ᴄʜᴀᴘɪᴛʀᴇ {𝟏𝟔}

16.

«It's like treason how you treated me»
~Good In Goodbye~MADISON BEER

-

{ P O V   D E   J Y I H A }

- Hôtel, México -

Je venais de mettre fin à ma conversation téléphonique avec M. Nobody et longeais le long couloir qui me ramenait au restaurant de l'hôtel. J'avais effectivement prévu de déjeuner en ma propre compagnie et déguster l'un des nombreux plats proposés par le chef cuisinier du nom d'Enrique, un quinquagénaire ma foi fort sympathique.

J'arrivai enfin au restaurant de l'hôtel et me dirigeai directement vers ma table, saluant le personnel au passage. Je pris place, ajustant le tissu de ma robe en m'asseyant, puis patientai un certain temps avant que le chef lui-même ne m'apporte mon repas : des tostadas. Je lui adressai un sourire et me munis de mes couverts, prête à déguster ce met traditionnel.

Je découpai soigneusement un morceau avant de le porter à ma bouche. Une fois avalé, je me tournai vers Enrique, les yeux écarquillés :

- Mmh, c'est délicieux Enrique. Merci ! Le complimentai-je, le tout accompagné d'un mouvement de tête approbateur.

- Content de l'apprendre Mademoiselle Yong ! Ces tostadas ont soigneusement été concoctées par ma femme et moi-même, spécialement pour vous. Me confia-t-il en riant. Bon appétit ! Me sourit-il de toutes ses dents.

- Bon appétit, Mademoiselle Yong ! s'exclama son épouse à l'autre bout du comptoir.

- Oh, et bien je vous remercie, dis-je en inclinant la tête. Ah ! Et je suis plus jeune que vous ; mon prénom suffira. Je leur fis un clin d'œil.

Ils rirent joyeusement avant de me souhaiter une nouvelle fois une bonne dégustation.

Je devais vraiment être de bonne humeur, au point où je me retrouvais à faire la causette au personnel durant mon repas. Cela me semblait être un bon moyen d'évasion de ce climat anxiogène qui régnait actuellement au sein de Mystery Ace.

Je finis par sombrer dans le mutisme, poursuivant calmement mon repas tout en ressassant le cas de Kim Man-Soo. En effet, malgré le malheur qui s'était abattu sur nous, nous essayions de reprendre progressivement l'affaire qui nous avait conduits à quitter notre pays natal. Une désagréable impression me chatouillait constamment l'esprit : nous pataugions, faisant du surplace tandis que Hwa-Pyung et Man-Soo se trouvaient déjà à l'autre bout de la rive.

Je découpais machinalement un énième morceau de tostada quand un jeune homme se décida à s'asseoir en face de moi et à m'observer manger.

- On mange seule Jyi-ha ?

- Oui. Un problème ?

- Aucunement.

Mon repas se poursuivit sous les yeux de mon interlocuteur, ce qui commençait à fortement m'agacer. Je relevai donc mon regard vers ce dernier qui me fixait sans aucune émotion apparente sur son visage.

- Suis-je une œuvre d'art Minho ? Me prononçais-je enfin.

Il sourit mesquinement.

Il se munit ensuite d'une fourchette qu'il piqua dans mon plat afin d'en manger le contenu.

Je souris à mon tour, déposant ma fourchette et mon couteau contre le rebord de mon assiette. Je m'essuyai les lèvres et repris la parole :

- Bon, qu'est-ce que tu veux ? Je suis sûre que tu n'es pas seulement venue contempler la magnifique femme que je suis en train de déguster un plat de tostadas fort appétissant.

Enrique m'adressa un pouce en l'air suivi de sa compagne qui m'envoya un baiser dans les airs auquels je répondis par un cœur formé avec mon pouce et mon index.

Minho observa le couple avec amusement avant de me répondre :

- En effet, je ne suis pas venue observer la magnifique femme que tu es, mais déguster un plat de tostadas fort appétissant. Il se leva. Dans le bureau des boss, tout de suite.

- Toujours aussi agréable. Le taquinai-je en quittant ma place.

- Quand il s'agit d'être aimable, tu peux compter sur moi.

Je ris amusée, marchant vers la sortie du restaurant. Je saluais le couple mexicain ainsi que le personnel et suivis Minho jusqu'au bureau des parrains qui était en fait l'une des nombreuses suites de l'hôtel située au 45 ème étage et qui a été aménagée par leurs soins.

Arrivés à destination, Minho prit le soin de m'ouvrir la porte sans même prendre le temps de toquer. Nous entrâmes ensuite. J'aperçus Seokjin, debout près de la baie vitrée du salon, plusieurs documents à la main, tandis que Namjoon était assis sur l'un des canapés de la pièce, pianotant sur son téléphone sans réellement se soucier des mots que lui adressait son aîné.

- On est là. Les interpella Lee Know.

Le médecin quitta sa paperasse du regard lorsque Namjoon se contenta de souffler du nez : ça annonçait les problèmes pour Yong Jyi-ha...

Je lançais un rapide coup d'œil au bras droit de Wolfgang, lui intimant qu'il paierait pour m'avoir fourré dans un tel bourbier.

Mon habituel sourire hypocrite scotché sur mon visage, je m'avançais assurément avant de m'asseoir en face du patron.

D'ailleurs, je pus remarquer que Christopher n'était pas là. Encore endeuillé, le jeune mafieux ne pouvait reprendre ses activités professionnelles pour le moment.

- Yong Jyi-ha, tu as le chic pour t'attirer les foudres du monde entier, à commencer par celles de mon géniteur, débita Namjoon qui avait brusquement jeté son téléphone sur le siège à ses côtés avant de me fixer, une lueur de défi dans son regard.

Il était le juge d'instruction et moi la suspecte : car oui, nous procédions actuellement à un interrogatoire, mon interrogatoire.

- C'est offensant. À t'entendre parler, on croirait que je suis un aimant à problèmes. Roulais-je les yeux dramatiquement.

