Chapitre 22 (Première partie)
PDV Extérieur :
La horde piaffait d'impatience, rongait son frein avec ostentation. Chaque chien, robuste et endiablé, bavait sur la suspension du départ, babines retroussées déformées en sourire, crocs pointus, prêts à mordre, prêts à la mastication, prêts à l'infamie carmine, gueule haletante, happant l'air chauffé à l'haleine expulsée effrénement. Chaque patte arrière bandait des muscles ardents parés à fendre l'espace. Chaque patte avant jonglait de ses griffes, ses armes de guerre, de génocide. Ces clébards assoiffés d'hémoglobine grognassaient, avides, et au milieu, une petite souris éperdue, esseulée, remuant nerveusement le museau. À ce qui allait se divulguer, elle aussi s'apprêtait, oui, à se faire piétiner quand lèverait le voile du spectacle. Le dresseur monta son bras. Ne nous pressons pas. Encore un peu... Tayaut ! Les chiens s'élancèrent dans des aboiements zélés, rocailleux, bousculant dans leur agressivité la pauvre souris surmenée.
La chasse fut ouverte.
Le dôme bleu sombre planait au dessus de la forêt, vaste domaine de sapins illuminés aux milles lumières s'élevant jusqu'aux étoiles, pinèdes où prospéraient en harmonie toutes sortes d'animaux : souris, mulots, musaraignes, blaireaux, petit lézards, grands poissons, araignées, oiseaux de nuit. Les nyctalopes vaquaient, les bêtes diurnes rêvaient. Quelle fut l'agitation lorsque, sourcée de l'horizon australe, une vague noire s'abattit sur eux! sciant les arbres, crevant les lumières. Bientôt les mâchoires se maculèrent, les canines se tachèrent, le ciel s'empourpa. La meute s'acharnait, dévorait sans scrupule. Un cerf par-ci, une biche par-là. Même les renards, furtifs et rusés ne purent s'y soustraire, astreints par la supériorité du massacre. Les griffes déchiraient les peaux dures, faisaient gicler le sang, écorchaient les chaires en lambeaux. La terreur résonnait entre les troncs, les fuites vaines se multipliaient et les rares batailleurs s'affaissaient sous le poids de leurs profondes sévices.
La jeune fille faillit à genoux. Ses jambes n'avaient pu soutenir son poids, décomposée, vidée par l'horreur, le carnage à l'entour. Figée, livide, les globes exorbités et les poings étalés sur le goudron souillé de la large rue, elle sentit à peine cette présence glacière dans son dos, et ces doigts qui effleuraient son cou, séparait une mèche puis la déposait sur sa nuque afin de mieux lui murmurer à l'oreille.
Nightmare : Puis-je en déduire que tu es prête à passer à l'univers suivant, Justice ?
★★★
PDV Lisa :
À peine débarquée au château que je me jetai sur les draps froids et humides des couches de velours composant ma couverture. Mes ongles limés aux incisives empalaient férocement l'oreiller, rendait l'illusion que celui-ci rugissait à ma place, les flashs de la razzia de cette nuit frappant violemment mon crâne.
J'étais pourtant persuadée de m'être préparée pour toutes ces ignominies, depuis le temps que je m'y opposais... Mais...
Horror arrachant le bras d'un humain, cloué, poitrine contre gazon, suppliant, avant de les lui croquer goulûment.
Mais je n'y avais jamais assisté dans de telles circonstances. Ces gens... Ces gens je les connaissais, bordel. J'avais beau me le tambouriner là-dedans que ce n'était que leurs homologues, je ne pouvais que voir Papyrus, Sans, Frisk et Grillby, et réaliser ce qui aurait pu leur être infligé ce jour-là si on ne les avait pas empêché.
Dust qui se complaisait à torturer le roi, lui proposant de choisir entre sa femme et son fils pour au final les tuer tous les trois, et éclater d'un rire sanguinaire au LOVE qui le submergeait.
C'était eux que j'avais vus se faire tuer. J'avais sondé partout autour de moi, aspiré à les cacher...
Blackberry qui fouettait sans remords une mère sous les yeux de ses petits lacérant jusqu'à leur colonne vertébrale, plus cruel encore quand l'œil de Nightmare tournait dans sa direction.
