Chapitre 4

La marche a été des plus fastidieuses, la chaleur insoutenable, la fatigue et la faim ne m'aident en rien. Cette dernière me donnait l'impression qu'un rat me dévorait l'estomac, ça en devenait insoutenable. Jamais je n'avais eu aussi faim de toute ma vie, je comprends maintenant pourquoi les parents de Mike et Jenny me disaient toujours de tout manger et de penser aux petits enfants dans le monde qui n'ont ni à manger, ni à boire. Pour l'instant, je n'ai pas plus soif que ça, mais je me sens tout de même vidée, mais je continue en pensant que moins je m'arrêterais, plus tôt j'arriverais dans le petit village où habite la dame qui pourra m'aider dans ma quête, même si je m'arrête parfois quelques secondes pour reprendre mon souffle, sinon je ne tiendrais pas, je suis épuisée.

Les arbres se font plus rares sur mon chemin ce qui me laisse voir le beau ciel qui se déroule au-dessus de ma tête.

Cette forêt est tout de même assez contradictoire, dans certain lieux, les arbres sont si nombreux qu'on a du mal à discerner le ciel, tandis que dans d'autres, les arbres sont quasi absents. Et ne parlons pas de la température, il peut faire si chaud qu'on se croirait parfois en pleine canicule et puis le jour d'après, le froid nous glace le sang de sorte que retirer une chaussette est l'épreuve la plus insurmontable de notre vie, c'est l'épreuve du siècle. Mais je ne peux m'empêcher de me rendre compte que cette forêt reste l'endroit le plus beau que j'ai jamais vu, malgré tous ces paramètres inhabituels.

Pour ne pas penser à l'épuisement, la chaleur et la faim, je me remémore les plus beaux souvenirs que j'ai partagé avec Mike, Jenny et MJ.

Le premier qui me vient à l'esprit est celui du jour où nous nous sommes approprié l'Endroit, avec Mike et Jenny. Nous avions neuf ans à l'époque, c'était un dimanche après-midi chez Mike, nous étions entrain de jouer à cap ou pas cap. Nous nous donnions des actions les plus farfelues les unes que les autres, une fois je m'étais retrouvé à danser déguisée en pompier dans une vitrine d'un magasin de sport d'hiver. C'était très drôle. Jamais je ne refuse une action de cap ou pas cap, après tout, tant que je ne fais rien que je juge d'humiliant ou qui puisse dépasser les limites, je le fais car sinon pourquoi participer à ce genre de jeux si c'est pour refuser toutes les actions ? Le jeu perdrait tout son intérêt. Et puis, si je refusais j'aurais l'impression de fuir, de me montrer lâche et je ne supporte pas les personnes lâches.

Ce jour-là, Mike m'avait lancé le défi de m'introduire dans la maison hantée et Jenny, qui déjà à cet âge avait un style décalé par rapport aux autres enfants de notre âge, avait complétait que je devais y rester au moins dix minutes, seule. En bonne joueuse, j'avais évidement relevé le défi. Nous y sommes allés tous les trois mais eux m'attendaient à l'entrée, tandis que moi j'accomplissais mon gage. Je n'y allais pas sans peur, mais j'essayer de donner l'impression d'être sereine devant mes amis. Plus j'avançais, plus je me demandais ce qui allait m'arriver dans cette maison sans vie, sans bruit. Je regardais tout ce qu'il y avait autour de moi pour m'assurer que j'étais bien seule et que personne ne sorte de l'ombre pour se jeter sur moi sans me prévenir. Tout était très poussiéreux, le sol ne laissait même plus apparaître sa vraie couleur à cause de la saleté. Les marches de l'escalier faisaient un bruit d'enfer, je ne sais pas si c'était moi qui étais trop lourde ou le bois de la latte qui était trop fragile mais j'ai fini par casser le plancher de la marche. Depuis on ne la toujours pas réparer. J'avais directement adoré la maison, ses meubles et objets vintages me plaisaient énormément. Je n'avais pas comprit pourquoi tout le monde la disait hantée mais je m'en fichais pas mal de ce que pouvaient penser les autres. J'avais appelé les deux autres pour venir regarder et eux aussi l'ont tout de suite adopté. Et puis petit à petit, nous avons commencé à occuper les lieux de plus en plus souvent. Nous ne savions pas comment l'appeler pour que personne ne sache de quoi nous parlions quand nous discutions de notre repère, alors tout simplement puisque c'est notre endroit à nous, alors nous n'avons pas cherché plus loin, cette maison s'appellerai dorénavant l'Endroit.

