Chapitre 3
Lettres d'Alfred
-----------------------------------------
14.11.1941
Ma très chère soeur,
Demain, nous partirons pour la côte française avec mon unité. Je n'arrive toujours pas à croire que je vais vraiment y aller. Je vais faire la guerre ! D'accord, cela fait bien des mois que nous nous entrainons à la base militaire, mais ce ne sera pas pareil. On tuera pour de vrai, et de vrais Nazis.
Je ne vais pas te mentir : j'ai peur. Terriblement peur. Comme au premier jour, j'ai du mal à me servir de mes mains, pour tuer en tout cas. Oui, j'ai peur de la mort.
Et puis, nous nous sentons tous aussi un peu bizarre. Mes camarades et moi, nous sommes en quelque sorte coincé entre la determination et le désespoir. Y en a qui racontent que les Allemands sont bien organisés et armés. Les mêmes disent qu'on ne libérera jamais les Alliés. Et puis y a Churchill et les généraux qui disent qu'ils faut espérer, résister...
Et nous, on en sais rien. On a jamais combattu. On a rien vu.
On est coincés, on doute et on a peur.
Ma soeur, laisse moi te raconter pourquoi je t'écris. Ce soir, j'étais à table avec trois amis, dans le grand réfectoir en parallélépipède rectangle, et nous comparions la guerre à une machine, une machine à tuer des gens. L'Allemagne était un espèce de cerveau fou qui contrôlait tout, et nous étions les pièces. Nous entrions dans la bouche de l'appareil, nous n'avions pas le choix. Le destin était tracé. Des machines et des pieces, voilà à quoi ressemble l'humanité. Je le réalise avec dégout à present.
Mais en bref, nous parlions de tout cela quand le plus jeune des soldats, le petit Emile, a débarqué. Il nous avait écouté, sa chope de bièrre à la main, et il l'a posée, frémissant. Il a clamé de toutes ses forces qu'on avait tort de se laisser aller ainsi. Qu'on libérera la France, puis la Pologne, l'Afrique et tous les pays de l'Est, TOUS. Que jamais on ne laissera faire les choses ainsi qu'elles se font, JAMAIS.
Que j'aimerais avoir son énergie et son courrage ! Le repas a pris fin et je suis retourné dans ma chambre avec Emile et deux de mes camarades. Nous avons alors parlé à voix basse de nos sentiments, de la guerre, de nos craintes... J'ai médité encore longtemps après que le silence soit tombé. Et j'ai ressentit le besoin de poser ces pensées de manière bien organisée en t'écrivant...
Je vais à present m'efforcer à penser à toi à papa à maman, et aux paroles de Churchill.
Prends soin de toi. Je t'aime,
Alfred
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top