Elections

Le peuple londonien apprit l'arrestation d'Hugo Weasley le lendemain de ce fameux jour devant l'hôpital, où tant de promesses et de paroles avaient été échangées. La réaction fut instantanée. Hugo n'était peut-être pas apprécié comme l'était Albus, mais il incarnait depuis des années aux yeux des gens un symbole de droiture : le voir impliqué ainsi du jour au lendemain dans un scandale – un scandale sexuel, qui plus est – apporta le coup de grâce à un Ministère déjà moribond. La colère du peuple était plus puissante que jamais. Le peuple se sentait trahi, le peuple se sentait floué par un politicien de trop, un mensonge de trop. Dans cet instant de flottement terrible, Albus se dit qu'il aurait facilement pu jeter les conditions d'Hugo à la poubelle – après tout, c'étaient les conditions d'un criminel – et présenter malgré tout sa candidature aux élections. Personne n'aurait probablement rien trouvé à y redire, maintenant qu'Hugo s'était compromis de cette façon, sans espoir de retour. Mais non. Ce qui faisait autrefois tant envie à Albus ne le séduisait plus de la même façon. La perspective de devenir Ministre de la Magie ne signifiait pas autant que l'idée de mettre Scorpius à ce poste, et dans sa vingt-septième année, Albus se surprenait à être en quête de sens, en quête d'un nouveau souffle derrière tout ce qu'il avait fait depuis ces dix dernières années. Ce souffle qui lui avait manqué, c'était Scorpius. A présent que le dernier rempart entre lui et le pouvoir venait de tomber, Albus ne se satisfaisait plus de gouverner grâce à Scorpius : il voulait gouverner avec lui, et là résidait toute la différence.

Albus n'avait pas besoin de devenir Ministre de la Magie pour changer le monde. Manquer ces élections ne signifiait pas qu'il allait ramper dans un trou et disparaître pour ne plus jamais faire parler de lui. Albus n'avait jamais eu besoin d'un poste, d'une instance officielle, pour façonner son monde...

Aussi, lorsque l'annonce de l'arrestation d'Hugo tomba, Albus ne mit-il pas la colère du peuple à son profit, comme il l'aurait sans doute fait quelques mois plus tôt. Non, il s'en servit pour donner du pouvoir à la seule personne qui comptait vraiment : Scorpius.

Il ne fallut pas longtemps aux journalistes pour demander à Scorpius si les accusations portées contre monsieur Weasley étaient vraies. Parmi ces journalistes, ceux du Nouveau Sorcier étaient en tête, bien sûr. Sur les conseils d'Albus, Scorpius ne nia pas. Il demeura très discret quant à ce qu'il s'était passé, mais le doute n'était plus permis. Désormais, dans tous les aspects de sa vie, Scorpius était belle et bien une victime de ce système que le peuple dénonçait. Le représentant parfait. Cela faisait sourire Albus, en un sens : il savait que Scorpius répugnait à parler de son passé, encore plus à des fins politiques, mais c'était Albus le stratège, et Albus savait par expérience que le meilleur moyen de faire accepter ses idées aux gens, c'était de leur faire croire qu'ils en étaient à l'origine.

Aussi, Albus laissa passer quelques jours. Le temps que le choc s'atténue, que la rumeur fasse son chemin, et que la conclusion s'impose toute seule à l'esprit des gens. En quelques jours, la majorité du peuple londonien – et le peuple britannique derrière lui – réclamait Scorpius comme Ministre de la Magie.

XXX

Une semaine s'était écoulée depuis le fameux jour devant l'hôpital. A l'étage d'une grande demeure sombre, Albus ajustait le nœud de cravate de Scorpius. Ce dernier, pas très à l'aise, ne pouvait s'empêcher de regarder partout autour de lui, accrochant le moindre détail de la pièce.

Albus n'avait rien perdu de sa méfiance habituelle : si près des élections, il savait que ce n'était pas le moment de baisser sa garde et de crier victoire. Aussi, à défaut de disposer de locaux officiels, et sans vouloir dévoiler son adresse personnelle, Albus avait-il choisi pour cette première annonce un lieu tout à fait symbolique. Il avait loué le Manoir Malefoy.