Malgré les cinq années qui ont suivi où nous avons continué à vivre à l'Endroit, rien n'a changé. Nous faisons le ménage une fois par mois mais c'est tout, le mobilier n'a pas été remplacé et les appareils électroménagers fonctionnent encore très bien donc pas besoin de jeter ou remplacer quoi que ce soit.

Parfois MJ vient lui aussi à l'Endroit mais que très rarement, il préfère ne pas nous déranger alors qu'en réalité, Mike et Jenny le considèrent comme un ami, lui aussi. Mais les parents, eux, ne savent pas que l'Endroit existe, sinon si j'ai envie de me réfugié quelque part sans qu'ils me trouvent, se serait peine perdue puisqu'ils sauraient où aller pour me trouver.

Le jour commence à décliner, le vent se lève et les feuilles se mettent à virevolter. La forêt est si belle en cet instant que j'ai envie de m'arrêter pour l'admirer. Mais je ne peux pas. Il faut que je continue sans relâche. Je ne peux pas baisser les bras, si je le fais, je ne reverrais plus mon petit frère, mes amis et je devrais vivre ici dans ce monde silencieux où tout le monde refuse de vous aider à cause de je ne sais quelle peur. La nuit, je me permettrai de me reposer mais pas avant, à moins que je ne tombe dans les pommes ou dans le coma. Ce qui serait une très vilaine chose.
Les souvenirs défilent.

MJ fêtait ses dix ans, toute la semaine précédant l'heureux jour, il avait été surexcité pour la fête qu'on lui avait organisé avec Mike et Jenny, les parents n'avaient pas pu le faire car ils étaient beaucoup trop occupés pour prendre soin de leur enfant qui allait fêter ses dix ans dans quelques jours. Nous lui avons préparé une journée mémorable. Ses amis étaient arrivés en fin de matinée à la maison, nous leurs avons commandé des pizzas format extra larges avec supplément sauce épicée, l'après-midi ils sont allés faire du paint-ball et le soir toute la famille de ma mère, qui est morte aujourd'hui, était venue. Nous avions pu revoir nos cousins et cousines qu'on adore tant et qu'on a pas vu depuis très longtemps, bien entendu mes amis étaient restés puisqu'ils font partis de la famille. MJ était le plus heureux des enfants du monde, j'en étais extrêmement contente.

La soirée avait été mouvementée, tous les cousins et cousines étaient venus dans la chambre de MJ et nous avons joué à Action ou Vérité. J'ai pu apprendre beaucoup de choses sur eux, les actions étaient comme à notre habitude géniales. Notre cousine Phoebe avait dû saccager l'horrible cheese-cake que tante Madisson nous avait préparé. Personne n'ose lui dire par peur de la blesser, j'ai souvent eu envie de lui dire mais elle est tellement sympa avec nous, elle nous offre des super cadeaux à chacun de nos anniversaires et Noël, alors on préfère la laisser dans l'ignorance, elle a l'air si heureuse comme ça.

Notre cousin Tom, avait dû quant à lui se déguiser en fille. Nous avions emprunté une belle robe noire à la mère de MJ, Jenny l'avais pomponné d'un maquillage très voyant avec du blanc, du rose et un peu de noir, pour finir le tout et compléter la tenue, nous avions emprunté, à l'une de nos tantes présentes, des escarpins noirs. Il avait défilé dans toute la maison vêtu ainsi, ce qui avait fait rire aux larmes toute la famille. C'était le plus affreux des travestis que je n'avais jamais vu. Autant dire que depuis plus personne ne le prend au sérieux. Nous lui avons même attribué un surnom, Conchita. Au départ, il n'aimait pas vraiment, mais maintenant il est habitué, je crois même qu'il commence à bien l'apprécier.

Il fait nuit noire à présent, j'ai du mal à garder les yeux ouverts, je sens que je vais défaillir d'une minute à l'autre. Il vaudrait mieux que je dorme un peu pour que demain je reprenne la recherche en pleine forme.

Ce soir, je ne construirai pas d'abris, cela me coûterait beaucoup trop d'énergie et de temps pour me reposer, je dormirai à la belle étoile. Je m'adosse donc à un arbre et laisse respirer mes pieds en posant mes bottines à côté de moi. Les petits fruits des arbres me tentent beaucoup mais je ne préfère pas, ils pourraient être nocifs. Ce soir, je m'endors sous le ciel étoilé avec un petit vent frais, sans aucun problème.

