Chapitre 5

Ma tête est lourde, mes yeux ne veulent pas se décider à s'ouvrir et mes membres inférieurs et supérieurs ne répondent pas non plus. J'entends des petits sons. J'essaie de me concentrer au maximum mais ne comprends pas. Je n'arrive pas à déterminer d'où ils viennent. Leur provenance me paraît lointaine. Lorsqu'un écho se fait entendre, il résonne comme si j'étais dans une pièce vide où les bruits rebondissent sur tous les murs et ne s'arrêtent seulement lorsqu'ils n'ont plus la force d'aller se projeter contre un autre mur. La pièce me paraît sombre comme si les ténèbres m'enveloppaient et attendaient que je me lève pour pouvoir se jeter sur moi et m'engloutir si profondément pour ne plus jamais me laisser apercevoir le moindre petit rayon de soleil. Les ténèbres ne m'effraient pas, je ne les crains pas, elle peuvent toujours courir pour m'attraper, elles ne m'auront jamais. J'essaie de me relever à nouveau lorsque je réussis à faire bouger mes doigts. Puis tout le reste de mon corps suit, mes bras, mes jambes et ma tête. Mes yeux s'ouvrent mais je ne discerne pas ce qui m'entoure, tout est dans le flou le plus complet. Je parviens à me poser sur mes deux pieds mais chancelle bien vite et rencontre à nouveau le sol. Ma tête me lance comme si on me martelait le crâne avec un marteau, je ne peux plus tenter une fois de plus me relever, je n'y arriverai pas, c'est bien trop douloureux. Je m'adosse contre quelque chose de dur et irrégulier qui me rentre au niveau de certains endroits du dos. Mes mains sont plaquées contre mon front répétant des petits mouvement circulaires pour masser la zone sensible. Pendant ce temps, des pas se rapprochent de moi. Ils sont plusieurs. Deux ou trois peut-être. Petit à petit, je retire les mains de mon visage. J'ai peur de me retrouver en face de quelque chose d'énorme qui veut me tuer ou de l'une de ces personnes mal intentionnées qui me veulent du mal, jusqu'à me tuer. C'est donc dans un geste lent que je retire mes mains, ne voulant pas connaître trop rapidement la réponse à ma question. Ils sont juste en face de moi, ils ne bougent plus. Ils attendent patiemment que je croise leurs regards pour pouvoir me tuer et que je garde cette dernière image effrayante d'eux avant de mourir. Ma tête se relève tout aussi doucement, puis je les vois. Je me sens d'un seul coup ridicule. Ils ne sont pas grands. Ni effrayants et encore moins imposants. Ce sont juste deux petites personnes naines loin d'être effrayantes. Deux petits hommes pas plus hauts qu'un enfant de sept ans, portant un élégant costume pour l'un noir et l'autre rouge, des chaussures cirées et un monocle en or. Si leurs costumes avaient été de la même couleur, j'aurais eu l'impression que l'un est le reflet de l'autre, ils sont identiques. Leurs cheveux noirs plaqués sur le côté aussi brillants que leurs chaussures étincellent et leurs visages identiques me font douter sur ma folie. Deux personnes ne peuvent pas se ressembler à ce point là. Ma vue me joue certainement des tours, j'ai peut-être besoin de lunettes ou alors ces hommes sont les jumeaux qui se ressemblent le plus au monde.

Je les regarde sceptique, impassible. Tandis qu'eux ne bougent pas d'un cils, ils me fixent attendant que je dise quelque chose ou que je cherche à m'enfuir, ce qui serait l'attitude la plus attendue dans ce genre de situation, mais je ne fais rien. Je n'aurais nul part où aller, je ne sais pas où je suis et je ne connais pas la sortie de cet endroit, à quoi bon perdre de l'énergie dans ce cas là. Je me contente de les regarder, ils devront bien faire quelque chose, ils ne vont pas rester là sans bouger indéfiniment.

L'air décidé qu'ils prennent montre qu'intérieurement, selon eux, il est clair que c'est à moi de faire le premier pas, c'est mal me connaitre, je ne le ferai pas. Hors de question que je bouge le petit doigt pour ces messieurs, qui sont mes ravisseurs, ce serait trop simple. Ils n'attendent que ça. Je me contente d'inspecter les lieux qui sont bien plus net qu'au moment où mes yeux se sont ouvert.