- Ce n'est pas le cas ? Répliqua-t-il avec arrogance.

Je ricanai ironiquement en levant mes mirettes noisettes vers le ciel.

- Cinq lettres. mimais-je avec mes doigts. C-U-L-O-T. Je pris appui sur ma cuisse gauche qui se trouvait au-dessus de celle de droite et avançai mon visage vers mon interlocuteur. Seulement cinq lettres me permettent d'exprimer à quel point tes propos sont un contre son camp phénoménal.

Il haussa son sourcil droit alors que je le confrontais avec mon meilleur sourire.

- Bon, ça suffit, vous deux, parla Seokjin.

- Tu gâches tout, putain ! soupira Minho. Je comptais ramener du pop-corn.

- Bonne idée. Le soutenais-je.

- Salé ?

- Alors là, c'est un non.

- Au caramel ?

- Bon fermez-la. Ordonna le leader. C'est pop-corn sucré ou démerdez-vous pour vous trouver un autre taf.

Minho hocha la tête.

- Je suis d'accord avec toi ! poursuivais-je. Pour une fois..., murmurais-je.

- Oh ! hurla le plus âgé.

Nous nous tournâmes à l'unisson vers ce dernier, les yeux ronds. Le médecin brûlait de colère, son visage était déformé par l'impatience et l'irritation. Il prit rapidement conscience de son débordement soudain (et justifié), relâchant ainsi tout l'air qu'il avait comprimé dans ses poumons surmenés.

- Désolé, boss. Soufflait-il en inclinant légèrement la tête.

- Ne t'excuses pas, lui chuchotais-je sous les regards menaçants lancés par mon supérieur.

- Bref, Jyi-ha, tu es là pour nous conter les moindres détails de ton altercation avec Kim Man-Soo, lança soudainement le tueur à gages.

Je le regardai de travers avant de lui répondre avec dédain :

- C'est la seconde fois que tu me trahis, Lee Minho. Il plissa les yeux, ne semblant pas comprendre mon sous-entendu. Il n'était pas censé le savoir. Balbutiais-je intentionnellement en désignant Namjoon d'un coup de tête léger.

Les pupilles de son bras droit valsèrent entre les miennes et celles de son supérieur, ses lèvres formant désormais un « Ah » démesuré.

- Trop tard, on lui a déjà exposé la situation, ajouta Seokjin.

Je roulais des yeux, contrainte de m'exécuter.

- Kim Man-Soo comptait bel et bien tendre un piège à Hana, commençais-je finalement. Il voulait l'attirer dans une ruelle déserte, un angle mort pour les caméras de surveillance du coin. Et si vous voulez mon avis, dans le cas où je ne serais pas intervenue à sa place, Hana se serait fait violemment agresser puis enlever.

- Qu'est-ce qu'il lui voulait ce connard ? Réagit Minho.

- Il est à la recherche de l'identité de son supérieur. Man-Soo doit être bien entouré, car je peux vous assurer qu'il connaît toute la biographie de Choi Hana.

- L'enfoiré... Souffla Seokjin.

- Ah ça, tu peux le dire. Surjouais-je en haussant les sourcils. Il a osé me surnommer « mon cœur » accompagné de quelques sous-entendus extrêmement salaces.

Je secouais frénétiquement la tête à la suite de mes propos, tout mon être étant submergé par un dégoût profond.
Lee Know compatissait tandis que le médecin fronçait les sourcils, visiblement contrarié par les actes du géniteur de son meilleur ami. Namjoon, lui, se contenta de me fixer.

- Il a mené des recherches approfondies sur Hana, et tu dis même qu'il connaît absolument tout de sa vie, mais il ne sait toujours pas pour qui elle travaille ? Souleva mon patron.

Effectivement, c'était assez illogique au premier abord.

- Personne ne sait vraiment pour qui travaille Hana désormais. Les seuls mis au courant sont Nowhere et la Maison Bleue, assurai-je. Les mafias et gangs ennemis n'ont aucune idée de qui pourrait être la nouvelle recrue de Christopher. Ton père va prendre un petit moment pour trouver un informateur qui saurait répondre à ses questions.

- Très peu de nos concurrents sont au courant de l'alliance entre nos deux mafias, ajouta Seokjin.

Namjoon hocha la tête pour toute réponse.

- Cependant, notre cher Kim Man-Soo sait que la personne qu'il a affrontée, à la place de l'avocate, s'appelle Jyi-ha, dis-je sarcastiquement. Nous pouvons être sûrs qu'il fera des recherches sur ma personne.

- Mais merde, s'exclama Minho. Tu l'as fait exprès ?

- Oui. Je réajustais ma position sur le fauteuil. De cette manière, il oubliera Hana et se focalisera sur des informations qui ne feront que lui brouiller les pistes.

- Comme ?

- Ma relation avec le gouvernement. Il saura d'emblée que ses ennemis ont des liens étroits avec le gouvernement coréen. Souriais-je.

- Tu t'es mise inutilement en danger, s'exprima enfin le leader.

Je soufflais de frustration, exaspérée par son intervention puérile.

- Je ne me suis pas mise en danger, je sais ce que je fais. Ça va faire bientôt 10 ans que je suis sur le terrain, Namjoon.

- Selon toi, que sait-il de « Yong Jyi-ha » actuellement ? demanda l'aîné.

- Sûrement que je travaillais pour Nowhere, mais que j'ai fini par trahir la Corée. Peut-être même qu'il sait que je travaille désormais pour Black Tears et Mystery Ace.

- Tu t'en vantes presque, ricana le tueur à gages.

- Non, je ne me le permettrai pas, répondis-je à sa provocation, un rictus au coin des lèvres.

- Il cherche donc à connaître l'ennemi qui se dresse devant lui. Et à en croire tes paroles, Jyi-ha, Man-Soo serait actuellement au courant pour Mystery Ace, conjectura le brun aux larges épaules.

- Tout à fait.

- Mon géniteur n'est qu'un pion quelconque sur cet échiquier. Il n'a toujours été qu'un esclave à qui l'on donnait l'illusion d'être important.