En sauver un, allez, juste un, juste Papyrus, juste Alphys... Allez, merde, juste un !
Killer qui se baignait dans la poussière et le désespoir de ses cibles, et dont les deux trous vidangés d'apathie se dilataient de sadisme.
Mais je n'avais pas pu. Admirer, ne rien tenter, aider mes coéquipiers. Tels avaient été les ordres qu'on m'avait dictés.
«Puis-je en déduire que tu es prête à passer à l'univers suivant, Justice ?»
Je mordillai sauvagement dans le coton du coussin, prise d'un spasme de dégoût.
Au moment où le maître des cauchemars avait susurré cela, j'étais paralysée, en transe, tout bonnement incapable d'esquisser un geste. Il avait alors parcouru un tentacule autour de ma taille pour m'aider à me relever, et tel un tentacule de méduse, le contact m'avait brûlée, enflammée. J'avais tiqué. J'avais fait volte-face et l'aurais sans doute tranché en deux si Killer, en bon second, jamais bien loin, n'avait pas ceigni les épaules de ses bras pour stopper mon élan. Le souffle abruptement coupé, une vive aiguille de douleur avait piqué mon poitrine, m'avait fait hoqueter. Puis était venue l'occasion non point loupée du sourire narquois, du rabaissement facile à coup de goguenardises, à coup de caresse doucereuse sur la joue, tandis qu'autour les pleurs perçaient les nuages et que les ricanements étouffaient les cris.
Ce fut là que le trop plein de sentiment négatif eût peint mon âme d'une noirceur jusqu'alors énigmatique, la corruption du maître des cauchemars propagée sur toute la surface dorée, quintuplant mon énergie, embrouillant ma raison, ne proéminant qu'une idée : tuer. Les tendons de mon cou s'exhibant sous l'épiderme, je m'étais défaite crûment de l'étreinte du tueur, avais pointé une lame électrique sur le squelette de pétrole...
...Qui eut vite fait de me foutre une baffe et m'éclater au sol.
Et j'avais toussé, sonnée. Et de la bile noire avait vitriolé le sol. Et, comme si la gifle avait balayé la brume toxique comme on balaierait de la fumée, mon bon sens avait repris le dessus, et ma détermination avait fléchi. Pouf, envolée. Et pour la première fois, en plus de la fureur, de la rage, de la hargne, j'avais goûté à la haine. Pour la première fois, ça n'avait pas été "je dois l'empêcher de nuire", "il doit payer pour ce qu'il a fait", ou "je veux le tabasser".
Pour la première fois, ça avait été "je veux le tuer".
Tuer.
Pour tuer.
C'était si amer...
Cette partie de mon âme, ce bout dévoyé, cette chose pourrie que j'avais moi-même imposée et pourtant clandestine, m'arnachait pis encore que de simples menottes. C'était intrinsèque, un mal logé au plus profond de mon être qui décuplait mes sombres pensées plus que de raison, rendait Nightmare exécrablement omniprésent.
Le poids de l'impuissance m'écrasait considérablement.
Et au-delà de ça,
un sentiment acerbe,
ignoble,
impardonnable,
de trahison.
On toqua à l'entrée. Comme par une détonation, je saisis l'oreiller et l'y propulsai en convulsant à pleins poumons :
Moi : FOUTEZ-MOI LA PAIX À LA FIN, MERDE !!!
??? : C'est moi...! Répliqua-t-on timidement.
J'eus un tressautement. Les larmes, qui depuis tout à l'heure coagulaient en grosses gouttes sous mes paupières, croulèrent soudain sur mes joues, chaudes, à la simple écoute de cette voix. Cette voix avec qui je pouvais enfin me dire : tu peux t'écraser, maintenant, p'tite Bruh. Tu peux t'écraser.
Moi : ...Entre.
Cross passa d'abord le crâne à travers la porte, puis élargit l'entrebâillement, aplatissant par mégarde le coussin contre le mur avant d'entrer. Cross qui, lorsque Nightmare avait rassemblé ses troupes et s'était téléporté dans le prochain monde pendant que je jouais le paillasson, que dis-je, la serpillère, était resté. Il s'était accroupi devant moi, m'avait tendu la main, m'avait offert un sourire rassurant. Ne t'en fais pas, avait-il dit, tandis que les rayons du soleil levant orangeaient sa face, illuminaient ses pupilles. C'est bientôt fini. Ces raids ne durent jamais plus de deux univers, Dream et les autres ne tarderont à arriver. Relève-toi, tu as fais le plus dur.