Je suis dans une sorte de pièce éclairé par des torches enflammées aux murs rocheux, rien n'occupe l'espace où je me trouve. Un long couloir s'étire jusqu'à perte de vue, éclairé de la même manière. Des portes sont encastrées par ci et là dans la parois rocheuse mais sont toutes fermées, je ne peux malheureusement pas savoir ce qui s'y trouve. Rien ne m'indique ce qu'est cet endroit, peut être un sous sol, une grotte ou une prison.

Je penche plutôt pour le sous sol car je ne pense pas qu'une grotte puisse posséder un aussi long corridor et la prison encore moins car elles sont censées avoir des barreaux pour empêcher les prisonniers de s'échapper, or, je n'en vois pas. Je ne sais pas ce qui me parait le plus rassurant des trois, le sous-sol voudrait dire que quelqu'un me retient prisonnière quelque part perdu au loin, étant donné que je n'ai vu aucune maison plus grande qu'une cabane à l'horizon, une grotte laisserait paraitre qu'un animal dangereux, surement un ours, se trouve quelque part non loin de moi et la prison que j'ai été assommée par l'une de ces personnes qui me veulent du mal. En y réfléchissant bien, les trois ont obtenue le même score, ces trois situations voudraient dire que je suis retenue captive, que je ne suis pas prête d'en sortir et que qui que se soit, il ne compte pas me faire passer un moment agréable.

Je n'aurais pas dû me mettre à imaginer ces hypothèses, elles m'enfoncent encore plus dans mon angoisse. Je balance ma tête en arrière qui vient se heurter contre la roche et laisse échapper un juron qui finit par devenir un soupir d'exaspération. Un raclement de gorge me rappela que je ne suis pas seule et m'enleva de mes pensées chaotiques.

Le petit bonhomme en rouge se pencha en avant en se balançant avec une drôle de tête.

-Bonjour bonjour !

Cette exclamation me surprend tellement que j'eu un mouvement de recule immédiat. Ce petit être habillé en rouge et son frère jumeaux en noir m'ont assommé, puis m'ont séquestrer je ne sais où, pour ensuite me dire d'un air tout joyeux, comme si nous étions amis "bonjour". Cette situation me parait complètement dingue et absurde.

-Comment t'appelles-tu ?

Il continue comme si tout était normal, rien ne semble lui paraitre bizarre.

Voyant que je me méfie et que je ne compte pas répondre, il continue à se balancer d'avant en arrière en silence. Son frère ne réagit pas quant à lui. Il se contente de me fixer de son regard le plus mauvais possible. A quoi peut-il bien penser ? Pourquoi me regarde-t-il de cette façon ? Je ne compte pas me laisser faire comme ça, je le fixe en retour de mon regard le plus froid. Une bataille de regards se met alors en place. Personne ne lâche l'affaire. Plusieurs minutes passent sans qu'aucun de nous deux ne détourne les yeux de l'autre. Son frère en rouge nous scrute l'un après l'autre, son mal aise se fait ressentir dans toute la pièce, petit à petit la situation prend une toute autre tournure. Elle en devient drôle. Je finis tout de même par rompre ce silence, mais pas le contact visuel avec Bonhomme en noir.

-June.

   Ce dernier reste de marbre à ma réponse devinant que je venais de répondre à la question de son frère tandis que l'autre met un temps à comprendre, appliquant un air confus sur son visage. Ce ne fut seulement qu'au bout de quelques minutes que son visage s'éclaircit, l'information venait d'effectuer le parcours pour parvenir à monter jusqu'au cerveau.

     -Enchanté mademoiselle, je suis Redapple et voici Mologan. Ca ne se voit peut-être pas mais nous sommes frères. Dit-il excité.

   Je mis brutalement fin à notre duel de regard pour pouvoir me concentrer à nouveau sur son frère.

     -Je présume que vous êtes jumeaux, n'est-ce pas ?  Dis-je d'un ton sarcastique qu'il ne perçu pas le moins du monde.

     -Oui, c'est exacte, comment l'avez-vous deviné ?

   Ses yeux brillèrent comme ceux d'un enfant à qui on venait d'apprendre qu'on l'emmènerait dans le parc d'attractions où il souhaitait tant aller.

     -Juste une impression. Répliquais-je en les observant tous les deux à mon tour.