Mon attention se porta entièrement sur mon supérieur, qui avait décidé de nous donner son avis sur l'affaire.

- À l'heure qu'il est, il doit effectivement savoir pour Hana, toi et Mystery Ace, c'est un fait. Cependant, la réelle menace ici, c'est son supérieur. Si Man-Soo est toujours aussi con, il va tout faire pour informer Hwa-Pyung de ses découvertes. Et seulement là, les dés seront jetés et la partie pourra commencer.

C'était effectivement un raisonnement qui tenait la route. Kim Man-Soo semblait vicieux et brutal, mais il avait tout bonnement omis d'activer ses neurones.

- Une autre question me tourmente, ajouta Lee en se frottant la tempe. Pourquoi Man-Soo a-t-il délibérément avoué que son supérieur était Bahng Hwa-Pyung s'il soupçonnait qu'Hana serait une potentielle ennemie ?

- C'est vrai, il me l'avait fait comprendre.
Il n'a absolument pas apprécié le flirt trafiqué surjoué par Hana, il était conscient qu'elle lui tendait un piège, surenchéris-je.

- Pour résumer la situation, cet idiot de Man-Soo et ce salaud de Hwa-Pyung ont une longueur d'avance sur nous. Lança Namjoon d'une voix grave, ses doigts pinçant l'arête de son nez.

- Oui. L'observais-je après un court instant de silence.

Il jura silencieusement, suivi de Minho.

- Nos ennemis connaissent tout de Jyi-ha et Hana, ils savent pour Mystery Ace et pour notre petit coup monté au bar de la ville ?

Le regard dénué d'émotions de Minho et le visage fermé de Namjoon m'encourageaient à arrêter le médecin dans son monologue. Mais je décidai de laisser se jouer cette mascarade.

- Nous sommes vraiment tombés bien bas ! On se laisse salement piétiner par des ordures de première, on délaisse nos responsabilités sans compter le petit épisode de déprime collective ! Nous sommes dans la grosse merde les gars ! poursuivit-il.

- Et les filles, enfin la... murmurais-je.

- On sait Jin, on sait, soupira Lee Know.

- Tu penses que je ne m'en étais pas rendu compte ? Mais que voulais-tu que l'on fasse ? Que l'on enfonce Jungkook et sa femme peut-être ? Qu'on leur crache à la figure, que leur deuil était de trop ? S'énerva Namjoon.

- Non pas dutout, mais qu'on essaie au moins de ne pas se laisser pourrir comme des cadavres en décomposition dans le salon de l'hôtel pendant une putain de semaine !

- Tu aurais dû agir alors si tu n'es pas content ! S'écria Minho.

- Mais bon sang, tu ne vois pas que je n'ai pas le pouvoir d'agir !

- Moi non plus, donc c'est bien pour ça qu'on doit fermer nos gueules et se contenter de réparer les conneries qu'on a laissées passer.

D'accord, il fallait que je mette fin à cette discussion qui commençait à dégénérer.

- Bon ! Je tapais énergiquement mes doigts contre les accoudoirs du fauteuil, puis je me levai. Fin de la réunion. J'ai trop parlé, j'ai besoin de me rafraîchir le gosier.

Les trois mâles me dévisagèrent à la seconde, probablement perturbés.

- Yah ! Yong Jyi-ha, reviens ici ! Entendis-je brièvement Soekjin me réprimander, alors que j'avais d'ores et déjà franchi le pas de la porte.

Cette réunion avait été épuisante pour tous. Entre Namjoon qui ne savait plus où donner de la tête, les bras droits qui se sentaient impuissants et oppressés par la situation et Christopher qui était toujours aux abonnés absents, nous n'étions clairement pas sortis de l'auberge.

Alors que je déambulais lentement dans le couloir adjacent au précédent, une grande main entoura mon poignet, m'interdisant de continuer mon chemin.

- Soekjin t'avait pourtant demandé de revenir.

Le regard orienté vers le sol, je finis par me tourner vers mon interlocuteur, relevant mes iris vers ce dernier. Sans grande surprise, c'était Namjoon.

- Oui, mais je ne fais jamais ce qu'on me demande de faire. Je penchais ma tête sur le côté, analysant le visage complexe de mon supérieur. Qu'est-ce qui te prends ?

Il ne dit rien. Néanmoins, son attention fut soudainement focalisée sur mon bras gauche. Mon visage pivota vers ce dernier, puis mes yeux s'écarquillèrent lorsque je constatai que mon cardigan avait légèrement glissé, laissant néanmoins l'opportunité à Namjoon de constater que mon bras était lésé.

Je pinçai mes lèvres l'une contre l'autre, me sentant soudainement condamné par cette erreur pitoyable. J'avais complètement oublié les yeux d'aigle du parrain qui allaient me coûter un énième échange à base de questions casse-pieds.

- Je t'avais demandé de ne pas t'approcher de lui, Jyi-ha, se prononçait-il.

Je relevais la tête vers le mafieux, ancrant mon regard dans le sien.

- Je vais faire comme si je n'avais rien entendu.

Pour toute réponse, Namjoon fit lestement glisser le bout de tissu qui dissimulait le reste de ma blessure avant de l'effleurer de ses doigts.

- C'est lui qui t'a blessée, affirmait-il. Et il aurait été capable de ne pas se contenter d'un hématome sur le bras.

Je dégageai sa main et me rhabillai correctement.

- Qu'est-ce que ça peut te faire ? Je suis vivante et avec des informations en prime. C'est le plus important. On fonctionne comme ça en mission.

- Sûrement à Nowhere. Dans une mafia, on se préoccupe de la sécurité des membres, d'autant plus pour les membres principaux.

- Tu préférerais que j'envoie Hana se faire défoncer par ton idiot de père ? M'offusquais-je.

- Bien-sûr que non Jyi-ha, ne sois pas bête.

