronormativité ; mention d'expérimentations sur des animaux ; nourriture ; menace avec arme ; rupture.

« Je t'aime. »
Tu me le dis avec toute la force de tes lèvres, mais je doute de ton cœur. Est-il de papier ?
Alors je souris du mieux que je peux, la terreur en fleuve alourdi de pollution dans mes muscles.
« Je crois que je t'aime aussi.
– Tu crois ?
– Oui haha ! »
J'esquive son regard que j'ai peur de découvrir vide comme une page blanche. Et je garde, l'air cool, la main dans la poche, qui tient avec force un zippo dégoulinant d'essence.
Sourire toujours, elle me sourit en retour, l'origami de son masque de Papier Mâché incroyablement délicat et précis – ou humaine, mais.
Je veux des ciseaux, inciser la bouche et regarder si c'est du sang ou de l'encre qui coulera. À la place, je laisse le temps s'étirer désagréablement, incapable de dire quoi que ce soit d'autre à celle que j'aurais aimée.
« Tu es blessante. »
Et le doute revient.

*****

Elle a toujours voulu être cosmonaute, c'est la troisième chose qu'elle m'a dite :
« Salut, moi c'est Emmie, et toi ?
– Jane, enchantée.
– Ça va ?
– Oui et toi ?
– Ça va. Je voudrais être cosmonaute, et c'est pas pour te décrocher une étoile (encore que...) ; toi tu fais quoi de ta vie ? »

Un début de conversation des plus banales sur un site de rencontre. Trop directe, trop bizarre aussi. J'ai failli la supprimer, et puis la curiosité. Savoir qui se cache derrière les mots creux et pourtant plein d'espoir.
« Cosmonaute ? Wahou ! Je suis diététicienne en clinique. »
C'était parti comme ça.

Le premier date s'est déroulé en haut de la Bastille, lieu venteux abritant un parking, quelques arbres à l'écorce blanchie et une vue à se damner sur le Vercors et les Écrins. J'ai craqué et fumé une clope pour l'occasion (sexy ou repoussant pour elle, difficile à dire à ce stade), à mesure que le soleil descend et nimbe les rocs nus d'orange, comme une robe de mousseline. Comme un hommage à l'astre, un petit feu au bout de mes lèvres. Toujours, nous discutons avec enthousiasme.

« Qu'est-ce qui te donne envie d'aller dans ce grand vide ? demandé-je en indiquant le bleu intense au-dessus de nous.
– Ah ! T'es marrante ! C'est pas vide, regarde ! »
Elle m'indique une étoile.
« Elle est à des milliers d'années-lumière.
– Et pourtant, elle est là quand il aurait pu ne rien y avoir. Et tout à l'heure, il y en aura des millions, à perte de compte.
– C'est vrai.
– Quand j'étais petite, je voulais me baigner dans la Voie lactée.
– Adorable ! Moi je m'occupais des animaux de mon jardin, je mettais de la nourriture pour les oiseaux, hérissons et autres joyeusetés de passage.
– Adorable aussi. »
Nous nous regardons, sourire en coin. Pensons au même moment que le date se passe bien. Et la nuit tombe.

Allongées dans l'herbe rase mais tendre. Un plaid sur nous, peut-être qu'on se tiendrait la main, et elle me montre les constellations par des vagues de la main avec assez d'enthousiasme pour que je me sente chaude dans la poitrine alors je me contente de sourire et d'attendre que la contemplation l'absorbe pour lui demander de la pulpe des doigts.
« Mais on peut pas voir Proxima du Centaure. C'est si ironique de pas pouvoir voir sa voisine. J'aimerais poser les pieds sur Proxima du Centaure B un jour. Un jour. Seulement un peu de plus de quatre années-lumière.
– Et moi j'aimerais poser les mains sur tes joues. »
J'ai craqué.
Elle se tourne vers moi. Les étoiles se reflètent dans ses yeux, elle en au fond de la rétine. Des étoiles dans les yeux, littéralement.
« Et ensuite, souffle-t-elle, tu ferais quoi ?
– J'arracherai ton souffle de ta poitrine comme le vide intersidéral.
– Ça me plaît. »

][*][

Tout est temporalité, instant. Viber, c'est être capable de s'enrouler dans le moment comme les dansereuses et leur ruban. Il y a un temps juste pour tout, et c'est savoir s'y plonger qui fait qu'une personne réussit ce qu'elle entreprend. J'ai frôlé cette microseconde, avec le bon ton et maintenant j'ai son goût sur mes lèvres.
Rêveuse.
Ce n'est pas un engagement, je le sais, mais :
« Tu veux venir chez moi ?
– Pour discuter, faire des câlins et dormir uniquement, je suis sur le spectre ace, quelque part dans ce grand flou du désir globalement absent. C'est aussi pour ça que je pense que je ferai une bonne cosmonaute. »
Je ris franchement et l'embrasse et pense à ma chance et remercie moi du passé de lui en avoir donné une.