Le mercenaire s'assit à mes côtés, son poids surélevant à peine le mien, tandis que j'étais pleinement enfoncée dans le matelas, bras en presse-genoux.
Cross : Je ne te demande pas si ça va...?
Je secouai mollement la tête. Il pianotait la couette, gêné. On l'aurait dit partir en quête de mots sans réussir à en déterrer. Mais il était là. Ce squelette, qui travaillait ici depuis des années contre son réel gré, qui avait dangereusement dupé son employeur, qui avait sauvé mes amis, mes anciens amis, il était là. Si admirable, si solide... Alors, par cette étrange force d'attraction, cette relation mathématique que seul Epic ou Science pourrait expliquer, le tout amenant le rien, je me laissai aller contre son pull, et fondis en larmes. Il m'enlaça, me tapota le dos, hésitant.
Cross : ...C'était dur, pour moi aussi au début. Hasarda-t-il. Mais j'avais Chara qui me soutenait, et... enfin... Tu verras, on finit par s'habituer.
Moi : Je ne veux PAS m'y habituer ! Bredouillai-je, indistincte à cause de la laine épaisse. Je ne veux pas, c'est... C'est horrible...
Aucun son de trop ne fila entre les dents du squelette emmitouflé. Il garda le silence, écouta courageusement mes lamentations couler sans tenter de barrage. Quand j'ôtai enfin mon visage de son thorax, j'avais la morve au nez et la buée sur les lunettes. Je raclai mes yeux à l'aide de ma manche, ramonai ma lèvre supérieur du dos de la main pour l'essuyer sans pitié sur mon pantalon, et m'installai plus conformément sur le rebord du lit.
Moi : Ce n'était que la première mission. Si ça continue comme ça, je... Merde Cross, je ne sais pas si je vais tenir...
Je gémis à l'adresse des lattes de parquet de ce plumard qui m'avait été présentée il y a deux jours. Voisinant avec celles des collègues, à contrario du luxueuse chambre où je créchais la dernière fois, sa superficie était moins grande, ses ornements moins spacieux ; contenant tout de même un lit rembourré, un placard haut, large, neuf, dans lequel on me coffrait trois fois, des meubles polis en bois de chêne et une tapisserie décorative aux couleurs envoûtantes. Le minimum pour un château, je suppose. Pas pire que celle des autres, mais si vide...
Moi : J'aurais du accepter la proposition de Color. Regrettai-je. Honey avait raison, je ne suis qu'un sac à embrouille.
Cross : Eh, Lisa... Murmura Cross. Si tu étais partie on serait déjà tous mort...
Tout le monde au sein des Bads avait été mis au parfum pour Error. Sans avoir eu les détails visiblement, ce n'était certainement pas moi qui avait été chargée de les informer.
Moi : Si j'étais partie vous n'auriez pas eu besoin d'être sauvés. Coupai-je. Et puis... Nightmare n'aurait jamais pris un tel risque sans prévoir une alternative si j'avais échoué à r...à le raisonner. C'est... C'est égoïste, hein ? Ce que je fais... Le Multivers ne veut pas voir le destructeur revenir, de toute manière. Il n'y a que moi qui m'y accroche. Même Dream...
Ma respiration bloqua. À quoi bon raconter ce qu'il s'était passé au moment où j'avais dû revenir aux Stars pour annoncer la nouvelle ? Ça avait été convenable, rapide, entendu. Lent mouvement de tête, pas de question, épaules voûtées, pas de commentaire, iris pâles, pas de mot, même chez Ink. Mais au moment où je m'étais apprêtée à passer la porte, entre l'air huilé et air frais du QG, à la limite, la frontière, sac à bandoulière à l'épaule, le maître des songes m'avait interpelé. Lisa. Ferme, m'intriguant sur le coup. Lorsque tu franchiras le pas de cette porte. Tu seras officiellement une ennemie des Stars. Ne crois pas pouvoir revenir, tu ne seras pas la bienvenue.