- Bien, alors arrête d'agir comme si tu me privilégiais, d'accord ? Tu ne t'es jamais préoccupé de mon sort, alors ne commence pas à essayer de le faire maintenant. Le fixai-je avec froideur.

Contre toute attente, ses lèvres s'étirèrent, formant un sourire narquois extrêmement désagréable à regarder.

- Ça te dérange tant que ça ? Tu as peur que ton amie Hana ne répète à tout le monde que Yong Jyi-ha entretient une relation ambiguë avec son patron ?

C'était donc ça son petit jeu ? Il essayait de me mettre mal à l'aise et de m'interdire toute issue de secours : de tout simplement avoir le contrôle. Mais je n'étais pas dupe, il cachait son inquiétude derrière son égo et j'en étais consciente.

Je ne faisais que rechercher du respect dans notre relation. Je ne supportais plus de me chamailler inutilement avec lui. C'était contre-productif et immature.
Nous nous provoquions toujours, mais nous ne nous considérions plus comme des ennemis désormais.

Néanmoins, je me rendais compte que tout était plus compliqué avec Namjoon. Notre relation était indescriptible, il était impossible de poser des mots dessus.

Au-delà de son statut de leader et le mien de "subordonnée", Namjoon et moi étions sensés être amis. Seulement, vouloir imposer son joug et déchiffrer l'âme de chacun ne ressemblaient pas à une simple relation amicale. Mais contrairement à ce que pouvais penser Hana, ce n'était ni amoureux, ni sexuel.

- Pourquoi devrais-je être effrayée par ces spéculations mensongères ? Souriais-je à mon tour. Je n'en ai strictement rien à foutre de ce que peuvent penser les autres. Que je sorte avec mon supérieur ou non, ce n'est pas leur dos.

Il ricana, légèrement amusé.

- Cependant, toi, ça te dérangerait énormément. Murmurai-je.

- Tu crois ça ? Demanda le mafieux.

- On parie ? Le défiai-je, mon regard ayant été attiré par plusieurs silhouettes au bout du couloir.

Les sourcils froncés, Namjoon se contenta de me fixer et se laissa faire par mes gestes : je posai mes mains sur son torse et le poussai aisément contre le mur. Désormais coincé entre le mur et moi-même, le leader haussa son sourcil droit en analysant la position dans laquelle il se trouvait actuellement.

J'attrapai ensuite le col de sa chemise d'été afin d'intervertir nos emplacements. D'un point de vue omniscient, Namjoon avait dorénavant l'avantage sur moi. Mais j'étais maîtresse de la situation. Ainsi, je me trouvai plaquée contre le mur, maintenant le Coréen par le col. Je jetai un coup d'œil à ma gauche : tout était parfait. Je le rapprochai un peu plus de moi, collant presque nos deux corps l'un contre l'autre. Je lui souris mesquinement, les yeux plissés avec arrogance.

Je vérifiais que la petite troupe nous avait remarqués et en effet, ce fut le cas. Hyunjin, Taehyung et Jisung s'arrêtèrent brusquement alors qu'ils marchaient vers je ne savais quelle pièce de l'hôtel, leurs yeux prêts à quitter leurs orbites et la bouche grande ouverte.

Satisfaite, je repoussai soudainement Namjoon loin de moi sous ses regards pleins d'incompréhension.

« Je suis désolée Namjoon, mais je ne peux pas sortir avec mon supérieur. »
Livrais-je avec émotion. (Il s'agirait de me recruter en tant qu'actrice principale d'un K-drama.)

Je le vis froncer les sourcils si fort que j'en vins à me demander s'ils allaient rencontrer ses paupières.

Hyunjin ne put continuer à réprimer un cri de surprise, ce qui fit tourner la tête du leader vers nos invités. Je me délectais de son expression faciale lorsqu'il se rendit compte du piège dans lequel il était tombé.

Je repris mon rôle et me tournai innocemment vers le trio ébranlé. Je les observai un à un, échangeant un regard de stupeur avec les mafieux.

Honnêtement, je ne savais pas comment me retenir de rire face aux têtes qu'ils arboraient : Hyunjin était pétrifié, les yeux et la bouche grands ouverts, Taehyung fronçait les sourcils, les yeux plissés et la bouche entrouverte, et Jisung avait les mains posées sur sa tête, le visage déformé par la surprise.

- Le patron t'a proposé de sortir avec lui et tu l'as recalé ?! S'exclamèrent-ils en chœur.

- Vous n'étiez pas censés voir ça, répondis-je doucement, le timbre de voix faussement gêné.

Sur ce, je décidai de « m'enfuir », sans oublier de lancer un regard discret à Namjoon, accompagné de mon plus beau sourire victorieux.

Je détournai ensuite les talons et quittai les lieux rapidement, abandonnant un Namjoon abasourdi et trois commères prêtes à informer tout l'hôtel de ce que Namjoon aurait soi-disant fait : il était dans la mouise.

C'était un message d'avertissement : rien ne me faisait peur, et s'il voulait jouer avec moi, je jouerais également avec lui.

Blesser l'ego d'un homme était la chose la plus amusante qu'une femme puisse faire.

Concernant la mission, j'attendais patiemment que Man-Soo ne se décide à faire des recherches sur moi : les choses commençaient à se corser, et ce, évidemment, pour mon plus grand bonheur.






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- Hôtel, México
Le lendemain, 8 h 30 -

Je toquais frénétiquement à la porte qui me séparait de l'avocate. J'étais effectivement debout de bon matin devant la suite de ma meilleure amie, car, d'après elle, une conversation sérieuse nous attendait.

Après ce qui me parut une éternité, la porte finit enfin par s'ouvrir sur Hana, vêtue d'une assez longue robe de nuit rose pâle, plutôt légère et élégante. Ses longs cheveux noirs étaient soigneusement brossés, comme elle avait l'habitude de le faire tous les matins.

Tandis que je comptais la complimenter sur son effort de présentation à une heure aussi prématurée, Hana me tira violemment à l'intérieur de sa suite et referma la porte derrière elle. Puis, la jeune femme me toisa avec mépris, les bras repliés contre sa poitrine. Je la reluquai de haut en bas, ne sachant comment réagir face à son attitude démesurée.