*****

« Pourquoi tu fumes parfois ? qu'elle me demande alors que nous sommes allongées dans l'obscurité de ma chambre.
– Quand je suis mélancolique, ça m'arrive. Ça me rappelle mon père, mort d'un cancer des poumons quand j'étais au lycée. J'étais tellement mal que j'ai voulu mourir comme lui. Bon ben ça a pas bien marché, mais j'ai toujours envie par moments. Comme un hommage ou le convoquer auprès de moi, je sais pas.
– Moi c'est au lycée que j'ai appris que j'étais lesbienne et plutôt ace.
– Ah ?

« Oui, avant je me considérais comme aromantique. Enfin, j'avais pas les mots, mais comme j'étais jamais tombée amoureuse d'un mec... Bref, le coup classique. Et donc, dans les vestiaires, je racontais ça quand on me demandait sur qui je crush, tu vois ? Et ya une meuf qui dit ''ah moi non plus, j'ai jamais aimé quelqu'un.'' Bon bah on s'est rapproché et on a appris.
– Mignon !
– Mais tu vois, elle voulait faire du sexe et moi pas. Enfin, si, par curiosité, mais c'est tout. J'avais pas cet... le ventre qui grouille, tu vois ?
– Bien sûr.
– Donc j'ai testé, c'était sympa, mais j'ai pas trop voulu m'y remettre et mon ex a pas trop aimé ça et voilà. J'ai cherché en ligne si c'était normal, de pas aimer le sexe, et c'est comme ça que j'ai trouvé mon étiquette. En vrai, ça m'arrive d'avoir envie, mais c'est en phase hypomaniaque – en phase haute, d'excitation générale.
– Je vois. Moi, ma première fois, c'était un peu pareil... »

Le souvenir du premier amour de Jane

Elle s'appelle Jade et c'est ma meilleure amie. Genre comme dans les memes historiques. On est super proches, très tactiles, mais c'est normal entre meufs. On se tient la main, on se dit « je t'aime » à tout bout de champ, normal, très normal. Bien sûr, nos parents commencent à nous regarder de travers parce qu'on est plus des collégiennes, mais ça passe parce qu'on se connaît depuis longtemps.

Le pire, c'est que c'est ma mère qui a lancé tout ça. Elle est venue me voir un matin alors que je me brossais les cheveux pour me parler.
« Ma fille, tu sais, tu me parles pas beaucoup de garçons.
– Oh, ils ne m'intéressent pas trop.
– Tout de même, moi à ton âge, je leur courais après.
– Grand bien t'en fasse.
– Je me demandais si tu aimais pas les filles. »
Je me fige à ces mots. La possibilité – merci l'hétéronormativité – ne m'avait pas effleurée. J'ai tout de suite pensé à Jade, mais je n'ai pas eu le temps d'aller plus loin dans mes réflexions.
« Non parce que si c'est le cas, il faut me le dire, c'est important. »
J'ai senti la menace sous-jacente. Aimer les mecs = ok, normal, à faire ; aimer les meufs = tout l'inverse. Alors je hoche juste la tête.
« Tu peux me faire confiance. »
Qui m'a glacée.

Le soir même, je dors chez Jade, comme tous les deux jours ou presque et je lui parle de cette discussion qui m'a fait si peur. Sa mère lui a fait le même topo, m'apprend-elle.
Alors on se met à chuchoter, dans l'obscurité de sa chambre, effleurée par le voile orangé d'un lampadaire. On sait l'interdit.
« Tu crois que c'est possible d'aimer une femme ? je demande.
– Ben oui, j'ai regardé sur internet. Lesbienne. Ça s'appelle être lesbienne. Ya même une catégorie porno pour ça. »
Je rougis très fort. Même dans la pénombre, Jade le voit.
« Et donc, commencè-je pour montrer que j'avais du courage, elles peuvent faire du sexe ?
– Ben oui.
– Oh waw. »

Je conscientise à ce moment-là, à ce moment où le fait d'être lesbienne devient concret. Deux femmes peuvent se toucher. Deux femmes peuvent s'aimer, d'accord, mais c'est des sentiments, comment les prouver ? Mais deux femmes peuvent faire l'amour, ça c'est réel, ça c'est vrai. J'ai pas le temps de m'en empêcher :
« Et tu voudrais faire du sexe de lesbienne ? »
Jade me regarde bouche bée. Se demande si ce n'est pas une proposition.
« Comme quand en primaire on s'était embrassées ? Qu'est-ce qu'on s'était fait engueuler ! s'exclame-t-elle.
– Oh ouais, horrible !
– Heureusement que la maîtresse avait rien dit aux parents...
– Oui, sinon...
– Sinon ?
– Peut-être que nos parents nous laisseraient plus dormir ensemble.
– Ça serait dommage.
– Voui. »