Reniement catégorique. Il m'avait cloué sur place, me poussait du regard, lèvres osseuses pincées et hermétiques. J'avais élargi la bouche, malheureusement, avant d'avoir pu contester, une ombre avait serpenté jusqu'à mes pieds, absorbé mes semelles, puis j'avais atterri à Killertale.
Moi : ...Même Dream m'en veut pour ça.
Cross agrippa mes coudes sans délicatesse, fronçant des arcades avec colère.
Cross : Ne pense pas ça !! Pense ce que tu veux mais pas ça. Dream veut tout sauf te punir. S'il t'a dit que tu étais désormais leur ennemie, c'est au contraire pour ne pas que tu fasses marche arrière...
Je mordis ma réponse, explorai son point de vue. Dream... Juger sans comprendre, repousser l'inconnu, abandonner un ami, ce n'était pas lui. C'est vrai. Et au fond, ce qu'avait dit me permettait de ne pas être rétive. M'encourageait, d'une façon un peu tordue, à distordre la Lisa des Star Sans et la Lisa des Bad Guys, afin de m'adapter à mon nouvel environnement. En somme, il m'aidait. Et ça, oui. Ça c'était Dream. J'abaissai les prunelles, honteuse.
Moi : Je sais...
Il glissa ses phalanges jusqu'à mes paumes, consciencieusement.
Cross : Écoute... Il n'y a pas de mal à faire de tout son possible pour les gens qu'on aime. Assura-t-il d'un ton solennel. Écouter son cœur, ce n'est pas un péché. Pense au moment où tu retrouveras Error, laisse cette idée t'envahir et tu recouvreras la flamme d'un nouvel espoir.
Mes lèvres penchèrent avant de se remettre à la parabole négative. Je ne lui avais pas avoué que penser à Error, après ma dispute avec lui, me procurait plus de malaise qu'autre chose. Ce devait être pour cela que ma détermination était à plat. Ma raison était restée à Underswap, quant à mon cœur, il louvoyait, éperdu dans de tumultueuses ténèbres.
Moi : Tu as raison... Approuvai-je délicatement sans y croire. Merci, Cross.
Le monochrome hocha la tête, me vola une perle au bout du cil et, se retirant, m'envoya un dernier salut bienveillant.
★★★
PDV Extérieur :
Cross remit son foulard, dans l'espoir que draper sa bouche d'un tissu barbouille d'indifférence sa sensibilité, masque aux camarades les véritables tourments qui le lançinaient, et fila dans le couloir, suivant les pas d'une ligne droite et lisse.
Lisa se méprenait sur sa rigidité. Lui aussi était enchaîné, traînant ses skis, un boulet à la cheville, transparent, évaporé au milieu de ses "potes". Drapé d'un habit décoloré, une expression nébuleuse qu'aucun ne déchiffrait, c'était lui : le fantôme du château. Un fantôme doublé d'un fantôme, quelle ironie. Car, ainsi qu'un mauvais esprit, une conscience personnifiée, Chara lui apparaissait systématiquement quand le mercenaire n'avait personne avec qui éprouver.
Chara : Tss, tu vas finir par me tuer... Siffla le garçon, mains dans le dos, joue gonflée.
Cross ne dit rien. Cela faisait longtemps qu'il avait abdiqué devant les reproches clinglants de Chara, ne se défendant qu'en phrases courtes, quasi neutres aux railleries et râleries. C'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour ne pas qu'elles pénètrent son âme, circulent entre ses os pour qu'au final elles ne dévalent de ses orbites en cascade.
Les gouailleries ne se dispersent pas comme la fumée pestilentielle d'une cigarette à la face des receveurs. Elles restent dans la boîte crânienne, se tassent, se rassemblent en une masse qui, devenue trop lourde, percent et glissent sur les pommettes en filaments liquides, choient en plic ploc sur le sol. Alors le réservoir est à nouveau vide, mais ravagé par ce passage corrosif, rendu crasseux, où les algues se développent, la rouille se répend, faisant crisser l'engrenage, et où les démons intérieurs se rassemblent pour faire la fête.
Si l'on n'y porte aucun soin, la coque, victime d'érosion, est adepte de se crevasser un jour où une redondance serait de trop.