Le Manoir avait été confisqué à Drago à l'issue de la guerre, et depuis, le Ministère n'en avait pas fait grand-chose. Il l'avait conservé comme maison d'apparat, mais on n'y avait jamais organisé beaucoup d'évènements. Sans doute l'ombre des choses qui s'y étaient déroulées – et des êtres qui y avaient séjourné – pesait-elle encore trop fortement sur les lieux. Quoi qu'il en soit, Albus avait vu dans le Manoir un message fort : ramener Scorpius chez lui, dans la demeure ancestrale de ses ancêtres, là où était sa place. Mais pas seulement. Pour Scorpius et lui, pour le nouveau gouvernement qu'ils espéraient mettre en place et pour le nouvel avenir qu'ils voulaient bâtir, cela signifiait triompher du passé. Le laisser derrière soi, enfin, et investir ces lieux d'un symbole différent.

Albus rajusta une dernière fois le nœud de cravate de Scorpius, et se surprit à croire follement en toutes ces choses qui lui traversaient l'esprit. Pour la première fois depuis des années, il se sentait réellement investi dans ce qu'il faisait. Une fougue qu'il avait perdue depuis le jour où Scorpius était parti, même s'il ne s'en était jamais pleinement rendu compte jusqu'à présent. Scorpius l'avait rendu à lui-même. Il lui devait bien la meilleure aide possible.

- Tu es vraiment sûr, à propos de tout ça ? lui demanda soudain Scorpius dans le silence de la chambre.

Ses yeux ne cillaient pas, en attente de la réponse, sans chercher à dissimuler les dernières traces de peur, les dernières traces d'hésitation en lui.

Albus acquiesça avec toute la détermination dont il était capable :

- J'en suis sûr.

- Je te connais, Albus. Tu aimes être au premier plan, sous les projecteurs. Tu es sûr que ça ne te manquera pas ?

- Tu n'as pas encore gagné, sourit Albus, taquin.

- Je t'en prie. Je suis sérieux. Je ne veux pas que tu me fasses élire si c'est pour en nourrir une rancœur par la suite. Je ne veux pas que cette histoire nous sépare, tu comprends ? Pas maintenant, alors qu'on s'est enfin retrouvés...

- C'est vraiment ça qui t'inquiète le plus ?

Scorpius haussa les épaules :

- Le reste m'inquiète bien plus, alors mieux vaut ne pas en parler.

Albus soupira, compréhensif. Puis, à la recherche des mots justes, il saisit Scorpius par les épaules :

- Tu as raison, j'aurais été déçu, dit-il. Si ça avait été qui que ce soit d'autre que toi.

Scorpius affronta son regard, puis, lentement, il finit par acquiescer. Alors Albus le serra contre lui, très fort, et ils restèrent longtemps ainsi enlacés sans parler. C'était comme si le monde était sur le point de s'arrêter. De basculer. Ils étaient au seuil de quelque chose de nouveau, ils le sentaient, et lorsqu'ils auraient quitté cette pièce, plus rien ne serait comme avant. Ils savouraient leurs derniers instants de normalité, avant d'entrer dans la lumière.

Finalement, Scorpius se redressa :

- Un conseil à me donner ? demanda-t-il.

- Oui, sourit Albus, d'un air grave qui ne lui était pas familier. On dit que le pouvoir corrompt tous les hommes. Sois l'exception, tu veux bien ?

Scorpius se détendit à son tour. Il entendait l'écho de tout ce qu'Hugo avait toujours reproché à Albus, dans ces paroles. Il savait qu'Albus parlait de cette noirceur, de cette crainte qu'Hugo, et même lui-même, avaient toujours décelée au fond d'Albus. Scorpius ne s'en détourna pas :

- Je n'ai jamais souhaité gouverner, dit-il.

- C'est vrai. Et c'est pour ça qu'il faut que ce soit toi.

Scorpius secoua la tête :

- Je n'aurais jamais imaginé me retrouver ici, dit-il, rattrapé par l'émotion.

Albus le saisit par le bras :

- Tu y es, lança-t-il. Tout repose sur toi, maintenant. Tu peux faire changer tout ce que tu souhaites, si tu t'y prends de la bonne façon. Et ça commence ce soir. En piste.

XXX

Le discours n'avait pas été organisé au sein du Manoir. Albus voulait à tout prix éviter de reproduire les clivages sociaux qui avaient conduit à la société dans laquelle ils se trouvaient aujourd'hui. Non, Scorpius et lui avaient choisi le parc pour prendre la parole, là où un maximum de monde pourrait se rassembler et venir les voir.