Ce silence. D'abord peuplé de nos souvenirs communs. Nos nuits à faire n'importe quoi jusqu'à pas d'heure, à discuter, lire, jouer... Et puis, la possibilité d'une autre chose se glisse entre nous. On la lit dans le regard de l'autre, toute proche. J'ai la gorge sèche et je me demande si elle va le sentir. Parce qu'on va s'embrasser, c'est une évidence, il suffit d'un mouvement. Je tends l'oreille vers la porte. Pas un son. Nous sommes seules dans sa chambre et j'ai envie de l'embrasser plus fort que tout ce que j'ai jamais voulu.
« Toi aussi ? elle demande pudiquement. »
Je hoche la tête. Elle a le plus immense sourire que j'ai jamais vu. Un sourire d'enfant émerveillé sur une tête d'adulte. Alors on se penche l'une vers l'autre, nos nez se frottent, je penche la tête, nos lèvres... ses lèvres contre les miennes, au goût de rose. Mes lèvres mouillées par sa salive. Mon souffle aspiré par ses lèvres. Elle pouffe heureuse, je lui souris en retour.

Et nous recommençons.

Plus intense.

L'arrière de son crâne sous ma main. Sa langue sur mes lèvres. Sa langue. Son cou sous mes lèvres. Son souffle qui accélère. Ses seins. Son premier gémissement qui est aussi le mien. Sa main sur un de mes seins. Sa main plus bas. Si chaud. Je tremble. Couvre ma bouche de ma main. Jouis, pour la première fois. Humide. Puis elle. Ahanements. Sourires. Me blottir dans ses bras. Une joie si profonde qu'elle se diffuse dans tout mon corps.
Je n'ai pas peur qu'on nous découvre.

Fin du souvenir du premier amour de Jane

« ... Mais c'était quand même bien. »
Nous hochons la tête de concert.

« Et tu regrettes pas après, quand tu péchotes pendant tes phases hautes ?
– Non ça va. Je suis toujours moi, après tout. Juste plus... intense et énergique et déconcentrée.
– Tant mieux. »
Je pose ma main sur la sienne et je la sens sourire.
« Mais par contre, ça me tue, dans ces moments-là, de pas pouvoir aller dans les étoiles. »

*****

« J'AI TROUVÉ UNE FAÇON ! hurle-t-elle au téléphone. »
J'écarte mon oreille et lâche un « hmm hmm ? » précautionneux.
« Ya cette start up, aptement nommée ''Star Up'' qui a trouvé une façon de voyage dans l'espace ultra rapide, à 99,999999999999% de la vitesse de la lumière ! Globalement, ça part d'une technologie qui déforme l'espace-temps de manière assez stylée et complètement incompréhensible, mais bref, le plus important, c'est qu'iels cherchent des gens pour peupler leurs vaisseaux !
– Quoi ? Mais -
– Je t'explique, attends. Donc. Le corps humain peut pas survivre à l'accélération et la décélération brutale qui permet d'atteindre cette vitesse (sinon, il faudrait lllllleeeeeennnntement accélérer et ralentir et ça servirait à rien). Bref. Iels ont trouvé un moyen de modifier le corps humain pour survivre à ça. Ça s'appelle la papiérisation et du coup l'équipage sera constitué de papyronaute haha. »
Je me demande sincèrement si elle n'est pas en phase haute, légèrement délirante, comme ça peut arriver. Je prends donc encore plus des pincettes pour la suite.

« Et la papiérisation, ça consiste en quoi ?
– Globalement, on photocopie ton corps avec un scanner pour le transformer en feuilles de papier. Là, on t'entasse et on te remoule plus loin ! Iels ont testé avec des animaux, aucun souci, ce sont toujours les mêmes, avec les mêmes traits de personnalité et tout ! Ça marche donc vraiment !
– Sans aucune séquelle ?
– Non !
– Eh bé.
– Olala, je suis trop excitée !
– Et comment iels gagnent des thunes dans l'histoire ?
– Oh, une fois sur place, on devra leur envoyer des ressources pendant un certain temps avant de pouvoir faire comme on veut.
– Oula, ça pue un peu, ça !
– Non mais on s'en fout, je vais pouvoir VISITER les ÉTOILES, MEUF ! J'ai une boule disco dans la poitrine, lààà !
– J'ai bien compris, j'ai bien compris. Faudra bien lire les lignes du contrat si tu t'engages là-dedans.
– Compte sur moi !
– Bon, on en reparle à la maison ? »