La nuit m'encercle, la forêt est sombre, j'ai du mal à discerner les arbres. Il n'y a pas un seul bruit. Une odeur flotte dans l'air, elle me rappelle l'Endroit. Ca sent comme lorsque Jenny cuisine des raviolis en boîte, cette odeur si alléchante que Mike et moi adorons qui nous fait rester assis sur nos tabourets en face de la table en attendant d'être servis par notre cuisinière préférée. Des voix résonnent à présent. Des rires troublent le silence qui régnait depuis mon arrivée. Pourtant je ne vois pas d'où ils proviennent. Je me lève en douceur pour ne pas me faire entendre mais mes bottes aux pieds m'empêchent d'être discrète. Je reconnais ces voix, ce sont celles de mes amis et de mon frère. Je veux les retrouver et les prendre dans mes bras, leurs dire à quel point je les aime et qu'ils m'ont terriblement manqué. Je veux leurs sauter dessus si férocement qu'ils en tombent par terre et en rigoler avec eux à cause de la chute qui nous a fait mal au dos mais qui n'est pas très importante car nous nous sommes enfin retrouvés.

Je marche d'un pas déterminé vers eux mais ne les vois toujours pas, puis en regardant à ma droite, je les vois. Ils sont dans la cuisine salle à manger de l'Endroit. La frontière entre la forêt et la cuisine est une ligne droite nette et précise. Ils sont tous à table. Ils rigolent ensemble et n'ont pas l'air de s'être aperçu de ma présence. Je m'élance vers eux en courant. La joie envahit mon coeur si rapidement que l'adrénaline me pousse à courir plus vite. Puis, mon bonheur s'envole aussi vite qu'il est arrivé. Je ne peux plus avancer. Je suis bloquée. Une paroi vitrée m'empêche de les rejoindre. Une frontière infranchissable entre l'endroit que je veux quitter à jamais et celui où je veux me réfugier. Notre collision émet un bruit sourd qui engendre  mes amis à se retourner vers moi. Ils rigolent. Je dois avoir une sacrée tête pour les voir rire à gorge déployée aussi fort et longtemps. Mais je sens qu'il n'y a pas que ça. Il y a autre chose. En les voyant se lever et venir se poser face à moi, je m'attends à les voir venir m'aider à faire exploser cette vitre mais tout le contraire se produit. Ils s'arrêtent à quelques centimètres de la paroi puis recommencent à rire de plus belle, à s'en tordre le ventre.

Complètement perdue par leurs comportements, d'une petite voix comparable à celle d'une petite fille, je dis.

     -Aidez moi plutôt que de rire comme ça.

Mais rien ne change, ils continuent encore plus fort. Je recule d'un pas ne comprenant pas la réaction des personnes qui sont le plus chers à mes yeux. Je les fixe, les sourcils froncés, le regard perdu et inquiet. Que leurs arrive-t-ils ? Pourquoi ne m'aident-ils pas ? Je m'avance à nouveau vers la vitre qui nous sépare et commence à frapper le plus fort possible. Mes poings sont si fermés qu'ils donnent l'impression que mes phalanges s'apprêtent à exploser. Je frappe sans relâche. Un à un, mes amis s'arrêtent de rire et me dévisagent d'un regard froid. Je frappe avec plus de puissance. Je veux comprendre leurs réactions, leurs parler. Puis, je cesse tout mouvement en entendant Jenny prendre la parole d'une voix moqueuse.

     -Pauvre June qui est seule, sans personne. Personne pour l'aider à sortir de cette vaste forêt. Qui n'a personne à qui parler, qui peut la rassurer de ses craintes. Tu es seule, tu l'as toujours été.

C'est bien la première fois que je la vois aussi méchante envers une personne, elle qui est si douce et attentionnée envers les personnes qu'elle apprécie. Le choc et la tristesse prennent possession de mon âme.
Mike ajouta d'une voix dure.

     -Nous n'avons jamais été tes amis, June. Nous avions de la peine pour toi, tout simplement. Nous sommes tellement mieux sans toi dans les pattes à présent. Reste où tu es, tu feras des vacances à tout le monde. Nous ne t'aimons pas.

Je ne le reconnais pas lui non plus. Mike, mon meilleure ami depuis toujours, lui qui a toujours été là pour me prendre dans ses bras lorsque j'avais peur des insectes qui volaient autour de moi en été, lui qui me faisait si rire avec ses blagues tellement nulles. Je suis encore plus sous le choc et attristée.
Puis, vint au tour de MJ.