L'évènement avait été annoncé dans les journaux quelques jours plus tôt. Tous ceux qui le désiraient étaient conviés : tous sans exception. La sécurité était à son maximum, bien sûr, mais Albus n'était pas inquiet. Il n'était plus le centre de l'attention, ce soir. Même si on tentait de s'en prendre à lui, cela ne ferait que renforcer Scorpius. Et si l'on tentait de s'en prendre à Scorpius, eh bien... Albus sentait son cœur se serrer d'inquiétude à cette perspective. Et il songeait ensuite au sort terrible qui attendrait celui qui oserait essayer.

A vingt-et-une heures, les lumières du parc furent allumées. Il y avait des centaines, des milliers de personnes sur la pelouse. On aurait dit que tout Londres s'était transportée ici. Albus fit son entrée sur la tribune montée spécifiquement pour l'occasion, Scorpius juste derrière lui. A leur arrivée, la foule se mua en une clameur assourdissante, hurlante, prolongée. Elle frappa ceux qui se tenaient sur le podium tel un raz-de-marée. Albus, lui-même impressionné, s'arrêta et laissa le temps à l'assemblée de se gorger de sa présence. D'un coup d'œil en arrière, il dévisagea Scorpius. Il se tenait immobile, paralysé, presque hypnotisé par cette foule qui les soulevait de ses cris, de ses encouragements, d'une ferveur si folle et puissante qu'elle semblait presque palpable dans l'air, dangereuse, insurmontable.

Albus fit quelques pas en arrière. Il saisit le bras de Scorpius, doucement :

- Il ne faut pas avoir peur, lui dit-il. Ces gens sont là pour toi.

Scorpius avait toujours l'air de ne pas y croire. Mais il s'habituait à la lumière des projecteurs, et petit à petit, il put soutenir le regard d'Albus. Alors ce dernier se retourna pour s'adresser à la foule :

- Mes amis, dit-il en amplifiant sa voix, un sourire sur son visage éclatant. Merci d'être venus si nombreux ce soir.

Ce ne furent pas des applaudissements : ce furent des cris de joie qui saluèrent son apparition.

- Vous avez tous, j'en suis sûr, entendu parler de l'actualité de cette semaine. Contrairement à la majorité des politiciens de notre époque, j'ai choisi de demeurer fidèle à mes engagements. C'est pourquoi ce soir, je tiens à vous présenter celui que, j'en suis sûr, nous avons tous choisi pour nous représenter dans les élections qui s'annoncent. Mesdames et messieurs : Scorpius Malefoy.

XXX

Des applaudissements, et puis le silence. Scorpius sentit l'attention se porter sur lui comme une lance braquée sur sa poitrine. Tout lui sembla alors passer comme au ralenti : sa respiration, la conscience de son sang qui battait tout contre ses tempes, le regard d'Albus qui applaudissait lui aussi pour l'encourager à avancer... Tout ceci semblait faire partie d'un rêve étrange, inexorable, et pourtant, jamais rien ne lui avait paru plus vivant, plus réel, que cet instant.

Dans un étrange moment de confusion, il revit d'un seul coup le soir de sa cérémonie de la Répartition. Il se revit à onze ans, grand, maigre et seul, devant une salle pleine de monde, dans un silence absolu. C'était un silence hostile : un silence de mort et de curiosité malsaine. Le silence qu'il affrontait aujourd'hui était différent. Scorpius contemplait tous ces gens, les uns après les autres, s'attardant sur leurs visages comme s'ils allaient rester là pendant mille ans. Et il ne voyait en eux qu'une seule et même attente. Ces gens étaient suspendus à ses lèvres. A sa volonté. A ce qu'il déciderait de faire. Pour la première fois, parce qu'il l'expérimentait vraiment, il prit la mesure du conseil d'Albus, et de tout ce que lui-même avait craint en le voyant jouer avec le pouvoir pendant toutes ces années : le pouvoir enivre, il tourne la tête, il vous donne des visions folles...

Mais Scorpius gardait en lui le souvenir de ce petit garçon de onze ans, terrifié par les siens mais si désireux de ne pas le montrer, si désireux de disparaitre, de n'être rien, pour qu'on le laisse tranquille jusqu'à ce qu'il puisse s'échapper... Aujourd'hui, Scorpius n'avait plus envie de s'échapper. Aujourd'hui, il pouvait se permettre de lever la tête sans que cela soit interprété comme un acte de défi, d'orgueil ou de menace de sa part. Alors soudain, Scorpius n'eut plus peur.

