Opening


INT. - VOITURE - JOUR

"Chérie, tu es sûre qu'on doit tourner là...?

- Evidemment que je suis sûre ! Annie ne se trompe jamais.

- Ah oui ? Ce n'était pas le cas, la fois où...

- Mais arrête de remettre en question tout ce que je dis ! Contente-toi de conduire !"

Le trajet ne s'était pas vraiment déroulé dans la joie et la bonne humeur. Avec Karen, ce n'était même pas surprenant. Elle était toujours sur les nerfs, réagissait au quart de tour. Si Karl restait avec elle malgré tout, c'était uniquement pour ses enfants. La vie avec Karen était bien assez dure, hors-de-question de se défiler et d'abandonner les gosses ! Derrière ses sourires hypocrites, Karl Davidson ne rêvait que du jour où Nils et Neyla aurait atteint leur majorité et pourraient ainsi voler de leurs propres ailes. Peut-être seront-ils plus chanceux et rencontrerait-ils quelqu'un qui les aimerait et en qui ils pourront avoir confiance... 


https://youtu.be/xYTWPHHA_BA

Soupirant, la blonde sortit son portable de sa poche. 

"C'est Nils. Il vient d'arriver. Il nous souhaite un bon week-end."


Nils, frère jumeau de Neyla, avait insisté pour se rendre chez son meilleur ami à l'occasion de l'anniversaire de ce dernier. Sa sœur, elle, n'avait (comme souvent) pas son mot à dire. "Les Loomis ont deux filles. Ça te fera de nouvelles amies !" Ce que la quadragénaire avait omis de préciser, c'était l'âge des fillettes : neuf et onze ans. 

Des "amies", Neyla en avait déjà suffisamment. Entre Zoey-la-Boulette et sa bande de copines dégénérées, c'était bien assez de se les fader à l'université. Enfin, de toute façon, Neyla n'avait jamais le choix...

Pour ne pas entendre l'énième querelle de ses géniteurs, la jeune fille enfonça ses écouteurs et mit le volume au maximum, échappant ainsi à la réalité. 

https://youtu.be/KlDHbX7aUIM

Elle ferma les yeux, tentant au mieux de se concentrer sur les paroles. Elle n'y parvint pas. Elle repensait à différents épisodes de sa vie fade et monotone. Et ce n'est que là, dans cette bagnole vieillotte et ballottante, qu'elle comprit. En plus de vingt ans, elle n'avait jamais réellement vécu. Toutes ses émotions n'étaient que miroirs aux alouettes et autres écrans de fumée. Elle avait beau remonter aussi loin que sa mémoires le lui permettait, impossible de retrouver la moindre trace de joie, de passion, de vie

C'était comme si elle était prisonnière de son corps. Comme si elle regardait le monde sans en faire partie. Comme si une part d'elle-même était morte. 

Elle poussa un léger soupir de désespoir et s'endormit au son de la musique. D'ailleurs, il manquait quelque chose. N'était-elle pas censée verser une larme ? Les paroles, la mélodie... tout était si triste. Pourtant, rien ne semblait la toucher. Ce n'était pas la première fois qu'elle se faisait cette réflexion. Quelques soient les circonstances, elle ne pleurait presque pas. Pas de tristesse en tout cas. Il lui arrivait de verser des larmes de rage, mais c'était tout. A contrario et d'une manière plutôt ironique, Neyla était capable de sangloter sur commande. Don qui, à presque vingt-et-un ans, était d'une utilité discutable.

La vérité, c'était que Neyla n'avait aucune raison de se sentir triste.

La tristesse était pour elle un sentiment inconnu.

Tout comme le bonheur.

Et tout le reste.

En fait, Neyla ne ressentait rien. 

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