Elle semble plus calme le soir, même si elle m'évoque plus un ressort attendant qu'on le lâche pour bondir au loin. J'aborde le sujet au milieu d'une salade froide de pâtes au tofu fumé et maïs :
« Bon, c'est quoi cette histoire de papyronaute ? Mais calmement.
– Une expédition interstellaire avec un processus chelou de hm décomposition ? du corps. Mais ya recomposition après, à l'identique.
– Oki, je vois.
– Et tout ça a été largement testé. Ya même, ai-je appris en les appelant, un humain qui s'est porté volontaire, et rien à signaler. Tout va bien. Juste une légère désorientation passagère.
– Ça a l'air d'être très chouette tout ça, mais je sais pas, je le sens pas. Je préférerais que tu attendes le prochain trajet, s'il y en a un.
– Mais meuf, là c'est l'opportunité d'une vie d'être enfin une des premières à faire quelque chose ! Ça se trouve le prochain voyage sera pas de mon vivant, peut-être que ça sera pas assez rentable et qu'iels nous laisseront nous débrouiller avec le minimum pour notre survie, je sais pas, mais je m'en fiche, je veux en être. Je veux être la première gouine ace psychatrisée de l'espace, à poser le pied sur une planète étrangère. Tu peux comprendre ça ?
– Je... »

Et alors que tout se bouscule en moi, les objections et les peurs, l'excitation, le fait de ne plus la revoir, jamais ; je me rends compte que je suis égoïste. Je ne veux pas la perdre parce que je l'aime. Même si une couche de rationalisation essaie de se caler dessus (où est l'embrouille ? Yen a forcément une), je veux juste qu'elle reste avec moi, même si ça la rendra triste.
Je ne l'aime pas assez pour qu'elle soit heureuse loin de moi.
Je referme la bouche, emplie d'un iceberg.
Secoue la tête négativement.
Emmie pose lentement sa fourchette. Déglutis. Je sais ce qu'elle s'apprête à dire, au mot prêt. Ce n'est plus que du théâtre à présent. Sortir ses répliques, faire une bonne scène.

« Si on ne se comprend pas, si tu ne peux pas me soutenir, alors il vaut mieux qu'on arrête là. Je veux, j'ai besoin de vivre ça, d'aller dans l'espace. Si on est pas d'accord sur nos objectifs de vie, alors... Je pensais pouvoir compter sur toi, avoir un lien, mais tant pis. J'irai seule, avec les autres papyronautes. Il vaut mieux qu'on arrête là. »
Je hoche la tête.
« Je comprends. Tu veux quand même finir le repas ?
– Non je crois que je vais rentrer chez moi. »
Je hoche à nouveau la tête. Elle se lève, prend son manteau, met ses chaussures – grands dieux, pourquoi est-ce si long de mettre des lacets –, me regarde, l'air déçue. Et triste jusqu'à la poitrine. Je sais qu'elle pleurera silencieusement en descendant les escaliers et puis à gros bouillons une fois rentrée.
Moi, ça sera en serrant mon oreiller fort.

*****

Quelque part, j'espérais encore que quelque chose se passe mal avant que la navette ne décolle. Mais non. Tout était parfaitement légal, organisé, préparé, beau même. Une énorme navette en nanotubes de carbone aussi légère que résistante s'est élevée gracieusement, emportant outils et vivres et puis, une fois hors de vue, on a aperçu comme un point plus sombre dans le ciel quand elle a enclenché son moteur principal de navigation, et puis plus rien. Emmie est à présent des milliards de kilomètres, hors de vue, hors d'interaction pendant les quatre ans et quelques que durera le voyage.
Emmie en tas de papier de sa taille, très précieux. Une feuille en moins et la recomposition tournera au cauchemar.
J'ai encore peur pour elle, des mois après notre rupture. Mais comme tout le monde, je crois. Peut-être en un peu plus personnel.
J'ai connu ses lèvres et son souffle, après tout.

Alors la vie continue, et très vite je ne pense que rarement à elle. L'absence de nouvelles en est une bonne : tout va bien sur le vaisseau de Star Up. Plus personne ne retient son souffle. Ce sera pour dans quelques années, quand l'équipage sera rendu à son humanité.

Pour ma part, je veux expérimenter. Je change de prénom quand je me présente à mes dates. C'est Emy, demigirl de mon état, et toi ma belle ?
Je coupe mes cheveux, porte des salopettes, un béret bleu, le pronom iel occasionnellement.
Je me lance dans le polyamour comme un bobsleigh sur la glace : je fonce en espérant ne pas sortir de la piste, avec comme arrivée en tête, la compersion.
Pour ne pas aimer uniquement pour moi à nouveau.

Leurs prénoms sont : Florence (un mois), Charlie (quatre mois et demi), Vivienne (sept mois), Jeanne (presque un an), Sylvia (une semaine et demie), Louise (deux ans, en cours), Mirabelle (onze mois, en cours), Ruby (trois semaines, en cours). Et elleux-mêmes forment un réseau de prénoms, que je m'attelle à connaître, avec les infos essentielles. Et ces personnes-là aussi participent à la toile, notre toile : un coup de pinceau coloré par personne, une fresque impressionniste qui formerait l'image des amours possibles. À notre image personnelle et collective.