Bonhomme en rouge me dévisageait avec une lueur si enfantine dans ses yeux que pendant un instant j'ai cru qu'il comptait m'utiliser comme poupée. Il me faisait vraiment peur à ce moment présent. Par pur réflexe, mon corps se raidit et recula d'un bond. Ce fut inutile, cela ne servi qu'à enfoncer encore plus la paroi rocheuse dans mon dos et me provoquer une douleur dans tout le dos.

     -N'ai pas peur, on ne te fera rien. Tu n'as pas à te méfier de nous.

En temps normal, je n'accorde pas ma confiance facilement, alors dans ces circonstances, il était évident que je n'avais aucune confiance en eux et jamais je n'en aurais. Ils m'ont enlevé, ils me retiennent prisonnière et en plus de ça, ces deux petits bonhommes sont louches, Bonhomme en noir ne cesse de me dévisager d'une façon déplaisante, je ne l'ai pas vu cligner des yeux une seule fois depuis le début de notre bataille, il reste stoïque à croire qu'il est paralysé, puis il y a Bonhomme en rouge qui lui est tout le contraire de son frère, il est constamment joyeux, une leur enfantine brille dans ses yeux et cette manie qu'il a d'essayer de rendre les moments gênants ou anormales en moment parfaitement anodins me met les nerfs.

     -Vous me capturez et je suis censé vous faire confiance, c'est une blague ?

-Nous ne vous voulons aucun mal, mademoiselle June. Dit-il soudain mal à l'aise.

-Ah oui ? Vous pouvez me laisser sortir, dans ce cas là.

-Je crains que cela ne soit pas possible.

     -Evidemment. Dis-je dans ma barbe mécontente.

Ses pieds tapaient contre des petits cailloux au sol montrant sa nervosité.

-Nous n'avons rien contre vous, mais je crains qu'en ce jour cela ne soit pas faisable, mademoiselle June.

Quelque chose m'intrigua, aujourd'hui ils ne pouvaient pas me laisser partir, pour quelle raison ? J'avais bien raison, ils me gardent pour se servir de moi. Il n'y a aucune raison pour me garder sauf pour me faire du mal. Ils pourront le faire autant qu'ils le veuillent, mais je ne me laisserais pas faire marcher dessus. Ils vont devoir supporter les crises que je ferais, je résisterais, lorsqu'ils m'ordonneront de bouger et de les suivre, je ne le ferais pas, je resterais dans mon coin. Lorsqu'ils s'approcheront de moi, je m'agiterais comme une fille alliée. Je les énerverais tellement qu'ils en auront marre de moi et me jetteront dehors. Mon stratagème débute maintenants. Qu'ils s'accrochent, ça va être dur.

-Venez, nous devons vous montrer quelque chose. Sa voix est revenue comme celle d'un enfant excité.

Une petite voix me dit d'aller voir ce qu'ils veulent me montrer, mais je ne lui obéis pas. Je garde la tête appuyée contre le mur et les regarde froidement.

-Mademoiselle June c'est important, vous devez être au courant de ce qu'il se passe, cela vous aidera.

Mes paupières sont les seules à bouger.

-Vous aurez les réponses à vos questions et ce que vous verrez vous sera très utile pour survivre.

Ils veulent m'aider à survivre, quelque chose ne tourne pas rond dans cette histoire. Soudain un bruit me ramena à la réalité. Mon ventre criait famine. Les frères l'entendirent aussi puisqu'une lueur de malice se fit apercevoir dans leurs yeux.

-Lorsque vous serez dehors vous en aurez besoin.

Ils ne me lâcheront pas, c'est un piège. Contre toute attente, Bonhomme en noir prit la parole en arquant un sourcil.

-Si vous venez, vous aurez droit à manger. De la bonne nourriture.

Imaginer pouvoir manger me donna l'eau à la bouche, si longtemps que je n'ai rien avaler, que je n'ai pas ressenti la sensation du ventre plein à craquer, si longtemps qu'il se plaint de ne rien avaler. Il me suppliait de le suivre même si c'était un piège, il ne se fit pas attendre. Je bondis sur mes pieds et les suivi.

-Ce qui va suivre sera très important pour la suite de votre parcours, mademoiselle June, il vous faudra donc écouter attentivement et retenir tout ce que nous dirons. Me dit Bonhomme en rouge avec un sérieux que je ne lui ai jamais vu. Nous avançâmes en direction du long couloir.

-Vous comptez me libérer si j'ai bien compris ? Dis-je dubitative.