Il s'avança sur le devant de la scène. Dans son cœur, une chaleur fleurissait, une chaleur comme il n'en avait encore jamais ressentie : elle le remplissait d'un aplomb si fort qu'il en aurait tremblé sur ses jambes. Cette chaleur toute entière était dirigée vers Albus. Scorpius comprit qu'il lui était reconnaissant, qu'il le serait jusqu'au jour de sa mort, pour ce seul et unique instant...

- Bonjour à tous, dit-il.

Il avait amplifié sa voix sans même y penser. Alors le silence se brisa, et ce fut magique : les gens l'acclamèrent, le saluèrent, sourirent, et Scorpius se dit que plus jamais il n'aurait une raison d'avoir peur.

- Moi aussi, je vous remercie tous d'être venus ce soir, continua-t-il. Je réalise qu'il y a encore quelques semaines, j'étais un parfait inconnu pour vous. Alors, avant que nous ne nous lancions dans cette aventure tous ensemble – et croyez-moi, ce sera une aventure – j'ai pensé que vous devriez peut-être en apprendre un peu plus sur moi.

Les mots s'écoulaient tous seuls de ses lèvres à présent qu'il s'était lancé. Jamais dans son existence toute entière il n'aurait cru que cela pouvait être aussi facile. De s'exprimer, de se faire comprendre des autres. De communiquer.

- Ma mère s'appelait Astoria Malefoy, commença-t-il dans le silence revenu. Comme vous le savez, elle m'a été arrachée lorsque j'étais très jeune. Des hommes l'ont battue et violée sous mes yeux, pendant que mon père était au travail.

Scorpius inspira profondément :

- A l'âge de seize ans, mon père a été marqué par Lord Voldemort.

La foule tressaillit, mais nul n'osa l'interrompre.

- Le Seigneur des Ténèbres logeait dans sa propre maison. Menaçait ses parents. Sa propre vie. Et le Seigneur des Ténèbres lui a confié une mission qu'il savait impossible. Il a fait cela pour punir les échecs de mon grand-père, Lucius. Il voulait que mon père meure. Et donc cette année-là, à seulement seize ans, Drago Malefoy est devenu un Mangemort, et il savait que cette marque le condamnait à mourir.

Scorpius s'interrompit brièvement, cherchant ses mots. Le silence était tout aussi intense, mais dénué de haine.

- Pourtant, mon père a survécu, reprit-il alors. Il aurait pu remplir la mission du Seigneur des Ténèbres, finalement, mais il y a renoncé. Il en a été incapable. Il aurait pu dénoncer Harry Potter lorsque ce dernier a été trainé devant lui prisonnier, mais il en a été incapable. Alors à l'issue de la guerre, mon père a survécu, et pour le remercier de son honnêteté, pour le consoler du sort terrible qu'il subissait depuis deux longues années, il a été envoyé en prison. Ses parents ont subi le Baiser du Détraqueur, tous les deux. Tout ce qu'ils possédaient, toute leur fortune, leur héritage, cette maison, tout leur a été confisqué. A sa sortie de prison, mon père a été jeté à la rue sans un sou, et pratiquement sans aucun droit sur cette terre. Pas même celui de travailler.

Scorpius fit une pause ici. Il était temps d'aborder sa partie de l'histoire :

- Quelques années plus tard, je suis venu au monde, sous le nom de Malefoy. J'ignorais tout de ce que mon père avait fait ou de ce que pouvait bien signifier mon nom. Je n'ai pas tardé à l'apprendre. On a assassiné ma mère avant que je ne sache lire et compter. On a abandonné l'enquête sur sa mort, comme s'il s'était agi d'un vulgaire vol à la tire. Lorsque je suis entré à Poudlard, je n'attendais rien de ce monde, seulement qu'il me laisse tranquille, et cela encore, c'était trop demandé. Je n'aurais jamais imaginé me retrouver devant vous ici ce soir.

Scorpius secoua la tête :

- Je n'ai pas de rancœur en moi. Je suis heureux de vous avoir tous ici, avec moi. Et je vous le dis avant toute chose : je ne souhaite pas m'engager sur le chemin de la violence avec vous. Vouloir se venger, vouloir faire payer tous ceux qui m'ont fait du mal, ce serait reproduire exactement le même schéma que celui que nous tentons de renverser aujourd'hui. Les opprimés d'hier deviendraient les bourreaux d'aujourd'hui. Je ne le souhaite pas. Personne ne devrait souhaiter la violence pour ses enfants, ses amis, son peuple...