[Les années passent, et avec elles une sorte d'apaisement. Ce n'est pas tant la disparition de la fougue que sa canalisation, de delta à fleuve. La force est la même, la dispersion moindre. De grands voiliers y circulent car son lit est profond, ses bancs de sable peu nombreux. Si sa surface affiche l'indolence, elle n'est que feinte, car le courant est fort et charrie des émotions intenses. Un fleuve, oui, un masque biface qui tient par ses oppositions symbiotiques.
Mais parfois, il suffit d'une pluie un peu plus abondante et –]

– c'est la crue sur mon visage. Je ne sais de quelle source intérieure sort toute cette eau, quelle terreur profonde enfin soulagée abreuve mes yeux et mes narines, mais je pleure comme un parent retrouvant son enfant cru mort devant Jane. Je ne pense pas au fait qu'elle n'a rien à faire là, qu'elle devrait être à l'autre bout du cosmos, non, je pleure parce qu'elle est là, que je pensais l'avoir perdue, qu'elle est devant ma porte, inchangée, comme un morceau de mon passé préservé et qui se tiendrait face à moi, un grand sourire sur les lèvres. Étrange mais beau, fragile mais brûlant. Je la serre dans mes bras sans un mot et elle semble si frêle contre moi.

Et alors que ses doigts se nouent dans mes cheveux comme auparavant, elle susurre les mots interdits que je crevais de l'entendre dire plus tôt, mais y-a-t'il jamais un trop tard ?
« Est-ce que tu m'aimes encore ? »
Je m'étouffe dans le torrent d'émotion qui traverse ma gorge, la transperce presque. Alors tout resurgit, les rires et les caresses, la voix qui apaise et enflamme, ces souvenirs qui appartiennent à deux.
Donc le torrent bout, se précipite, se fracasse dans moi.
Et ma gorge reste un barrage.

Je comprends soudain les poissons hors de l'eau. Je pense à ce que je devrai dire mes relations. Je me demande si j'ai laissé un truc à cuire (ça semble avoir disparu de ma mémoire). Je... sa peau fraîche contre la mienne. Le reste disparaît. Je ne peux toujours pas parler, mais je sais. Alors je me blottis contre elle, contre mon amour prodigue, revenu d'entre les étoiles et.
Les étoiles.

Je m'écarte soudain.
« Qu'est-ce que tu fais là ? »
Elle hésite. Lâche la vérité en même temps que ses épaules s'effondrent, avec ses larmes.
« J'ai eu un doute. Loin de... du monde, de ne pas tenir le coup. La procédure est simple dans ce cas : prendre une des capsules de secours et revenir, pour ne pas mettre trop en danger la mission. Mais la culpabilité, si tu savais... Alors j'ai décidé que la première chose à faire serait de réparer ma plus grande erreur. T'avoir abandonnée. »

Je ne peux que pouffer d'émotion, sourire entre nos larmes mêlées et le regarder, empli•e d'une forme d'adoration intense. Bien sûr que le temps est passé, mais. Mais l'amour, lui, attend. Parce que j'ai appris à aimer comme ça, comme on respire ou boit une grande gorgée d'eau ou au quotidien. J'ai appris à aimer sans attendre, sans « moi aussi ». J'ai appris à aimer dans le temps long de la mer.
« Moi j'ai définitivement arrêté de fumer. »
C'est la seule chose que j'arrive à dire et nous rions.
Et nous nous regardons un peu trop.

Elle se penche vers moi, approche sa main de mon visage, j'acquiesce imperceptiblement. Sa paume sur ma joue est un peu râpeuse, son regard court sur mes lèvres.
On s'embrasse.
Un peu maladroites, comme si on avait oublié comment faire entre nous. Je veux long quand elle n'ose pas, je la rattrape, main derrière la tête et ses épaules se détendent enfin.
C'est bon comme un morceau de souvenir solaire.

Cette nuit, nous dormons ensemble, en cuillère. Elle n'a plus d'appartement, elle a encore quelques ami•es, elle n'a plus que moi vers qui se tourner pour se sentir à nouveau humaine, pour rattraper le temps perdu. Je lui présenterai mes amour•es au plus vite, lui montrer que j'ai changé, que je suis précisément au point qu'il aurait fallu que je sois, quatre ans et demi plus tôt.

*****

Nous sortons de cet enfer sur terre que sont les centres commerciaux pour nous diriger vers notre pizzéria. Celle de nos dates d'habitude. Je sais que Jane en a besoin. De retrouver des repères. Des choses qui la lient à notre présent dont elle a été absente trop longtemps. Parfois, elle ne comprend pas certaines expressions nouvellement utilisées et je sens sa souffrance interne qui lui rappelle son sacrifice inutile. Cependant, elle se réadapte vite, et moi aussi, à cette irruption douce de passé – et pour elle de son futur. C'est le présent qu'on partage qui nous relie.