Le squelette emmitouflé fit grincer les pentures de sa porte. Il alluma les lampes magiques comme on allumait une lampe à gaz, poussant un soupir las. Il défit sa panoplie de garde royal, ôta ses chaussures et se coucha dans son lit douillet, un étrange parchemin collé jalousement au thorax. C'était un message de Dream, reçu pas plus tard que ce matin. Si les flèches du gardien des émotions positives étaient inaptes à percer à travers le brouillard de négativité qui englobait la demeure, elles trouvaient souvent l'occasion de lui parvenir lorsque Cross était en mission, et qu'il ressentait, ne serait-ce qu'une seconde, la joie de se dire que qui sait, peut-être qu'aujourd'hui il recevrait un mot, une phrase, un rien de son prince, tiré du carquois de Cupidon. Nightmare était au courant, bien sûr. Mais il le tolérait, pour on ne savait quelle raison dont le monochrome se foutait un peu.
Il inspira un grand coup, et, à fleur d'os, lut le courrier d'une attention absolue. Dream écopait le réservoir, vidait l'eau avant qu'elle ne s'abonde trop, puis rapait les algues, frottait la rouille, lissait les rouages, exorcisait les démons et calfeutrait les fentes. Opiniâtre au commencement, le Cross avait fini par se confier aux confiseries et veloutées du prince des rêves. Son ange, son gardien... Il l'admirait. S'il était encore garde royal, il aurait voulu protéger personne d'autre que lui. Mais il n'était pas au service de Dream. Il n'était pas aussi bon que Dream. Il n'avait pas sa sagesse, ne trouvait pas les mots juste comme lui le faisait, incapable de rendre hommage à Epic via la brunette, incapable de s'excuser pour ce qu'il accomplissait : poursuivre une chimère.
Chara : Tu sais pourtant que je suis obligé de relater tout ce que tu fais. Grommela le fantôme qui suivait les lignes gracieuses d'encre bleue derrière son épaule, vérifiant qu'il n'y ait ni informations compromettantes ni langage codé. Tu penses vraiment qu'il va accepter que tu la rassures alors qu'il cherche justement à lui faire du mal ?
Cross ferma les orbites, passant avec précaution la lettre dans la manche de son pull.
Cross : Je ne sais pas, je... Je n'ai pas réfléchi, Chara, c'était instinctif.
Chara : Normal tu ne réfléchis jamais.
Loin était la critique dans la remarque du garçon. Un pur constat, un commentaire d'une désobligeance ingénue.
Tandis que le squelette aéra sa trachée osseuse d'un énième soupir, un léger bruissement réclama son ouïe, du côté de la porte. Une feuille s'était faufilée à moitié sous la fente. Perplexe, Cross se baissa pour la ramasser, se statufia alors. Le fantôme, posté en face de lui, déchiffrant le griffonnage à l'envers, arrondit un œil constateur.
Chara : Mmh. Apparemment il trouve toujours une idée relative à l'intrigue pour choisir la manière de te convoquer.
Cross : Oui.
Chara : Je te l'avais dit, qu'il ne fallait pas faire ça ! Déjà qu'il te voit d'un mauvais œil.
Cross : Je sais.
Chara : Je te l'avais dit, non ?
Cross : Si.
Chara : Voilà, putain !! Si on meure c'est de ta faute !
Cross : Si tu veux.
Cross chiffonna le message considérablement moins rassérénant que celui de son ange, le balança dans la corbeille et s'en alla jusqu'au long couloir aux vitraux, le dépassa afin de déboucher dans les appartements du maître des malheurs. Campé devant la porte du cabinet de travail, il se sentit brusquement tout petit, minuscule. Il porta un poing à la plaque de bois, le retira, craintif. Brutalement, il ne se sentit pas de se jeter à l'eau, eau de mer, celle aux paroles salées qui plantait les algues, corrodait les rouages et accueillait les démons. Il plaqua sa mains à son torse, rationalisa, se tranquilisa. Non, il n'avait officiellement rien fait de mal, pas de quoi s'affoler, quelle était donc cette atmosphère nauséeuse et obstruante ?
Chara : Vas-y, Cross. Souffla le garçon, d'une soutenance sincère et donc paradoxalement angoissante.
Le mercenaire retint sa respiration, enclencha la poignée, s'engouffrant alors dans le repère de la pieuvre tentaculaire.
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