     -Tu n'imagines pas à quel point les parents se sont sentis heureux lorsqu'ils se sont rendu compte que tu ne les supportais pas. Ils se sont tout de suite dit qu'ils n'auraient pas à te supporter. Pourquoi crois-tu qu'ils n'ont jamais insisté pour se balader avec toi ou même avoir une discussion comme tout parent ferait avec son enfant ? Parce que tu es une corvée pour eux, quelque chose dont ils ne veulent pas avoir collé à eux constamment comme un chewing-gum. Je me forçais à rire lorsque nous étions petits et que tu voulais me faire rire parce que je pleurais. Tu m'ennuyais.

Mon petit frère avec qui je faisais tous les mauvais tours à nos parents, me dit qu'il se forçait à rire et s'ennuyait avec moi. Celui que je réconfortais, le soir dans son lit, parce qu'il avait peur du monstre du placard. Celui que je conseillais pour qu'il ait une petite amie.
Mon âme vient s'effondre de tristesse et de désespoir.
Comme si cela ne suffisait pas, d'une même voix, ils lâchèrent.

     -Personne ne t'aime.

Leurs mots me font l'effet d'un coup droit dans le coeur comme si on me déchirait mon organe cardiaque avec un poignard pointu bien aiguisé. Les larmes me montent aux yeux, je tente de ne pas les laisser couler pour ne pas leurs montrer qu'ils m'ont blessé, que leurs mots ne m'atteignent pas mais une larme traitre arrive tout de même à s'échapper et coule librement sur ma joue. Jamais je n'avais imaginé que mes amis me diraient cela un jour. Je me sens si trahis. Blessée. Abandonnée. Seule. Je ne comprends pas d'où leurs viennent cette haine envers moi. Ai-je été égoïste ? Me suis-je mise en avant par rapport à eux ? Ai-je pensé qu'à ma petite personne ? Non, ça ne peut pas être cela, j'ai toujours été à leurs écoute lorsqu'ils en avaient besoin. Peut-être pas assez ? J'ai toujours fais passer leurs problèmes avant les miens par peur de les embêter.

Je ne peux plus voir leurs têtes avec leurs sourires froids et sadiques comme s'ils prenaient un malin plaisir à me regarder pleurer à cause d'eux. Je repars dans la direction dans laquelle je suis arrivée en courant. Cette fois-ci, je laisse mes larmes couler librement autant qu'elles le veulent. Mes amis que j'aime tant m'avouent ne jamais m'avoir supporté. Mes larmes coulent à flot sur mon visage. Ma meilleure amie me révèle que j'ai toujours été seule, qu'elle faisait semblant d'être là pour moi quand ça n'allait pas. Un cri de désespoir surgit de mes entrailles. Mon meilleur ami qui me fait comprendre que je suis un fardeau pour toutes les personnes de mon entourage, plus loin je suis d'eux, mieux ils se portent. Mon corps est désormais secoué par de violents tremblements. La personne que j'ai prit le plus soin depuis qu'il est né, mon petit frère, me dévoile que je suis comme un chewing-gum collé à une chaussure, que je suis ennuyeuse et que personne ne veut de moi. Ma vue se trouble, tout est flou. Quelque chose vient se prendre dans mes pieds et je trébuche en lâchant un cri suraigüe.

Je me réveille en sursaut le coeur battant à cent à l'heure et le front trempé de sueur en plein milieu de la nuit. Ce n'était qu'un cauchemar. Mon pouls ralentit jusqu'à ce que des bruits se font entendre, on dirait des craquements de branches sur lesquelles on aurait accidentellement marché dessus. Mon cœur recommence à s'affoler, la panique me submerge, j'ai peur. La sensation d'être suivi de l'autre jour s'empare à nouveau de moi. Je me lève d'un bond et me mets en position de défense en avançant doucement, un pas après l'autre.

     -Qui est là ?

Un autre craquement brise le silence pesant qui m'entoure depuis maintenant environ trois jours.

     -Pas la peine de vous cachez, je vous ai entendu, alors montrez-vous ! Avant que... Que je ne pète un câble !

Je suis à bout, à deux doigts de l'hystérie. Ces personnes qui sont présentes sans l'être n'arrangent rien à la situation. Pourquoi ne peuvent-elles pas tout simplement me répondre, alors que je sais pertinemment qu'elles rôdent autour de moi ? Je m'avance doucement sans faire de mouvements brusques, pour ne pas les alerter. Dans la pénombre de la nuit, je ne discerne toujours pas de mouvement. Désormais, seul les battements de mon cœur se font entendre, je continue d'avancer sans faire de bruit malgré cela, mais arrivée à l'endroit où je croyais avoir entendu les bruits, personne n'est là. Seul des feuilles, des arbres, des petits rochers et des cailloux jonchent le sol à des kilomètres à la ronde, aucun bruit ne trahie la chose qui était présente il n'y a seulement que quelques secondes. Le coin est sombre, il se cache certainement, je regarde dans l'ombre des arbres discrètement pour ne pas me faire remarquer. Le vide. Je suis définitivement seule. Je deviens folle. Et en supplément, paranoïaque.