Devant une pizza aux légumes de saison et fomage, nous discutons gaiement de projets.
« Je devrais assez vite retrouver un boulot, je pense. Même un petit truc, le temps de relancer la machine. Après ça, un appart' et c'est tout bon.
– Oh tu sais pour l'appart'...
– T'es adorable, mais je préfère me sentir indépendante. Ancrée, tu vois ?
– Bien sûr, chat, bien sûr, lui souris-je. »
Et je note qu'il y a quelques années, j'aurais peut-être piqué une crise pour ça. Aujourd'hui, c'est calme et compréhension. La mer d'huile.

« Mais du coup, Star Up a pas annoncé que tu étais revenue sur Terre ?
– Non, iels ont préféré ne pas le faire pour éviter que les gens puissent penser que la mission sera un échec. De ce que j'en comprends, quand il y aura un beau succès, ce sera déclaré en même temps, l'air de dire « et en plus, on l'a fait avec une personne de moins ! » Ça sera aussi l'occasion de lancer une deuxième mission (mais chut ! ne le répète pas, c'est encore un secret). Toujours est-il que ça ne devrait pas tarder, je pense.
– D'accord d'accord. »

Et puis j'y repense. Elle est réapparue après un peu plus de quatre ans et demi. Dans l'émotion du moment, je n'y avais pas pensé, mais...
« Et toi, quand es-tu revenue, et comment ?
– En cours de route, vers la moitié.
– Mais tu étais pas inconsciente sous ta forme papiérisée ?
– Hm oui et non. Je sais pas trop si je peux te le dire... Tu promets de ne pas le répéter ?
– Si c'est pas trop grave, oui.
– Bon. Je te fais confiance, hein ! Me trahis pas ! Alors, Star Up a trouvé le moyen de numériser la conscience dans des ordinateurs quantiques. C'est ça qui permet au vaisseau d'être réparée, et pas une IA : il y a bien un équipage conscient : nous. On a juste à transférer notre conscience dans un robot pour gérer les soucis. Mais c'est un gros secret professionnel et commercial alors n'en parle à personne, vraiment !

« C'est encore en phase de test, donc on ne savait pas trop, par exemple, si je garderai la mémoire en me réincarnant (non, mais les logs de ce qu'il s'est passé m'ont été fournis pour que je puisse ne pas avoir perdu des années de ma vie).
– Et le retour seule, c'était pas trop dur ?
– Un peu. J'ai beaucoup joué aux jeux vidéo, beaucoup lu sur plein de trucs, beaucoup mis ma conscience en veille légère (réveil au moindre imprévu, genre le passage d'une particule à travers le vaisseau). C'est passé assez vite. Vers la fin, j'ai gardé une routine normale pour me réhabituer un peu au rythme de vie humain. Et puis me voilà.
– Et le premier truc que tu as fait, c'est venir toquer chez moi ?
– Après les tests de reprise de conscience, oui. C'est peut-être le point le moins sympa de Star Up : tu les lâches, iels te lâchent. J'imagine que c'est donnant-donnant, leur philosophie, vu comme iels nous aident, les aident, là-haut... »

C'est à ce moment précis que je doute. Tout ça est trop... étrange. Trop de détails ajoutés à la dernière minute, même s'ils sont cohérents. Je sais pas, je dois être encore sur mes gardes à cause de l'étrangeté du processus.
Et finalement, qu'est-ce que ça change ? Jane est là, devant moi, à m'aimer. Même si elle n'existait pas et qu'elle n'était qu'imagination, les émotions et sensations sont là, et c'est suffisant.

*****

C'est un soir étouffant que tout éclate. Dans son lit, nous regardons une série et je m'émerveille de la fraîcheur de sa peau sous la canicule, de son absence de transpiration quand je coule jusqu'à mes sourcils. Je caresse répétitivement son poignet sans y penser, absorbé•e par le récit dramatique sous mes yeux (une sombre histoire de gens monogames qui refusent de ne pas choisir entre deux personnes et de vivre heureux•ses ainsi).

Crsh fait sa peau quand je passe mon doigt dessus. Comme un son de poils qu'on rebiffe, ça. Mais plus fort. Je baisse les yeux et l'illusion se crée en même temps qu'elle se brise. Sous les lumières mouvantes, il manque comme un bout de sa peau mate, une sorte de tache inversée. En dessous, c'est tout blanc, presque éclatant. Horrifiée, je crois lui avoir fait mal à force de la caresser sans cesse, mais. Ce n'est pas. Possible ? Si ??? Avec ma peau salée de sueur, caustique, sûrement que j'ai dû trop la frotter, la râper, révéler ce qui se trouve en dessous. Révéler.
Et si ?
Malgré les changements de couleur (bleu, rouge, vert, bleu encore, jaune), la tache reste là. Je repasse mon doigt, tout doux, caresse presque sensuelle. Crsh. C'est doux mais fibreux ?
Je me retiens de vomir.

Parce que je crois que je sais.