- Jyi-ha ? se prononçait-elle finalement d'un ton plein de reproches.

- Hana ? répondis-je de la même manière.

- M'as-tu trompé ? Et réponds sincèrement. Me pointait-elle avec son index comme si cette dernière me menaçait avec une arme.

Je la fixai un instant, incrédule. Quelle idée farfelue était-elle encore allée dénicher ?

- Je ne suis pas sûre de comprendre... Nous sommes en couple ?

Le visage de cette dernière s'adoucit soudainement. Elle haussa les épaules avant de se diriger vers la cuisine ouverte sur le salon. Elle sortit un verre puis s'avança jusqu'à la machine à café posée sur le comptoir. Elle l'activa, laissant le liquide brun et chaud se déverser dans sa tasse, avant de reposer son regard sur ma personne.

- Non, voyons, puisque tu l'es visiblement avec ton supérieur. Lança-t-elle, un sourire moqueur affiché sur son visage.

J'analysai le visage de mon amie afin de déterminer si elle se foutait de moi ou non. Mais non, elle était bel et bien sérieuse.

Un rire folâtre se fit entendre dans l'antre de la pièce rustique qu'était la cuisine de la suite, sous les regards noirs de ma partenaire de travail. Je fis rapidement le lien entre la mascarade que j'avais fait vivre à Namjoon et les propos de l'avocate. Les commères de service ne s'étaient donc guère fait prier...

- Vous êtes tous tombés dans le panneau comme des débutants, je secouais la tête de droite à gauche, un rictus au coin des lèvres, je trouve ça tout de même flatteur. Si vous y croyez, c'est que je suis une bonne actrice.

- Pardon ? Tu m'expliques tes plans de psychopathe là ?

- Oh pitié, tu ne peux pas dire ça quand tu es toi-même une psychopathe de première.

- Pas faux. Bon, explique-toi !

Je m'affalai sur le canapé, la tête maintenue par ma main droite, tandis que j'observais Hana chercher je ne savais quoi dans le réfrigérateur.

- Une certaine personne se montrait un peu trop maligne avec moi, alors j'ai décidé de la mettre dans l'embarras en faisant en sorte que les commères que sont Taehyung, Hyunjin et Jisung soient témoins d'une scène fort douteuse digne des plus grands feuilletons turcs de l'histoire, expliquai-je.

Hana prit place à côté de moi en m'offrant un bol de fruits au passage.

- Tu n'es pas sérieuse ? Je suis sûre que tu mens pour éviter d'avouer que j'avais raison, haussa-t-elle les sourcils.

- Dans tes rêves les plus fous, Mademoiselle Choi. Riais-je.

- Mais tu es au courant que tout l'hôtel est au courant ? Tout le monde sait que vous étiez sur le point de vous embrasser et que l'autre t'a demandé de sortir avec lui ! S'exclama Hana.

- C'est le but, ma grande, mais ce n'est pas exactement ce qui s'est passé...

- Oui, je m'en doute, puisque tout est une mise en scène orchestrée par tes soins. Elle roulait des yeux. Bref, tu comptes faire quoi ?

- Manger les fruits que tu viens de me donner, ironisais-je en montrant le récipient.

- Je vais te jeter le café bouillant au visage si tu continues.

- Ça va, je plaisantais. Levai-je les yeux au ciel. Rien du tout.

Mon téléphone nous interrompit dans notre conversation lorsque la sonnerie de notification retentit. Je souris à mon amie avant de prendre mon cellulaire qui se trouvait précédemment dans la poche arrière de mon jean bleu. Mon esprit s'embruma lorsque je réalisai que l'expéditeur du message n'était nulle autre que Lisa.

Hana se pencha vers mon visage après avoir noté la mine grave que j'affichais et mes sourcils froncés par la même occasion. Je fixais l'écran de mon téléphone intelligent assez perplexe.

- Qui est-ce ? demanda ma cadette, ce qui me sortit de la transe dans laquelle j'étais plongée.

Je relevai mon visage vers le sien, les lèvres entrouvertes. Hana m'encourageait à prendre la parole, accompagnée de son sourire.

- C'est Lisa, révélais-je enfin.

- Lisa ?

- Oui, tu sais, mon amie de l'orphelinat. Elle travaillait avec moi à Nowhere. C'est mon informatrice.

- Oh oui, cette Lisa. Soufflait-elle avec amertume. Qu'est-ce qu'elle t'a dit qui puisse te mettre dans tous tes états ?

- Elle est ici, à Mexico.

-

Je venais juste de découvrir que l'un des passe-temps favoris de Seokjin était la natation. Je le retrouvai seul, dans la piscine de l'hôtel, faisant quelques longueurs sans jamais s'arrêter. Je m'assis au bord du bassin, faisant battre mes pieds dans cette eau claire et fraîche dans laquelle baignait le médecin de Mystery Ace.

Il ne m'avait pas encore aperçu tandis que je l'observais nager de dos, me laissant une vue imprenable sur ses larges épaules. Ce sport lui seyait définitivement. Il finit par faire demi-tour et distingua enfin ma silhouette au large. Je le vis sourire alors qu'il nageait jusqu'à moi.

- Alors, on fait trempette tout seul comme un grand, Seokjin ? Ricanais-je.

Il s'arrêta près de moi, reprenant son souffle tandis qu'il croisait ses bras sur le rebord du bain en carrelage coûteux, où il prit appui.

- Oui, je préfère nager seul. Mais si tu souhaites me rejoindre, je me ferai un plaisir de t'accueillir. Me taquinait-il.

- Non merci, je ne préférerais pas finir arrosé de la tête aux pieds aujourd'hui.

Il hocha la tête.

- Comme tu veux.

- Tu faisais de la natation plus jeune ? Je t'observe depuis un moment et je peux dire que tu nages comme un pro.