-Bien sur ! Vous ne croyez quand même pas que nous vous gardions prisonnière tout de même, mademoiselle June. Continua-t-il en s'esclaffant.

-Non bien sur, ce n'est pas comme si j'avais été assommée et m'étais réveillée quelque part je ne sais où, sans moyen de m'en échapper. Mon sarcasme habituel était de retour.

-Très bien ! Je ne sais pas si vous avez remarqué mais j'adore le rouge ! Une fois, notre mère m'a raconté, qu'étant petit, je voulais que tous mes vêtements soient rouges, donc j'ai prit un pot de peinture rouge et les ai noyé à l'intérieur. Elle était très en colère contre moi sur le moment, mais avec les années passées, elle en rigole. Bon plus maintenant car elle est décédée.

Il continua à déblatérer encore et encore sur sa défunte mère, puis changea de sujet sans jamais s'arrêter. Il doit avoir de sacrés crampes à la langue et aux joues à force de bavarder sans jamais prendre le temps de respirer, à la fin de la journée.

Pendant ce temps, j'observais les environs. Le couloir était bien sans fin, des portes bordeaux longeaient les murs mais ne laissaient rien apercevoir de ce qu'il s'y trouvait derrière. On pouvait percevoir des petits bruits mais ne pouvons pas distinguer ce que c'était. Des torches enflammées éclairaient les lieux entre chaque portes ce qui donnait l'impression d'être dans une prison du Moyen-Age plutôt effrayante. Bonhomme en noir ou plutôt Mologan me lançait des petits coups d'oeil noirs de temps à autres sans pourtant dire quoi que ce soit. Il était tout l'inverse de son frère. Il était sombre, discret et surtout muet. Je n'avais entendu sa voix qu'une seule fois, contrairement à son frère, qui lui, parlait sans frein. Il restait mystérieux. Il ne m'apprécie pas, cela se voit, mais je n'en avais rien à faire. Ce qui comptait plus que tout était de sortir de cet endroit qui n'en finissait plus. Le couloir continuait, les portes défilaient et les torches ne s'éteignaient jamais, mais des bruits s'intensifièrent derrière une porte. Une sorte de grognement terrifiant. Sans m'en rendre compte, je mettais arrêté. Les jumeaux, eux, ne semblaient pas perturbés par cette chose effrayante, ils continuaient d'avancer et Redapple jacassais toujours.

Je fixai la porte bordeaux un long moment. Elle ne laissait rien voir de ce qu'il s'y trouvait derrière. Il valait peut-être mieux que je ne le sache pas mais ma curiosité était bien trop présente pour ne pas essayer de savoir ce que cachait cette porte. Un nouveau grognement, celui-ci bien plus fort que le dernier, résonna le long du couloir de telle sorte que les jumeaux s'arrêtèrent et se retournèrent vers moi.

-Qu'est ce qu'il y a derrière cette porte ? Demandais-je sans la quitter des yeux d'une seconde.

-Rien qui ne puisse vous intéresser, mademoiselle June. Me dit Redapple qui tentait de camoufler sa nervosité derrière sa gaieté.

-Il faut croire que tu te trompes, car ce que cache cette porte m'intéresse énormément, vois-tu ? Dis-je en tournant la tête vers lui.

Ma détermination se lisait dans mon regard, il l'a lu lui aussi puisqu'il souffla de résiliation et vint vers moi accompagné de son ombre, son jumeau.

-Si je vous ouvrais la porte, cela vous ferez perdre du temps pour votre quête, mademoiselle June. Son sourire cachait encore sa nervosité mais c'était peine perdue.

-Il faut croire que j'aime perdre du temps de ce cas là. Lui dis-je accompagnée d'un faux sourire.

Cette fois-ci, il n'essaya pas de cacher sa nervosité.

-Vous pourriez le regretter mademoiselle...

Je ne le laissais pas le temps d'achever sa phrase que je le coupai d'une voix dure.

-Ouvrez moi cette porte Redapple.

Il souffla encore une fois et obtempéra. Il sortit un gros trousseau de clés de la poche de sa veste, en choisit une et ouvrit la porte. Elle s'ouvrit lentement avec un grincement à vous rendre sourd. La pièce était plongée dans la pénombre, au début je ne voyais rien, puis plus la porte s'ouvrait plus je distinguais une énorme silhouette.

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