Scorpius sentit sa gorge se serrer, ému malgré lui par ses propres paroles :

- Je ne suis pas parfait, loin de là, s'entendit-il dire. Je n'en ai jamais eu la prétention, et le fait d'être une victime ne fait pas de moi le candidat idéal pour ce poste. Si vous examinez mon passé, vous verrez que j'ai un casier judiciaire, pour avoir tabassé Hugo Weasley lorsque nous étions adolescents, presque à mort. C'est de cet évènement que découle la tentative de viol dont vous avez tant entendu parler...

Des cris de colère se firent entendre à ces mots, mais Scorpius les fit taire :

- Je souhaite construire avec vous un avenir dépourvu de tout cela. Hugo et moi ne nous serions sans doute jamais affrontés de la sorte dans un contexte différent. Je refuse d'être le dirigeant d'une société qui conduit deux jeunes hommes à s'agresser et s'entretuer.

Un profond silence recueillit ses paroles, presque religieux. Les gens semblaient saisis, et touchés, par son approche des choses. Scorpius sentit qu'il avait dit tout ce qu'il avait à dire :

- A présent, vous savez qui je suis, conclut-il. Je veux le meilleur pour ce pays, comme n'importe lequel d'entre vous. Je serais honoré d'avoir votre confiance, et votre soutien dans cette tâche.

Les applaudissements s'élevèrent, lentement, massivement, et puis les cris, enfin, et Scorpius sut qu'il venait d'enclencher quelque chose qui ne pouvait plus être stoppé. A côté de lui, Albus souriait. Le jeune homme lui donna une accolade, et en profita pour lui murmurer à l'oreille :

- Tu as été parfait.

Alors tous deux quittèrent la scène, et ils passèrent la soirée sous la musique et les rires, à échanger avec tous ceux qui souhaitaient leur parler, les toucher, les voir, comme pour repartir avec un petit fragment d'eux en souvenir.

Ce ne fut que très tard dans la nuit, enfin, lorsque tout le monde fut parti, qu'Albus et Scorpius transplanèrent dans la boutique de baguettes. La tranquillité des lieux tomba sur eux avec une telle soudaineté qu'ils en éclatèrent de rire. Pour un peu, ils auraient été étourdis, envoûtés par ce qu'ils venaient de vivre. Albus et Scorpius se prirent dans les bras, s'embrassèrent, et c'était comme si tout leur appartenait. Le monde leur appartenait. Ils étaient jeunes, amoureux, heureux, sur le point de laisser leur empreinte dans l'histoire.

- Je t'aime, dit Albus en caressant les cheveux de Scorpius. Je te l'ai déjà dit ?

- Jamais assez.

Ils s'embrassèrent de plus belle, jusqu'à ce qu'un tapement persistant tout contre une des vitres ne les ramène à la réalité. C'était un hibou grand-duc, porteur d'une lettre à l'écriture familière. Fébrile, Scorpius déplia la missive de Drago Malefoy :

« Scorpius, tu nous manques à Katie et moi. Je voulais que tu saches que quoi que tu fasses, nous te soutenons de tout notre cœur, et nous t'aimons. Sois prudent.

Papa. »

Scorpius tint longtemps la lettre entre ses mains, sans rien dire, comme aspiré par l'encre du papier. Drago et lui ne s'écrivaient que très rarement, pour ne pas permettre au Ministère de retrouver la trace de l'ancien Mangemort. Que Drago ait pris la peine – le risque – de lui écrire ce soir signifiait tellement...

- Tu te rends compte ? s'exclama Albus, extatique. Ça veut dire que l'on parle de nous jusqu'en Hongrie !

Mais Scorpius avait une toute autre idée en tête :

- Si je deviens Ministre, articula-t-il lentement, mon père pourra rentrer en Angleterre.

Albus partagea son regard, le même enthousiasme intense, dans ses yeux.

- Il pourra rentrer à la maison...

Abandonnant la lettre sur le comptoir, Scorpius et Albus s'embrassèrent, montèrent dans leur chambre et s'aimèrent cette nuit-là, pour célébrer toutes les victoires qui les submergeaient tout à coup.

Trois semaines plus tard, les élections eurent lieu : Scorpius Malefoy contre Kinglsey Shacklebolt, qui n'avait eu d'autre choix que de se représenter. Scorpius Malefoy fut élu Ministre de la Magie.

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