Le lendemain, devant un thé fumant, je jette un coup d'œil à son poignet : rien. Peut-être que j'ai rêvé. Peut-être que j'ai mal vu, mal cru, mal, mais qu'une façon de le savoir. Chercher la source.
« Amour...
– Oui maon chéri•e ?
– Je crois que je voudrais partir avec toi dans les étoiles. Avec la prochaine mission. »
Il lui faut un temps pour entendre mes mots, un autre pour les comprendre, un pour les apprécier et un dernier pour réagir, du plus beau sourire qui soit.
« Je t'aime ! »
Tu me le dis avec toute la force de tes lèvres, mais je doute de ton cœur. Est-il de papier ?
« Je crois que je t'aime aussi.
– Tu crois ?
– Oui haha ! »
« Tu es blessante. »
Et le doute revient. Peut-être que j'ai tort, que c'est la vrai Jane devant moi. Que la papiérisation ne l'a pas transformée en papier mâché pour me tromper. Pour s'infiltrer dans mon quotidien et quoi ? Me recruter ?
Après tout, je crois me souvenir ne l'avoir jamais vue nue – normal puisque nous ne couchons pas ensemble –, ni prendre une douche ou un bain, ni même se laver les mains (non ça c'est peut-être juste la mémoire sélective).
Suis-je en train de perdre pied ?

« Désolée, j'ai eu un coup de stress, j'ai réagi n'importe comment. Je serai incroyablement heureuse de partir avec toi sur Proxima du Centaure B, mais ça me fait un peu paniquer. J'ai dit de la merde en voulant détendre l'atmosphère. Mais vraiment, je t'aime. Au point d'aller décrocher une exoplanète pour toi haha ! »
Cette fois elle rit avec moi, sans se douter, j'espère, de la fleur de glace dans mon ventre, qui pousse, sans cesse plus épanouie.
« On peut aller chez Star Up demain pour prendre rendez-vous, si tu veux.
– Oui, pourquoi pas ! »
Je feins les étoiles dans mes yeux, garde mon briquet sur moi en permanence.

*****

Leurs bureaux se trouvent dans un immense terrain arboré ; en forme de grand « U » tout de vitres et d'acier, ils impressionnent. Les portes automatiques s'ouvrent sans bruit et une personne à l'accueil nous salue d'un grand sourire avant de s'adresser à nous :
« Bonjour Jane, bonjour à vous ! Puis-je savoir la raison de votre visite ?
– Salut Matis ! Maon copaine voudrait rejoindre la prochaine mission, et moi avec ; tu pourrais prévenir Nadège ?
– Mais bien sûr ! C'est génial si vous pensez venir à deux !
– Ouiii ! »

Ladite Nadège ne tarde pas et nous mène vers une salle à l'atmosphère apaisante, murs bleus, moquette douce, légère insonorisation. Quelques fauteuils à l'air excessivement confortables y sont répartis. Elle nous donne un paquet de feuilles et un stylo chacune.
« Bon, je vais me répéter pour toi, Jane, mais telle est la procédure ! Alors, avant toute chose, nous allons vous faire passer des tests de personnalité assez complets pour identifier une équipe qui aurait une synergie intéressante et surtout fonctionnelle. Cela signifie peut-être que vous ne pourrez pas partir ensemble mais, pas d'inquiétude, si vous décidez de ne pas le faire, alors nous trouverons d'autres gens. Nous savons que ce genre de mission demande un investissement total et nous préférons que toustes se sentent à l'aise. Vous avez des questions ? »
Nous secouons la tête négativement.

Après une heure de questionnaire, je prétexte une envie pressante pour sortir de la salle. Jane ne fait pas attention à moi et au fait que je n'ai pas pris la porte des toilettes mixtes bien en évidence. À partir de maintenant, il faut avoir l'air sûre de moi. Je profite de ma tenue très typée travail – jupe noire et chemise blanche – pour me déplacer dans les couloirs sans être inquiétée. Évidemment, les directions sont indiquées en acronymes. Mais je suppose que la salle de papiérisation ne doit pas être très loin d'un ascenseur ou du rez-de-chaussée pour éviter de se trimballer des kilos de papier sur de longue distance. Et ça ne manque pas. Je trouve, près d'une des branches du « U » qui donne sur le parking de livraison, un panneau « s. d. pprst° » qui semble plus que prometteur.

Je le suis, la boule au ventre et arrive devant une porte blanche comme n'importe laquelle des autres, mais une petite étiquette indique bien un simple « papiérisation ». Grande inspiration. Vu la longueur du test, j'ai encore du temps devant moi avant qu'on ne me cherche. Mais tout de même. J'entre sans toquer. C'est une salle de commande, avec son PC, des machines pleines de boutons clignotants et une vitre vers une sorte de scanner. Une personne me regarde, interloquée.
« Bonjour, je suis la stagiaire de Nadège. Je viens vous informer qu'on a deux nouvelles candidates pour la prochaine mission. C'est un couple, d'ailleurs.
– Ah, très bien. »
Silence.
« Je suis un peu curieuse du processus de papiérisation, vous pensez que je peux observer ? Je n'ai quasi pas de boulot, Nadège est si efficace, haha !
– Ah ça, on l'adore notre Nadège ! Mais bien sûr, ce n'est pas très long. Par contre, accroche-toi, c'est parfois un peu... dérangeant. »
Je hoche la tête.
« J'ai été briefé•e. Ça devrait aller ! »