- Tu es perspicace, Jyi-ha, riait-il. Oui, de mes 12 à 17 ans. Mais j'ai arrêté d'en faire quand on s'est consacrés à la création de Black Tears avec Joon.

- C'est dommage, tu sembles être passionné par ce sport.

- C'est le cas, et comme tu peux le voir, j'essaie de nager un peu quand j'ai besoin de décompresser. Soupira le bras droit avec nostalgie.

Je souris face à la mine apaisée de mon aîné. Seokjin méritait vraiment d'être heureux. Il a consacré toute sa vie à servir Namjoon, parce qu'il l'aimait profondément, comme un grand frère le ferait. Par conséquent, les responsabilités s'étaient enchaînées pour lui, il n'avait donc aucune chance de se préoccuper de sa propre personne, ce qui me peinait énormément.

Je le sentais brisé, tout comme Namjoon, Christopher ou encore Rose et Jungkook. Tous étaient marqués au fer, par la vie.

- À quoi penses-tu ? me sortit Seokjin de mes tourments.

Je plongeais mon regard dans le sien, hésitant entre lui avouer mes pensées ou me taire à jamais.

- Toi aussi, tu veux te venger ?

Ma question effaça le sourire radieux qu'affichait celui qui me considérait comme sa petite sœur auparavant.

- Namjoon est animé par la vengeance, elle coule dans ses veines. Pas moi. Moi, je souhaite seulement le bonheur des miens. Évidemment, je le soutiendrais toujours dans sa quête, moi aussi je veux éliminer Man-Soo, contait sincèrement le Coréen. Mais ce n'est pas une obsession chez moi.

Je m'imprégnais des mots du médecin, qui me permettaient là encore d'en savoir un peu plus sur les personnes qui faisaient désormais partie intégrante de ma vie.

Un silence que je qualifiais d'étrange s'installa entre nous. Je ne supportais pas cela.

- Mon amie Lisa est à México. Changeais-je intentionnellement de sujet.

Il fronça les sourcils.

- Ton informatrice ?

- Hmh, acquiesçai-je. Mais quelque chose ne va pas, ça me travaille.

- Comment ça ?

- Je n'ai jamais dit à Lisa que j'étais à Mexico. À vrai dire, depuis l'affaire Moon Dae-ho, ce n'a été que des « bonjour, ça va » avec Lisa. Nous n'avions pas eu l'occasion de vraiment discuter, affirmais-je.

- Et donc ? Je sais que tu as quelque chose derrière la tête.

- Je me demande... Si l'ennemi ne se fait pas passer pour elle ou bien même pire, qu'il la détienne. Révélai-je. Je veux dire, Man-Soo fait des recherches sur moi alors...

- Tu penses qu'il s'en est pris à ta collègue la plus proche, concluait-il ma phrase.

- Oui, c'est ça.

- Que dit le message ? M'interrogea Seokjin, en se replongeant entièrement dans l'eau, se positionnant sur le dos cette fois-ci.

- Elle veut qu'on se voie. Et pas n'importe où : dans l'une des boîtes de nuit les plus cotées de Mexico.

- Autrement dit, un lieu aisément accessible pour Man-Soo. Il se redressa, caressant le liquide bleu turquoise de ses bras. Je te conseille d'aller voir Namjoon et Christopher. Ce sera sûrement ta prochaine mission, ma Jyi-ha.

- Si tu le dis, soupirai-je. Christopher a repris le travail ?

- Oui, il se sentirait mieux d'après les dires de Minho.

- Tant mieux. Je me levai. Bon, je vais faire comme convenu, je t'abandonne ici, Seokjin. Pouffais-je.

- C'est ça, fais cela donc. Riait ce dernier. Ah, et prépare-toi à souffrir. Joon n'a pas du tout apprécié le sale coup que tu lui as joué.

Je haussai les sourcils, amusée.

- Oh, tu es au courant toi aussi.

- Évidemment. Mais j'ai très rapidement compris que c'était du pipeau, je vous connais beaucoup trop bien tous les deux. Sans compter toutes les heures durant lesquelles Nam t'a maudit alors que je l'écoutais comme si j'étais son thérapeute.

Je ris à gorge déployée face à cette information : c'était exactement ce que je souhaitais.

- Je suis prête, peu m'importe ce qu'il compte faire pour se venger.

- Fais attention à toi, Jyi-ha, quand il s'y met, il ne rigole pas. Mais je te protégerai contre ce dragon enragé. Il me fit un clin d'œil exagéré qui m'arracha de nouveau un rire.

- Je crois, que je t'aime, Soekjin.
Plaisantais-je.

- Moi aussi ! s'écria-t-il tandis qu'il reprit le cours de son activité.

Je l'abandonnai ainsi, l'esprit et le cœur plus léger.

-

- Lalisa Manoban est à México.

- C'est ce que je viens de dire. Soufflais-je.

Je l'observais amener une tranche de bœuf saignant à sa bouche alors qu'il me dévisageait avec attention. Je haussai les sourcils, attendant une quelconque riposte de sa part, mais ce dernier ne fit que mâcher son morceau de viande, un rictus au coin des lèvres. Un détail que j'omis de préciser : Christopher mangeait en tête-à-tête avec Namjoon, qui lui m'ignorait royalement.

- Et donc ? Tu souhaites qu'on vérifie ? Dégnait-il enfin me répondre après avoir avalé sa nourriture ?

- Accessoirement.

De là, le jeune homme se perdit dans ses pensées les plus troublantes. Ses pupilles vides de toutes émotions encrées dans les miennes, il se figea ainsi durant plusieurs secondes. Malgré ce qu'il essayait de faire transparaître, Christopher n'allait pas mieux. La perte de son neveux l'avait profondément déchiré, sa raison l'avait abandonnée et son cœur s'était éteint.
Ces moments d'absence devenaient récurents pour le parrain endeuillé.