Je détale vite vers mes chaussures, les mets en vitesse et me réfugie dans la forêt. J'ai horriblement peur. Je ne cesse de me retourner toute les deux secondes pour m'assurer que personne ne me suit. Je n'ai jamais autant couru de toute ma vie, je pourrais faire un marathon grâce aux nombreuses heures de courses que j'ai dû parcourir depuis au moins trois jours. Je cours mais reste tout de même en retrait, même si je n'ai pas vraiment le choix puisqu'il n'y a que des arbres autour de moi et plus aucune routes ou marchés, comme hier. Ma course folle continue sans relâchement malgré mon souffle saccadé et mes crampes aux jambes. Je repense aux longs joggings que je faisais tous les dimanches matin avec MJ, où au bout d'une demie heure j'étais déjà écroulée par terre et qu'il se moquait de moi constamment mais m'encourageait en même temps.

-Tu me désoles, t'es super rapide mais dès que tu commences à ressentir de la fatigue tu abandonnes, tu te relâches. Me disait-il avec un sourire de défis sachant très bien l'impact qu'auraient ses dernières paroles.

-Moi ? J'abandonne ? Tu cherches quoi ? J'abandonne jamais moi, je te bats quand tu veux à une course, même morte je te battrais pour te prouver que je lâche pas facilement.

-Prouve-le. Petit sourire me défiant de retour.

-Premier arrivé au lac gagne une glace avec double portion de nappage aux noisettes !

Je ne m'avais pas laissé pas le temps de finir que je m'étais déjà élancé vers le lac qui se trouvait à quelques centaines de mètres. MJ était aussi rapide que moi ce qui l'avait permis prendre un peu d'avance sur moi, mais qu'il avait aussitôt perdue.
Je suis une très mauvaise perdante donc il était hors de question que je le laisse prendre de l'avance sur moi. On se poussait, se donnait des coups de coude, c'était chacun pour sa peau, coûte que coûte. Au final, j'avais gagné. De peu, mais j'avais gagné. Quelle grande satisfaction de gagner contre la personne qui vous a lancé le duel. Je n'avais pas arrêté de le charrier et de me vanter, ce qui l'agaçait un peu et qui rendait ma victoire encore plus savoureuse.

Aujourd'hui, en ce moment même, je me dis que je ne savais pas ce qu'était d'être réellement fatiguée, à l'époque. Aujourd'hui, je le sais, parce qu'après trois jours de course pratiquement sans jamais m'arrêter et sans manger, en rajoutant mes nuits très courtes où je me réveille sans arrêt à cause de mon sommeil léger et la peur constante de sentir quelqu'un qui me suit, je peux dire que je connais ce qu'est la vraie fatigue, qu'elle soit physique ou psychologique. Je mériterais la médaille du mérite, la médaille de la détermination et la médaille de la plus endurante.

Soudainement, malgré mon manque d'énergie dû au fait que je n'ai toujours pas mangé depuis que je suis dans cette forêt, une idée me vint à l'esprit. Je me réfugie derrière un énorme arbre pour me cacher, comme ça si je suis belle et bien poursuivie par quelqu'un ou quelque chose, il me cherchera et je pourrais l'apercevoir de là où je suis. Je reste là, sans bouger, ni même sans oser respirer. Plus aucun bruit ne se fait entendre depuis plusieurs minutes. Je risque un coup d'œil mais ne me dévoile toujours pas. La forêt est sombre et vide de vie. Incroyable. Je dois vraiment être entrain de devenir paranoïaque. J'étais pourtant sure et certaine de ne pas être seule. Je sors de ma petite cachette inutile à présent, et observe tout autour de moi. C'est apeurant de se rendre compte à quel point cet endroit si immense et lugubre, peut vous faire perdre la tête en quelques jours seulement. J'essaye de me ressaisir tout de même et de reprendre mes esprits.

La nuit commence à s'estomper et laisse place au jour petit à petit. Le ciel se transforme en une surface orangée émanant une forte chaleur. Il fait si chaud. Mon corps dégouline de sueur, des bouffés de chaleur s'emparent de moi, mes yeux voient troublent, lorsque d'un coup, ma tête rencontre quelque chose de dur et farineux. Elle percute la terre. Me voici écroulée au sol, évanouie.

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