Elle appuie sur un bouton et parle dans un micro.
« Vous pouvez venir. »
Son ton est neutre mais rassurant. Quelqu'un, nu, rentre par une porte attenante à la pièce du scanner.
« Placez-vous dans la posture neutre indiquée sur le scanner, les pieds sur la plaque de métal. »
Elle coupe le micro.
« On commence par le haut pour que la personne ne tombe pas en cours de route. On pensait aussi, au départ, que ça limiterait la douleur, mais le processus n'est pas douloureux : c'est comme un fil qui passerait à travers soi ; ça reste pas très agréable mais on s'y fait. »

La personne s'est placée entre temps. Sa poitrine se soulève un peu vite, mais sinon tout semble correct. Son regard est concentré et ferme. « Même pas peur » qu'iel essaie de dire pour s'autoconvaincre. Et iel semble y parvenir : sa respiration s'apaise. Comme fasse l'inéluctable, on arrête de se débattre.
« Parfois, je leur rappelle qu'iels peuvent arrêter à tout moment, quand iels semblent trop stressé•es. Ça devrait aller, là. »
Elle réenclenche le micro.
« O.K., si ça vous va, on va commencer.
– Ça me va.
– Super. »
Elle enclenche un gros bouton vert et le scanner monte lentement en tournant d'abord autour de la personne.

Enfin, une fois arrivée en haut, une lumière en sort, un fin rai comme un laser de l'épaisseur d'une feuille. Rien ne bouge pendant quelques secondes, puis la lumière passe de l'autre côté du corps et s'arrête sur une plaque un peu plus loin, dos à la personne.
« Et voilà, c'est lancé. Je n'ai qu'à m'assurer que la personne ne bouge pas trop, mais normalement, ça a comme un effet hypnotique ou sédatif – encore inexpliqué, pour le coup. »
Je hoche la tête lentement pour ne pas vomir.

Après deux minutes, je peux voir son cerveau et je fonce vers la poubelle, rends mes tripes sous le « eurrrk » dégoûté de l'employée, me redresse, plonge ma main sous ma chemise et en sors mon pistolet.
Elle se fige. Éclate de rire.
« Mais qu'est-ce que tu fiches avec ton jouet ? »
Je ne souris pas. Ou alors avec cruauté. Dans ma main, le plastique vert fluo est frais.
« C'est un pistolet à eau.
– Oh.
– C'est le cas de le dire. Tu bouges, je tire. Dans la tête, directement. Tu as compris ?
– Oui.
– Bien, tu m'expliques tout. »

L'explication du plan de Star Up

Star Up est une entreprise ambitieuse. Se fondant sur des technologies de pointe, notamment la papiérisation, qui consiste à créer un moule du corps des gens en les scannant pour les envoyer dans l'espace sans s'embêter avec des questions de G lors de l'accélération et la décélération, pour ensuite les remouler sur place et commencer l'exploitation de planètes lointaine, elle cache un second plan. Lors de la signature du contrat pour être papiérisé•e, les personnes acceptent de donner leur droit à l'image afin que Star Up puisse légalement déplacer leur moule, qui contient littéralement leur image. S'il n'existe qu'un seul moule remplissable, il reste possible d'en utiliser la structure pour former un papelard, une copie en papier de nanotubes de carbone disposant de son propre ordinateur quantique à l'intérieur pour simuler la psyché de la personne originelle, mais légèrement modifiée pour que son but soit de convaincre de nouvelles personnes de participer au projet, créant ainsi des travailleur•euses gratuit•es pour Star Up, puisque non humain. Il est prévu de proposer cette technologie par fax pour se déplacer instantanément ou presque sur terre et récolter encore plus d'esclaves.

Fin de l'explication du plan de Star Up

Pfchouittt fait mon pistolet à eau quand je vise le visage de l'employée, qui fond lentement, d'abord le nez et la bouche, puis le menton et les yeux ; se décomposant et laissant apparaître l'ordinateur en dessous. J'hésite. C'est une personne, simulée, certes, mais réelle. Je peux toujours douter de l'existence d'autrui mais cela n'a aucune incidence puisque je ne peux le prouver. La détruire, c'est tuer quelqu'un•e. Je ne peux pas. Par contre, je peux arroser le visage de toutes les personnes que je croise pour vérifier s'iels sont des papelards ou non.
Je vérifie mes munitions accrochées à mon torse, petites gourdes remplies d'eau à visser sur mon pistolet à eau, adresse un regard meurtrier à l'employée, et pars en chasse.


Sorte de courtes blagues ; ici il est fait référence au fait que nombre de couples probablement lesbiens sont représentés comme des amies partageant la même chambre.


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