Je fronçais les sourcils quelque peu perturbée tandis que l'autre imbécile continuait son repas comme si nous étions un lundi banal, sans soucis et sans Christopher qui s'éclipsait dans un monde parallèle toutes les trente secondes.
Je décidai de faire claquer mes doigts devant les yeux de mon coéquipier qui se vit retourner dans notre dimension, on pouvait le dire, en un claquement de doigts.

Je l'interrogeais du regard, mais ce dernier ne fit que se revêtir de son sourire charmeur et détaché, comme pour attester qu'il allait très bien, et que ce qui venait de se produire devait absolument s'effacer de ma mémoire.

- Je... pense que c'est un bon début. On peut commencer par là. Tu n'es pas d'accord, Kim ?

Le concerné releva ses iris colorés vers son coéquipier, d'une lenteur presque provocatrice.

- Faites comme bon vous semble. Lâchait le brun avant de reprendre son déjeuner.

Solidarité, zéro.

- Bon, alors je prendrai les directives seul. Se reprit Chan. Enrique ! Veuillez nous ramener des desserts, je vous prie !

Le chef cuisinier rejoignit son épouse derrière le comptoir et prépara ce qui lui avait été demandé avec enthousiasme.

- Tu ne manges pas, Jyi-ha ? m'interpella l'Australien.

- Non, ce serait impoli. Je viens tout de même de ruiner votre rendez-vous en face-à-face. Notez l'ironie.

Je l'entendis ricaner légèrement, ses pupilles valsant entre les miennes et celles de Namjoon qui ne prêtait aucunement attention à notre conversation. Il devait sûrement être en train de s'imaginer réduire ma tête en bouillie et donner mes restes au chien de garde de la propriété. Hélas, cela ne restera qu'un songe lointain pour le jeune Coréen.

Enrique vint à notre table, conduisant une desserte pleine de pâtisseries locales qui me séduisaient du haut de leurs assiettes flamboyantes. Il déposa les différentes douceurs puis s'éclipsa rapidement en voyant que les mafieux s'impatientaient. Je lui souris pour le rassurer et retournai ensuite vers mes supérieurs. Quelle fut ma surprise lorsque je constatai qu'ils avaient déjà entamé le flan au caramel. Je les toisai avec dédain.

- Donc, le plan ? Râlais-je, les bras repliés contre ma poitrine.

- Tu te rendras là-bas, trancha Chris. Ton objectif sera de localiser Lisa. Si elle y est, tu la ramènes à l'hôtel. Si c'est un piège orchestré par Kim Man-Soo... Eh bien, son fils se fera un plaisir de le confronter.

Namjoon ne réagissait pas. Il fallait toujours se méfier de l'eau qui dort...

- Je vois. Une stratégie plutôt simpliste.

- Il ne faut surtout pas chercher trop loin avec nos ennemis, du moins pas pour le moment. Il découpa soigneusement une cuillerée de flan. Ils s'amusent avec nous. Pour nos géniteurs, nous restons des amateurs. Alors rentrons dans leur jeu, soyons simplistes comme tu le disais si bien, simplistes et innocents.

Christopher Bahng avait raison : entreprendre quoi que ce soit à l'aveuglette, sans en savoir davantage sur les intentions de nos ennemis, serait du suicide pour une mafia comme Mystery Ace. Nous devions être précautionneux, un pas après l'autre, avec lenteur et discrétion.

- Ce que tu dis là est étonnamment intelligent, m'exclamai-je avec ironie.

Il rit amèrement, sans jamais répondre, avant de perdre une nouvelle fois pied et de laisser son subconscient quitter la terre ferme.

- Chris, dit Namjoon.

Le plus jeune revint à lui, le regard plus sombre.

- Jyi-ha, demande à tout le monde de se rassembler dans le salon principal, déclara-t-il.

Je compris que finalement, nous étions toujours emprisonnés dans cette boucle infernale qu'était la mort.

- Chris... Tu es sûr que tout va bien ? demandais-je doucement.

- S'il-te-plait.

Je demeurai un instant interdite.

- Eh bien, si gentiment demandé...

Je haussai les épaules, abandonnant mon siège en velours.

Sans un mot de plus, je les quittai cette fois-ci, le cœur lourd.

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Nous étions en pleine après-midi. Mystery Ace était rassemblé au grand complet dans le salon de l'hôtel. Christopher semblait avoir repris du poil de la bête, tandis que l'autre humain qui lui servait de coéquipier semblait toujours vouloir économiser sa salive.

Par ailleurs, je m'étais chargée d'exposer la situation concernant le message de Lisa. Les mafieux comprirent alors les enjeux de cette mission.

- Donc Jyi-ha se rend en boîte. Qui l'accompagne ? Questionna Changbin.

- Mystery Ace se séparera en deux groupes : Namjoon, Seokjin, Hyunjin, Taehyung, Changbin, Jungkook et Felix accompagneront Jyi-ha. Les hackers, Hana et moi resterons ici pour faire des recherches sur le gérant officiel de la boîte. Le reste s'en ira à la recherche de ce dernier dès que nous découvrirons son identité, car il est certain qu'il ne se trouvera pas sur les lieux.

- Et pourquoi avons-nous besoin de retrouver le gérant ? demanda Seungmin.

- Tout simplement pour en savoir plus sur le gérant officieux. Comme vous l'a dit Jyi-ha, il est possible que ce soit Man-Soo.

- Et pour Lisa ? rétorqua Jimin.

- On avisera sur place, me prononçais-je.

Chris acquiesça. Le déroulement de cette mission nous paraissait limpide comme de l'eau claire et pourtant, un mauvais pressentiment se logea dans ma poitrine : j'en étais certaine, un fléau allait s'abattre sur nos têtes ce soir.

Nous échangions sur les modalités de base lorsque, soudain, une voix féminine étrangement dynamique nous fit tous basculer vers l'entrée de la pièce. Éberlués, nous observions Rose, les vêtements peu présentables, le visage terne et les cernes creusés, mais néanmoins un large sourire radieux habillant ses lèvres charnues alors qu'il ne coïncidait guère avec son état actuel.

- Vous préparez une mission ? demanda mon amie d'une voix euphorique.

Sa soudaine allégresse ne nous rassurait pas, non, c'était en fait l'effet inverse. Rose était au plus bas. Jungkook se releva rapidement et Christopher fit tomber son verre d'eau au sol qui se brisa instantanément sous les hoquets de surprise de l'avocate et du sniper.

- Rose ? Qu'est-ce que tu fais là ? Retourne te reposer. Le médecin a dit que tu ne t'étais pas complètement remise-

Rose ignora son mari, s'avançant jusqu'au bras droit de Wolfgang avant de nous annoncer :

- Je veux accompagner Jyi-ha et participer à cette mission.

Le silence, grand ami des moments insensés, se joignit à nous après l'annonce de la jeune épouse. Nous nous échangions tous des regards inquiets, l'air interrogateur. Jungkook déglutit, impuissant face à l'état inquiétant de sa femme. Quant au grand frère de Rose, son visage pâlit. Je compris que Chris était au courant pour sa sœur : le déni que traversait la dealeuse était la source de ses absences répétées. Effectivement, Rose était bel et bien dans le déni.

L'être humain était fascinant, capable de jouer un rôle à la perfection au point d'assimiler ce dernier à la réalité. Pour Rose, à cet instant, elle n'a jamais perdu cet enfant et ne l'a même jamais porté en elle. Elle allait parfaitement bien.

- Non, Rose. Désapprouva Felix. Arrête de raconter des conneries et retourne te reposer.

Nous nous tournâmes vers la concernée, analysant ses réactions. Contre toute attente, elle se mit à sourire.

- Qu'est-ce que tu racontes, Felix ? Je vais bien, pourquoi devrais-je me reposer ?

Je ne compris pas exactement ce qui s'ensuivit, mais je vis Hana essayer de rassurer Chris en lui caressant l'épaule. Puis ce fut au tour de Seokjin de calmer Jungkook dont les yeux s'étaient teintés de rouge.

- Rose, dis-je, je ne pense pas que ce soit une bonne idée d'agir comme ça. Tu n'es pas en état de participer à cette mission.

- Bien sûr que non, Jyi-ha ! Je vais très bien, qu'est-ce qui vous prend ? Riait-elle.

Je sentis mon cœur se serrer et mon souffle se couper sous le coup de la stupéfaction : mon amie n'était plus elle-même.

La perte d'un enfant était-elle si fatale ?

C'en était terrifiant.

- Rose ! Ça suffit, s'il te plaît, l'implora Hana. Tu te fais souffrir plus qu'autre chose...

Le dealer se dégagea brusquement des bras de son aîné afin de rejoindre son épouse. J'écarquillai les yeux de terreur lorsque je me rendis compte qu'il secouait Rose avec rage.

- Putain Rose ! Tu n'es bonne qu'à faire souffrir tous le monde, c'est ça ? Tu n'es pas la seule à avoir mal et pourtant tu es bien la seule à jouer l'amnésique !
Hurla-t-il, déchiré. J'en peux plus d'accord ?

- Jungkook, arrête ça tout de suite ! S'écria Chan. Relâche ma sœur ! Ordonnait-il en le bousculant afin de l'éloigner de Rose.

Le leader prit sa cadette dans ses bras, son regard rivé sur le maknae de Black Tears.

Rose était tétanisée : son visage était marqué par l'effroi et son corps tremblait contre son grand frère.

Quant à son mari, il les observait avec fureur, les yeux larmoyants.

Le couple était à bout.

Mystery Ace était silencieux. Les mafieux ne réagissaient pas, encore secoués par les gestes du dealer. Pourquoi diable avait-il malmené Rose de la sorte ?

Jungkook était épuisé. Il était beaucoup trop immature. Il n'était pas en capacité de gérer son propre malheur, alors sa femme endeuillée était un fardeau trop lourd à porter pour lui. Cependant, Rose avait besoin d'aide, d'un homme qui la tirerait vers la lumière de la guérison, pas d'un mari qui la suivrait en enfer.

- Une mission ? Soufflait Jungkook. Hors de question. C'est la plus grosse connerie qu'elle ait pu me sortir depuis la mort du bébé.

Chan continua à rassurer Rose, lui caressant le dos avec douceur.

- Je sais, Jungkook. Rose n'est pas dans son état normal. Mais tu lui fais du mal en agissant comme ça. Crachait-il. Je la ferai surveiller par mes hommes. Vous, allez préparer la mission. Vous décollez dans 4 heures.

- Mais-

- Allez-vous en. Je m'occupe de Rose.

Les mafieux quittèrent les lieux, arborant un air grave sur le visage. Les dernières personnes présentes étaient Felix, Namjoon, Jungkook, Hana et moi-même.

- Chris, laisse-moi rester avec Rose. Lança Felix.

- Impossible, on aura besoin de toi sur le terrain. Refusa le parrain.

- On ne peut pas la laisser seule avec tes hommes, Christopher, ajouta l'avocate.

- Je suis d'accord. Ce serait trop dangereux et imprévisible. Affirmais-je.

- Alors, son mari restera avec elle. Il va assumer ses responsabilités et arrêter de jouer les chochottes dépressives, déclara l'homme avec amertume.

Jungkook fronça les sourcils, le regard noir de colère.

- Je ne resterai pas avec elle ! pestait-il. Elle ne veut pas de moi de toute façon !

Son beau-frère souffla du nez avec ironie.

- Logique, vu ta gueule.

- Ça suffit, vous deux ! s'imposa Namjoon. Il était temps qu'il l'ouvre, celui-là. Jungkook, tu viens avec moi.

Le brun tira le plus jeune à l'extérieur de la pièce, l'éloignant le plus possible de la fratrie Bahng.

- Je ne le répéterai pas. Allez préparez la mission avec les autres. Je m'occupe de ma sœur.

Cette fois-ci, nous l'écoutâmes et rejoignîmes le reste des mafieux à l'étage.

J'osai espérer que Christopher allait réussir à maîtriser l'état de sa jeune sœur.

-

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